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histoire des Juifs de France (3)

enseigner l'histoire de l'antisémitisme en Allemagne et en France,

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Deux mille ans de judaïsme en France par Philippe BOUKARA, historien et formateur au Mémorial de la Shoah. (suite et bibliographie)

De l’Affaire Dreyfus à Vichy

Vichy fait aujourd’hui écran dans la mémoire collective des Juifs de France comme dans celle de la France et empêche de percevoir le degré d’osmose auquel la France et le monde juif sont parvenus pendant un siécle entier - de 1840 à 1940, si l’on choisit justement comme première borne la date de la campagne menée par Adolphe Crémieux et son collègue britannique Moses Montefiore pour défendre leurs coreligionnaires de Damas injustement mis en cause. Les générations d’après Vichy ignorent généralement ce passé ; et ceux qui en ont connaissance invoquent généralement l’Affaire Dreyfus pour dire à quel point le tropisme français serait anti et non philosémite. Or l’Affaire Dreyfus devrait confirmer plutôt qu’infirmer l’évaluation faite de la société française : certes, les antisémites français ont lancé une violente offensive visant à remettre en cause les acquis de l’émancipation, mais leur offensive s’est soldée par une défaite au terme d’une longue bataille menée victorieusement par les dreyfusards. Après une alerte certes angoissante, les Juifs de France ont retrouvé après l’Affaire le même niveau d’excellente intégration qu’ils avaient avant elle. La meilleure preuve en est qu’en 1936, un Juif est pour la première fois à la tête du gouvernement du pays - ce qui, à ce jour, ne s’est jamais produit ni aux Etats-Unis, ni au Royaume-Uni (rappelons que Disraeli était un protestant d’origine juive). Là aussi, les antisémites français déclenchent contre Léon Blum des attaques d’une extrême violence. Mais le leader socialiste n’en continue pas moins à gouverner. A la veille de la deuxième guerre mondiale, le premier président Dreyfus est le plus haut magistrat de France, et la loi Marchandeau vient d’être votée pour réprimer l’incitation à la haine raciale. Si l’immigration juive d’Europe centrale et des Balkans s’est accélérée entre les deux guerres au point que les étrangers et les naturalisés dépassèrent en nombre la communauté autochtone, si la France a été proportionnellement le pays le plus accueillant aux réfugiés après 1933, on comprend que l’engagement volontaire des Juifs étrangers dans l’armée française ait été aussi massif en septembre 1939 qu’il l’avait été en août 1914.

Le patriotisme des israélites français et de leurs coreligionnaires étrangers s’adressait à un pays dont le rayonnement culturel et politique était mondial. La rupture unilatérale de ce lien affectif et intellectuel par le fait du régime du Maréchal Pétain a fait que rien ne sera plus comme avant : en métropole d’abord, puis plus tard en Afrique du Nord avec la décolonisation, les Juifs ont été les témoins du rétrécissement de l’horizon national. Mais cette France qui a trahi leur confiance est une France qui n’était plus elle-même, une France défaite comme jamais dans son Histoire. Pour apprécier la défaillance des élites officielles entre 1940 et 1944 - alors que l’honneur fut sauvé par un grand nombre de citoyens sans autorité - il faut mettre en perspective 1940 dans un temps long qui inclurait la première guerre mondiale, avec sa victoire si coûteuse en vie humaines et en destructions, et la dépression pacifiste qu’elle a induit, mais aussi le ralentissement démographique et la déchristianisation commencés dès le XVIIIème siècle, et au XIXème siècle l’évitement de la révolution industrielle, masqué dans ses effets par la rente prélevée sur l’empire colonial. La méditation sur les causes de la défaite de 1940 devrait être aujourd’hui au coeur de l’esprit civique. Elle permettrait de mieux comprendre à leurs sources les malaises d’un temps présent où l’antisémitisme fait parfois symptôme.
Philippe Boukara
 

Orientation bibliographique


La revue semestrielle Archives juives est spécialisée dans l’histoire des Juifs de France et est publiée sous les auspices de la Commission française des archives juives. La Revue des études juives, elle aussi semestrielle, parait depuis 1880 sous les auspices de la Société des études juives ; elle est généraliste mais consacre une large place à l’histoire des Juifs de France dans sa prestigieuse collection des éditions Peeters. Les éditions Privat ont publié une série d’ouvrages de référence dans leur collection Franco Judaica jadis dirigée par Bernard Blumenkrantz. Facilement accessible est la collection de poche Présences du judaïsme des éditions Albin Michel, dans laquelle on trouvera, par exemple, Rashi de Troyes de Simon Schwartzfuchs et La polémique chrétienne contre le judaïsme au Moyen-Age par Gilbert Dahan. Les travaux de Gérard Nahon font autorité sur les communautés de Bordeaux et Bayonne, et ceux de Dominique Jarrassé sur l’histoire des synagogues françaises modernes.

On renverra finalement à la bibliothèque de l’Alliance israélite universelle (45 rue La Bruyère 75009 Paris) et pour ce qui concerne l’immigration d’Europe centrale, à la bibliotèque Medem - Maison de la culture yiddish (18 passage Saint-Pierre Amelot 75011 Paris), qui appartiennent toutes deux au réseau Rachel des bibliothèques juives de recherche dont le catalogue est accessible en ligne.  

Histoire des Juifs de France - orientation bibliographique

On recommandera la revue semestrielle Archives juives, spécialisée dans l’histoire des Juifs de France, publiée aux Belles Lettres par la Commission française des archives juives (dont le site Internet est également à recommander).
Un DVD-CD Rom dirigé par Béatrice Philippe : Histoire des Juifs de France, Mindscape, 2006.
Dans la collection de poche Présences du judaïsme, chez Albin Michel :
  • Simon Schwarzfuchs : Rachi de Troyes, 1991
  • Danièle Iancu : Être juif en Provence au temps du roi René, 1998
  • René Moulinas : Les Juifs du Pape, 1998.

Gérard Nahon : Juifs et judaïsme à Bordeaux, Nollat, Bordeaux, 20003.
Collectif : Le judaïsme alsacien - histoire, patrimoine, traditions, La Nuée bleue, Strasbourg, 1999.
Henry Schumann : Mémoire des communautés juives de Moselle, Serpenoise, Metz, 1999
Mémoire des communautés juives de Meurthe et Moselle, de la Meuse et des Vosges, Serpenoise, Metz, 2003
Mémoire des communautés juives de Champagne-Ardennes, henryschumann.com, 2005.
Sylvain Klein : La maison sublime - le monument juif de Rouen, Points de vue, 2006.
Roger Berg : Histoire du rabbinat français, Cerf, 1992
Histoire des Juifs de Paris, Cerf, 1997.
Dominique Jarrassé : Histoire des synagogues françaises - entre Orient et Occident, Actes Sud, 1997.
L’âge d’or des synagogues, Herscher, 1991
Guide du patrimoine juif parisien, Parigramme, 2004.
Mireille Hadas-Lebel et Evelyne Oliel-Grausz (dir.) : Les Juifs et la Révolution française - histoire et mentalités, E.Peeters, Louvain - Paris, 1992.
Berrnard Blumenkrantz et Albert Soboul (dir.) : Le Grand Sanhédrin de Napoléon, Privat, Toulouse, 1979.
Michael Graetz : Les Juifs en France au XIXème siècle, Seuil, 1989.
Perrine Simon-Nahum : La cité investie - la Science du judaïsme français et la République, Cerf, 1991.
Philippe Landau : Les Juifs de France et la Grande Guerre - un patriotisme républicain, CNRS Editions, 1999.

les illustrations de l'article proviennent de la BnF-Gallica,
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