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Citoyenneté et intégration

mis à jour le 16/08/2007


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Le terme de citoyenneté, repris avec enthousiasme par la révolution française, est aujourd'hui revenu à la mode, parfois de façon abusive, dans le monde entier. Mais quelle est exactement la signification de ce mot ?

mots clés : citoyenneté, intégration intégration, schnapper, nation, stage


Journée de formation continue du 16 / 03 / 2001 à l'I.U.F.M.du Mans.

Animateurs: DESSIOUX Jacques et GÉHANNE Jean-Claude - Responsables et animateurs de la formation continue dans l'académie de Nantes.

Intervenant extérieur : Mme SCHNAPPER Dominique (Directrice à l'école des hautes études de Paris)

                    

Introduction

Le terme de citoyenneté, repris avec enthousiasme par la révolution française, est aujourd'hui revenu à la mode, parfois de façon abusive, dans le monde entier. Mais quelle est exactement la signification de ce mot ?

 

LA CITOYENNETÉ : UN CONCEPT PLURIEL

Trois sens peuvent être accordés à ce concept :

            1 / Un sens juridique :

La citoyenneté est d'abord un ensemble de droits et d'obligations. De ce point de vue, la citoyenneté apparaît comme un concept abstrait.

Les droits peuvent être :

  • civils: l'ensemble des libertés individuelles (conscience, expression, se marier, avoir un avocat, aller et venir, être traité par la justice de façon égale pour tous, ....),
  • politiques: (participation à la vie publique, être électeur , être éligible, etc...., pour tous, y compris les étrangers).
En retour, chaque individu est tenu à respecter les lois, à contribuer à la vie économique par les impôts par exemple ou encore à défendre la société si elle se trouve menacée...

 

            2 / Un sens politique :

C'est le principe de la légitimité politique qui fonde l'organisation sociale et la concrétise :  nous sommes tous divers, inégaux, mais nous constituons la même société. C'est sur cette base que l'on peut expliquer les institutions politiques, sociales, économiques et culturelles.
- le citoyen est détenteur d'une part de la citoyenneté politique puisque « la communauté des citoyens »   choisit ses gouvernants et  les sanctionne par le vote. En conséquence l'électeur apparaît souverain, à l'image du consommateur- roi.
- les hommes politiques ne peuvent pas critiquer les électeurs ou les juger ; ils n'ont pas la possibilité de dire que l'électeur a eu tort. (par exemple, la seule et unique fois que M. Bernard Tapie s'est excusé, c'est après avoir traité les électeurs du FN de « salauds »...).

           

3 / La source de la légitimité politique :

Dans l'histoire française, les révolutionnaires (Article 3 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen) ont avancé l'idée que les citoyens formaient une nation, avec comme principe fondamental que lorsqu'ils sont constitués en nation, les individus agissent en citoyens sont souverains indépendamment de leurs enracinements religieux, historiques ou culturels..., ce qui renvoie au « siècle des lumières ».

Ils pensaient également que les individus pouvaient se libérer de ce déterminisme,  entrer en contact avec les autres et devenir ainsi de véritables citoyens (« utopie créatrice »).

On peut noter, par ailleurs, que les institutions découlent du principe de «l'égalité dans la dignité ». La citoyenneté est un instrument pour gérer la diversité des hommes.

Ce principe se fonde :

- d'une part sur la séparation du public et du privé: en privé, l'individu est concret ; en public, il appartient à l'unité et à  l'universalité par sa «neutralité ».

Il apparaît alors une sorte de dualisme représenté par l'universalisme du citoyen d'un côté et  la liberté de l'homme privé de l'autre.

- d'autre part sur la séparation du politique et du religieux : il n'y a pas de pouvoir extérieur et toutes les églises sont éliminées comme source de pouvoir. C'est l'Anglais J. Locke qui a formulé, après les guerres de religions, l'idée que la neutralité religieuse de l'Etat était la condition pour faire vivre ensemble des individus de religions différentes... « la religion divise les hommes ; la raison les unit... ». Pour autant, les formes concrètes diffèrent d'un pays à un autre (ex : en Allemagne, la religion figure sur les papiers d'identité).


 La construction de la citoyenneté moderne 

            1/ citoyenneté et universalité 

La citoyenneté moderne a pour vocation d' être étendue à tous comme le démontre l'histoire du droit de vote :

  • la communauté est née en 1789 mais seuls les citoyens actifs( hommes, chefs de famille) avaient le droit de vote, par la suite c'est au nom de l'universalité que le droit de vote a été étendu :
  • en 1848, les ouvriers et les paysans peuvent voter ;
  • en 1944, les femmes ;
  • en 1974, les jeunes de 18 ans (au lieu de 21 ans) ainsi que les nouveaux naturalisés (dès le premier jour de leur naturalisation et non au bout de 5 ans auparavant).

Toute organisation, par nature, détermine ceux qui en font partie. Il en découle deux caractéristiques :

- 1ère caractéristique : les sociétés organisées n'échappent pas à la règle de l'inclusion/exclusion pour les pratiques politiques : les citoyens sont inclus, les non-citoyens en sont exclus car ils disposent de droits dans un autre pays.

- 2ème caractéristique : les sociétés citoyennes modernes se distinguent, en principe, par leur « ouverture » ; mais en réalité tout État démocratique prévoit des dispositions pour accéder à la citoyenneté, en ce qui concerne les étrangers).

 

            2/ le rôle des institutions (au sens général) :

Les institutions, au sens général, jouent un rôle très important, ainsi chaque société élabore des règles pour que le principe de citoyenneté ne reste pas au stade du simple principe mais devienne une façon concrète de vivre ensemble. Il en découle que les formules qui organisent la vie en Europe sont différentes d'un pays à un autre car elles sont héritières d'histoires différentes ( relation entre public et église, constitutions, façon de débattre, ... ne sont pas les mêmes...). C'est une des difficultés majeures pour la construction de l'espace commun européen.

 

            3/ l'opposition Nation civique / Nation ethnique :

Toute Nation est à la fois ethnique (partage d'une langue, d'une histoire, d'une culture...) et civique (principe fondamental de la Nation) mais au-delà de cette dichotomie, il existe un principe selon lequel les différences doivent être transcendées.

Exemple de l'institution scolaire :

L'école agit à la fois sur la dimension ethnique et civique (diffusion d'une langue commune et d'un récit historique commun), en même temps, elle est l'image de la société politique dans la mesure où elle forme un espace public dans lequel tous les enfants sont traités de la même manière, et ce quelles que soient leurs caractéristiques (le port de l'uniforme à l'école).
La transcendance du principe universel ne signifie pas que l'on  nie les diversités mais que l'on ne veut pas les prendre en compte dans les lieux publics (ex : en France, on recense au moins 65 langues différentes mais dans l'espace public : une seule langue commune, le français). Cette question du multiculturalisme fait objet de débats.

 

LES DEUX GRANDS COURANTS CRITIQUES DE LA CITOYENNETÉ

L'analyse montre que les sociétés ont un aspect ethnique « réel » et un aspect civique « abstrait ». Deux courants critiques se dégagent :

-   le premier oppose l'égalité civile, juridique du citoyen aux inégalités économiques et sociales de fait : l'égalité civile proclamée n'a pas de sens si les individus connaissent des situations trop inégales (l'inégalité des fortunes entraîne l'inégalité des citoyens). Cette idée sera reprise par les catholiques sociaux ainsi que par le courant marxiste.

L'Etat-Providence apparaît ainsi comme une réponse à cette critique.

-   le second qui oppose l'égalité civile à la réalité des références religieuses, historiques et idéologiques, a nourri toute la pensée contre révolutionnaire (cf E.Burke, Réflexions sur la Révolution de France).

Aujourd'hui, les penseurs communautaires reprennent cet argument en réclamant la reconaissance des communautés particulières dans l'espace public.

Conclusion

- la citoyenneté est fragile car elle s'efforce de dépasser les différences humaines (ce qui n'est pas spontané chez l'homme), en ce sens elle peut être assimilée à « une utopie créatrice » ;

- les sociétés citoyennes trahissent toujours les principes qu'elles affirment (elles sont infidèles aux valeurs qu'elles présentent) ;

- il y a une contradiction entre les principes (les hommes sont égaux) et les faits (on défend les rapports de force !).

 

Questions et débat :

-   à propos du vocabulaire : « assimilation », « intégration », « insertion »,  il apparaît qu'il s'agit plus d'un effet de mode que de véritables différences de fond ;

-   quelle politique faut-il mener pour les enfants d'immigrés ?

-   la discrimination et ses conséquences sur l'école républicaine ? (exemple : quotas d'entrée à Sc. Po, sans examen) ;

- la citoyenneté extra-nationale ? Problème de la double citoyenneté et de sa réciprocité ;

- citoyenneté et Europe ? Alors que la logique de l'extension de l'Europe pose le problème de l'harmonisation du droit de vote des étrangers aux élections locales. Une nouvelle notion semble néanmoins émerger : celle de la « citoyenneté-résidence ».

-   les abstentions aux élections, crise des valeurs démocratiques et de la représentation ?

-   faut-il construire des mosquées en France ? Nécessité de relire la loi de 1905 et de rappeler les principes fondateurs de la laïcité.

 

   Ouvrage de référence: D. Schnapper, Qu'est-ce que la citoyenneté ?

 

Nb : depuis la mi-mars 2001, Mme Dominique Schnapper siège au Conseil Constitutionnel.

 

Notes ordonnées de et par DESSIOUX Jacques, GÉHANNE Jean Claude et BEN CHAMAKH Belgacem

 

 

information(s) pédagogique(s)

niveau : tous niveaux

type pédagogique : connaissances

public visé : enseignant

contexte d'usage : travail autonome

référence aux programmes : Programme de terminale: intégration et solidarité
Enseignement de spécialité: intégration et solidarité (Durkheim)
Programme de première: l'organisation politique (citoyenneté)

fichier joint

information(s) technique(s) : Cette conférence est téléchargeable au format pdf.

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