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des liens multiformes entre écoles et collège

mis à jour le 09/10/2013


echanger dossier 6

Depuis plusieurs années, environ deux cents élèves participent à un prix du roman en CM2 et en 6e. Au-delà de la volonté affirmée d'inviter à la découverte du plaisir de lire, c'est un véritable réseau d'échanges de pratiques qui s'est peu à peu installé entre enseignants du primaire et du collège.

mots clés : échanger, réseau pédagogique, lecture, compétences, mutualisation


ierre-Norange est un collège Éclair (École, collège, lycée de l'Ambition, de l'innovation et de la réussite) et les écoles situées aux alentours font partie du réseau d'éducation prioritaire. Les constats faits par l'ensemble des enseignants sont malheureusement classiques : le livre franchit difficilement les portes du foyer, les élèves ont de grandes difficultés à maîtriser la langue française qui n'est pas toujours leur langue maternelle, et l'acquisition du vocabulaire reste très limitée. Cela entrave lourdement l'acquisition de savoirs scolaires. En 2003, un projet voit le jour : "Le prix du Roman". D'abord expérimenté sous la forme du "prix des Incorruptibles", le choix a été fait de lui donner la forme d'un prix littéraire de réseau. En effet, en choisissant eux-mêmes la sélection, les organisateurs remarquent que celle-ci est beaucoup plus adaptée aux élèves. Cela favorise la lecture et les échanges avec les différents intervenants. De plus, le travail de présélection indispensable est remarquablement réalisé par les bibliothécaires, qui trouvent souvent de véritables petits bijoux. Le groupe de travail est composé, pour le collège, de Nadine Allaire, professeure de français et professeure référente Ambition réussite jusqu'en 2009 ; de Guylaine Miottini, professeure-documentaliste, pour les écoles du réseau d'enseignants de CM2, dont J.-L. Allain ; de la secrétaire du réseau Françoise Goujon, des deux conseillères pédagogiques Mmes Thibaut et Robin-Poignard, et pour la ville, de la coordonnatrice de la médiathèque Étienne-Caux ainsi que de bibliothécaires. C'est cette équipe qui fera la sélection définitive parmi la présélection. L'objectif du prix est de faire lire les élèves en mettant en commun les techniques connues par chaque professionnel. De rencontre en rencontre, le lien créé autour du projet s'enrichit des échanges spontanés et ouvre de nouveaux horizons aussi aux enseignants!

École, collège, médiathèque...

Le principe est fréquemment exploité à l'école : à partir de propositions de lecture faites par les enseignants, les élèves lisent un certain nombre de récits puis votent afin d'élire le meilleur roman de l'année. Le "prix du Roman" présente six fictions, et reprend la ligne du "prix des Incorruptibles" qui, auparavant, était proposé aux classes de CM2 et de 6e qui désormais participent à ce prix revu et corrigé. Chaque établissement participant doit faire l'acquisition des six romans en plusieurs exemplaires et c'est déjà le premier obstacle à lever. À Saint-Nazaire, le conseil général et la municipalité ont pris en charge à tour de rôle le financement du prix. Ensuite, il s'agit d'organiser un déroulement tel que les trois écoles et le collège concernés puissent tous venir successivement à la bibliothèque Anne-Franck située dans le quartier et lieu de lancement du prix. Il faut aussi que chaque école planifie ses activités et que mi-mai tout le monde soit prêt pour la grande journée (rallye et vote) qui se passe au collège. Autour des lectures faites tout au long de l'année, c'est une rencontre animée et joyeuse qui prépare aussi l'arrivée au collège des cent quarante élèves de CM2. Entre-temps chaque adulte impliqué dans le projet a mis en place les activités intermédiaires qui rythment l'année, suscitent des découvertes, des échanges et (r)éveillent l'intérêt des faibles lecteurs. À l'école comme au collège, cela peut être un temps hebdomadaire ou ponctuel qui sera consacré au "prix du Roman" : échanges des livres, discussion à partir des réactions exprimées, lecture à voix haute d'un passage par le professeur ou par un élève, temps de lecture individuelle de dix à quinze minutes...



Le prix, c'est parti !

Si ce prix a été conçu dans le cadre de la liaison CM2/6e, il n'en reste pas moins que le rôle de la bibliothèque municipale s'avère essentiel. D'une manière générale parce qu'il faut une volonté politique pour soutenir le projet et, en particulier, du fait de la place prise par la bibliothèque du quartier. En effet, les bibliothécaires apportent un autre regard professionnel et savent emprunter encore d'autres chemins pour favoriser la lecture. Pour chaque établissement, le lancement du prix a donc lieu lors d'une séance à la bibliothèque Anne-Franck. Première visite pour un grand nombre d'élèves dans ce lieu très proche géographiquement (entre les immeubles, les écoles, la piscine, le petit centre commercial), mais le plus souvent très éloigné de leurs pratiques culturelles. Un demi-groupe participe à une activité de découverte des techniques classiques de classement afin que chacun soit un peu plus à l'aise lors de la prochaine visite. L'autre groupe découvre la sélection du prix par différentes activités dont l'exercice de mise en réseau (voir annexe). Des livres sont rassemblés par la bibliothécaire qui demande aux élèves de les classer. Excellente occasion pour l'enseignant présent d'observer ce qui fait ou ne fait pas sens pour ses élèves. Ainsi, les élèves qui ont déjà des repères en tant que lecteurs proposent rapidement d'associer par genre romanesque. Mais pour d'autres, c'est lorsque des étiquettes de mots seront ajoutées pour les aider qu'ils penseront à créer une association entre "manoir" et "trésor", par exemple. Même si, d'ailleurs, la bibliothécaire en profitera pour leur montrer des contre-exemples : une couverture de livre représentant un manoir alors qu'il n'y pas du tout d'histoire de trésor dans le récit... À l'école, au collège, à la médiathèque, le livre est le support de bien des apprentissages.

Des temps forts pour les élèves

Que ce soit en CM2 ou en 6e, les professeurs sont bien d'accord, il faut parvenir à rendre l'écrit "envisageable". Que des élèves qui n'ont aucune habitude de lecture personnelle, et bien du mal à faire les lectures scolaires, puissent apprivoiser l'objet livre et ses lieux de diffusion est un objectif majeur dans la lutte contre les inégalités sociales. Cela passe par des temps de sociabilisation grâce au partage des lectures ou par l'expression orale sollicitée lors de débats organisés à partir des thèmes universels traités dans les romans. Cela passe aussi par la variété des activités articulant lecture et écriture sous forme de jeux, de questions, de la tenue du carnet de lecteur. D'autres moments contribuent aussi largement à la réalisation du but poursuivi, entre autres la rencontre avec un auteur ou un illustrateur. Passer un moment avec un créateur et échanger avec lui sur son travail (c'est toujours l'auteur ou l'illustrateur d'un des romans en compétition) permet aux élèves de réaliser qu'il y a bien un être de chair et de sang derrière tous ces mots ou ces dessins, que cet être a des désirs, des frustrations, aussi, que chacun a sa manière de s'exprimer, qu'eux peuvent aussi essayer. Écrire, illustrer, deux verbes qui prennent un sens différent après cette rencontre vécue par tous.

Des échanges entre élèves et entre professionnels

Jusqu'à la rentrée 2011, grâce à une dotation horaire spécifique, Nadine Allaire professeure-référente Ambition réussite, se rendait sur les différentes écoles pour animer avec les enseignants des classes de CM2 des activités autour de la lecture et de l'écriture. C'était aussi une façon de venir à la rencontre des élèves qui iraient au collège l'année suivante et de commencer à créer des liens. Les différentes séances d'ateliers CM2/6e étaient à chaque fois conçues par les deux enseignants ; le lexique était souvent au cœur de l'activité, mais pas seulement, car la dimension d'ouverture est capitale. Le livre est un médiateur formidable pour découvrir le monde. La séance pouvait être essentiellement orale à partir de la couverture d'un des livres, ou bien s'appuyer sur le thème particulier d'un des romans. Ainsi un récit, dont l'un des thèmes était l'art, a pu donner lieu à une séance de découverte virtuelle de la galerie du Louvre pendant l'un des ateliers du rallye lecture. En 2011-2012, En noir et or a permis la visite de sites pédagogiques sur les Gaulois. Celui de la Cité des sciences, par exemple, présente un travail sur la toponymie, abordable et attractif pour tous les élèves. Les collègues de primaire ont alors été invités par N. Allaire à venir, avec leurs élèves, découvrir le site et participer au quiz dans la salle multimédia du collège. C'est une manière d'amener en douceur les élèves vers leur futur établissement. C'est aussi une autre occasion de mutualisation de pratiques. Dans le premier degré, de nombreux travaux de recherche ont permis de varier les approches et il est enrichissant pour tout le monde de les partager. Grâce à ce prix, auquel la professeure-documentaliste collabore activement, elle a, elle aussi, pu tisser des liens avec l'école : échanges avec un des enseignants de primaire autour du lien entre la BCD et le CDI pour la classification et la signalétique, découverte du CDI par les élèves de CM2 lors du rallye lecture... Des liens devenus réguliers également avec les bibliothécaires du secteur avec, par exemple, l'accueil d'une exposition de travaux d'élèves à la bibliothèque Anne-Frank, après la sortie d'un recueil de poésie créé par les 4e Segpa.
 

Des temps forts pour les adultes

De toute évidence, ce "prix du Roman" n'a pas comme seule finalité de réunir des élèves de CM2 et de 6e lors de la grande journée rallye de fin d'année. Même si elle a son importance, cette seule journée ne saurait témoigner de la richesse de ce travail. Mené par plusieurs personnes qui, depuis le début, surmontent, en gardant courage, les différents obstacles, ce projet réunit plusieurs fois par an une dizaine de professionnels. L'un des moments les plus riches en apprentissage pour J.-L. Allain, l'un des enseignants de l'école élémentaire, est la réunion de choix des livres. Présent dès le début du prix, il a pu se forger une expérience qui nourrit sa réflexion sur la sélection à proposer. Les succès ne sont pas toujours ceux que l'on imaginait, les élèves voient venir les adultes, avec leurs thèmes de prédilection (le deuil, les problèmes sociaux...) ou inversement avec des lectures trop faciles qui ne font pas sens. Parfois aussi, le professeur est séduit par une histoire qui sort de l'ordinaire, dont la forme est assez inclassable. L'enseignant a appris à se méfier de ces "livres Ovni" comme il les nomme. Ceux-là, par leur genre non identifiable, déroutent encore plus les faibles lecteurs qui, malgré tout, se sont construit quelques repères, ne serait-ce que par les films qu'ils voient. Le regard que l'enseignant a pu porter, au fil des années, sur les discussions animées et argumentées pour le choix des livres et la réception de ceux-ci par les lecteurs lui a appris beaucoup de choses. Même si J.-L. Allain insiste bien sur le fait que c'est loin d'être une science exacte, on peut être assez confiant lorsque le roman propose une histoire un peu "résistante", que le vocabulaire est riche sans être trop complexe et qu'il y a quelques caractéristiques d'un genre repérable par la plupart des élèves.

Des temps forts qui s'inscrivent dans le temps

Les trois ou quatre réunions sont réparties sur l'année pour l'organisation et le lancement du prix, la venue d'un auteur ou d'un illustrateur et pour la mise en œuvre de la journée rallye/vote. Il s'agit bien sûr, avant tout, de se mettre d'accord sur le déroulement du "prix du Roman", mais l'équipe, qui se renouvelle régulièrement autour de quelques piliers, prend plaisir à échanger. Bien plus facilement que dans des assemblées plus nombreuses, la parole se libère et chacun raconte aisément ce qu'il a expérimenté dans sa classe, ce qu'il a observé. En s'écoutant ainsi, en échangeant sereinement, les enseignants du premier degré et du second degré disent avoir énormément appris sur les pratiques respectives de chacun, mais aussi sur les approches différentes en primaire et au collège. D'autres projets se sont développés, comme le rallye mathématique, par exemple. Des projets toujours propices à une meilleure connaissance des pratiques et des programmes. Les enseignants ne sont pas les seuls à ressentir les effets de ce fil rouge. Depuis trois ans, des élèves de CM1 participent également au projet. Lorsqu'ils arrivent en 6e, ils connaissent donc bien et le principe et l'enseignante qui est venue plusieurs fois dans leur école. Pas d'effet de surprise, donc, mais pas de lassitude non plus. Les élèves de 6e sont nombreux à retourner voir leur enseignant de primaire et à se réjouir de le retrouver à l'occasion de ce prix. Ils sont aussi plus à l'aise au collège où ils retrouvent celle qui a participé aux ateliers et la professeure-documentaliste qu'ils ont aussi rencontrée. Ils connaissent déjà un certain nombre d'attentes, il leur est moins aisé d'user des stratégies d'évitement habituelles en affirmant qu'ils ne comprennent rien à la consigne ou que jamais ils n'ont fait tel ou tel type d'activité. Si les difficultés restent de taille, si quelques-uns seulement ont véritablement découvert le plaisir de la lecture, tous ont pratiqué de manière récurrente et diversifiée des activités de lecture et d'écriture sans pour autant cantonner le livre à un objet scolaire.

Un réseau pédagogique

À l'origine, c'est la volonté de tisser des liens entre l'école et le collège qui a institué les réunions de liaisons. Dans certains secteurs, comme celui du collège Pierre-Norange, les difficultés des élèves sont telles qu'il est indispensable de favoriser des passerelles avec l'école primaire. L'objectif est alors de prolonger des pratiques, de donner plus de cohérence aux activités afin d'aider les élèves à franchir les étapes. Ainsi, J.-L. Allain, l'enseignant de l'école Escurat devenue depuis l'école A.-Chedid, pratique régulièrement l'Atelier de questionnement 1 issu des préconisations du Roll 2. À présent, cet atelier a aussi trouvé sa place au collège Norange dans les classes de sixième. C'est également grâce à ce lien permanent avec l'école que Nadine Allaire s'est intéressée aux Maclé 3 (Module d'approfondissement des compétences en lecture-écriture), découverts en lisant le livre d'André Ouzoulias. Ensuite, en discutant avec les conseillères pédagogiques, et avec l'aval de leurs supérieurs respectifs, un stage de liaison école-collège sur les Maclé a été mis en place. Ainsi l'enseignante, aidée de ses collègues, a pu les instituer pendant plusieurs années au collège (voir annexe). Il est réellement indispensable de favoriser la continuité des apprentissages, en particulier pour la maîtrise de la langue. Le travail par compétence, l'évaluation et la remédiation trouvent donc également leur place dans cette mutualisation. Les échanges, l'observation des pratiques des uns et des autres permettent une harmonisation naturelle. Et c'est bien le travail en réseau qui peut favoriser cela : s'approprier des dispositifs et les adapter pour donner du sens aux activités en les inscrivant dans un parcours logique et sécurisant de la maternelle à la 3e. Depuis la rentrée 2012, le Conseil pédagogique de réseau, lieu d'échanges interdegré sur les pratiques pédagogiques, permet d'harmoniser les constats et pratiques. Le travail commun doit se renouveler en permanence, les résultats ne sont pas toujours probants, mais les projets et énergies résistent et donnent néanmoins souvent de petites victoires. Ainsi lorsque Nadine Allaire se rend à la bibliothèque un mercredi après-midi et qu'elle y aperçoit un de ses élèves confortablement installé dans un fauteuil avec un livre à la main, c'est une bouffée d'espoir pour tous ceux qui participent à ce réseau pédagogique.


1. Après avoir lu un texte, chaque élève du groupe constitué pour l'atelier indique ce qu'il a compris à partir des éléments essentiels (qui, quand, quoi, où, comment, pourquoi). Sans le texte sous les yeux, les élèves discutent et confrontent les éléments explicites et implicites avant de retourner vers le texte pour trier le vrai du faux et construire les interprétations possibles du texte.
2. Extrait de la charte : "L'action du ROLL vise à prévenir l'illettrisme en développant une pédagogie de la compréhension alliant respect de l'auteur et interprétation du lecteur, et dans cette perspective, accorde autant d'importance à la maîtrise des mécanismes du code linguistique (graphophonologiques, syntaxiques et lexicaux) qu'à l'acquisition d'une vraie culture de l'écrit." http://www.roll-descartes.net/fr/accueil.php
3. Il s'agit d'un décloisonnement massif et concentré dans le temps afin de répondre aux besoins des élèves les moins avancés en lecture-écriture. http://www.cndp.fr/bienlire/04-media/a-interview24.asp
 
auteur(s) :

M. Blin

contributeur(s) :

N. Allaire, G. Miottini, J.-L. Allain, Collège Pierre-Norange, Saint-Nazaire [44]

fichier joint

information(s) technique(s) : pdf

taille : 576 ko ;

ressource(s) principale(s)

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