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1987 : Marat reprend un bain !

mis à jour le 14/04/2011


echanger dossier 5

Les arts et l'histoire sont intimement liés, alors il est assez aisé de provoquer des allers-retours entre les deux domaines, surtout lorsque l'enseignant s'occupe d'un cycle complet. Ce qui est moins facile, c'est d'éviter la compilation. Entre programmes, projets, instructions, l'enseignant en cycle 3 répond-il toujours à la demande institutionnelle ?

mots clés : échanger, pluridisciplinarité, histoire des arts, création


La lithographie réalisée en 1987 par Braco Dimitrijevic, artiste serbe, représente une installation comme on pourrait en trouver dans un musée d'art moderne. Sur un socle rectangulaire blanc, est posée une baignoire ancienne dans laquelle est plongé le tableau de David, La Mort de Marat. Un grand tissu rouge recouvre en partie la baignoire. Cette lithographie, présentée dans le cadre du projet annuel arts visuels, Collecter, collectionner, a été découverte à la bibliothèque municipale par les élèves de CM2 de l'école Victor-Hugo de Montoir-de-Bretagne. En effet, leur enseignant, Samuel Truet, participe depuis plusieurs années aux propositions des conseillers pédagogiques de pratiques artistiques. Il est à la fois passionné d'histoire depuis fort longtemps et vivement intéressé par l'enseignement des arts à l'école depuis qu'il pense avoir compris comment s'y prendre. Et l'enseignant le dit sans ambages : "Avant de travailler avec la conseillère pédagogique en arts visuels, je ne me sentais pas capable de faire découvrir des œuvres à mes élèves, parce que j'étais trop inculte en la matière. Notamment pour des œuvres contemporaines ou même du XXe."

De l'histoire...

À l'école Victor-Hugo, chaque enseignant essaie de tirer parti au mieux de ses compétences, et la répartition des domaines d'enseignement se fait en concertation au sein de l'équipe. Depuis son arrivée, S. Truet prend en charge l'enseignement de l'histoire pour tout le cycle 3. L'avantage d'assurer les trois années du cycle, c'est qu'il peut mettre en place des outils, et que la cohérence de sa pratique permet aux élèves de mieux comprendre ses attentes. Par ailleurs, il sait évidemment ce qui a été fait ou non les années précédentes, et peut suivre la façon dont progressent ses élèves dans le classeur qu'ils gardent durant les trois ans. Les liens entre arts et histoire sont tels qu'il n'a pas attendu la mise en place de l'enseignement de l'histoire des arts pour associer la découverte d'œuvres patrimoniales aux événements historiques du programme. Et comme pour beaucoup de ses collègues, la présentation de documents représentant les Grottes de Lascaux, des églises romanes ou gothiques ou un tableau tel La liberté guidant le peuple, est l'occasion de s'interroger sur les raisons qui poussent les hommes à représenter leur univers, sur les différences entre deux styles architecturaux, ou sur l'aspect symbolique d'une œuvre.

... des arts...

Une fois par semaine, parallèlement à cet enseignement, le professeur entraîne ses élèves dans des projets de pratiques artistiques. L'étude du tableau de Munch, Le cri, débouche sur toute une série de dessins de visages exprimant des émotions diverses. La participation au projet départemental arts visuels Arts et textiles, en 2008-2009, a été l'occasion de faire découvrir deux grands peintres, Mondrian et Hantaï, et d'adapter leurs styles très différents à des conceptions vestimentaires (voir ci-dessous). En 2009-2010, le projet Collecter, collectionner, a amené les élèves à mieux comprendre l'histoire muséographique au travers des cabinets de curiosités, et à expérimenter eux-mêmes la pratique de la collection (voir ci-dessous). Lors d'un autre projet arts visuels, deux ans auparavant, sur le thème Arts et jardins, la classe de S. Truet avait travaillé sur une reproduction en volume des jardins de l'Orangerie. Les différentes réalisations de la classe témoignent d'un travail approfondi pour découvrir des artistes et des techniques.
 
Robes créées par les élèves

Organiser sa collection
Organiser sa collection
 

Et des questions !

Lors de l'exposition du Frac proposée à la médiathèque municipale dans le cadre du projet Collecter, collectionner, l'observation de la lithographie de l'artiste serbe précédemment cité a été spontanée. Nul besoin de forcer quiconque à s'installer devant l'œuvre, celle-ci attirait d'elle-même les élèves. Les réactions et les discussions de ces derniers ont été propices à un retour sur la période historique évoquée. L'enseignant a pu solliciter la mémoire de chacun et apporter les compléments historiques nécessaires. À partir de la reproduction du tableau de David que les élèves connaissaient déjà, les échanges ont également permis de resituer le célèbre tableau dans la période historique et artistique. Puis en regardant à nouveau l'œuvre de Braco Dimitrijevic, le groupe s'est interrogé sur ce qu'est une œuvre contemporaine, le sens qu'elle peut avoir. Pas question pour l'enseignant de donner une réponse définitive à cette question, mais bien plutôt de laisser ces jeunes regards continuer d'interroger avec curiosité les œuvres présentées.

Est-ce là l'histoire des arts ?

Cependant, l'enseignant s'interroge beaucoup depuis la mise en place, en 2008, du nouvel enseignement qu'est l'histoire des arts. Il est évident qu'il fait son travail en histoire et qu'il sait associer, par des travaux d'observation, les œuvres patrimoniales aux événements auxquels elles se réfèrent. La Joconde au moment de l'étude de la Renaissance, la tapisserie de Bayeux pour la période médiévale... Il sait aussi que la pratique artistique à laquelle il convie ses élèves de manière hebdomadaire lui permet, entre autres choses, d'apporter des connaissances culturelles qui peu à peu tissent des liens entre elles. D'ailleurs, quand il reprend le programme, il peut repérer tout ce qu'il a abordé dans les recommandations qui sont faites. Et pourtant cela est-il suffisant ? En essayant d'analyser ses pratiques de classe, S. Truet s'inquiète du foisonnement des activités et du manque de temps pour les relier entre elles. Il sait bien ce qu'il a fait avec ses élèves, il peut faire des liens à l'oral, et d'ailleurs, il ne s'en prive pas, mais l'aspect juxtaposition reste présent à son esprit. Par ailleurs, le goût qu'il a développé pour les arts graphiques et la relative sécurité qu'il ressent dans ce domaine, mieux connu de lui, le conduisent à le favoriser au détriment des autres arts. Il a pu constater en discutant avec l'intervenante en éducation musicale (une personne extérieure à l'école) que celle-ci avait établi une programmation exigeante de découverte des œuvres. Un avantage de plus dans cette école, mais comment trouver le temps de se concerter avec cette personne pour que la découverte d'un chant grégorien ne soit pas seulement associée du point de vue chronologique à la période carolingienne ou médiévale et que le lien soit effectivement l'objet d'un travail ?


Accompagner est une nécessité

Cet enseignant est très motivé par ce qui constitue l'essence même de l'histoire des arts, jusqu'à être parfois tenté de rogner sur d'autres enseignements. C'est bien là aussi tout le problème pour les professeurs des écoles. Comment concilier l'ensemble des activités prescrites ? Du projet d'école aux projets de classe, en passant par l'aide personnalisée, la mise en place du livret de compétences, les rencontres avec les parents et tant d'autres choses encore... où trouver le temps de réfléchir à la façon de faire émerger le sens, aux moyens à mettre en œuvre pour rendre cohérents les différents apprentissages disciplinaires ? La connaissance, la volonté et le dynamisme sont néanmoins bien présents, et concourent à répondre aux multiples demandes institutionnelles. Pourtant, cet enseignant a le sentiment de n'avoir pas le temps de réfléchir suffisamment à ce qu'il fait. La profusion laisse un léger goût d'amertume, l'impression de quelque chose d'incomplet. Et l'arrivée de nouveaux textes vient interroger une pratique bien installée, reconnue. Le questionnement suscite comme un malaise, une forme d'insécurité. Alors, pour que de tels professeurs ne se sentent pas submergés, et pour promouvoir avec force l'enseignement de l'histoire des arts, qui porte en lui bien plus qu'un apport culturel, sans doute ne faudra-t-il pas oublier à quel point la formation est essentielle. Celle-ci pourra être une aide pour compléter les connaissances des enseignants dans les différents domaines artistiques. Elle pourra également faire office de tremplin pour que connaissances et pratiques puissent rebondir ensemble et être créatrices de sens.
 
auteur(s) :

M. Blin

contributeur(s) :

S. Truet, École Victor-Hugo, Montoir-de-Bretagne [44]

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information(s) technique(s) : pdf

taille : 304 Ko ;

ressource(s) principale(s)

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