Séquence Ecrire une nouvelle
Evaluation écrite en terminale BEP
Proposée par A. Malle, L.P. Branly La Roche-sur-Yon  

 

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textes
questions
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Evaluation écrite (après l'écriture collective d'une nouvelle d'après la vidéo La parure)

Présentation des textes.

On met en relation le dernier épisode de la nouvelle de Maupassant et un pastiche de Muller et Reboux racontant le même épisode à la manière d'Alphonse Daudet. L'intérêt est de mettre en évidence la différence des tons, réaliste, sec et impitoyable chez Maupassant, guilleret et optimiste dans le pastiche. De plus, dans celui-ci, intervient une "suite" qui renverse la signification du récit.

Présentation des questions.

Les questions font appel aux notions suivantes :

- point de vue de narration (appelé aussi focalisation)
- formes du discours rapporté (direct, indirect)
- caractérisation (qualification)
- relation narrateur / lecteur
- sens global ("morale" de la nouvelle)

 


SUJET

Texte n°1

Or, un dimanche, comme elle était allée faire un tour aux Champs-Élysées pour se délasser des besognes de la semaine, elle aperçut tout à coup une femme qui promenait un enfant. C'était Mme Forestier, toujours jeune, toujours belle, toujours séduisante.

Mme Loisel se sentit émue. Allait-elle lui parler? Oui, certes. Et maintenant qu'elle avait payé, elle lui dirait tout. Pourquoi pas?

Elle s'approcha.

«Bonjour; Jeanne.»

L'autre ne la reconnaissait point, s'étonnant d'être appelée ainsi familièrement par cette bourgeoise. Elle balbutia:

«Mais... madame!... Je ne sais... Vous devez vous tromper.

- Non. Je suis Mathilde Loisel.»

Son amie poussa un cri:

«Oh!... ma pauvre Mathilde, comme tu es changée!...

- Oui, j'ai eu des jours bien durs depuis que je ne t'ai vue; et bien des misères... et cela à cause de toi!...

- De moi... Comment ça?

- Tu te rappelles bien cette rivière de diamants que tu m'as prêtée pour aller à la fête du ministère.

- Oui. Eh bien?

- Eh bien, je l'ai perdue.

- Comment! puisque tu me l'as rapportée.

- Je t'en ai rapporté une autre toute pareille. Et voilà dix ans que nous la payons. Tu comprends que ça n'a pas été aisé pour nous, qui n'avions rien... Enfin, c'est fini, et je suis rudement contente.»

Mme Forestier s'était arrêtée.

«Tu dis que tu as acheté une rivière de diamants pour remplacer la mienne?

- Oui. Tu ne t'en étais pas aperçue, hein? Elles étaient bien pareilles.»

Et elle souriait d'une joie orgueilleuse et naïve.

Mme Forestier; fort émue, lui prit les deux mains.

«Oh! ma pauvre Mathilde! Mais la mienne était fausse. Elle valait au plus cinq cents francs !...»

La Parure, nouvelle de Guy de Maupassant publiée en 1885.


Texte N° 2

Et combien croyez-vous que dura cette vie-là ?

Dix ans, mon bon monsieur, dix ans d'abnégation et de martyre! La grande route parisienne a parfois de singuliers tournants. Ces pauvres Loisel étaient montés au sommet du bonheur, et puis crac! la dégringolade, comme dans ces montagnes russes foraines où la glissade vertigineuse vous chavire les prunelles et vous met une angoisse au creux de l'estomac.

Pourtant, au bout de dix ans, voilà qu'ils ont tout payé, tout remboursé. Ah! cela n'avait pas été commode! Et Madame Loisel a eu plus d'une fois des idées noires. Mais bah! quand il en vient papillonner autour de vous, on n'a qu'à se secouer, on va faire un tour, et le soleil vous a bien vite déplissé le front, comme il déplisse les jeunes feuilles des marronniers.

Justement ce jour-là - oh! l'exquis après-midi de printemps parisien, avec sa tendresse dans l'air, sa lumière blonde, ses vols de pierrots et, le long des Champs-Elysées, sa file d'équipages fringants dont les harnais étincellent ! - ce jour-là, Mme Loisel est assise auprès de son mari sur une petite chaise de fer. Pour ses deux sous, elle aura trois heures de spectacle, et ce bonheur qui passe lui mettra dans l'âme un peu de griserie.

Mais la voilà dressée, toute pâle. Jeanne Forestier ! ce n'est pas possible !... Et pourtant oui, c'est bien elle.

« Bonjour... Vous ne me reconnaissez donc pas ? »

Non, Mme Forestier ne la reconnaît pas. A travers son face-à-main d'écaille, elle regarde avec étonnement cette étrangère.

« Mathilde... Je suis Mathilde... Mathilde Loisel. »

Elle n'a pas l'air enchantée de la rencontre, Mme Forestier ; pourtant, elle fait bon visage.

« Mathilde! Comme tu es changée! Qu'est-ce que tu es donc devenue depuis si longtemps ? »

Ce qu'elle est devenue ? Ah! ce n'est pas bien gai! Et la voilà qui commence à raconter sa vie médiocre et nécessiteuse. Dire que tout ça, c'est à propos de ce bal!

Mme Forestier ne comprend pas. De quel bal veut-elle donc parler ?

« Tu sais bien, ce bal pour lequel tu m'as prêté une parure. J'ai eu le malheur de la perdre. Et celle que je t'ai rendue, je l'avais achetée. Quarante mille francs... Et depuis ce temps-là...»

Cette fois, Mme Forestier a compris. Bouleversée, elle prend les mains de son amie.

« Quarante mille francs! mais ma pauvre Mathilde, la parure que je t'avais prêtée était fausse. Elle valait au plus cinq cents francs! »

Aussitôt, voilà cette petite folle de Mme Loisel qui se met à sauter en l'air et à battre des mains. C'est que la dure existence lui a donné l'habitude de compter. Elle calcule... Mme Forestier a reçu trente-neuf mille cinq cents francs de trop. Elle les rendra. Cette épargne involontaire, et qu'ils n'auraient jamais eu la patience de former, c'est comme une fortune qui leur tombe du ciel.

Et voulez-vous connaître à présent la fin de l'histoire ? Allez vous promener un dimanche dans cet adorable coin de banlieue dont la verdure s'étend de Ris-Orangis à Champrosay. Vous verrez là, au bord de la Seine, une maisonnette rose à volets verts. Il y a des glycines autour de la grille... Mais la porte s'ouvre. Voici les propriétaires : lui, coiffé d'un yokohama, porte une longue canne à pêche ; elle, un pliant sous le bras, tient en laisse un petit chien frisé. Vous les avez reconnus : ce sont les Loisel. Et vous pourrez lire, en grandes lettres, sur la plaque émaillée dont s'orne l'entrée, l'inscription suivante : CHALET LA PARURE.

Episode final de la nouvelle de Maupassant, La Parure
réécrite par Muller et Reboux A la manière d’Alphonse Daudet.
extrait de A la manière de... Livre de Poche n°

 

QUESTIONS

Compétences de lecture. (2 points / question)

1 -Texte 1 Montrez que Maupassant nous fait adopter le point de vue de madame Loisel pour décrire Madame Forestier.

2 - Texte 1 Quels sont les qualificatifs utilisés pour décrire Mme Forestier ? Sur quel aspect Maupassant insiste-t-il ? Comment cette insistance est-elle marquée ?

3 - Textes 1 et 2 A quel passage du texte n°2 correspond le passage du texte n°1 en caractères gras ? Caractérisez la forme de discours utilisée dans chacun des cas.

4 - Texte 2 Montrez, à l’aide d’exemples relevés dans le texte, que le narrateur intervient directement dans le récit.

5 - Texte 2 En quoi le dénouement de la nouvelle est-il différent ? Montrez que le sens global de la nouvelle s’en trouve changé.

Compétences d’écriture. (10 points)

La nouvelle de Maupassant a d’abord été publiée dans un journal. Imaginez que le rédacteur en chef, ayant perdu le dernier feuillet, a fait réécrire la fin (texte n°2) et a publié la nouvelle ainsi. Maupassant, en voyage en Normandie, découvre dans le journal cette version inattendue de son œuvre. Il écrit au rédacteur en chef pour protester en avançant des arguments précis. Ecrivez cette lettre.

 


 

Corrigé

PREMIERE PARTIE

1 -Texte 1 Montrez que Maupassant nous fait adopter le point de vue de madame Loisel pour décrire Madame Forestier.

utilisation du verbe "aperçut" avant la description

2 - Texte 1 Quels sont les qualificatifs utilisés pour décrire Mme Forestier ? Sur quel aspect Maupassant insiste-t-il ? Comment cette insistance est-elle marquée?

qualificatifs : jeune belle séduisante

Maupassant insiste sur la permanence de ses charmes avec l’adverbe "toujours"

3 - Textes 1 et 2 A quel passage du texte n°2 correspond le passage du texte n°1 en caractères gras ? Caractérisez la forme de discours utilisée dans chacun des cas.

le passage du texte 1 est au discours direct

dans le texte 2 ce passage est rapporté au discours indirect libre

Ce qu'elle est devenue ? Ah! ce n'est pas bien gai! Et la voilà qui commence à raconter sa vie médiocre et nécessiteuse. Dire que tout ça, c'est à propos de ce bal!

 

4 - Texte 2 Montrez, à l’aide d’exemples relevés dans le texte, que le narrateur intervient directement dans le récit.

- le narrateur s’adresse directement au lecteur

Et combien croyez-vous que dura cette vie-là ? - phrase interrogative

Dix ans, mon bon monsieur, dix ans  - interpellation, apostrophe

Et voulez-vous connaître à présent la fin de l'histoire ? Allez vous promener un dimanche

- interrogative - emploi de l'impératif

5 - Texte 2 En quoi le dénouement de la nouvelle est-il différent ? Montrez que le sens global de la nouvelle s’en trouve changé.

Dénouement heureux : en récupérant l’argent de la parure, les Loisel acquièrent un niveau social élevé et retrouvent le bonheur.

La nouvelle de Maupassant s’achève au contraire brutalement sur une révélation qui aggrave le malheur de Madame Loisel, car celle-ci apprend que le sacrifice de sa jeunesse et de sa beauté a été inutile.

 

DEUXIEME PARTIE

Critères d'évaluation :

- présentation de la lettre - identification du destinataire, le rédacteur en Chef, et de l'expéditeur, Maupassant

- utilisation correcte de temps (présent d'énonciation, passé proche)

- référence à la situation : en voyage, lecture de la nouvelle dont la fin est réécrite

- expression de son mécontentement

- argumentation réutilisant les éléments de l'étude des textes

- formule sèche à la fin, assortie d'éventuelles demandes de rectification