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Clémi

Renvoyé Spécial 2020

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Renvoyé Spécial est une opération organisée au niveau national par le CLEMI et la Maison des Journalistes, depuis 2006. L’objectif principal est de sensibiliser les lycéens à la liberté d’expression et à la liberté de la presse par la rencontre avec un.e journaliste réfugié.e politique en France. Seuls deux lycées sont retenus par académie, chaque année.



Sakher Edris, un journaliste syrien réfugié à la rencontre des lycéens saumurois

Sakher Edris, journaliste syrien réfugié en France depuis plusieurs années, est venu mardi 30 mars 2021 au lycée Duplessis-Mornay, afin de rencontrer et d’échanger en anglais avec les élèves de Terminale dans le cadre de l’opération “Renvoyé Spécial” (opération nationale coordonnée par le Clémi et la Maison des journalistes).

Malgré les reports et déconvenues liés à la crise sanitaire, cette rencontre a pu finalement se dérouler comme prévu ; ce qui fut une chance pour ces élèves ayant choisi l’option HGGSP : Histoire-Géographie Géopolitique Sciences Politiques.
En effet, après avoir étudié durant l’année les conflits au Moyen-Orient et le journalisme de guerre, ces échanges avec Sakher Edris ont permis une prise de conscience plus concrète de la situation en Syrie et des risques encourus par les journalistes qui osent défier le régime.

Fils et neveu d’opposants politiques, Sakher Edris n’avait qu’un an lorsque ces derniers furent arrêtés sur les ordres de Hafez Al-Assad. Un autre frère de son père fut aussi arrêté quelque temps après. Malgré les menaces pesant constamment sur sa famille, c’est pourtant la même voie que Sakher Edris décida d’emprunter, en enquêtant et en dénonçant les exactions du régime via son métier de journaliste.
Après avoir dû quitter la Syrie pour Dubaï, où il a travaillé plusieurs années pour des médias connus, Sakher Edris s’est vu refuser un nouveau visa car il avait trop critiqué le manque de liberté de la presse et la situation dans son pays, désormais contrôlé par Bachar Al-Assad.

Il avait également été arrêté à l’aéroport jordanien, et avait réalisé un reportage d’investigation sur une université fantôme en Turquie… l’université est désormais fermée mais l’article a dérangé en haut lieu.
Sakher Edris a alors décidé de partir se réfugier en France et a été accueilli un moment par la Maison des journalistes, à Paris.
Il fait partie de l’association des Journalistes Syriens, travaille pour RSF (Reporters sans frontière), et reste plus que jamais un journaliste activiste.

Lors de l’échange, les élèves lui ont posé de nombreuses questions en anglais, sur la situation géopolitique, sur le métier de journaliste et les risques qu’il comportait, ou encore sur la manière dont il envisageait l’avenir de son pays.
L’une des questions a porté sur la capacité d’un journaliste à avoir une opinion objective lorsqu’il rédige un article. Sakher Edris a répondu que, même si le journaliste choisit un angle d’attaque et réoriente donc son texte, il doit rester professionnel et dénoncer si cela est nécessaire, même s’il risque d’être arrêté, torturé… ou assassiné.
Plus de 400 journalistes ont été tués en Syrie, à ce jour.

Caroline MALVILLE
Référente académique “Renvoyé Spécial” pour le Clémi


Rencontre avec des élèves de seconde du Lycée Raphaël Elizé, à Sablé-sur-Sarthe

Thelma nous avait prévenus : elle est bavarde. Cela se confirme rapidement, dès les premiers contacts. Mais il y a tellement à raconter qu’on ne peut lui en vouloir.

Transmettre sa passion pour le journalisme malgré les épreuves, les arrestations, les menaces… jusqu’à l’exil, loin de la chaleur et du soleil de son Zimbabwe natal.

Thelma CHIKWANHA a voulu devenir journaliste dès l’âge de 12 ans. Pour cela, elle a étudié la géographie, l’histoire et l’économie à l’université ; avant d’obtenir un poste dans un célèbre journal de son pays, The Daily News.

Thelma se fait rapidement un nom et grimpe les échelons au sein du média, réalise même des collaborations avec des médias européens (France, Suède, Angleterre), tout va pour le mieux… si ce n’est que son pays est en train de basculer. Basculer de la démocratie à la dictature, parce que celui qui est à la tête du pouvoir ne veut plus le lâcher, quitte à employer les pires méthodes pour cela.

Thelma enquête et veut rendre compte de ce qui se passe, y compris lors des manifestations de l’opposition. Elle rédige également des papiers sur le chef d’Etat et sa femme. Or, pour Robert Mugabe et ses proches, la liberté d’expression et de la presse doit désormais se réduire aux quelques organes officiels qui véhiculent leur parole… une chaîne de TV contrôlée par l’État ou encore une radio propriété d’un ministre…

Thelma Chikwanha et tous les autres journalistes du Daily News sont arrêtés et jetés en prison, la plupart d’entre eux sont torturés. Leur journal restera fermé pendant sept ans, et ses machines de presse seront brûlées dans une explosion à la bombe.

À sa sortie de prison, Thelma reprend son métier de journaliste et décide de poursuivre son travail à visage découvert, malgré le danger et la peur. Elle s’appuie sur un réseau de personnes et de lecteurs qui suivaient ses articles et qui la préviennent lorsqu’elle sur le point de se faire arrêter. Comme Thelma le précisera par la suite aux lycéens, sa voiture est toujours garée dans le sens de la marche et elle n’emprunte jamais les entrées ou sorties principales… cela lui sauvera la vie plusieurs fois.

En 2018, l’armée finit par passer du côté des manifestants et la famille Mugabe doit quitter le pouvoir. Des élections ont eu lieu. Mais la situation ne s’est guère améliorée…

Thelma, elle, est déjà partie. Elle a fini par s’exiler, craignant trop pour sa vie et celle de ses proches. Dans son pays, elle avait pris la précaution d’aller se faire établir un visa à l’ambassade française. Elle migrera en Suède puis sera redirigée vers la France pour cette raison.

Les débuts en France sont très difficiles. Seule, sans argent ni abri, aucune aide ne lui est proposée à son arrivée. Elle ne parle pas français. Ses diplômes ne sont pas reconnus, ni son métier.
Aujourd’hui, trois ans après, elle renaît. La Maison des Journalistes l’a accueillie. Elle aime la nourriture, le bon vin et le fromage français… Elle a repris des études informatiques, pour trouver du travail comme webdevelopper ou data analyst. Et Thelma rédige en parallèle un livre sur le clan Mugabe.

Les lycéens de Raphaël Elizé, qui l’ont rencontré, ont été nombreux à livrer les mêmes impressions sur leurs fiches de restitution : bluffés par sa détermination à informer malgré les menaces et la peur, solidaires et l’encourageant à poursuivre dans cette voie malgré les épreuves, et souhaitant que le combat pour la liberté de la presse se poursuive dans la monde face à de telles situations.

Le pari est réussi, la rencontre aussi. Ces lycéens sarthois ont pris conscience de ce qui se passait ailleurs dans le monde et de l’importance d’informer en toute liberté ; ce qui est l’un des principaux objectifs de l’opération Renvoyé Spécial. Cette intervention complète bien le travail qu'ils effectuent durant l'année en PEM (classe à Projet d’éducation aux médias) avec leurs enseignants de Français, Histoire-Géographie et Anglais, ainsi qu'avec les professeures documentalistes.

Caroline MALVILLE
 

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