Enseignement du français au Lycée Professionnel

Ecrire une fable à partir d'un conte : Le Diable et le Moine, Victor Hugo 

 Auteur : A. Malle

Sommaire
présentation de la séquence
texte du conte de Victor Hugo (page web)
texte du conte de Victor Hugo (fichier .rtf)
résumé du conte
versification
exercice - variante 1
exercice -  variante 2
fable complète

 

 

Tâche : écrire une fable à partir d’une nouvelle (en fait, un conte).

Objectifs :

- connaître les caractéristiques respectives du conte et de la fable

- expérimenter dans l’écriture un changement de code pour s’approprier :

les contraintes linguistiques liées à la versification

les caractéristiques de la fable en tant que genre littéraire


texte support :

LE DIABLE ET LE MOINE, Victor Hugo, in Le Rhin, 1842.

Texte figurant dans le recueil "Lectures XVIIIe-XIXe-XXe - BEP" - p. 98-101

Auteurs du recueil : Christian De Marez et Denielle Gionifei

Editeur : Nathan

Le recueil est constitué essentiellement de nouvelles. Chacune de celles-ci est accompagnée d’axes d’étude (questionnement / élève), d’une page "Recherche" (lecture documentaire en rapport avec la nouvelle, son thème, son auteur...) et d’une double page "Groupement de textes".

 

Procédure adoptée :

Travail préalable de l’élève :

- lecture personnelle de la nouvelle

- réponses aux questions de la page 102

- Consigne supplémentaire : rédiger un résumé d’environ 200 mots en utilisant les temps du passé.

Première séance en classe (1 heure) :

- correction des questions

- présentation du projet "écrire une fable"

- organisation de groupes de 4 élèves qui réalisent un résumé unique à partir de leurs versions respectives

Deuxième séance en classe (1 ou 2 h) : travail / groupe

- découper le résumé en "séquences" à partir du critère formel : une séquence doit comporter entre 6 et 15 syllabes

- écrire le résumé sous la forme : une séquence / ligne

- entreprendre le travail de versification proprement dite

Ressources à mettre à la disposition des élèves : dictionnaire, dictionnaire des synonymes, dictionnaire de rimes.

Troisième séance en classe (1 h) : lecture des différentes productions. Appréciations.

Variantes :  séance unique. Si la versification paraît au-delà des possibilités des élèves, ou si l’on estime que cela sera trop long, proposer un exercice de "mise en vers", soit par modifications (variante 1) soit par simple découpage (variante 2)

 

 

 

 

Résumé du conte.(exemple)

Les bourgeois d’Aix-la-Chapelle construisaient une église. L’argent manqua pour achever l’édifice. Un inconnu survint, proposant un million d'or. C’était le diable, car, en échange, il réclama une âme quelconque, la première qui entrerait dans l’église, le jour où les cloches en sonneraient la dédicace.

D’abord effrayés les bourgeois se rendirent aux raisons d’Urian, disant qu’une âme de hasard valait bien une église. Les sénateurs avaient juré de garder le secret, et chacun s’empressa de le trahir en racontant la chose à sa femme. Chacune eut tôt fait de la faire savoir partout, si bien que l’église achevée, personne ne voulut y entrer.

On consulta en vain les sénateurs, l'évêque, les chanoines. Ce fut un moine qui tira la ville d’embarras, en proposant de faire entrer un loup pris vivant le matin même. On déposa sa cage devant le portail, les portes furent ouvertes en même temps. L’animal se crut libre et se rua dans l’église se jetant dans la gueule du diable. Quand celui ci sentit qu’il avalait un loup, il poussa un rugissement épouvantable et donna dans la porte un coup de pied formidable qui la fendit du haut en bas.

On dit le diable Malin , mais à malin, malin et demi...

 

 

 

Découpage en séquences. Début de versification. (exemple). Découpage en séquences. Modifications lexicales. Recherche de rimes. Travail sur le mètre.

 

Les bourgeois d’Aix-la-Chapelle construisaient une église

L’argent manqua pour achever l’édifice

Un inconnu survint, proposant un million

On sut que c’était le diable quand en échange il réclama une âme quelconque

La première qui entrerait dans l’église

Le jour où les cloches en sonneraient la dédicace.

D’abord effrayés les bourgeois se rendirent aux raisons d’Urian

Disant qu’une âme de hasard valait bien une église

Nos sénateurs avaient juré de garder le secret

Et chacun s’empressa de le trahir en contant la chose à sa femme

Chacune eut tôt fait de la faire partout savoir

Si bien que l’église achevée

Personne ne voulut y entrer

Sénateurs, évêque, chanoines furent en vain consultés

Ce fut un moine qui tira la ville d’embarras

En proposant de faire entrer un loup

Pris vivant le matin même

On déposa sa cage devant le portail

Les portes ouvertes en même temps

L’animal se crut libre et se rua dans l’église

Se jetant dans la gueule du diable

Quand celui ci sentit qu’il avalait un loup

Il poussa un rugissement épouvantable

Et donna dans la porte un coup de pied formidable

Qui la fendit du haut en bas.

On dit le diable Malin

C’est un des noms qu’on lui donne

A malin, malin et demi

Et le plus malin des deux peut être un saint homme.

 


 

 

 

Exercice de mise en vers. Variante 1 : modifications lexicales

Consigne : les vers de la fable ci-dessous ne sont pas tout à fait au point. Modifiez les parties soulignées en vous aidant des indices donnés entre parenthèses, dans le but d'obtenir les rimes et les mètres souhaités. Le principe est de rechercher la rime avec un vers non modifié.

 

Le Diable et le Moine

 Des bourgeois construisaient une coûteuse église.

L’argent manqua pour achever cette entreprise.

Survint un grand seigneur et il se présenta (mode verbal en "ant")

Sous le nom d’Urian.

Il offre un million d’or : le don est généreux (adj. en "-able").

On apprit que c’était le diable

Quand en échange il voulut (V. du 1er groupe, passé simple en "a")

Une âme quelconque, non pas celle d’un prélat,

Mais la première qui entrerait dans l’église.

Où était le piège ? (Nom synonyme en "ise")

Tout d’abord effrayés, les bourgeois, hésitant,

Se rendirent aux raisons du seigneur (à remplacer par son nom)

Disant qu’une âme de hasard en sacrifice

Valait bien le saint bâtiment. (remplacer par un synonyme en "ice")

Nos sénateurs avaient promis (remplacer par un V. du 1er gr.)

De garder le secret muré :

Chacun s’empressa de médire

En contant la chose à son épouse (remplacer par un nom qui rime avec...)

Le secret n’est pas le fort de ces dames.

Chacune eut tôt fait de le répéter (remplacer par un V. du 3ème gr.)

Si bien que l’église construite (V. du 1er gr.)

Nulle âme ne voulut y faire son entrée.

 

Chanoines, sénateurs, évêque, (modifier l’ordre de l’énumération)

Furent en vain consultés : aucun ne trouva.

Or, qui tira la ville de l’impasse ? (remplacer par un nom en "a)

Ce fut un simple moine.

Un loup qu’on avait pris vivant le matin (ajouter un adv. pour la rime en "ème")

Serait, dit-il, la solution du stratagème.

Devant le saint portail on déposa sa cage.

Toutes les portes étant ouvertes, (ajouter un complément de temps)

L’animal se vit libre et crut prendre le large,

Se jetant dans la gueule infâme du diable. (remplacer par son nom)

Quand le diable sentit qu’il avalait un loup

Il fit un bruit épouvantable (remplacer bruit par un nom en "a" et le mettre à la fin)

Et donna dans la porte un coup formidable (modifier l’ordre)

Qui la fendit du haut en bas.

Le portail en porte toujours... (ajouter un nom)

Souvenir du jour de la dédicace.

 

Le diable est malin, on le dit.

Malin est un nom qu’on lui donne. (utiliser le V. nommer)

A malin, malin et demi

Et le plus malin des deux peut être un saint homme.

 

 

 

 

 


 

Exercice de mise en vers. Variante 2 : rétablissement par découpage.

Consigne : rétablir la disposition en vers de la fable. Indications : le mètre peut varier (6, 9, 10 à 12 syllabes). L'alternance rimes féminines / rimes masculines est respectée.

 

Le Diable et le Moine Des bourgeois construisaient une coûteuse église. L’argent manqua pour achever cette entreprise. Survint un grand seigneur se présentant sous le nom d’Urian. Il offre un million d’or : le don est appréciable. On apprit que c’était le diable quand en échange il réclama une âme quelconque, non pas celle d’un prélat, mais la première qui entrerait dans l’église. Où était la traîtrise ? Tout d’abord effrayés, les bourgeois, hésitant, se rendirent aux raisons d’Urian disant qu’une âme de hasard en sacrifice valait bien le saint édifice. Nos sénateurs avaient juré de garder le secret muré : chacun s’empressa de médire en contant la chose à sa femme. Le secret n’est pas le fort de ces dames. Chacune eut tôt fait de redire, si bien que, l’église achevée, nulle âme ne voulut y faire son entrée. Sénateurs, évêque, chanoines furent en vain consultés : aucun ne trouva. Or, qui tira la ville d’embarras ? Ce fut un simple moine. Un loup qu’on avait pris vivant le matin même serait, dit-il, la solution du stratagème. Devant le saint portail on déposa sa cage. Toutes les portes étant ouvertes en même temps, l’animal se vit libre et crut prendre le large, se jetant dans la gueule infâme de Satan. Quand le diable sentit qu’il avalait un loup il fit un épouvantable fracas et donna dans la porte un formidable coup qui la fendit du haut en bas. Le portail en porte toujours la trace, souvenir du jour de la dédicace. Le diable est malin, on le dit. Malin : c'est ainsi qu'on le nomme. A malin, malin et demi et le plus malin des deux peut être un saint homme.

 

 

 

Fable. (solutions)

Le Diable et le Moine

 

Des bourgeois construisaient une coûteuse église.

L’argent manqua pour achever cette entreprise.

Survint un grand seigneur se présentant

Sous le nom d’Urian.

Il offre un million d’or : le don est appréciable.

On apprit que c’était le diable

Quand en échange il réclama

Une âme quelconque, non pas celle d’un prélat,

Mais la première qui entrerait dans l’église.

Où était la traîtrise ?

Tout d’abord effrayés, les bourgeois, hésitant,

Se rendirent aux raisons d’Urian

Disant qu’une âme de hasard en sacrifice

Valait bien le saint édifice.

Nos sénateurs avaient juré

De garder le secret muré :

Chacun s’empressa de médire

En contant la chose à sa femme.

Le secret n’est pas le fort de ces dames.

Chacune eut tôt fait de redire,

Si bien que l’église achevée

Nulle âme ne voulut y faire son entrée.

Sénateurs, évêque, chanoines

Furent en vain consultés : aucun ne trouva.

Or, qui tira la ville d’embarras ?

Ce fut un simple moine.

Un loup qu’on avait pris vivant le matin même

Serait, dit-il, la solution du stratagème.

Devant le saint portail on déposa sa cage.

Toutes les portes étant ouvertes en même temps,

L’animal se vit libre et crut prendre le large,

Se jetant dans la gueule infâme de Satan.

Quand le diable sentit qu’il avalait un loup

Il fit un épouvantable fracas

Et donna dans la porte un formidable coup

Qui la fendit du haut en bas.

Le portail en porte toujours la trace,

Souvenir du jour de la dédicace.

 

 

Le diable est malin, on le dit.

Malin : c'est ainsi qu'on le nomme.

A malin, malin et demi

Et le plus malin des deux peut être un saint homme.

 

© Alain Malle, 1998, d’après le Diable et le Moine, de Victor Hugo.

 

 

LE DIABLE ET LE MOINE

   Il y a longtemps, bien longtemps, ceux d'Aix-la-Chapelle voulurent bâtir une église. Ils se cotisèrent et l'on commença. On creusa les fondements, on éleva les murailles, on ébaucha la charpente, et pendant six mois ce fut un tapage assourdissant de scies, de marteaux et de cognées . Au bout de six mois, l'argent manqua. On fit appel aux pèlerins, on mit un bassin d'étain à la porte de l'église ; mais a peine s'il y tomba quelques targes et quelques liards à la croix. Que faire ? Le Sénat s'assembla, chercha, parla, avisa, consulta. Les ouvriers refusaient le travail, et l'herbe et la ronce, et le lierre et toutes les insolentes plantes des ruines s'emparaient déjà des pierres neuves de l'édifice abandonné. Fallait-il donc laisser là l'église ? Le magnifique Sénat des bourgmestres était consterné.

Comme il délibérait, entre un quidam, un étranger, un inconnu, de haute taille et de belle mine.

- Bonjour, bourgeois. De quoi est-il question ? Vous êtes tout effarés. Votre église vous tient au cœur ? Vous ne savez pas comment la finir ? On dit que c’est l’argent qui vous manque ?

_ Passant, dit le Sénat, allez-vous en au diable. Il nous faudrait un million d’or.

- Le voici, dit le gentilhomme: et, ouvrant une fenêtre, il montre aux bourgmestres un grand chariot arrêté sur la place à la porte de la maison de ville. Ce chariot était attelé de dix jougs de bœufs et gardé par vingt nègres d'Afrique armés jusqu'aux dents.

Un des bourgmestres descend avec le gentilhomme, prend au hasard un des sacs dont le chariot était chargé, puis tous deux remontent, l'étranger et le bourgeois. On vida la sacoche devant le Sénat : elle était en effet pleine d'or.

Le Sénat ouvre de grands yeux bêtes et dit à l'étranger:

- Qui êtes-vous, Monseigneur?

- Mes chers manants, je suis celui qui a de l'argent. Que voulez-vous de plus ? J'habite dans la Forêt-Noire, près du .lac de Wildsee, non loin des ruines de Heidenstadt, la ville des païens. Je possède des mines d'or et d'argent, et la nuit je remue avec mes mains des fouillis d'escarboucles. Mais j'ai des goûts simples, je m'ennuie, je suis un être mélancolique, je passe mes journées à voir jouer sous la transparence du lac le tourniquet et le triton d'eau, et à regarder pousser parmi les roches le polygonum amphibium. Sur ce, trêve aux questions et aux billevesées. J'ai débouclé ma ceinture, profitez-en. Voilà votre million d'or. En voulez-vous?

- Pardieu, oui! dit le Sénat. Nous finirons notre église.

- Eh bien, prenez mais à une condition.

- Laquelle, Monseigneur?

- Finissez votre église, bourgeois ; prenez toute cette mitraille ; mais promettez-moi en échange la première âme quelconque qui entrera dans votre église et qui en franchira la porte le jour où les cloches et les carillons en sonneront la dédicace.

- Vous êtes le diable ? cria le Sénat.

- Vous êtes des imbéciles, répondit Urian.

Les bourgmestres commencèrent par des soubresauts, des frayeurs et des signes de croix. Mais comme Urian était bon diable, et riait à se tordre les côtes en faisant sonner son or tout neuf, ils se rassurèrent et l'on négocia. Le diable a de l'esprit. C'est à cause de cela qu'il est le diable.

- Après tout, disait-il, c'est moi qui perds au marché. Vous aurez votre million et votre église. Moi, je n'aurai qu'une âme. Et quelle âme, s'il vous plaît? La première venue. Une âme de hasard. Quelque mauvais drôle d'hypocrite qui jouera la dévotion et qui voudra, par faux zèle , entrer le premier. Bourgeois mes amis, votre église s'annonce bien. L'épure me plaît. L'édifice sera beau, je crois. Je vois avec plaisir que votre architecte préfère à la trompe-sous-le-coin la trompe de Montpellier. Je ne hais pas cette voûte en pendentif, à plan berlong et à coupes rondes; mais j’aurais préféré pourtant une voûte d'arête, biaise et également berlongue. J'approuve qu'il ait fait là une porte en tour ronde, mais je ne sais s'il a bien ménagé l'épaisseur du parpaing. - Comment se nomme votre architecte, manants ? - Dites-lui de ma part que, pour bien faire la tête d'une porte en tour creuse, il est nécessaire qu'il y ait quatre panneaux : deux de lit et un de doyle par-dessus ; le quatrième se met sur l'extrados. C'est égal. Voilà une descente de cave à trompe-en-canonnière qui est d'un fort bon style et parfaitement ajustée. Ce serait dommage d'en rester là. - Il faut mettre à fin cette église. Allons, mes compères, le million pour vous, l'âme pour moi. Est-ce dit ? Ainsi parlait le gentilhomme Urian.

 

- Après tout, pensèrent les bourgeois, nous sommes bien heureux qu'il se contente d'une âme. Il pourrait bien, s'il regardait d'un peu près, les prendre toutes dans cette ville.

Le marché fut conclu, le million fut encaissé. Urian disparut dans une trappe d'où sortit une petite flamme bleue, comme il convient, et, deux ans après, l'église était bâtie.

Il va sans dire que tous les sénateurs avaient juré de ne conter la chose à personne, et il va sans dire que chacun d'eux, le soir même, avait conté la chose à sa femme. Ceci est une loi : une loi que les sénateurs n’ont pas faite, mais qu'ils observent. Si bien que, lorsque l'église fut terminée, comme toute la ville, grâce aux femmes des sénateurs, savait le secret du Sénat, personne ne voulut entrer dans l'église.

Nouvel embarras, non moins grand que le premier. L’église est bâtie, mais nul n'y veut mettre le pied; l'église est achevée, mais elle est vide. Or, à quoi bon une église vide ? - Le Sénat s'assemble. Il n'invente rien.

On appelle l'évêque de Tongres. Il ne trouve rien. On appelle les chanoines du chapitre. Ils n'imaginent rien. On appelle les moines du couvent.

- Pardieu dit un moine, il faut convenir, Messeigneurs, que vous vous empêchez de peu de chose. Vous devez à Urian la première âme qui passera par la porte de l'église. Mais il n'a pas stipulé de quelle espèce serait cette âme. Urian n'est qu'un sot, je vous le dis. Messeigneurs, après une longue battue, on a pris vivant ce matin dans la vallée de Borcette un loup. Faites entrer ce loup dans l'église. Il faudra bien qu'Urian s'en contente. Ce n'est qu'une âme de loup, mais c'est une âme quelconque.

- Bravo, dit le Sénat. Voilà un moine d'esprit.

Le lendemain, dès l'aube, les cloches sonnèrent.

- Quoi dirent les bourgeois, c'est aujourd'hui la dédicace de l'église ! mais qui donc osera y entrer le premier? Ce ne sera pas moi.

- Ni moi.

- Ni moi.

- Ni moi.

Ils accoururent en foule. Le Sénat et le chapitre étaient devant le portail. Tout à coup on amène le loup dans une cage, et à un signal donné on ouvre à la fois les portes de la cage et les portes de l'église. Le loup, effrayé par la foule, voit l'église déserte et s'y enfonce. Urian attendait, la gueule ouverte et les yeux voluptueusement fermés. Jugez de sa rage quand il sentit qu'il avalait un loup. Il poussa un mugissement effrayant et vola quelque temps sous les hautes arches de l'église avec le bruit d'une tempête. Puis il sortit enfin éperdu de colère, et en sortant il donna dans la grande porte d'airain un si furieux coup de pied, qu'elle se fendit du haut en bas. On montre encore cette fente aujourd'hui.

C'est pour cela, ajoutent les bonnes vieilles, qu'à gauche de la porte de l'église on a placé la statue du loup en bronze, et à droite une pomme de pin qui figure sa pauvre âme si stupidement mâchée par Urian.

Victor Hugo, Le Rhin 1842.

 VOCABULAIRE

LIARD Ancienne monnaie française de cuivre, qui valait trois deniers ou le quart d'un sou.

BOURGMESTRE Régional (franç. de Belgique, de Suisse). Premier magistrat des communes belges. Equivalent de MAIRE.

DEDICACE Consécration d'une église, d'une chapelle au culte divin.

BILLEVESEE Parole vide de sens, idée creuse, chimérique

EPURE Dessin à grande échelle ou en grandeur nature tracé pour aider à la construction d'un édifice, au montage d'une machine.

TROMPE Archit. Section de voûte formant saillie et supportant la poussée verticale d'un élément de construction en encorbellement. Trompe supportant une tourelle en encorbellement (à l'angle d'une tour carrée, par ex.). Trompe en niche, sphérique, en forme de coquille. Trompe dans l'angle, qui occupe un angle rentrant.

PENDENTIF Triangle sphérique entre les grands arcs qui supportent une coupole. Les pendentifs permettent de passer du plan carré au plan circulaire.

EXTRADOS Technique. Archit. Surface extérieure (d'une voûte*, d'un arc*). Extrados parallèle, à courbe concentrique à celle de l'intrados. Extrados horizontal. Extrados en chape formant des plans inclinés.

CHANOINE Dignitaire ecclésiastique membre du chapitre* d'une église cathédrale ou collégiale, ou de certaines basiliques

CHAPITRE Assemblée de religieux, de chanoines réunis pour écouter la lecture d'un chapitre de la règle, et aussi pour délibérer de leurs affaires