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diffuser la culture numérique

mis à jour le 15/06/2010


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Comment faire un numéro d'Échanger sur la culture numérique sans revenir sur l'aventure qu'a représentée la refondation de la partie pédagogique du site académique ? Pour témoigner de cette expérience, Échanger a interrogé Patrick Ducler, conseiller TICE du Recteur, à l'initiative de ce projet.

mots clés : TICE numérique, culture numérique, site académique, information, communication, espace pédagogique


La refondation en un espace pédagogique cohérent et sous une même ligne éditoriale des anciens sites des différentes disciplines, des différents domaines (la culture, l'innovation, l'international...) et des différents niveaux (primaire, secondaire) a constitué, ces dernières mois, un enjeu majeur et un réel défi. Une étape difficile, douloureuse parfois, mais nécessaire à la construction d'une culture numérique commune dans une académie.

Patrick Ducler, comment cette belle aventure a-t-elle commencé ?
Elle a commencé en 2005 par le feu vert du recteur qui nous a permis d'organiser ce projet en réunissant l'ensemble des équipes qui, jusqu'alors, œuvraient séparément, chacune dans sa discipline, dans son domaine ou sur son niveau. Nous avons constitué trois équipes transversales, la première portant sur le rubriquage, la seconde sur la taxonomie et la troisième sur le web design. Le rubriquage consiste en un classement des données. Les données en ligne trouvent ainsi leur place dans des rubriques communes à tous, de type informations, enseignements ou transversalité, et dans des rubriques plus spécifiques à une discipline ou à un domaine, comme laboratoire, détente ou interacadémique. La taxonomie consiste dans le choix de termes discriminants, souvent des mots-clés, permettant d'indexer des ressources pour mieux les retrouver ensuite. Le web design reflète la part visible du travail, c'est-à-dire la mise en page et l'ergonomie de navigation. De fil en aiguille, tout s'est articulé, mais l'histoire s'est prolongée un an et demi avec force discussions, négociations, parfois des complications et des contestations. Cela a bouleversé les positions de certains webmestres et de certaines disciplines.

C'est bien là qu'on touche à la difficulté de créer une culture commune ?

Absolument, c'est là que les difficultés ont commencé, par les fortes résistances de nombreux protagonistes qui étaient dans des univers séparés, certains convaincus intimement que ces univers ne pouvaient pas se confondre avec les univers des autres. C'est l'éternelle situation : "Nous, c'est particulier, on ne fait pas la même chose que dans une autre discipline, on ne peut pas avoir les mêmes outils". Il y a eu une période très relationnelle, très politique, presque idéologique où il a fallu convaincre tous ceux qui résistaient pour des motifs parfois peu lisibles.

Est-ce que vous-même, en tant que concepteur, vous avez évolué en fonction de remarques ou de réticences parfois justifiées des uns et des autres ? Je fais le parallèle avec l'Europe et son slogan "L'unité dans la diversité", n'y a-t-il pas des spécificités de disciplines ou de domaines incontournables ?
Oui, la réponse est oui. Entre les grands rangements que nous avions prévus initialement, le rubriquage et ce à quoi nous avons abouti au fil du temps, de la diversité s'est recréée à l'intérieur du système, du moins, si la première strate d'organisation, celle qui permet la transversalité, la coopération et la circulation des ressources, reste cohérente.
C'est à ce moment-là, pour permettre à la diversité nécessaire de s'exprimer, que nous avons imaginé une organisation des données avec deux niveaux de rubriquage : un niveau à peu près identique pour tous sur une première ligne et, en dessous, un deuxième niveau de rubriquage où chacun était libre de ses intitulés.
Et puis, le dispositif a évolué tout au long de sa construction. Ce qui est intéressant dans notre aventure, c'est que nous n'avions pas un outil préfabriqué, nous avons fabriqué l'outil au fur et à mesure que notre réflexion progressait. Nous avons donc été en situation de ce que l'on appelle le work in progress. Nous savions que nous voulions aller quelque part, mais nous ne savions pas comment faire ni comment y aller. Et c'est chemin faisant que tout s'est construit, à la fois la méthode et l'objet : ça, c'est une expérience singulièrement intéressante. Nous n'étions pas dans une situation de projet industriel où l'on pose tout sur le papier pour ensuite le réaliser. Nous avons construit en marchant, nous avons transformé en marchant et parfois ça a été un peu compliqué !

Est-ce que cela veut dire que le travail est terminé, le projet stabilisé ?

Dans l'informatique et notamment l'informatique du web, la dynamique d'évolution est permanente : tous les grands sites institutionnels, les sites commerciaux, sont rénovés quasiment une fois par an. À l'Éducation nationale, je pense que ce n'est pas encore dans notre culture : les uns et les autres avaient l'habitude de voir des rubriques qui s'étaient un peu éternisées depuis plus de cinq ans. À chaque fois que le produit évolue, nous rencontrons des résistances parce que ça remet en question des petites choses qui semblaient acquises et un peu stabilisées. Aujourd'hui, nous sommes convaincus qu'il faut faire une pause de plusieurs mois, même si nous envisageons des nouveautés intéressantes. Cet Espace pédagogique, c'est une dynamique particulière !

Pouvez-vous expliciter la conception de l'information et de la ressource sur laquelle repose l'Espace pédagogique ?
L'Espace pédagogique est un espace professionnel de construction de ressources pédagogiques pour les enseignants, qui repose fondamentalement sur un objet numérique appelé "ressource pédagogique". Y figurent aussi d'autres objets numériques plus périphériques comme des actualités ou des articles.
Sa particularité est d'être ouvert au grand public comme un site web. Cependant, il existe des parties visibles uniquement par des destinataires ciblés quand ils sont identifiés. Cette diffusion sélective de l'information (DSI) permet de destiner une information à une personne précise ou à des groupes particuliers. Le système fait donc cohabiter DSI et consultation publique, y compris dans l'Espace pédagogique. Et c'est la grande singularité du système nantais, car en général, dans les autres académies, coexistent deux espaces, un espace public et un espace privé, complètement séparés.
Nous avons donc voulu construire un objet hybride, à la fois public et privé, et qui soit aussi une base de données tout en se présentant visuellement comme un site web. Ce qui veut dire qu'il offre la possibilité de faire des recherches comme dans une base de données tout en ayant le confort de lecture de pages web que l'on peut feuilleter. Réunir des types de construction qui sont habituellement séparés dans l'espace d'internet était notre objectif, et c'est devenu une des particularités de cet environnement.
À long terme, en dehors des actualités ou des éditos, l'essentiel est la construction d'une base de données de ressources pédagogiques qui soient indexées de telle sorte qu'on puisse les faire circuler dans différentes bases de données, pour peu qu'on ait des corrélations permettant d'effectuer des recherches avec des critères semblables. Nous avons anticipé cette possibilité-là, puisque nos ressources pédagogiques sont indexées sur la base du LOM-fr (Learning Object Metadata). La structure sous-jacente d'indexation avec des boîtes à filtres existe déjà. Elle nous permettra, un jour, d'être en articulation directe avec d'autres moteurs de recherche et d'autres bases de données.
Enfin, il y a actuellement, au niveau national, un projet de travail, du nom Dacore, sur l'indexation de ressources pédagogiques. Projet au pilotage duquel participe l'académie de Nantes.

On pourrait très bien imaginer une articulation avec le site national ?
Bien sûr, c'est le but ! Avec le site national, avec d'autres sites académiques ou d'autres sites universitaires, pour peu que les uns et les autres aient des systèmes d'indexation compatibles ; cela ne veut pas dire que ce sera dans six mois mais c'est évidemment l'avenir !
Avant, on imaginait qu'il fallait construire un grand réservoir national qui centraliserait toutes les données et dans lequel on trouverait tout. Aujourd'hui, les choses sont vues différemment : il s'agit plutôt de créer des moteurs qui puissent chercher dans les différentes bases. Au fur et à mesure qu'on avance dans la cohérence de ces constructions, il n'y a plus de limite, on peut en effet imaginer chercher dans une base universitaire, une bibliothèque et ainsi de suite. C'est déjà conceptuellement et technologiquement possible.
Si cela n'existe pas encore (sauf entre quelques universités), cela tient aux différences de protocoles, mais on est déjà inscrit dans cette logique-là. Donc, du point de vue de la circulation d'informations, les échanges entre différentes bases de données, c'est à attendre dans quatre ou cinq ans !
 


Que peut-on encore développer à l'interne, dans cet espace pédagogique ?

L'évolution, en interne, de notre espace, c'est le renforcement de la transversalité, qui en est la spécificité. Aucune base de données, y compris au niveau national, n'est fondée sur le principe de la transversalité. Dans Edubase, base de référence nationale des ressources pédagogiques, il y a un moteur de recherche en mathématiques, un moteur pour les arts plastiques, un moteur pour les sciences et vie de la Terre (SVT), mais il n'y a aucun moteur pour chercher dans ces trois disciplines sur une même entrée. Les ressources ne circulent pas, elles restent cloisonnées.
Sur l'Espace pédagogique de l'académie de Nantes, on est en situation de chercher dans l'ensemble de la base de données, quel que soit le point de chute final de la ressource. La même ressource peut être visible à partir de plusieurs rubriques : en mathématiques, en arts plastiques, en éducation musicale ou en philosophie. On n'est pas tenu d'être dans la rubrique lettres ou mathématiques, pour voir une ressource créée par un professeur de lettres ou de mathématiques qui peut intéresser des professeurs de technologie. Elle peut être visible dans la rubrique technologie.
Une deuxième singularité de notre dispositif, c'est qu'en construisant l'objet "ressource pédagogique", nous avons imaginé un protocole permettant d'associer plusieurs ressources, appelé "ressource complexe" : il s'agit de sortir des usages anciens, où on publiait, diffusait, imprimait des "sommes". Aujourd'hui nous souhaitons proposer des ressources plus fragmentées que les professeurs assembleront de différentes manières et à leur gré. On parle aujourd'hui de granularité d'une ressource, il s'agit ici de développer une granularité plus fine. L'objectif est moins de publier des documents "clef en mains", avec un début, un milieu et une fin, l'évaluation, les tenants et les aboutissants, que de fournir des éléments que les professeurs peuvent assembler en leçons, séances ou séquences. Le principe qui nous détermine est plus d'offrir un dispositif de ressources à faire fructifier qu'un recueil de documents prêts à l'emploi.

Pouvez-vous nous donner des exemples de cette notion de granularité qui est loin d'être évidente ?
Si un professeur d'arts plastiques souhaite travailler avec ses élèves de cinquième sur des questions relatives à la couleur, il a accès à plusieurs séances (qui, par ailleurs, ont une existence autonome) qui abordent la réception et la pratique de la couleur. Il imaginera, selon ses objectifs, une sorte de petit parcours sur la couleur dont les séances ainsi assemblées créeront, pourquoi pas, une nouvelle ressource.
Voici un autre exemple. Comment travailler en sixième autour du paysage ? Cette notion figure dans les programmes de géographie, de SVT, d'arts plastiques et en littérature, à travers la description narrative. De façon abstraite, mais tout à fait réelle, il est possible de créer une séquence qui va agréger une ressource en arts plastiques, une ressource d'histoire-géographie et présenter cet assemblage dans l'ensemble des rubriques de toutes les disciplines. On est en train de fabriquer de façon distante quelque chose qui ressemblerait à un itinéraire de découverte et qui favorise la pluridisciplinarité.
Un exemple d'un autre type : il suffit de repérer toutes les ressources sur le développement durable dans différentes disciplines pour les agréger dans une nouvelle rubrique transversale.
Pour l'instant, ce n'est encore ni dans les mentalités, ni dans les cultures, et c'est loin d'être l'essentiel du travail des webmestres, mais l'outil permet de le réaliser.

La conception du site est-elle en avance sur les pratiques des enseignants ?
Oui, parce que les professeurs avaient l'habitude d'utiliser des réservoirs univoques de cours. Ils recherchaient un cours précis pour des classes spécifiques et ils le trouvaient dans un endroit structuré et immédiat.
Aujourd'hui, il leur est proposé un dispositif plus ouvert, plus complexe et qui nécessite plutôt un travail qu'une consommation. C'est toute la difficulté de notre construction : il ne fallait pas complètement effrayer et perdre les usagers que sont les enseignants, mais quand même les inviter, les amener à avoir un autre usage de l'Espace pédagogique.

Pour initier les enseignants à ce nouvel objectif, comment avez-vous conçu l'accompagnement à cet usage ?
Il y a un premier niveau de formation : le niveau des webmestres, responsables des rubriques qui, eux-mêmes, forment des équipes de webmestres associés. Il y a déjà une répartition, une diffusion de cette culture dans des équipes un peu élargies. Par ailleurs, dans les disciplines où des inspecteurs et des formateurs sont engagés, cela devient un outil de référence dans les stages de formation : en effet, une part du travail est consacrée à la façon dont on utilise l'Espace pédagogique et à la façon dont on peut y contribuer. Ainsi, on est de plus en plus dans une cohérence entre formation et Espace pédagogique où la formation va s'appuyer sur l'Espace pédagogique et l'Espace pédagogique va pouvoir publier les fruits de la formation.
On a d'ailleurs un indicateur très intéressant : cette année, presque toutes les disciplines et les spécialités ont inscrit au plan académique de formation (PAF) un temps de travail autour de l'Espace pédagogique. Il y en avait à peine trois ou quatre l'année dernière. Évidemment, au fur et à mesure qu'on avance, nous cherchons à aller plus loin, vers un monde (rêvé !) où tout le monde collaborerait, échangerait. La construction d'un espace collaboratif marque une étape considérable dans le développement de l'Espace pédagogique. Caraïbes est le nom qui a été choisi pour cet espace qui aura une double fonction. D'une part, il fournira des outils pour les enseignants qui travailleront dans un cadre disciplinaire, par exemple, entre les sessions d'un stage... et, d'autre part, il pourra publier tous types de ressources imaginées et construites par les collaborateurs.

À qui cet espace collaboratif sera-t-il ouvert ?
Tous les enseignants de l'académie, les chefs d'établissement, tous les cadres, les personnels du rectorat et des inspections académiques. Concrètement, pour des groupes disciplinaires, des groupes interdisciplinaires, des groupes professionnels, la revue Échanger, etc. Il n'y a pas confusion entre Caraïbes, qui concerne l'échelon académique, et les ENT qui concernent spécifiquement le niveau établissement s'adressant aux professeurs de l'établissement, aux élèves, aux parents et aux partenaires de l'établissement.
Ainsi, on peut imaginer un groupe transversal comprenant des enseignants, des chefs d'établissements, des inspecteurs travaillant sur une question à un moment donné. Ils ouvrent un espace de travail collaboratif moins lourd qu'un système de type quickplace et corrélé à l'environnement de l'Espace pédagogique du site nantais. Ainsi, lorsque les équipes fabriqueront des documents et si ces documents ont vocation à pouvoir être publiés, le transfert de l'espace collaboratif vers l'Espace pédagogique est prévu.
Imaginons la réalisation d'un document à élaborer à plusieurs. Si tous les protagonistes sont inscrits dans le groupe de travail collaboratif, le texte produit par Monsieur A est visible par Monsieur B et Monsieur C, qui peuvent continuer de le travailler ; on a alors les différentes versions. Lorsque la version finale, amendée, améliorée, est validée, elle peut devenir une ressource pédagogique pour peu que l'on prenne la peine d'effectuer un travail d'indexation du document. Dès lors, on est déjà dans un dispositif très intégré.

L'académie de Nantes est-elle regardée de près ?
On peut dire regardée, visitée, invitée ici et là ! Cela a suscité de l'intérêt et pas mal d'inquiétude. Les académies de Paris, Rennes, Poitiers, vont dans cette direction ; l'académie d'Orléans commence. D'autres vont avancer vers cette dimension plus professionnelle des espaces pédagogiques. La période où des pionniers créaient des éléments juxtaposés est passée, nous possédons dorénavant un véritable outil professionnel de production. Cela nous met à niveau avec d'autres sites institutionnels, mais avec une différence fondamentale, c'est que ce qu'on considère aujourd'hui comme des rubriques étaient, en fait, des sites, avec toute leur complexité. Ce qui n'était, au départ, qu'une vue de l'esprit, agréger un ensemble de sites complexes en un tout cohérent du point de vue éditorial et pédagogique, est devenu réalité !
 
auteur(s) :

C. Ladret

contributeur(s) :

P. Ducler, Rectorat [44]

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information(s) technique(s) : pdf

taille : 344 ko ;

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