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une présence virtuelle !

mis à jour le 24/06/2010


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Converser avec les habitants du pays d'origine, n'est-ce pas le meilleur moyen d'apprendre une langue ? D'où l'appel bien connu à des assistants. Mais quand on est un petit collège rural excentré de la Mayenne, il est difficile de disposer d'une telle aide. Heureusement, des nouvelles technologies comme la visioconférence peuvent remédier à cette situation.

mots clés : apprentissage des langues, visioconférence, langues étrangères, assistant de langue


Depuis longtemps, les lycées, puis des collèges, reçoivent sur une grande partie de l'année scolaire des assistants de langues, locuteurs natifs, comme on dit aujourd'hui. Ainsi, les élèves peuvent-ils converser avec un interlocuteur du pays d'origine, se familiariser avec son accent et perfectionner leur maîtrise d'une langue étrangère. Mais ceux-ci interviennent dans des établissements de taille importante ou dans de grandes agglomérations et il n'est pas possible, pour un petit collège rural isolé, d'employer un assistant pour seulement quelques heures dans la semaine. Il n'est pas possible non plus de prendre en charge financièrement les nombreux déplacements des assistants - pouvant aller jusqu'à cinquante kilomètres - entre les lieux d'exercice des assistants et la grande ville dans laquelle ils sont accueillis. Alors les collégiens ou les écoliers des petits établissements excentrés devront-ils être victimes d'une forme de discrimination linguistique ?

À l'origine

Au début des années 2000, l'inspecteur d'académie s'est penché sur le problème et a proposé de mettre en place un système d'assistance linguistique par visioconférence. Puisque des assistants de langues ne pouvaient être présents réellement dans les petits collèges du nord ou du sud Mayenne, ils y seraient présents virtuellement. Le Conseil général accepte de financer l'équipement nécessaire qu'il continue d'entretenir chaque année. Le CDDP (centre départemental de documentation pédagogique) assure la logistique. Il a mis une salle à disposition des assistants de langues, équipée d'un ordinateur et d'un écran télé. Une caméra filme l'animateur pendant la séance, une autre caméra sert à capter les documents proposés aux élèves, et enfin un tableau blanc interactif est utilisé par les plus compétents. Celui-ci est filmé, pour l'instant, par la première caméra pour éviter des pertes d'informations dans la communication. Le dispositif, un peu complexe, nécessite donc un temps de formation et d'apprentissage !

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Adaptation

Le CDDP se charge de l'accueil des assistants qui arrivent début novembre. Cinq assistantes, cette année, étaient concernées par le dispositif, trois pour l'anglais, une pour l'allemand et une pour l'espagnol. Celles qui interviennent en primaire sont reçues par le référent de langue à l'inspection académique, qui choisit pour ce type d'enseignement celles qui lui semblent les plus à même d'intervenir face à ce jeune public. Celles qui sont recrutées dans le secondaire ne savent que tardivement qu'elles interviendront dans le cadre d'un tel dispositif. En effet, elles reçoivent leur affectation par le rectorat fin juin et apprennent alors seulement, en découvrant leur emploi du temps, qu'elles devront assurer des heures de visioconférence. Certaines sont déroutées par cet environnement technique, d'abord, mais surtout par cette relation inattendue avec des élèves. Cela nécessite un temps d'adaptation plus ou moins long. L'an dernier, une assistante a demandé à rencontrer d'abord les élèves et l'enseignant avec lesquels elle allait devoir travailler, pour se rassurer. Elles sont formées à la maîtrise des outils par un enseignant chargé des TICE (technologies de l'information et de la communication pour l'éducation) qui reste à leur disposition lors des premières séances. Et il leur en faut bien une ou deux pour s'adapter à la situation, c'est-à-dire s'adresser à des élèves qui ne sont pas dans la salle, mais sur un écran de télévision, et qui, cependant, réagissent aux sollicitations ou répondent aux questions ! Il leur faut aussi intégrer qu'elles sont filmées et ne pas oublier de rester dans le champ de la caméra lorsqu'elles se déplacent pour aller au tableau ! La disparition du professeur du champ de vision des élèves pendant un cours n'est pas un risque habituel, en classe !

Organisation

La mise en place du système est un peu complexe. Début novembre, dès l'arrivée des assistantes, le CDDP doit organiser leurs différentes interventions. Les contraintes à prendre en compte sont multiples, quatorze, selon le directeur du CDDP ! En effet, il faut croiser de nombreux emplois du temps : ceux des cinq assistantes qui interviennent d'abord dans leurs établissements d'affectation, puis ceux des différentes classes concernées dans les quatre collèges et l'occupation des salles aménagées et enfin, la disponibilité de la salle de visioconférence du CDDP. Les collèges ont des modes d'organisation très différents, organisations choisies, mais souvent contraintes. Impossible techniquement, ni souhaitable pédagogiquement, de prendre la classe entière. Le groupe entier doit pouvoir apparaître dans le champ de la caméra et ne pas se placer loin de l'écran de télévision. La visioconférence peut avoir lieu sur une heure de cours de langue, la moitié de la classe passant une demi-heure avec l'enseignant pendant que l'autre dialogue par écran interposé avec l'assistante. Elle peut également avoir lieu pendant l'une des heures de permanence d'un groupe d'élèves concernés, ceux-ci se rendant alors dans la salle équipée. Les élèves sont accompagnés d'un surveillant ou d'un aide éducateur. Il arrive qu'une classe soit divisée en trois groupes, chacun suivant une heure de visioconférence par semaine. On peut aussi proposer le dispositif aux seuls volontaires. Les contraintes sont en effet très nombreuses dans l'établissement, et plus encore dans le cadre de l'enseignement de l'espagnol ou de l'allemand où les enseignants ont des services partagés sur plusieurs établissements.

Déroulement d'une séance

Ce lundi à 10 h 30, Nicole, l'assistante d'anglais, arrive au CDDP pour assurer une heure de conversation avec des élèves de sixième. Elle met sous tension les matériels, sélectionne dans l'annuaire l'établissement choisi et établit le contact avec celui-ci. Alors, sur son écran, apparaissent huit élèves de sixième, un tiers de la classe, assis autour d'une table sur laquelle est posé un micro. Un cadre en bas à droite signale à l'assistante ce que les élèves perçoivent sur leur écran. Ils sont seuls et calmes. Premiers contacts, premières corrections de prononciation : I'm fine not fun! puis elle s'enquiert du temps qu'il fait. On entend quelques échanges entre élèves pour trouver le mot qu'ils souhaitent, chaud, froid, Je veux dire du soleil., chuchote l'un d'eux. On passe ensuite à la date. Une correction est aussitôt effectuée : Monday THE eleventh of May, et tous répètent ensemble. L'assistante annonce ensuite A new subject : clothes. Elle se déplace au tableau pour écrire close, cold, clothes... tout en n'oubliant pas de manier la télécommande pour orienter la caméra, qui la filmait alors assise sur la chaise, vers le tableau. Puis elle centre la caméra sur elle lorsqu'elle dénomme les différents vêtements qu'elle porte, faisant répéter les élèves collectivement, puis individuellement. Quelques prononciations difficiles déclenchent des rires passagers, mais les élèves s'entraident plutôt bien et se poussent à prendre la parole. Ensuite, un exercice de révision nécessite papier et crayon, ce qui produit un certain brouhaha amplifié par le micro posé sur la table. Le document placé sous la seconde caméra et projeté sur leur écran télé semble un peu petit pour eux et nécessite un effet de zoom. Ils doivent d'abord classer les noms de vêtements en deux colonnes: winter/summer, ensuite retrouver sur un autre document le personnage décrit par l'assistante. Les élèves écoutent silencieusement, on entend à peine quelques échanges chuchotés. Soudain, ils se lèvent, une sonnerie silencieuse a marqué la fin de la séance! Ils se reverront dans trois semaines.

Réactions de l'assistante

Trois semaines ! Nicole trouve cela long car les élèves risquent d'oublier. Elle préfère le dispositif mis en place avec des quatrièmes, vingt minutes chaque semaine. Il ne lui est pas possible de connaître les élèves, elle n'est pas dans le collège, elle ne les voit que sur le petit écran, d'un peu loin. Pendant la séance, elle n'a prononcé qu'un seul prénom, elle a dû interpeller la fille à lunettes, le garçon au T-shirt bleu! Mais n'est-ce pas une bonne façon, aussi, d'assimiler le vocabulaire, et dans une situation bien adaptée au sujet de la séance ? Il n'existe pas la même interaction que dans une situation de classe normale ; en effet, il ne lui est pas possible de se déplacer, de voir les travaux des élèves... mais l'essentiel reste quand même le discours oral, la prononciation et l'accent. Mais comment peut-on intervenir lorsqu'un élève ne suit plus ou dérange le groupe ? se demande-t-elle. Ce qu'elle a parfaitement fait cependant au cours de la séance lorsque quelques élèves commençaient à faire trop de bruit avec leurs stylos. Il faut dire qu'avec le micro sur la table, le moindre bruit de ce type est amplifié, inconvénient qui pourrait être évité si la table était simplement recouverte d'un épais tissu. Il semble difficile de changer quelque chose pendant la séance. Néanmoins, malgré ces difficultés inhérentes à la situation, elle constate que le niveau de vocabulaire progresse assez vite, ainsi que la prononciation. Ne pourrait-on pas regrouper les élèves par niveaux, suggère-t-elle ? Pour cela, il faudrait voir avec l'enseignant ou l'administration du collège et les contacts ne sont pas toujours évidents.

Point de vue d'enseignantes

Dans un autre collège, le collège Jean-Rostand de Bazouges, les enseignantes de langues ont intégré la visioconférence à leur enseignement depuis trois ans. Le choix des classes qui en bénéficient se fait en fonction des plages disponibles dans l'emploi du temps proposé par le CDDP, mais elles s'efforcent de faire en sorte que les élèves puissent au moins en bénéficier une fois dans leur scolarité au collège. La visioconférence a lieu sur leur temps de cours, une moitié de la classe restant avec l'enseignante pendant que l'autre partie rencontre l'assistante par l'intermédiaire de l'écran. Le dispositif a lieu toutes les trois semaines. Une salle de langue a été aménagée pour ces séances, les tables sont placées en cercle devant un grand écran sur lequel l'image est projetée par un vidéoprojecteur. Quels sont les contacts entre assistantes et enseignantes ? Ceux-ci sont très différents selon l'assistante et selon les années. Une information globale peut être envoyée une semaine à l'avance pour signaler le thème travaillé en classe, les faits de langue en cours d'étude, les documents utilisés... L'assistante conçoit alors sa séance à partir de ces données. Elle peut envoyer par mail les documents qui seront photocopiés et distribués aux élèves. Mais l'enseignante peut envoyer aussi des indications plus détaillées (voir annexe) et quelques documents-supports. Elle produit parfois la séance complète que l'assistante se contentera de mettre en œuvre (voir annexe), ce qui lui demande une double préparation de cours ! On le voit, la relation établie dépend de la personnalité de l'assistante. Certaines ont une expérience professionnelle du métier, maîtrisent le déroulement d'une séance, ont un contact facile avec les élèves ; d'autres découvrent et ont plus de mal à motiver les élèves, à varier les rythmes des séances, à proposer des intercorrections, à les inviter à répéter, sans parler de la connaissance du niveau des classes.

Bilan

La visioconférence ne remplace pas, évidemment, la présence de l'adulte. Le dispositif présente encore quelques aléas techniques, mais de mieux en mieux surmontés. Les difficultés dues à la personnalité des intervenants ne relèvent pas de ce dispositif. En présence d'une classe d'élèves, les problèmes ne seraient-ils pas les mêmes ? Des rencontres préalables, des échanges, une petite formation pourraient réduire ces difficultés. Néanmoins, c'est un outil pédagogique supplémentaire qui permet aux élèves d'entendre une autre personne parlant dans sa langue maternelle. Les élèves de sixième, en particulier, sont heureux de ces séances et sont plus motivés que les troisièmes. La curiosité pour le nouvel outil attire aussi. Des élèves qui avaient peur de parler, handicap sérieux dans l'apprentissage d'une langue (!) osent enfin prendre la parole avec une personne qui n'a pas le statut de professeur, donc d'évaluateur. L'élève, moins inhibé, n'a plus peur de faire des fautes! Au cœur de la Mayenne, on entend enfin l'accent d'une Madrilène ou d'une Londonienne !
 
auteur(s) :

M. Le Bihan

contributeur(s) :

P. Benaben, V.  Foucoin, N.  Bodell, A. Pomès, G.  Legeay, D.  Sol-Lehir, Centre départemental de documentation pédagogique - Laval [53]

fichier joint

information(s) technique(s) : pdf

taille : 220 ko ;

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