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promouvoir une pratique réflexive

mis à jour le 12/03/2013


echanger dossier 10

L'analyse de pratique de situations professionnelles s'avère une nécessité aujourd'hui dans le système éducatif. L'enseignement est une tâche complexe, l'accompagnement et le suivi des élèves le sont également. Dans l'académie de Nantes, la réflexion est en cours et un certain nombre d'actions sont déjà mises en place.

mots clés : échanger, analyse de pratique(s), formation, observation, posture professionnelle


Que ce soit dans la pratique quotidienne des professeurs ou des CPE (Conseiller principal d'éducation), ou lorsque les étudiants se forment à leur métier, les personnels d'éducation sont confrontés à la même question : comment faire évoluer ses pratiques ? L'enjeu est bien de comprendre et de dénouer les situations complexes auxquelles chacun est confronté. C'est sans doute d'autant plus difficile dans la mesure où celles-ci se déroulent la plupart du temps dans un lieu clos, la salle de classe ou le bureau, sans autre regard que le sien. Mais la situation professionnelle est composée d'éléments très différents : des relations humaines aux savoirs pédagogiques, psychosociologiques, institutionnels. La compétence professionnelle que chacun va construire au fil de son parcours est donc une question centrale. Comme le constate Claire Burdin, formatrice à l'IUFM (Institut universitaire de formation des maîtres) en analyse de l'activité, "actuellement, peu de professionnels sont formés à l'autoanalyse ou à l'analyse collective". Nombreux sont ceux qui, pourtant, se trouvent face à des problèmes récurrents et communs qui découlent les uns des autres : absence de sens donné aux apprentissages, agitation des élèves, manque de motivation, difficulté à s'engager dans un effort de longue durée. Dans les métiers de la santé et de l'éducation spécialisée, la formation à des pratiques réflexives est plus développée et plus ancienne. Pourtant le besoin est évident. Le travail des enseignants et celui des CPE demande un investissement qui ne cesse de croître. Les  personnels sont face à des publics très différents, mais qui, tous, ont droit à l'éducation. Pourtant, peu d'espaces de parole existent actuellement entre professionnels. Le but de la diffusion d'une culture de l'analyse de pratiques est donc aussi de créer des lieux et des temps d'échanges qui ne sont pas fondés sur un regroupement par discipline ou par fonction (voir annexe).

Une réflexion en mouvement

Dès les années deux mille, la directrice de l'IUFM, qui était alors Marguerite Altet, avait souhaité que son établissement contribue à former des praticiens réflexifs, car son propre parcours l'avait convaincue du bien-fondé de cette compétence : "Selon moi, une classe est caractérisée par un système de tensions. L'enseignant doit alors gérer des logiques d'action contradictoires : la logique de la communication pédagogique, la logique didactique, la logique des savoirs, la logique du groupe-classe et la logique de chaque élève. L'enseignant construit une situation avant la classe et la reconstruit pendant la séance. Cette séance fonctionne quand l'enseignant et les élèves aboutissent à un compromis qui permet l'apprentissage et le bon climat de travail 1. Mais le parcours est long et la formation n'a évolué que pas à pas. Cela étant, avant la réforme de la masterisation, l'analyse de pratiques se faisait toute l'année au sein d'un groupe de référence en formation initiale. À cela s'ajoutaient, dans la plupart des IUFM, plusieurs modules, de la gestion de classe à la gestion des conflits. Actuellement, les différents travaux, en particulier ceux du chercheur Éric Debarbieux, ont conduit à proposer aux futurs enseignants des formations sur la gestion de la classe. Ce dispositif tel qu'il est proposé au niveau national s'axe davantage sur la tenue de classe et s'appuie sur une approche plus behavioriste 2. Dans l'académie de Nantes, certains formateurs, dont Claire Burdin, proposent une entrée par l'analyse de pratiques. La réflexion menée a montré la nécessité d'ouvrir le spectre et de relier les différents paramètres entre eux. S'il est nécessaire de maîtriser des compétences professionnelles pour créer un cadre de travail, et de savoir gérer ses propres émotions pour répondre de manière adaptée aux élèves selon leur âge, il semble aujourd'hui indispensable de savoir aussi différencier sa pédagogie. Le spectre est large, donc, mais comme le rappelle Claire Burdin, il s'agit bien d'acquérir une posture professionnelle qui relie entre eux tous les champs dans lesquels le professionnel peut agir. S'appliquer à construire cette posture professionnelle permet alors de poser un regard sur ses propres pratiques, mais aussi sur celles de ses pairs, et de savoir les analyser. C'est au cours des expositions et des analyses de pratiques dans un Gease (Groupe d'entraînement à l'analyse de situations éducatives) par exemple (voir annexe), qu'une réflexion et une autoréflexion peuvent alors s'établir durablement. C'est également à partir des interactions entre pairs que la compétence professionnelle de chacun peut évoluer afin d'apporter de meilleures réponses aux problèmes rencontrés tant par les élèves que par les professionnels de l'éducation. Depuis 2008, différents groupes se sont constitués au niveau du rectorat, de l'IUFM devenu École interne, et même de l'université qui propose un master Ffast (Formation de formateurs par l'analyse des situations de travail). De cette formation est née L'Afast (Association des formateurs par l'analyse des situations de travail), qui a cette volonté de promouvoir une posture réflexive sur les pratiques professionnelles.

Analyses de pratique avec ou sans "s" ?

Le vocabulaire employé pour désigner ce regard posé à plusieurs est multiple, et cela ne provient pas de la fantaisie des uns et des autres, mais bien des différentes pratiques et des écoles dont elles sont issues. Pour autant, l'essentiel est bien commun à toutes ces dénominations, à savoir les invariants qui constituent l'analyse. En effet, le principe fondamental est que l'acteur ne peut évaluer ou modifier, si besoin, sa façon de faire sans que celle-ci soit analysée. Or, l'objectivité nécessaire à cette analyse ne peut exister qu'à certaines conditions, et l'enjeu, se former en continu, nécessite une sorte de contrat implicite. Tout d'abord la confiance. Pas de jugement par les pairs, pas de position hiérarchique des intervenants qu'elle soit réelle ou virtuelle. L'échange ne passera pas par des critiques ou des conseils, mais par une recherche de faits objectifs : cadre, organisation, déroulement de l'activité, effet produit, autres faits notables. Ensuite, se former c'est aussi accepter de se transformer au gré des échanges, de remettre en question certaines certitudes ou automatismes, mais en toute sécurité. Le fait d'être simplement questionné par le groupe, étape nécessaire pour mettre à jour les conditions de l'activité analysée, engendrera sans doute une réflexion personnelle, ou bien fera émerger des éléments récurrents qui interagissent avec l'activité. Ainsi, celui qui expose une situation pourra ensuite prendre ou non en compte les réflexions des autres. Mais il aura une palette assez large des "possibles" et pourra ainsi faire son choix en fonction de sa personnalité. Enfin, le groupe constitué pour l'analyse des pratiques est également dans une dynamique collective. D'abord parce que tous ceux qui ont participé se sont enrichis par les propositions formulées par les uns et les autres. Ensuite, parce qu'un effet interne peut prolonger le travail avec, par exemple, la modélisation d'un type d'activité, une typologie des effets induits dans tel ou tel dispositif.

Les formations

Dans le champ de la formation continue, en 2009, à l'initiative du rectorat, un groupe de travail s'est créé autour de l'analyse de situation professionnelle. Des binômes composés d'un professeur et d'un CPE ont rencontré des équipes afin d'expérimenter la pratique d'un Gease (voir annexe). Ce groupe n'existe plus aujourd'hui. Sans doute que très peu d'établissements savaient qu'il était possible de demander ce type d'intervention ou que cette possibilité n'a pas encore assez fait son chemin. De même, peu d'enseignants s'inscrivent aux stages du Paf proposant cette entrée.  Cependant, plusieurs formateurs ont constitué un groupe d'analyse de pratiques qui, tout en mettant en application et en s'entraînant à ces pratiques réflexives, réfléchit à l'élaboration de formations qui pourront ensuite être proposées dans le plan de formation, en particulier aux néoformateurs. L'institution semble intéressée par cette approche. En formation initiale, on retrouve un des axes de l'analyse de pratiques. La volonté de l'université est de faire en sorte que tous les futurs professionnels de l'éducation acquièrent des compétences dans l'analyse de l'activité et développent une pratique réflexive. En master, la formation est validée par une unité d'enseignement  Analyse de l'activité de l'enseignant et de l'élève. Lors du premier semestre de master 1, les étudiants ont un stage d'observation dans les établissements ; au second, ils ont un stage de pratique accompagnée. Ainsi, tout au long de leur année, ils reçoivent un enseignement dont l'objectif est de savoir adopter une double posture : celle du praticien en prise, dans l'instant, avec la réalité de la classe, et celle de l'observateur, tel un chercheur, qui observe avec distance. À partir de leurs constats et de leurs pratiques au sein des établissements, les étudiants sont peu à peu conduits à faire le lien entre les situations vécues ou observées et la formation reçue à l'université. Le but étant qu'ils puissent analyser ce vécu pour en tirer des enseignements. Tâche complexe dont la difficulté réside aussi dans le choix des éléments à observer, et là, il s'agit d'avantage d'acquérir cette position de "chercheur". C'est pourquoi l'enseignement dispensé est également riche en propositions d'outils pour devenir plus autonome dans l'analyse en sachant recueillir des données observables.

Un avenir encore à construire

Selon les milieux professionnels dans lesquels l'analyse de pratique a lieu, les méthodes diffèrent, car l'axe varie. Elle peut être centrée sur le sujet, sur l'objet ou sur la situation. Dans le milieu scolaire, c'est la situation professionnelle qui est centrale. Pour les participants, il s'agit bien de faire évoluer ses propres pratiques afin de mieux répondre aux missions qui sont fixées, tout en favorisant l'épanouissement professionnel de chacun. Les professeurs comme les CPE doivent pouvoir constater les effets positifs de ce travail tant au niveau individuel que collectif. C'est aussi la raison pour laquelle des groupes-ressources devraient se développer dans l'académie afin de pouvoir intervenir à la demande des établissements. La volonté de promouvoir ces formations, que ce soit en formation initiale ou continue, est aujourd'hui portée par un ensemble de formateurs qui a pu mesurer le rôle de l'analyse de pratique. Car, ainsi que M. Altet l'indiquait lors du séminaire déjà cité : "l'analyse de pratiques n'évalue pas les personnes, mais donne du sens. En revanche, elle fournit aux stagiaires une culture de l'évaluation en leur donnant les moyens de justifier leurs choix pédagogiques. En outre, l'analyse de pratiques apprend aux stagiaires à construire une identité professionnelle individuelle et collective". On ne peut qu'espérer que, de l'école au lycée, les équipes de mieux en mieux informées sur ce mode d'échanges exprimeront des demandes de formation, première étape indispensable à la mise en œuvre d'un groupe d'analyse de situations professionnelles.


1. Acte du séminaire : "L'analyse de pratiques professionnelles et l'entrée dans le métier", janvier 2002.
2. Le behaviorisme est une approche qui consiste à centrer son analyse sur le comportement observable du sujet (en l'occurrence l'élève dans les formations "tenue de classe") afin de comprendre comment il réagit à son environnement.
 
auteur(s) :

M. Blin

contributeur(s) :

C. Burdin, IUFM, Pays de la Loire

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