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analyse de séquence - 2

mis à jour le 20/03/2021


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Extrait de Cléo de 5 à 7 d'Agnès Varda : Sans toi.

mots clés : analyse, film de bac


Document sans nom

Introduction : séquence centrale du film = climax, construite autour de la chanson Sans toi, composée par Michel Legrand, paroles A.Varda.
Chanson qui va agir comme un révélateur pour Cléo, qui dès lors va commencer sa transformation et son ouverture au monde.


I- Cléo toujours omniprésente

               1- Toujours au centre des regards :

Entourée de trois personnages : Plumitif, Bob et Angèle. Tous la regardent, y compris Angèle pourtant en retrait dans le cadre. Cléo par ailleurs souvent au centre de l'image.

Ici, ce gros plan sur le visage de Cléo non seulement la valorise, mais sort aussi Plumitif du cadre : Cléo dévore le cadre, ce qu’elle fera évidemment aussi lors de l'interprétation de Sans toi.

               2. Evidemment Cléo toujours au centre du processus de création d'Agnès Varda : elle occupe ici à la fois le champ visuel et le champ sonore.

- Ainsi dès le début de la séquence, elle s'énerve sur Bob et ses sous-entendus : ce dernier reste en hors-champ, seul l'agacement de Cléo s'exprime et se voit.
- Puis Varda consacre sa réalisation à Cléo dès lors que la musique diégétique (piano de Bob) commence. A noter l'enchaînement entre le propos de Bob « Cléopâtre je vous idolâtre » et le début du doux mouvement de caméra que Varda entame pour se diriger progressivement sur Cléo et l'isoler, la couper du reste du monde pendant son chant. La caméra porte dès lors sur Cléo un regard amoureux, elle la dévore, au même titre que les hommes la dévoraient des yeux dans la rue.

Panoramique à 90° vers la gauche, qui sort peu à peu les autres personnages du cadre.

               3. Jeu avec le regard du spectateur qui devient le nouveau public de Cléo, auquel elle s'adresse directement.
Evidemment Varda se sert d'une caméra frontale et du regard caméra accompli par Cléo mais aussi du dispositif scénique qui vient placer la jeune femme sur un fond totalement noir, alors que le reste de sa chambre est blanc. Il est à noter que Cléo, alors qu'elle vient de découvrir la chanson, semble pourtant la connaître et l'interprète avec cœur. Ce n'est pas une simple répétition, en témoignent ses larmes et son abandon final.

 

Sorte de rupture spatio-temporelle ici : Cléo n'est plus dans sa chambre mais dans une salle de spectacle et nous, spectateurs, nous sommes au 1er rang.


               4. Explosion des sentiments mise en scène aussi par le travail sur le montage de la musique.
En effet on passe d'une musique diégétique : piano de Michel Legrand (Bob) à une musique extra-diégétique plus puissante (orchestrale) au moment du dernier couplet " Belle en pure perte..."
Cléo presque centrée dans le cadre.

 
Quelques exemples de passage de musique diégétique à extra-diégétique ou l'inverse :
 

A noter la douceur du mouvement de caméra qui rend hommage à la beauté de Cléo certes mais aussi à la force de son interprétation. D'ailleurs la caméra finit par s'immobiliser et laisser Cléo libre de faire jaillir son émotion.
Elle ne reprendra ''vie'' qu'à la fin de la chanson dans un brusque zoom arrière qui nous fait, Cléo et les spectateurs, revenir à la réalité, au cadre spatio-temporel d'origine : la chambre, face à une Cléo épuisée et submergée par ses émotions.


Caméra toujours frontale, mais suppression des artifices de mise en scène précédents : cf travail sur la lumière (projecteur).

Reprise du mouvement et réapparition des autres personnages.
 
 


II- Tournant du film et du parcours de Cléo

               1. Cléo chamboulée par les paroles de la chanson, qui la ramènent à sa propre existence et à ses propres émotions.
 

 

But recherché par Varda qui écrit dans un de ses cahiers préparatoires « La chanson ''Sans toi'' coïncide exactement  à  son  angoisse  qui,  soudain formulée,  éclate.  La  séquence  comme  une grosse vague. »
Ainsi cette chanson est vécue par Cléo comme un raz-de-marée. On y retrouve tous les thèmes qui l'obsèdent depuis le début du film.


 
Quelques références culturelles
         
Les trois âges et la mort, Hans Baldung (1510) ; Ronsard « Quand vous serez bien vieille... » Sonnet pour Hélène (1578)
 
Lien émotions/musique : extrait de La passante du sans-souci – J.Rouffio (1982) (Romy Schneider)
 

               2. Prise de conscience de Cléo face à ce ''cri d'amour''

terme utilisé par Plumitif pour désigner cette chanson. Cléo remet en cause ce qu'elle est , qui elle est. Elle exprime pour une fois ses sentiments/opinions en remettant en cause l'utilité d'une chanson, le regard que ses proches portent sur elle. Ce point s'exprime surtout dans un duel avec Bob, déjà entamé avant l'interprétation de la chanson. Leur position dans le cadre d'ailleurs les oppose souvent et met en évidence l'incapacité de l'entourage de Cléo à la comprendre. Bob continue de la qualifier de ''capricieuse'', caractéristique souvent utilisée dans la 1ere partie du film pour désigner Cléo (Angèle, José, Bob).


A noter que sur ces plans, les personnages sont tous présents. Cléo les associe tous et leur fait le même reproche.


Après avoir été séparés dans le cadre par le piano, Bob et Cléo sont face à face (duel) mais séparés par deux chaises, qui d'ailleurs se ''tournent le dos''. Puis Bob se retrouve
seul en GP dans le plan.

La petitesse d'esprit de Bob est affirmée dans sa dernière réplique, d'ailleurs Cléo lui tourne le dos. Le vide de la pièce (Cléo en bord cadre) est similaire au vide de son existence au moment où elle prend conscience de l'absence d'amour dans sa vie. La coiffeuse trône au centre ainsi que le miroir, mais Cléo comprend que tout cela est vain.


               3. Cléo décide alors de mettre fin au spectacle, certes de manière quelque peu théâtrale (cf rideau).

D'abord de manière''métaphorique'' en se dépouillant de ses accessoires et en se changeant (perruque, robe noire).

Là encore les regards sont sur elle mais traduisent l'incompréhension voire un certain mépris de Bob, qui ne la comprend pas.

Cléo revendique aussi son désir de liberté et de solitude. Ce sera d'ailleurs la dernière fois que ces 3 personnages apparaîtront (de manière active/présents plus tard lorsque des portraits défileront, comme figés dans le passé de Cléo).

Sur ce plan, les deux femmes sont séparées, alors que jusque là Varda les mettait souvent sur le même plan. Là aussi forme de duel, Cléo rejette Angèle et sa superstition. Elle leur tourne le dos.

Tous la regardent, inconnus ou non.
Varda revient plusieurs fois sur Cléo, qui marche, va de l'avant et ne veut plus affronter ses regards ni dans la rue, ni dans sa mémoire. Mais tous  font partie du passé, comme semble l'attester le plan suivant :

En effet, cette galerie de portraits se termine quand Cléo croise un cortège funéraire.


               4. Première fois où l'on voit Cléo prendre une décision seule. Volonté de sortir et de s'ouvrir aux autres.

Néanmoins, dans un premier temps, quoiqu'elle en dise, elle reste soucieuse de son apparence : chapeau, collier... D'ailleurs, lors de ses premiers pas dans la rue, elle reste au centre des regards masculins et de la caméra de Varda (qui la suit comme dans l'ouverture du film).

- Elle semble encore enfermée, cf grilles et reprise du thème musical de « Sans toi » (variation instrumentale).
- Il faut attendre l'interruption de la musique par l'envol des pigeons, qui entraîne une réaction en chaîne montrée par le montage, pour qu'elle décide réellement d'évoluer (en commençant par enlever son dernier caprice de dessus la tête).
- En effet, la devanture du magasin « Bonne santé » la renvoie à sa propre existence. Elle se place pour la dernière fois devant une vitre et prend conscience de son égocentrisme.

À noter que son reflet est brouillé par les inscriptions du restaurant et évidemment le retour de la voix-off pour traduire les pensées intérieures de Cléo, ici sa prise de conscience.


Dès lors, Cléo peut commencer sa déambulation dans les rues de Paris mais aussi dans sa propre vie et rencontrer plus tard Antoine, afin de ne pas finir seule et livide dans un cercueil de verre...
 

« Cette chanson ''Sans toi'' devait marquer le tournant qui lui fait preuve conscience de façon aiguë que s'il n'y pas partage, communication avec les autres, amour des autres ou amour d'un seul d'ailleurs, aller vers la mort est encore pire. » A.Varda

 
Cela faisait des mois et des mois que Flocon-de-Neige reposait, comme endormie, dans son cercueil quand un Prince s'arrêta dans la maison des sept Nains pour y passer la nuit.
Le lendemain il vit la belle endormie dans son cercueil de verre sur la montagne, et lut l'inscription en lettres d’or. Il dit aux Nains :
« Donnez-moi ce cercueil, je vous donnerai ce que vous voudrez. »
Mais ils refusèrent :
« Nous ne te le donnerons pas pour tout l'or du monde. »
– Offrez-le moi, je ne saurais plus vivre sans la regarder et je vous promets de la chérir et de l'honorer comme mon trésor le plus cher. »
En entendant ces paroles, les Nains eurent pitié et lui offrirent le cercueil en verre et la belle endormie.
          
 

information(s) pédagogique(s)

niveau : Lycée tous niveaux, Terminale

type pédagogique : production d'élève

public visé : enseignant, élève

contexte d'usage : classe, travail à distance, travail autonome

référence aux programmes :
Comprendre le sens global d’une oeuvre cinématographique et audiovisuelle en lien avec quelques éléments significatifs de son contexte (fabrication, métiers, public)

Analyser de manière argumentée les principaux éléments significatifs d'un plan ou d'une suite de plans cinématographiques et audiovisuels

Connaître quelques procédés d'écriture et repères de l’histoire du cinéma et de l’audiovisuel

Mobiliser ses connaissances pour nourrir son expérience de spectateur et sa pratique artistique

ressource(s) principale(s)

vignette.jpg voir, recevoir, percevoir, concevoir, pouvoir 21/03/2021
Travailler l'analyse de séquence avec les élèves.
analyse, film de bac, individuel, collectif

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