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la peinture, un art de la présentation - Frac des Pays de la Loire

mis à jour le 17/02/2013


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Un outil pédagogique autour de la question de la peinture, à partir de l'analyse de deux oeuvres de la collection du Frac des Pays de la Loire.

mots clés : chaarp, peinture, frac


 

Bernard Frize Suite Segond
Bernard FRIZE

Suite Segond

1980
peinture Alkyd-uréthane sur toile
116 x 89 x 3,5 cm



Claude Rutault AMZ - Le soleil brille pour tout le monde (Partie A)
Claude RUTAULT
AMZ - Le soleil brille pour tout le monde (Partie A)
1985
toiles tendues sur châssis, acrylique sur toile
dimensions variables 300 x 1100 x 60 cm
 

à propos des oeuvres


Bernard Frize

Cette œuvre est une peinture. Elle se présente physiquement comme un tableau « classique », un toile tendue sur un châssis et accrochée au mur.

La surface est recouverte de cercles colorés, de « peaux » de peinture, c'est-à-dire de la pellicule qui sèche à la surface des pots mal refermés. L'œuvre fait écho à l'adage de Maurice Denis définissant le tableau comme « une surface plane recouverte de couleurs en un certain ordre assemblées ».

Bernard Frize ajoute deux données à cette définition : l'utilisation du déjà là et la soumission à des règles, des contraintes pré-établies. Il prélève les peaux fabriquées par le temps et le hasard pour composer sa toile. L'artiste « délègue » à ces pastilles de peinture les choix de couleurs et de dessin. L'artiste ne cherche pas à imiter des images préexistantes, il découvre les conséquences de ses processus de mise en œuvre. Ceux-ci évoluent ou changent radicalement d'une série à l'autre pour déconstruire la pratique de la peinture.

Il pose le principe que la peinture est avant tout le champ d'une expérience dans le temps et non le fruit de la vision subjective et inspirée d'un artiste démiurge.

Le cartel mentionne une épaisseur importante (3,5cm). Qu'y a-t-il dessous, derrière cette surface colorée ? Il y a des Histoires de peintures trompeuses que Bernard Frize met à plat. Ce qu'il donne à voir c'est l'acte de peindre lui même et lui seul.

A sa façon, c'est un « bricoleur » au sens où l'entendait Claude Lévi-Strauss, à savoir celui qui façonne un nouvel objet, le tableau, à partir de restes récupérés sur d'autres objets. Il transfère les « peaux » de peinture sur la toile, l'artiste prend en charge une simple délocalisation. Il nous rappelle que la peinture est une question de temps et de transformation de la matière, une question de surface, de formes et de couleurs.

 
Claude Rutault

Le cartel et le visuel associés à l'œuvre évoquent l'installation, c'est-à dire l'organisation de différents éléments dans l'espace d'exposition. Mais l'œuvre se définit par son concept et non par sa forme qui n'est pas figée, qui au contraire change à chaque exposition. AMZ est un dispositif évolutif qui exploite de nouvelles données d'apparition de l'œuvre : l'espace et le temps. Le point de départ, la matrice est un ensemble de cent toiles de formats différents. Quand des toiles sont prises en charge par des collectionneurs ou des institutions, elles sont peintes de la couleur du mur où elles sont accrochées. Les autres sont appuyées contre le mur.

Cette œuvre s'inscrit dans la continuité de la décision radicale prise en 1973 par Claude Rutault : ses toiles seront désormais peintes de la même couleur que les murs sur lesquels elles sont accrochées. Le tableau ne se distingue plus de son mur d'accrochage. De plus, le tableau n'est pas un objet intangible, puisqu'il est susceptible de changer de couleur s'il change de place ou si le mur est repeint. L' artiste délègue au collectionneur les choix ( de couleurs, d'accrochage) qui sont cadrés par les « définitions-méthodes », textes qui déterminent les règles de fonctionnement des œuvres.

Claude Rutault remet en cause la peinture par la peinture elle-même, il redéfinit également la procédure d'existence de l'œuvre d'art, le rôle de l'artiste et de l'acquéreur. Le choix du contenu de la toile est laissé, par l'entremise du protocole, à son « preneur en charge » et à son contexte d'exposition.

« je n'ai jamais pensé que mon travail était fermé. Au contraire : je l'ai organisé pour qu'il m'échappe. Mes toiles changent de couleur au gré des collectionneurs, des reventes, des déménagements. Elles sont très souvent actualisées. Mes toiles ont peut-être la vie courte mais elles ont un grand nombre de vies !"

 

mise en relation des œuvres

de la représentation au protocole

Le sujet est remplacé par le protocole . La peinture est le résultat de la mise en œuvre d'une méthode, à chaque fois renouvelée et différente car obéissant à une règle précise : celle dictée par des contraintes assumées. Les tableaux naissent de dispositifs techniques extrêmement éloignés du geste du peintre tenant son pinceau en main. Les deux artistes se servent, tout en les adaptant à leur logique, des instruments picturaux pour dire que la peinture est une fabrication. Qu'elle relève autant du maquillage que de la cuisine, qu'elle est le produit d'opérations matérielles qui n'ont rien de mystérieux. Aux mythologies qui racontent des histoires d'inspiration et d'illuminations, ils opposent l'objectivité d'un travail réglé et prémédité.

du peintre démiurge à l'artiste entremetteur

Le rôle de l'artiste change. Nous observons une mise à distance du statut de peintre. Son intervention devient minime. L'artiste devient simple passeur, accompagnateur, entremetteur au service d'une peinture qui s'autogénère. Cette mise à distance de la pratique se combine à un geste déclaratif qui va servir de fondement à l'œuvre à venir : baliser un processus tout en laissant une grande part à l'aléa et à l'imprévu, mettre sa personnalité et ses affects en retrait et ne faire aucun choix. « Comme les tubes de peinture utilisés par l'artiste sont des produits manufacturés et tout faits, nous devons conclure que toutes les toiles du monde sont des ready-made aidés et des travaux d'assemblage. » Cette démonstration de Marcel Duchamp peut éclairer les démarches de Bernard Frize et Claude Rutault.

peindre c'est chercher à savoir ce que l'on fait en peignant

Nous pouvons être troublé par le fait qu'il n'y ai rien à voir. Il y a chez les deux artistes de l'humour et de la radicalité mêlés. Mais ils nous rappellent que la peinture est un jeu et une Cosa mentale. On peut y percevoir le degré ultime de l' « Éloquence muette » dont les classiques qualifiaient la peinture. Peindre, c'est aussi donner à voir ce qu'est la peinture. "Peindre c'est appliquer sur une surface une matière colorée, pâteuse ou fluide ", selon Étienne Souriau.

 

à partir de la question de la peinture, quelques éléments pour une réflexion pédagogique

aujourd'hui on fait de la peinture... 
« peindre c'est appliquer sur une surface une matière colorée, pâteuse ou fluide » Etienne Souriau. Fabriquer des matières colorées diverses, trouver les moyens de les appliquer sur un support, "écouter" la matière, regarder ce qu'elle a à dire.

aujourd'hui on laisse faire la peinture
L'élève ne cherche pas à imiter des images préexistantes, il se détache des questions de représentation pour découvrir que la peinture peut être la conséquence de ses processus de mise en œuvre.

aujourd'hui tu donnes à faire de la peinture
L'élève conçoit un protocole et délègue sa réalisation à un camarade.


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D'autres fiches CHAARP sur la peinture ou sur d'autres thématiques sont consultables sur le site académique et dans les structures culturelles suivantes :
Frac des Pays de La Loire, Musée des Beaux-Arts d'Angers, Musée des Beaux-Arts de Nantes, Musée de l'Abbaye Sainte-Croix des Sables d'Olonne.


 
auteur(s) :

sandra georget, chargée de mission au Frac Pays de la Loire

information(s) pédagogique(s)

niveau : tous niveaux

type pédagogique : démarche pédagogique

public visé : enseignant

contexte d'usage : sortie pédagogique, classe

référence aux programmes :

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éducation artistique et action culturelle - Rectorat de l'Académie de Nantes