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2008/2009 : à l'école des Écrivains au collège Jean Lurçat (49)

mis à jour le 01/07/2009


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Une classe de troisième du collège Jean Lurçat d'Angers a participé à l'opération "à l'école des écrivains - les mots partagés" qui propose à des classes de troisième de découvrir l'univers d'un écrivain français et de cheminer, avec lui, dans la découverte d'une de ses œuvres, porte ouverte sur la littérature d'aujourd'hui.

mots clés : lecture, écriture, rencontre, poésie, écrivain


un début compliqué...


L'opération « A l'école des écrivains - Des mots partagés » au collège Jean Lurçat d'Angers s'est déroulée autour d'un ouvrage d'Antoine Emaz : Peau.
Le professeur en charge de l'opération n'a pris ses fonctions dans l'établissement qu'au mois de février, sur un poste occupé auparavant, successivement, par trois enseignants différents. C'est pourquoi il a été décidé avec l'écrivain, M. Antoine Emaz, que l'opération commencerait véritablement après les vacances de Pâques, le temps pour le professeur et les élèves de prendre leurs marques.
La documentaliste du collège, Mme Bérot, a été associée au projet. Elle a assisté aux rencontres et a apporté du matériel spécifique pour la troisième rencontre.
Le programme arrêté conjointement par le professeur, l'écrivain, et la Maison des Ecrivains, s'est constitué autour de trois rencontres entre le poète et la classe.
 

première rencontre : faire connaissance


La première rencontre était consacrée à un dialogue sur ce qu'est un écrivain, un poète, aujourd'hui. Cette séance d'accroche a été préparée en amont par le professeur, à partir d'un « curseur », questionnaire à choix multiples sur la représentation que les élèves avaient de l'écrivain et du poète. Ensuite, à partir de ce curseur et de leurs représentations, les élèves ont tous formulé une ou plusieurs questions directes pour le poète. Les élèves ont été très intéressés par la mise à plat sur les conditions de vie et de travail d'un écrivain. Les questions sur la rémunération, les voyages, le travail concret de l'écriture (quand ? sur un carnet, à l'ordinateur ? à plusieurs, avec des collaborateurs ? sur commande ? etc.), et sur l'engagement du poète dans le monde, en prolongement d'une réflexion entamée précédemment en séquence sur la poésie lyrique et engagée, ont bien impliqué les élèves et ont permis que s'instaure d'emblée une relation entre eux et le poète. Il est à noter que les rencontres avaient lieu sur une heure de cours, le lundi, toutes les deux semaines : mais dès le lendemain de la première rencontre, certains élèves s'étonnaient de ne pas voir le poète et manifestaient une déception face à son absence. Antoine Emaz a accepté de répondre à toutes les questions, même celles qui étaient plus personnelles. Il semble que les élèves aient besoin de passer par un rapport vraiment tourné vers l'individu, en demandant par exemple comment vit le poète en tant que personne, sur le plan matériel notamment, avant de se préoccuper de l'écriture en elle-même. L'auteur a tout à fait accepté de prendre ce détour, en consacrant par exemple du temps à la question des finances liées à la condition d'écrivain.
Cette première rencontre a été prolongée par le professeur, demandant aux élèves d'écrire quelques lignes sur ce qu'ils avaient retenu de la rencontre, sur ce qui les avait éventuellement étonnés. Enfin, les élèves étaient invités à écrire si certaines de leurs représentations avaient évolué.
 

deuxième rencontre : au cœur des choses...


La deuxième rencontre a été centrée sur le recueil de poèmes, « PEAU », choisi par Antoine EMAZ pour l'opération. Il faut préciser que l'écrivain avait tenu à choisir ce recueil, et non pas un de ses livres publiés dans une collection de poche, pour que les élèves possèdent ce qu'il appelle un « vrai » livre, un objet ayant une certaine valeur, puisque l'opération prévoyait que le volume leur soit offert.
Avant la rencontre, plusieurs séances ont été consacrées au travail sur les textes. Le recueil a d'abord été distribué, un temps a été laissé pour la découverte de l'objet livre. Les élèves formulaient alors leurs premières impressions, leurs observations, leurs questions. Tous ont été étonnés par la mise en page (beaucoup de blancs, parfois quelques mots seulement par pages, certains étant complètement isolés), ainsi que par la présence de certaines choses qui ne leur semblaient pas forcément relever de la poésie. Par exemple, dans un poème, l'auteur a intégré les résultats d'un bilan sanguin, ce qui a surpris les élèves.
Par rapport au travail effectué dans une séquence précédente par le professeur, tous se sont aussi étonnés de l'absence de rimes, de majuscules, de vers réguliers. En revanche, certains élèves ont relevé des procédés (tel que l'anaphore) vus dans la poésie classique. Tout cela a amené les élèves, en collaboration avec le professeur, à débuter une réflexion sur ce qu'était la poésie, si ce n'est pas forcément l'écriture rimée et versifiée qui permet de la définir.
Pour continuer à préparer la rencontre, certains textes ont été lus à haute voix, par plusieurs élèves. Cette lecture oralisée a amené les élèves à respecter les blancs, les silences. Elle a été trouvée difficile par certains élèves. Elle a permis de soulever des questions sur le sens des poèmes. La préparation s'est achevée par l'écriture de questions ou d'observations à soumettre au poète. Ces questions pouvaient porter sur le sens précis de certains mots, la raison de l'emploi de tel ou tel procédé ; elles pouvaient aussi rester générales, sur le travail de l'écriture, en prolongement ou complément de ce qui avait été dit lors de la première rencontre. Cela a favorisé l'impression d'une continuité du projet, d'un lien entre les séances.

Le jour de la rencontre, le dialogue s'est instauré rapidement. Les questions sur la présence de tel détail, jugé trivial, dans la poésie, ont permis à Antoine Emaz d'expliquer sa conception d'une poésie n'étant pas faite pour rêver ou s'évader du monde, mais dont le rôle au contraire est de parler de la réalité dans laquelle on vit. Un échange aussi s'est installé sur l'absence de rimes et sur l'emploi de vers libres. L'auteur a ainsi pu donner un aperçu rapide et simple de l'évolution des formes poétiques au XXe siècle. 
Ensuite, un élève a fait une lecture oralisée d'un poème, déjà lu lors de la préparation. Antoine Emaz lui-même a lu certains de ses textes. Cet échange a été suivi de questions sur le sens d'une phrase, les conditions dans lesquelles tel texte a été commencé... La lecture a permis à l'auteur d'insister sur l'importance des silences, des rythmes et des sons, même dans le cadre d'une poésie en vers libres. Elle a été le préalable à certaines véritables explications de texte. Enfin, les questions des élèves ont permis à Antoine Emaz de s'expliquer sur le titre du recueil, sur le fait qu'il emploie souvent des monosyllabes pour ses titres (de livres ou de poèmes), sur la table des matières et le retour précisément des mêmes titres, et donc, au-delà d'un poème isolé, sur le travail de constitution d'un recueil.

C'est à ce stade du projet, à l'issue de la deuxième rencontre, que la production des élèves a trouvé sa place. Après s'être approprié les poèmes et le recueil, les élèves étaient invités à écrire eux-mêmes un texte. Deux possibilités leur étaient offertes : ils pouvaient construire un poème nouveau en empruntant des vers à plusieurs poèmes de « PEAU », ce qui permettait de donner naissance à un autre texte, dans une recomposition qui change la perception des mots. Ils pouvaient aussi écrire un poème véritablement personnel, en partant toutefois d'un des titres utilisés dans le recueil. Il est à noter que certains élèves n'ont rien produit à ce moment-là. Cela n'a aucunement choqué Antoine Emaz, selon qui on ne peut forcer un jeune à s'improviser poète en quelques heures de travail. En revanche, cette confrontation à l'écriture a créé en quelque sorte un lien avec le début du projet et la question des représentations que l'on se fait d'un poète ; il est arrivé en effet qu'un élève pour qui un poète écrivait forcément en rimes, et qui avait été surpris du coup par la forme des poèmes de PEAU, juge qu'il était « facile » d'écrire sans versification. Confronté aux difficultés de l'écriture, même en vers libres, il a été dès lors conduit à revenir sur son jugement.

troisième rencontre : le livre, cet objet...


La troisième rencontre a eu lieu autour de la chaîne du livre et de l'édition, du livre d'artiste, du livre-objet.
Antoine Emaz a d'abord expliqué comment fonctionnait la chaîne du livre, de l'auteur au lecteur en passant par l'éditeur, l'imprimeur, le diffuseur, et le libraire. Le pourcentage du prix du livre qui revient à chacun des maillons de cette chaîne a vivement surpris certains élèves !
Ensuite, le poète a présenté le parcours de Djamel Meskache, à la fois éditeur et illustrateur du livre sur lequel nous avons travaillé. Cela a donné lieu à quelques questions sur le rapport entre les textes et les illustrations choisies.
Puis nous avons enchaîné sur la présentation de livres d'artistes, de livres différents, de livres objets que les élèves ont pu observer et manipuler. Pour cela, la documentaliste, qui a eu l'occasion d'assister plusieurs années de suite à un festival du livre d'artistes dans le centre de la France, avait apporté du matériel. Des livres, différents par leur format, leur reliure, l'organisation de leur pagination (livres à déplier...), ou encore leur apparence (par exemple, un livre en forme d'ardoise), ont suscité la curiosité des élèves. Ce passage par le visuel a notamment permis d'accrocher l'attention de certains parmi ceux qui étaient en difficulté de lecture.   
Enfin, la rencontre s'est conclue sur la possibilité, pour les élèves, de faire dédicacer leur volume par l'auteur, afin de garder un souvenir véritablement personnalisé de ce projet.

Pour conclure, sur l'ensemble des séances, il faut noter que l'intérêt de certains élèves a été vif et constant. En revanche, d'autres élèves, en grande difficulté scolaire et qui ont un rapport difficile à la lecture, ce qu'ils verbalisent par ailleurs très bien et très clairement, sont restés en lisière du projet. Le public des collèges de ZEP - « Ambition Réussite » reste un public difficile. Antoine Emaz se trouve être professeur à temps partiel, et il a enseigné plusieurs années dans un collège de ZEP par le passé. Il n'a donc pas été surpris par les conditions de son intervention. Mais pour un écrivain qui ne connaîtrait pas du tout ce type d'assistance, il peut être déroutant d'avoir à toujours conquérir l'attention des élèves.
Sur le plan pédagogique, une remédiation possible a été évoquée entre le professeur et l'écrivain, pour les élèves en grande difficulté, mais elle n'a pu être mise en place faute de temps. Il s'agissait de constituer éventuellement des binômes, l'un étant auteur d'un ou plusieurs poèmes, dans le cadre de la production écrite proposée, et l'autre, illustrateur. Cela pourrait permettre à ceux qui ont un rapport difficile à la lecture et à l'écriture, d'exprimer aussi, d'une autre manière, leur réception de l'œuvre, et leur sensibilité personnelle. Cet aspect du projet pourrait être élaboré, dans une optique interdisciplinaire, avec un professeur d'Arts plastiques, éventuellement dans la perspective de la composition d'un livre d'artiste par l'ensemble de la classe.


Antoine Emaz photographié par Michel Durigneux.
Image mise en ligne sur le site "Poètes au potager"
 
auteur(s) :

Jean-François Frackowiak, professeur de lettres au collège Jean Lurçat (Angers-49)

information(s) pédagogique(s)

niveau : 3ème

type pédagogique : activité de découverte, démarche pédagogique

public visé : enseignant

contexte d'usage : classe, espace documentaire

référence aux programmes :

ressource(s) principale(s)

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