Contenu

arts plastiques - InSitu

Recherche simple Vous recherchez ...

espace pédagogique > disciplines du second degré > arts plastiques > enseignement > leçons

la verbalisation

mis à jour le 03/09/2011


oral2.jpg

L'oral ou l'écrit?

mots clés : oral, écrit, verbalisation, parole


La verbalisation. L'oral ou l'écrit ?

C'est la fin du cours, certains n'ont qu'une hâte, ranger leurs affaires et courir en récréation.  D'autres traînent encore et se bousculent autour du point d'eau. Il  faut ramasser le matériel de la classe, vérifier que rien ne manque, nettoyer pour le cours suivant. Je presse encore les plus lents d'arrêter leur activités, tant pis s'ils n'ont pas fini. Ils n'arrivent pas y s'y résoudre.
On accroche les derniers travaux, j'essaie de mobiliser l'attention. -  Installez vous, dépêchez-vous. C'est le temps de la verbalisation ....
Le cœur n'y est pas vraiment. Les élèves sont bruyants : c'est long  d'obtenir le silence d'une classe qui émerge d'une séance de peinture. Mais ce n'est guère plus facile d'extraire  les élèves des autres pratiques quand il s'agit  de réfléchir et d' échanger autour de ce qui vient de se vivre.  Enfin, je réussis à capter l'attention de quelques uns.  Les premiers élèves commencent à intervenir, timidement, malgré l'agitation environnante.  La sonnerie retentit.

-Tant pis, on en reparlera la semaine prochaine . Tâchez d'y réfléchir d'ici-là. ( - Ah non, la semaine prochaine, on fait la sortie avec M... )
Non, la semaine prochaine, c'est bon, rien à signaler, on reprendra la discussion.

Mais ou en sommes nous la semaine suivante ? Une semaine, c'est long pour  nos élèves. (Certains, qui ont oublié de mentionner leur nom  sur leur travail,  sont même  incapables d'en reconnaître la paternité).
Cette fois, le silence dans la classe est profond. Par chance quelques uns arrivent à se remémorer l'incitation, mais la machine à verbaliser a bien du mal à démarrer et les échanges anarchiques de la dernière fois laissent place au mutisme. Quelques courageux bienveillants  avancent une ou deux remarques. Je sens l'ennui. J'encourage, je félicite, je questionne,  mais très vite les premiers signes de lassitudes laissent place à l'impatience. On joue avec son crayon, on titille son voisin, on papote avec sa voisine, on se lève pour aller jeter un papier. -Quand est-ce qu'on travaille ??

Et là, j'ai bien envie de laisser tomber l'oral, et de  glisser vite fait le questionnaire écrit que j'ai préparé, avec les bilan du travail, quelques mots de vocabulaire bien choisis, le tout « agrémenté » de reproductions d'œuvres qui éclairent « judicieusement »  la leçon, et sauter ( ce ne serait pas la première fois)  cette fastidieuse épreuve de la verbalisation orale. La tentation est grande et je m'y soumets des fois, quand je n'ai pas le courage d'affronter l'épreuve  face à une classe chahuteuse ou peu réactive, et c'est toujours un sentiment d'échec, de n'avoir pas su mener la leçon jusqu'au bout, sachant que l'essentiel n'a pas été fait puisque rien n'a été échangé. Je me dis  que la pratique du questionnaires limite la bavure,  qu'il peut inciter à la réflexion, les aider à formuler les intuitions, à s'approprier des savoir et fixer des connaissances. C'est en partie vrai. Est-ce bien  suffisant ? Bien sûr il y aura toujours des élèves en retireront quelque bénéfice, mais qu'en est-il de la grande majorité d'entre eux ? Ceux qui ont besoin de temps pour réfléchir, ceux qui manquent d'autonomie , ceux  qui maîtrisent mal l'écrit pour lequel ils doivent mobiliser toute l'attention et qui ne peuvent pas simultanément lire les consignes, réfléchir et répondre. Pour ceux là, les réflexions échangées et les informations partagées à l'oral sont indispensables.
 
Le problème, c'est quoi ?

C'est que l'oral est un exercice très difficile pour tous. Le professeur mesure combien c'est utile, il en connait les enjeux, qu'en est-il de l'élève ? Il voudrait faire, bricoler, tester, mettre la main à la pâte, mais réfléchir... avec des mots ... se concentrer... faire l'effort d'écouter - car écouter demande un effort - essayer de comprendre ce que l'autre dit mal, de s'ouvrir à la pensée étrangère, se poser des questions, chercher des réponses .... Je dois   forcer pour faire rentrer les élèves dans cette activité qui n'en est pas une, qui prend (mange ?) du temps, qui provoque parfois des conflits (hé oui, ça arrive aussi), du temps pour s'écouter, pour laisser parler ceux qui ont des difficultés à parler, supporter les ennuyeux, attendre son tour, écouter les redites des inattentifs, subir les remarques du prof qui reprend, les bavardages qui empêchent de suivre, s'empêcher de rêvasser..

Et pourtant,  la verbalisation écrite ne peut pas remplacer la verbalisation orale.

Et si la verbalisation orale est médiation, elle est aussi re-médiation : elle permet aux élèves qui sont passés à côté de la question soulevée de comprendre et de mesurer leur « échec » grâce à la confrontation productive.
La verbalisation orale permet de faire émerger naturellement les mots utiles à la compréhension des notions  
La verbalisation orale fait prendre conscience  de l'intérêt du réfléchir et communiquer. Certains élèves n'ont pas l'habitude de parler, de s'interroger alors que d'autres y sont habitués chez eux. Pour ceux-là, comprendre qu'on peut trouver un intérêt à pratiquer la réflexion et l'échange devient donc un objectif très important que l'écrit ne peut pas atteindre .

Certains élèves ont des facilités à s'exprimer mais des difficultés à écouter. Confrontés aux autres ils seront contraints à s'ouvrir , à remettre en question leurs préjugés, à sortir d'eux-même.

Participer à  l'oral, c'est prendre des risques : risquer les moqueries,   risquer  de ne pas être compris ou mal compris, être seul face aux autres, ne pas se faire entendre, devoir répéter, accepter les avis contradictoires, se voir renié dans ses propos.
La verbalisation orale s'avère alors un moment privilégié de l'apprentissage de la vie en collectivité et de la citoyenneté.

Et puis, comment comprendre son travail quand les outils du vocabulaire manquent ?

La pratique leur fait pressentir, les prépare, les questionne mais les laisse  perplexes. Pourquoi on a fait cela ? Pour quoi faire ? Ils sont mal à l'aise.  Grâce aux mots, l'élève passe de l'intuition cernée par  la pratique à la compréhension de la question.. Quand les élèves parlent,  on sent  la compréhension qui se tisse petit à petit, d'un mot à l'autre, d'une phrase maladroite à l'autre. Les élèves cherchent et circoncisent peu à peu la notion. Que s'est-il joué ? Qu'est-ce que l'enseignement veut nous faire saisir ? Ah oui, c'était ça, bien sûr. Et là, ça devient plus clair,  les réalisations en classe prennent du poids, elles ont du sens, et les œuvres de références sont devenues accessibles.
Fréquemment, le cheminement est laborieux, difficile, souvent accompagné de chahut, et il semble que rien ne se soit passé, qu'aucun étincelle n'ait réussi à enflammer les débats et que la verbalisation ait avorté.  Je me dis « à quoi bon dépenser tant d'énergie », faire « souffrir » mes élèves dans ce qui ressemble à un accouchement aux forceps de notions simplissimes. Et pourtant ... la verba est un travail de fourmi, fastidieux mais utile, qui, petit à petit, morceau par morceau, va amener les élèves à la compréhension, à la construction de connaissances, et  lui permettre  d'accéder au plaisir de la découverte. Car l'élève est vraiment heureux quand tout à coup il repère et comprend les enjeux d'un travail ou d'une œuvre de référence, et que ce qui était mystérieux tout à l'heure prend tout à coup du sens.

Les moments magiques

Dernièrement, au cours d'une verbalisation suite à une séance de cinéma  dans le cadre de Collège au cinéma », les élèves ont échangé à chaud sur le film. Un film sous titré,  narration minimale,   rythme lent,  personnages  peu loquaces, ce que les élèves n'ont pas manqué de remarquer. Plusieurs ont fait part de leur ennui durant la projection. Un élève est alors intervenu pour dire: - Oui, c'est lent et il y a beaucoup de silence, mais c'est bien parce que ça nous laisse le temps de réfléchir.
La classe s'est tue. Ce jour-là le silence en disait long...
 
L'écrit ne peut pas remplacer l'oral.
La verbalisation ne peut être en aucun cas se limiter à une verbalisation purement écrite, et les programmes sont très clairs à ce sujet :
L'oral et l'écrit - C'est à l'intérieur de la classe et dans le cadre d'un échange collectif, pour analyser le travail qu'il vient de réaliser, que l'élève est invité à s'exprimer oralement ou par écrit. Il parle ou rédige en situation et de manière motivée. Sa réflexion porte sur l'objet concret qu'il a produit, sur la part personnelle, singulière, qui en fonde l'expression. A cette occasion, confronté à la présentation des productions de la classe ou à des œuvres proposées en référence, il s'interroge sur le sens de la situation proposée et appréhende la pluralité des réponses et des pratiques. L'oral et l'écrit exercent les élèves à faire usage d'un vocabulaire diversifié, spécifique aux arts plastiques. Cette pratique enrichit leur lexique et favorise le développement de compétences analytiques et argumentatives. C'est à cette occasion que ses connaissances en arts plastiques se formalisent. Cette pratique est appelée verbalisation. Elle est structurée et étroitement lié à l'élaboration de la séquence.
Les élèves sont amenés à écrire lors de l'évaluation, à prendre des notes ou à tenir un carnet de bord (écriture « pour soi »).
L'oral et l'écrit portent sur la nature de la production, sur les modalités opératoires et sur la manière dont elle est perçue d'une part, sur les contenus notionnels et culturels d'autre part.
Ce que nous disent les programmes :

Tout enseignement artistique prend appui sur une pratique dans laquelle s'articulent action et réflexion, intention et attention.
Pour ce faire, l'initiative des élèves sera sollicitée et l'accès à l'autonomie facilité.
Cette part d'autonomie ainsi que les initiatives dont les élèves font preuve dans la conduite de leurs projets jusqu'à leur réalisation se manifestent aussi dans des situations d'échange oral, individuelles ou collectives.
Du fait de la pratique, leur réflexion autour des œuvres ou de leur production est fondée sur un vécu qui nourrit l'expression orale. Cela peut également prendre la forme de notations écrites.
Le recours à un vocabulaire spécifique et son usage pertinent sont évalués. C'est à ce titre que les arts plastiques contribuent à la maîtrise
de la langue française.
Dans la confrontation des productions et les prises de parole qu'elle suscite, les élèves apprennent à pondérer leur relation à
l'autre, à reconnaître et à apprécier les différences dans le respect mutuel des échanges. Le questionnement inhérent à toute pratique artistique, celle de l'élève ou celle de l'artiste, favorise la conscience de l'altérité et développe chez les élèves des compétences sociales et civiques, telles la tolérance, l'écoute et la responsabilité.
 
auteur(s) :

colette baconnais

ressource(s) principale(s)

verba.jpg la parole de l'élève 06/09/2019
La maitrise du langage et la prise de parole dans le domaine des arts plastiques
parole, élève, oral, verbalisation, écrit groupe de travaill InSitu collège

haut de page

arts plastiques - InSitu - Rectorat de l'Académie de Nantes