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Enzo Traverso "Le passé mode d'emploi. Histoire, mémoire, politique"

mis à jour le 23/12/2007


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Les lois dites mémorielles (lois Gayssot, Taubira) ont fait l'objet d'un vif débat public. Aussi dans le cadre de la préparation du cours de terminales L /Es sur " Les mémoires : lecture historique", je me suis intéressé à ce livre d'Ernesto Traverso : "Le passé mode d'emploi"  publié en 2005 aux éditions La Fabrique.

mots clés : mémoire, passé



L'auteur est reconnu, il a publié notamment, Les marxistes et la question juive , La Brèche-PEC, Montreuil 1990 ; Les Juifs et l'Allemagne, de la "symbiose judéo-allemande" à la mémoire d'Auschwitz , La Découverte, Paris 1992 ; L'Histoire déchirée, essai sur Auschwitz et les intellectuels , Editions du Cerf, Paris 1997 ; Pour une critique de la barbarie moderne :écrits sur l'histoire des Juifs et l'antisémitisme , Editions Page deux (Cahiers libres), Lausanne 2000 ; Le totalitarisme : Le XX ème siècle en débat , Seuil (Points Essais), Paris 2001 ; La violence nazie, essai de géalogie historique , La Fabrique, Paris 2001 ; La pensée dispersée , Ed. Léo Scheer, Paris, 2004.

Ce livre s'ouvre sur la proposition d' Antonio Gramsci : " L' histoire est toujours contemporaine, c 'est à dire politique ".

Construit autour de six chapitres , l'ouvrage interroge le rapport entre mémoire et histoire.
" Puisque mémoire et histoire ne sont pas séparés par des barrières insurmontables mais interagissent en permanence" p63.

  • Le premier chapitre montre comment l'historien est certes redevable de la mémoire mais il contribue aussi à la former et à l'orienter. L'auteur mobilise de nombreuses références ( Paul Ricoeur, Walter Benjamin, Hegel...) et s'interroge : Histoire et mémoire : un couple antinomique? " L'histoire...qui n'est au fond qu'une partie de la mémoire s'écrit toujours au présent" p 21.
 
  • Le second chapitre intitulé " Le temps et la Force" , s'appuyant sur la distinction entre mémoires " fortes" et mémoires " faibles", analyse les processus d'historisation de certaines mémoires. " La mémoire a tendance à traverser plusieurs étapes...d'abord un événement marquant... puis une phase de refoulement....suivie tôt ou tard par une inévitable anamnèse ( le retour du refoulé) qui peut parfois virer à l'obsession mémorielle" p 43-44..
  • Plus la mémoire est " forte", plus sa mise en histoire est susceptible de se concrétiser. " La mémoire de la shoah....illustre bien ce passage d'une mémoire faible à une mémoire forte" . p 55.
  • Le troisième chapitre étudie la posture de l'historien entre juge et écrivain. Enzo Traverso évoque l'influence du " lingusitic turn", étiquette qui regroupe " un ensemble de courants intellectuels nés aux Etats-Unis vers la fin des années 1960" sur l'historiographie contemporaine. Il traite également de la tendance croissante " à une lecture judiciaire de la mémoire" et évoque les grands procès ( Barbie, Touvier, Papon...) "  moments de remémoration publique de l'histoire." p75.
    " L'historien ne doit pas s'ériger en juge, il ne peut émettre de sentences" p 77. "  Résultat d'une opération intellectuelle, l'histoire est analytique et réflexive... Elle ne se limite pas à établir des faits mais essaie de la placer dans leur contexte, de les expliquer, en formulant des hypothèses et en recherchant des causes."
  • Un quatrième chapitre s'interroge, à partir des situations contrastées de la mémoire de la Shoah comme " religion civile" et l 'éclipse de la mémoire du communisme, sur les usages politiques du passé. "Le risque n'est pas celui d'oublier la shoah, mais de faire un mauvais usage de sa mémoire." p 81.
  • Le cinquième chapitre ouvre sur les dilemmes des historiens allemands. " L'Allemagne constitue un laboratoire intéressant pour étudier l'interaction entre la mémoire du nazisme et l'écriture de l'histoire" . p 94
    Enzo Traverso revient sur les débats de ces vingt dernières années et s'interroge sur les facteurs des mutations du paysage mémoriel de l'Allemagne.
  • Le sixième chapitre étudie les métamorphoses du concept de " révisionnisme" . L 'auteur préfère ne conserver ce concept que pour la controverse soulevée par " l'ancien secrétaire d'Engels, Edouard Bernstein" au sein de la social-démocratie allemande, et signale les dérives d'un usage non contrôlé. Il s'agit certes de combattre les tendances apologétiques ( nettement perceptibles ces derni ères années ) dans l'historiographie du nazisme et du fascisme, mais sans pour autant leur opposer une vision normative de l'histoire.

La notion de conscience historique est donc au coeur de la réflexion d'Enzo Traverso : la mémoire n'est pas figée, elle se construit dans l'espace public, avec des moments d'oubli... Aujourd'hui on constate la montée en puissance de mémoires " faibles" : histoire des femmes, histoire coloniale... plusieurs mémoires interfèrent en fait et s'opposent parfois comme on le constate aujourd'hui.

A lire aussi sur un thème proche : Quand l'état se mêle de l'histoire René Rémond - Stock ed..
proposition - juin 2006
 
auteur(s) :

J. Pouzin

information(s) pédagogique(s)

niveau : tous niveaux

type pédagogique : connaissances

public visé : enseignant

contexte d'usage : espace documentaire

référence aux programmes :

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