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maîtrise et partage des sciences

mis à jour le 10/09/2013


echanger dossier 4

La vulgarisation des savoirs et savoir-faire scientifiques exige une bonne maîtrise de ceux-ci. En les mettant à l'épreuve de leur transmission, on peut donc juger de leur acquisition. De ce postulat est née une fructueuse collaboration entre le lycée La Colinière et l'école primaire La Cerisaie.

mots clés : échanger, lycée, école primaire, enseignements d'exploration, méthodes et pratiques scientifiques, culture scientifique, communiquer des savoirs


n seconde, l'enseignement d'exploration Méthodes et pratiques scientifiques aborde, selon les textes officiels, un ou plusieurs des thèmes suivants : science et aliments, science et cosmétologie, science et investigation policière, science et œuvres d'art, sciences et prévention des risques d'origine humaine, et science et vision du monde. Un thème libre peut y être ajouté par l'équipe de professeurs. Tel est le cas dans cet établissement qui a choisi de brasser divers domaines pour s'adresser à des écoliers. En effet, l'accent est essentiellement mis sur la communication, l'une des compétences à développer. Cet enseignement d'exploration vise à développer les compétences suivantes :
  • savoir utiliser et compléter ses connaissances ;
  • s'informer, rechercher, extraire et organiser de l'information utile (écrite, orale, observable, numérique) ;
  • raisonner, argumenter, pratiquer une démarche scientifique, démontrer ;
  • communiquer à l'aide d'un langage et d'outils adaptés.
Dans le cadre d'une démarche de projet, on demande à l'élève un travail personnel ou d'équipe qui devra intégrer obligatoirement une production (expérience, exploitation de données, modélisation, etc.) et aboutir à une forme de communication scientifique (compte-rendu de recherche, affiche, diaporama, production multimédia, etc.). Ce travail conjuguera les apports des différents champs disciplinaires concernés 1. Il s'agit donc non seulement d'acquérir et de maîtriser des savoirs et des savoir-faire, mais aussi et surtout de savoir les transmettre de manière claire et adaptée aux destinataires. En première S, on retrouve d'ailleurs la même préoccupation puisque l'approche expérimentale offre à l'élève "un cadre privilégié pour l'habituer à communiquer en utilisant des langages et des outils pertinents". Or comment mieux vérifier si l'on maîtrise des contenus scientifiques qu'en les transmettant à des plus jeunes ? Deux groupes de vingt lycéens sont donc concernés par cet enseignement destiné à être partagé par environ quatre-vingts écoliers de CP-CE1 et CM1-CM2 pour faire émerger de multiples problématiques scientifiques.

Des élèves savants et enseignants

Les deux enseignants de sciences du lycée animent donc les deux groupes du lundi et du vendredi matin. Depuis le début de l'année, par binômes, les seconde ont choisi un thème de sciences physiques et de sciences de la vie et de la Terre à explorer et à faire découvrir aux CP-CE1 sous forme de manipulations. Certains ont opté pour la digestion, d'autres pour les fossiles, d'autres encore pour les colorants alimentaires (voir annexe). La présentation des interventions des seconde devant des élèves d'école primaire ne s'improvise pas. Elle exige une préparation et une mûre réflexion. Les professeurs encadrants ont distribué une fiche qui explicite les objectifs visés et les modalités. Il faut prévoir un plan de présentation orale de cinq minutes au cours desquelles les tâches doivent être réparties. Quelle sera la place des manipulations ? Qui les fera ? Que feront les enfants ? Autant de points sur lesquels il convient de s'interroger en amont, de même qu'il importe de veiller aux questions de sécurité. Par exemple, sur son carnet de bord de MPS, une élève a dressé une liste répondant à la question : "Que sait faire ou pas un élève de CP ?". On y trouve les réponses suivantes. "Les élèves de CP ne savent pas lire ni écrire correctement. Je pense qu'il faudrait leur expliquer avec des dessins ou des schémas. Ils savent nous dire quand ça ne les intéresse pas. Ils sont difficiles à contrôler, car ils ont beaucoup d'énergie." À ces considérations qui révèlent une vocation d'enseignant, s'ajoutent des résolutions telles que : bien accueillir les petits, faire un puzzle pour qu'ils emportent un souvenir chez eux, etc. Les compétences évaluées sont communiquées aux groupes : échanges au sein du groupe, organisation de la communication, trace écrite du plan, maîtrise de l'oral en termes de simplicité, clarté, originalité de l'atelier. De la sorte, les élèves ont imaginé une approche ludique avec des tests. Afin que les petits puissent conserver une trace écrite des expériences auxquelles ils ont participé, les lycéens ont réalisé des fiches à remplir par les écoliers. Ainsi, à propos du mélange des liquides, les seconde ont conçu un tableau à entrées multiples (voir annexe). Lors de la présentation des ateliers scientifiques aux écoliers, les professeurs évaluent leurs capacités à communiquer des connaissances de manière claire et adaptée, ce qui suppose de les avoir bien maîtrisées (voir annexe).

La main à la paillasse

Pourquoi les M&M's changent-ils de couleur ? Comment fonctionne le système digestif ? Sais-tu où se trouve l'estomac ? À quel animal correspond ce crâne ? Autant de questions qui fusent de part et d'autre en ce lundi matin de début novembre. Devant les paillasses de salles de sciences, les écoliers sont impressionnés par un superbe alambic en cuivre ou un écorché humain. À peine arrivés devant le stand dédié à l'astronomie, certains lâchent le mot "météore". Puis ils associent des crânes d'animaux à des photos de serpent ou de lapin. Ils tentent de deviner le régime alimentaire de l'animal à partir de sa dentition. Ils découvrent par là même le principe d'une typologie. Ils identifient des aliments tels que chips, pomme verte ou bonbons aux saveurs salée, sucrée et acide, ce qui permet de réaliser une autre classification. Ils manipulent de l'huile, du vinaigre et du sirop de menthe afin d'observer la nature de leurs mélanges. Ils créent des fossiles à l'aide de pâte à modeler. Ils mettent vraiment la main à la pâte ! Pour la première fois, ils regardent des feuilles à l'aide d'un microscope. Les petits doivent comprendre les termes employés par leurs aînés. Ainsi, pour expliquer le sens du verbe "dissoudre", les plus jeunes plongent un sucre dans un verre d'eau. Au déjeuner que partagent aussi les lycéens et les enfants, ces derniers s'interrogent sur le chemin que prennent, à l'intérieur de leur corps, les aliments qu'ils ingurgitent. Ils vérifient les saveurs salée de leurs chips et sucrée de leur dessert. Les découvertes qu'ils ont faites trouvent leur prolongement dans leur quotidien. De retour à l'école, ils rédigent un compte-rendu illustré de leurs découvertes.

Experts en herbe

À leur tour, en février, les lycéens se rendent à l'école La Cerisaie où ils vont découvrir ce que des élèves de CM1-CM2 leur ont savamment concocté. Ce matin-là, la classe présente des exposés relatifs au thème de la vision (SVT) et de la lumière et des ombres (sciences physiques). En effet, le thème "Lumières et ombres", qui est réparti sur le CE2, le CM1 et le CM2, figure au programme de sciences expérimentales et technologie de ces classes. Bien sûr, il faut se serrer dans la salle de classe un peu exiguë pour accueillir un auditoire inhabituel. Les élèves prennent leur rôle très au sérieux. Tour à tour, parfois stimulés par leur professeure, ils commentent des affiches placées sur le tableau avant de donner la parole aux questions. Par binômes, les élèves de la classe expliquent la résolution d'une problématique. Celles-ci sont nombreuses : Que faut-il pour fabriquer une ombre ? Comment devenir maître d'une ombre ? À quoi sert l'œil ? Comment fonctionne la vision binoculaire ? Un œil domine-t-il l'autre selon que l'on est gaucher ou droitier ? Tous les objets produisent-ils une ombre ? Comment la taille de l'ombre varie-t-elle ? Pas moins de onze questions se trouvent ainsi abordées, auxquelles s'ajoutent les illusions d'optique, la vitesse et la direction de la lumière, etc. Les élèves qui se sont demandé ce qu'il faut pour fabriquer une ombre en ont conclu qu'il faut que la source lumineuse, l'objet et l'écran soient les uns derrière les autres. Une modélisation qui, en seconde, n'est pas toujours maîtrisée ! L'action se déplace ensuite au rez-de-chaussée, dans une autre salle, pour qu'il soit possible d'obtenir une obscurité totale. Les CM1-CM2 animent à leur tour six ateliers expérimentaux sur le thème des ombres. Il s'agit, à l'aide d'une lampe, de faire coïncider l'ombre d'une balle avec un cercle dessiné sur un écran. Ou d'identifier la forme géométrique de l'objet dont on découvre quatre ombres sous des angles différents 2. Ou encore, en en faisant varier la distance par rapport à un écran, d'obtenir les diverses ombres d'une forme géométrique consignées sur une feuille 3. Les lycéens se prêtent au jeu et parviennent parfois difficilement à savoir comment orienter l'objet afin de reconstituer telle ombre. Même le professeur de sciences physiques ne réussit pas toujours à résoudre l'énigme. Les enfants ne sont pas peu fiers de jouer ainsi les savants, voire de coller leurs aînés ! Les lycéens ont une fiche à remplir, qui comporte d'une part une autoévaluation de leur prestation passée devant les CP-CE1, d'autre part le compte-rendu d'une expérimentation qu'ils ont observée.
 

Dispositif

Les temps forts de ce projet résident, on l'aura compris, dans les visites respectives que se rendent les participants dans l'établissement scolaire voisin. Pour les uns et les autres, il faut travailler sur ces visites, entre-temps. Les élèves de seconde n'ont pas tout de suite rencontré les CP-CE1. Afin de réduire quelque peu l'écart d'âge qui est déjà conséquent puisque l'on saute par-dessus le collège, la jonction s'est, dans un premier temps, opérée avec les CM1-CM2 qui, en novembre, ont découvert le lycée et visité les locaux scientifiques. À cette occasion, des expériences ont été présentées et animées par des élèves de seconde aux écoliers qui ont ensuite rédigé leurs conclusions. Suite à cette visite, l'émergence de questions en classe de primaire a permis de définir des problématiques. Le professeur des écoles en a choisi une qui permette à chaque groupe d'enfants d'élaborer son projet. Ces projets ont été mis en œuvre et présentés aux élèves de seconde, lesquels ont ensuite complété et affiné le travail de leurs cadets en préparant de nouvelles expériences. Une présentation à l'école primaire est alors organisée. Durant ce temps, un travail similaire de découverte a été proposé aux élèves de CP-CE1. Comme on peut en juger, le va-et-vient entre lycée et école n'est pas uniquement géographique, mais aussi heuristique. En effet, un questionnement toujours plus approfondi anime les rencontres et occupe les intersessions. Les écoliers se trouvent entraînés dans une démarche scientifique d'investigation qui les conduit à optimiser le questionnement. Ainsi les CM1-CM2 ont opté pour l'étude de la botanique (voir annexe). Les seconde du vendredi ont posé des questions à leurs benjamins qui leur ont répondu sous forme d'hypothèses scientifiques. À partir du constat selon lequel la plante puise de l'eau, une question émerge : Est-ce qu'elle se nourrit uniquement d'eau ? Des hypothèses ont été formulées, accompagnées de questions supplémentaires placées entre parenthèses, comme si d'une réflexion en germait une autre : elle se nourrit aussi de soleil (et avec une lampe, est-ce que ça marcherait ?), elle a besoin de la terre ; (ou de choses contenues dans la terre) ; elle a besoin d'engrais et d'air (d'oxygène) ; (est-ce qu'un arbre respire ?) ; elle a besoin d'ombre (de nuit ?) ? Un questionnaire luxuriant s'en est suivi : La plante n'a pas de système digestif, comment fait-elle pour se nourrir ? Où partent les déchets qu'elle produit ? (peut-être avec les racines ?), etc. La seconde source de réflexion a été la suivante : Pourquoi les feuilles jaunissent et tombent en automne ? Relevant ce défi, les CM1-CM2 y sont allés de leurs hypothèses : et s'il y a moins de soleil donc de lumière, et si la plante a trop ou moins d'eau, et s'il y a trop de vent, s'il fait trop froid. Telle une réaction en chaîne, le questionnement prolifère en quête de lumières. Gageons que parmi ces écoliers se trouvent des graines de prix Nobel ! Certains ont demandé à leurs aînés comment agir sur la croissance des végétaux, ce qui a conduit les lycéens à effectuer des recherches et à préparer des protocoles expérimentaux pour traiter cette interrogation grandissante qui bourgeonne dans les esprits. Après avoir rencontré les CM1-CM2, les élèves de seconde étaient prêts à affronter les CP-CE1 !

Liaison école / lycée

L'exploration des sciences physiques et des SVT a signé la première collaboration entre le lycée La Colinière et l'école La Cerisaie, tous deux situés à l'est de Nantes. Pour la nouvelle directrice de cette école, ce rapprochement constitue une opportunité. Ce dispositif est source d'apports mutuels pour les uns et les autres. Les écoliers bénéficient du matériel scientifique dont ils ne peuvent pas d'ordinaire disposer tels que microscope ou spectroscopes. Leurs professeurs reconnaissent que, sur le plan de la réflexion et du savoir, ceux-ci sont allés plus loin que d'habitude. L'émulation, voire l'admiration envers les grands, fonctionne à merveille. Ils sont amenés à se questionner, à formuler et mettre à l'épreuve des hypothèses, à exposer et à communiquer, à réaliser des expériences. Les connaissances et compétences en matière de sciences expérimentales qu'ils ont acquises ont été ainsi mobilisées à destination d'un public de lycéens. Du côté des aînés, l'originalité du projet réside évidemment dans le fait que les lycéens s'adressent non pas à leurs professeurs, qui jouent essentiellement un rôle de médiateurs, mais à un public caractérisé par l'écart d'âge. L'approche didactique ne s'appuie plus sur l'approche thématique préconisée. Ce projet est innovant et ambitieux, car il développe chez les élèves leur propre démarche didactique et pédagogique. Il développe l'esprit d'initiative, les responsabilise tout au long de l'année. Il s'agit donc, à plus d'un titre, d'un enseignement d'exploration, puisqu'il consiste à partir à l'aventure sur les chemins de la transmission, tout en balisant l'itinéraire et en prenant soin d'éviter les impasses. L'adaptation des savoirs et savoir-faire à un jeune public oblige à faire preuve d'inventivité. Par ailleurs, les pratiques expérimentales sont testées et élaborées en vue de destinataires réels et les méthodes maîtrisées et partagées. Les textes stipulent d'ailleurs que les compétences en matière de communication doivent faire l'objet d'un apprentissage particulièrement poussé selon une finalité citoyenne. Le projet se fonde sur une haute considération de la culture scientifique en rendant les connaissances accessibles, de manière transgénérationnelle, et en cultivant la faculté d'émerveillement. Si, selon Baudelaire, la poésie est l'enfance retrouvée, cette approche des sciences réveille l'enfant qui sommeille en tout chercheur.

1. Bulletin officiel spécial n° 4 du 29 avril 2010.
2. Cf. En CE2, les éléments de connaissances et de compétences intitulés : Connaître les conditions d'obtention d'une ombre. Savoir qu'à plusieurs sources lumineuses correspondent plusieurs ombres.
3. Cf. En CM1, les éléments de connaissances et de compétences intitulés : Savoir expliquer la variation de la forme de l'ombre d'un objet en fonction de la distance source lumineuse/objet et de la position de la source lumineuse.
 
auteur(s) :

J. Perru

contributeur(s) :

M. Gavaland, B. Guillet, F. Prost, I. Matéo, Lycée la Colinière, Nantes [44] , École La Cerisaie, Sainte-Luce-sur-Loire [44]

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information(s) technique(s) : pdf

taille : 264 Ko ;

ressource(s) principale(s)

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