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fiche chaarp : le dessin : du projet à l'oeuvre

mis à jour le 07/02/2012


vignette girodet.jpeg

A partir d'œuvres référencées, cette fiche thématique conçue par le professeur d'Arts plastiques chargé de mission, présente des questions d'enseignement dont les professeurs pourront se saisir pour construire une situation de cours.

mots clés : trait, contour, dessin, dessein, inachevé



à propos des oeuvres

Anne-Louis GIRODET, 1824 Étude de draperie 1806 47,7x56,3 cm
Anne-Louis GIRODET

Étude de draperie pour Scène de déluge du Louvre
Mine de plomb et craie blanche sur papier beige
1806
47,7x56,3 cm



"Le mouvement ample, le clair-obscur, l'esquisse du corps portant, courbé, et laissé en réserve donne une force romantique insurpassable à ce dessin virtuose."

Cyrille SCIAMA, Conservateur du Patrimoine- Chargé des Collections XIXe siècle au MBA de Nantes.


Le dessin représente l'étude de draperie qui couvre le vieillard porté par le jeune fils dans le tableau du Louvre, Scène de déluge. L'artiste a ajouté une bande de papier dans le bas du dessin. Elle se distingue par sa couleur plus foncée. Juste au dessus de cette bande, à gauche, une inscription indique: « Cette étude me vient directement de Girodet et a servi au tableau du Déluge, au musée du Louvre. Ate Galimard »

 
i




V
isage de femme naît de quelques traits. Cette impression "d'émergence d'une forme", ici humaine, est générée par le caractère inachevé du dessin. La chevelure, le visage et les épaules se perdent dans le support du dessin. La pierre dans un premier temps, le papier ensuite. De la simplicité apparente de l'ensemble surgit des forces. Selon MATISSE: " les lignes sont des forces, et dans le jeu de ces forces, dans leur équilibre, réside le secret de la création." (1)



(1) Henri Matisse, « Il faut regarder toute la vie avec des yeux d'enfants », propos recueillis par Régine Pernoud, Le Courrier de l'U.N.E.S.C.O., vol. VI, n°10, octobre 1953.

 Henri MATISSE

 Visage de femme
 Lithographie
 63,5x48 cm
 14/50

 

confrontation des oeuvres, éléments pour une réflexion pédagogique


Du "dessin" au "dessein"

Les noms « dessin » et « dessein » ont la même étymologie (desseigner, dessigner) mais leurs sens est différent aujourd'hui. Alors que le verbe « dessiner » signifiait « projeter, tracer les contours de », le nom « dessein » (pourtant issu de ce même verbe) signifiait quant à lui à la fois « projet » et « représentation graphique ». Celui qui dessine, nourrit un dessein. C'est à dire qu'il crée un pont entre lui et ce qu'il voit. Aujourd'hui, « le nom dessin est d'abord un dessein , c'est à dire un projet de l'esprit qui se traduit par une oeuvre matérielle. »(Extrait de la définition de « dessin et dessein », Office québécois de la langue française)
 
  • le dessin comme dessein

Le dessin comme dessein est à comprendre comme une étape avant une matérialisation finale qu'elle soit d'ordre architecturale, sculpturale ou picturale.... La peinture est précédée par le dessin car il s'avance au-devant d'elle. Mais le projet peut-il exister pour lui-même sans aboutir à une œuvre réalisée ? A t-elle contribué à l'évolution de la peinture, à ses mutations ?

« Le dessinateur exécute plusieurs essais, appelés esquisse, puis modèle, enfin carton, qui donnent le sentiment esthétique de la promesse, de l'ouverture vers..., bref d'une fraîcheur, d'un non-abouti qui annonce une émergence. »
Etienne SOURRIAU


Scène de déluge est une peinture spectaculaire et d'un format important (441 x 341 cm) qui ne représente pas l'épisode biblique "du " déluge mais plutôt une scène "de" déluge.


 
  • le geste dessinant comme matérialisation de l'idée

Si le sens premier de « disegno » est un « projet obscur », il est aussi dans un sens une visée rationnelle, un objectif que l'artiste tente d'atteindre. Pour s'en approcher, le dessin devra rassembler ou choisir, distinguer ou confondre, faire un tri assumé qui mettra en lumière certains éléments et en taira d'autres.
En admettant que le dessin soit le commencement de la peinture, on accepte l'idée qu'il en soit l'éclaireur. DELACROIX comme GIACOMETTI insistait sur l'absence de ligne dans la nature, sur la vue de l'esprit à créer des contours aux objets. Finalement, la nébuleuse de traits autour des figures représentées (fusain, pastel, lavis,..) se rapproche davantage de la nature de l'objet.
Les dessins au pinceau de MATISSE confondent deux étapes en un geste: le dessin et la peinture. L'un ne précédant pas l'autre mais les deux naissant de leur fusion.


« Dans l'exécution [...] se montrent deux choses : l'une, une contention de mémoire
résurrectionniste, évocatrice, une mémoire qui dit à chaque chose : « Lazarre, lève-toi», l'autre, un feu, une ivresse de crayon, de pinceau, ressemblant presque à une fureur. C'est la peur de n'aller pas assez vite, de laisser échapper le fantôme avant que la synthèse n'en soit extraite et saisie »
Charles BAUDELAIRE
 

Le dessin pour l'invention c'est:
«[...] le moment le plus propice à la libération de l'imagination. [...] Les traits s'embrouillent autour de la matrice d'où surgit, tout en se libérant, une énergie surnaturelle de sorte que l'on pourrait voir se développer à l'infini ce moment d'élan créateur »

Lizzie BOUBLI, Le plaisir et la nécessité, une voie en transit,
(Dualité de la nécessité et de l'imagination : le réel, espace de la séparation)
 
  • Le dessin comme art autonome

Si le dessin était l'étape préalable et incontournable avant la peinture, l'émergence de la photographie dissout cet état de fait. Cette dernière abandonne certains types de représentations et évacue le dessin en tant que étape préparatoire, ce qui est d'autant plus étonnant puisque l'un de ses inventeurs Fox TALBOT la définissait comme « le crayon de la Nature » (« The Pencil of the Nature »). Ce rejet de la main au profit de la perfection de l'image photographique éveille chez les artistes le désir de réemployer l'art de la mine de plomb qui par sa technique et son matériau est comparable au daguerréotype et au grain des préparations héliosensibles. Le dessin acquière ainsi une autonomie jamais atteinte.
La principale différence que nous pourrions faire entre un dessin préparatoire et l'émergence du dessin autonome est celle liée à la volonté de montrer la production graphique effectuée et à la potentialité d'un spectateur. La conservation même du dessin en sera différente.
 

L'inachevé: une valeur expressive



  • un caractère essentiel en tant que début, ouverture, piste ...

L' « esthétique de l'inachevé » ou le non-finito pour reprendre le terme italien le plus souvent attribué à la sculpture de MICHEL-ANGE, et désigne des œuvres inachevées volontairement ou non. On considère que chez ce dernier, il est lié à une incapacité de terminer son ouvrage pour des raisons techniques ou par une incapacité d'atteindre l'idée au départ de l'ouvrage. En revanche, pour RODIN, l'inachevé est pensé et désiré car il apporte une valeur expressive qui alimente la force que dégage l'œuvre.

Le détail est le centre d'intérêt du dessinateur qui, par son traitement et la mise en page (plus que la composition) focalise son attention et celle du spectateur (regardeur) sur un élément. En devenant, comme ici, le centre d'intérêt du spectateur, il perd son statut de « détail » au profit de « sujet principal » aidé par l'opposition d'une exécution soignée, détaillée et de parties inachevées. L'Étude de draperie de GIRODET devient même « l'élément accrocheur » de l'exposition « Trésors cachés du cabinet d'art graphique ».
Pourquoi et comment une étude passe-t-elle ainsi de l'ombre à la lumière ?
Ce glissement de statut est inévitablement renforcé par le changement d'époque et
l'apparition d'une esthétique contemporaine. Les études n'étaient pas vouées à être montrées en dehors des ateliers alors qu'aujourd'hui elles le sont, encadrées et exposées.
 
  • une esthétique contemporaine (Le dessin dans la collection d'art contemporain du musée)

Dans la production contemporaine, le dessin est un mode d'expression majeur et incontournable. La mimésis n'est pas l'objectif que tend à atteindre le trait des artistes d'aujourd'hui. L'imitation de la nature est détournée au profit du geste. Le dessin est donc à différentier de la représentation. Il devient alors une exploration de l'espace qui lui est attribué additionné à l'intensité et au rythme du « geste dessinant ». Ce geste largement exploité par MATISSE. Ce dessin change de statut, il n'est pas une esquisse préparatoire mais une production autonome affirmée malgré l'apparente simplicité et la prédominance du support.
Le dessin s'est libéré avec l'invention de nouveaux supports et de nouvelles techniques au début du XXème: collages cubistes, frottages (cf. Max ERNST), cadavres exquis des surréalistes. A partir de la seconde moitié du XXème siècle jusqu'à nos jours, il s'enrichit par de multiples inventions (dessin dans l'espace, lumière, projections,...)
 

Pour aller plus loin


  • DAMISCH Hubert, Traiter du trait, édition Réunion des Musées Nationaux, 1995
  • LEYMARIE Jean, MONNIER Geneviève, ROSE Bernice, Histoire d'un Art : Le dessin, édition Skira, Genève, 1979.

 
Cette fiche a été conçue par les professeurs d'arts plastiques chargés de mission. D'autres fiches CHAARP sur le dessin ou sur d'autres thématiques sont consultables sur le site académique et dans les structures culturelles suivantes : Frac des Pays de La Loire, Musée des Beaux-Arts d'Angers, Musée des Beaux-Arts de Nantes, Musée de l'Abbaye Sainte-Croix des Sables d'Olonne.
 
auteur(s) :

virginie michel, chargée de mission au MBA de Nantes

information(s) pédagogique(s)

niveau : tous niveaux

type pédagogique : préparation pédagogique

public visé : enseignant

contexte d'usage :

référence aux programmes :

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documents complémentaires

dossier d'accompagnement de l'exposition - Trésors cachés du cabinet d'arts graphiques - Chapelle de l'Oratoire - du 10 février au 29 avril 2012.

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