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Intelligence Artificielle et Éducation Musicale
mis à jour le 11/07/2023
Un programme de création mélodique basé sur une IA, et plusieurs pistes d'exploitation en classe.
mots clés :
intelligence artificielle, ia, scratch, gpt, markov
Introduction
Très largement médiatisés depuis la démocratisation de plateformes telles que Chat GPT (génération de texte), Dall-E (invention de visuels) ou encore Aiva (création musicale), les systèmes d'intelligence artificielle ne cessent de gagner tant en efficacité qu'en qualité du rendu final.
Or, ces outils reposent sur la collecte et l'analyse d'une immense quantité de données et de fait, le processus de création restera opaque pour ses utilisateurs.
Afin de pouvoir aborder des questions autour de l'intelligence artificielle générative ou plus simplement de la créativité, ce programme permet d'explorer et d'expérimenter la création musicale à partir de modèles musicaux simples.
Lien du projet :
scratch.mit.edu/projects/894558214
Utilisation
Au milieu de l'écran, plusieurs séquences musicales préenregistrées permettent de sélectionner un modèle, à partir duquel l'algorithme pourra créer une nouvelle séquence mélodique.
Une fois l'oeuvre de référence choisie, il suffit de cliquer sur le bouton [
Partition originale] pour entendre celle-ci. En bas de l'écran, un curseur permet d'ajuster le tempo.
+ Le bouton
[Inventer une séquence] déclenche le processus de création, et produit une nouvelle mélodie. Le curseur
[Profondeur] adapte en temps réel le fonctionnement de l'algorithme afin d'offrir un rendu plus ou moins proche du modèle original.
À l'issue de la création d'une nouvelle mélodie, le bouton
[Réutiliser] permet d'utiliser celle-ci en tant que nouveau modèle mélodique.
La fonction
[Créer une partition] fait apparaître un clavier, sur lequel il est possible de jouer à la souris ou à l'aide de son clavier d'ordinateur. Il est possible de s'enregistrer, afin de créer un nouveau modèle mélodique personnalisé.
Enfin, la fonction [Choisir un instrument] permet de sélectionner d'autres timbres. Par défaut, le son du piano est sélectionné.
Principes de fonctionnement
Le programme repose sur un usage adapté des
chaînes de Markov, un système probabiliste appliqué ici aux hauteurs mélodiques.
Dans un premier temps, le modèle sur lequel on se base est analysé. Pour cela, on repère toutes les occurences d'une même note dans la mélodie d'origine, puis on comptabilise tous les mouvements mélodiques qui s'ensuivent.
Cela permet d'estimer la probabilité d'apparition d'une note après une autre.
L'analyse de cet exemple (Ah, vous dirai-je maman) nous permet de produire le tableau de probabilités suivant :
| Do | Ré | Mi | Fa | Sol | La |
Do | 50% | | | | 50% | |
Ré | 50% | 50% | | | | |
Mi | | 50% | 50% | | | |
Fa | | | 50% | 50% | | |
Sol | | | | 33% | 33% | 33% |
La | | | | | 50% | 50% |
Profondeur de niveau 1 (colonne de gauche)
On lit que si la dernière note entendue est un Do, il y a 50% de chances que la suivante reste un Do, et 50% de chances qu'elle soit un Sol. Une fois sur Sol, la probabilité d'arriver vers Fa, Sol ou La est cette fois de 33% dans chacun des cas. En partant de cette matrice, il est dès lors possible de générer une suite mélodique infinie.
Dans un premier temps, ce système permet de créer une mélodie dont les caractéristiques peuvent être très proches de l'originale, et ce d'autant plus que le modèle est court comme c'est ici le cas. En revanche, cette approche montre ses limites lorsqu'on utilise un modèle plus long, où le fonctionnement de type note-à-note aura bien peu de chances de correspondre à la pensée du compositeur. On peut alors rajouter une dimension supplémentaire, en fonctionnant par groupes de [x] notes et d'ainsi établir des probabilités prenant en compte une section mélodique de plus grande longueur. Avec une profondeur de deux notes, cela donnera le tableau suivant :
| Do | Ré | Mi | Fa | Sol | La |
Do-Do | | | | | 100% | |
Do-Ré | | | | | | |
Do-Mi | | | | | | |
Do-Fa | | | | | | |
Do-Sol | | | | | 100% | |
Do-La | | | | | | |
Ré-Do | | | | | | |
Ré-Ré | 100% | | | | | |
Ré-Mi | | | | | | |
etc. | | | | | | |
Profondeur de niveau 2 (colonne de gauche)
Rapidement, on observe que dans le cas d'une très courte mélodie, l'algorithme devient entièrement déterministe et n'aura pas d'autre option que de reproduire la mélodie d'origine. La profondeur de l'analyse devra donc être adaptée à chaque modèle musical.
Exemples d'usages en classe
Plusieurs situations de création, d'écoute ou de réflexion peuvent être nourries par l'utilisation de cet algorithme :
PISTES DE RÉFLEXION - Se questionner sur les seuils permettant au programme de produire différents résultats :
- Jusqu'à quand a-t-on l'impression d'un rendu aléatoire ?
- À partir de quand le programme semble-t-il inventer quelque chose de nouveau ?
- Quelle est la limite à partir de laquelle on parlera de plagiat ?
- Au-delà des limites de chacune de ces zones, existe-il un espace dans lequel l'IA peut-être considérée comme "créative" ?
- Interroger le statut du créateur, humain comme machine.
- Peut-on être créatif ?
- La création ex nihilo est-elle possible ?
- Un inventeur invente-t-il réellement ?
- Établir un lien avec la question de la propriété intellectuelle. À qui "appartient" la création d'une machine ?
PISTES DE CRÉATION
- Employer le principe des chaînes de Markov pour créer "manuellement" une nouvelle mélodie. Après avoir fait l'analyse d'une partition, l'utilisation de dés suffit à générer la part d'aléatoire nécessaire à la création.
- Transposer cette application à d'autres paramètres : rythme, intensité, timbre, texte, etc.
PISTES D'ÉCOUTE - Oeuvres musicales basées sur des processus d'aléatoires ou de probabilité : de Musikalisches Würfelspiel de Mozart à la musique stochastique du XXe
- Installation musicales et sonores interagissant avec leur environnement.
- Formes ouvertes (Archipels de Boucourechliev) ou variant selon les interprétation (In C de Terry Riley)...
Détails techniques
Le programme s'exécute dans Scratch, ce qui a l'intérêt de permettre une manipulation de l'application directement par les élèves.
En revanche, les limitations de cet environnement ne permettent pas de créer un tableau à deux dimensions issu de l'analyse d'une partition. L'oeuvre de référence est par conséquent entièrement parcourue à chaque nouvelle note, à la recherche d'une séquence mélodique correspondant à la profondeur définie. Ce processus non-optimal permet toutefois un fonctionnement plus transparent de l'algorithme, qui peut être facilement adapté ou transformé pour d'autres applications.
Dans le cas où le degré de profondeur défini ne permettrait pas de trouver une correspondance, celui-ci est provisoirement réduite jusqu'à ce qu'une suite mélodique soit trouvée. Le rendu musical du programme devient alors très naturel, et ne provoque pas d'impasses comme cela peut se produire avec un algorithme trop "rigide".
auteur(s) :
Valentin Leroux
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- Rectorat de l'Académie de Nantes