Témoignage de Monsieur Giraud sur la déportation à Buchenwald - page 1 / 44
Le voyage

"Bei funf!" Combien de fois, aujourd’hui encore, résonne dans la tête ce "Bei funf!" que je vais entendre tant de fois. Bei funf : par cinq. C’est qu’en Allemagne, on défile toujours par cinq, et que toutes nos souffrances, nous les subirons par cinq. Et toujours : "Bei funf!" "Bei funf!" . Et nous prenons, à pied, par groupes de cinquante, le chemin de la gare de Compiègne, où nous allons embarquer. Les habitants de Compiègne nous voient passer, et ils savent. Ils ont déjà vu passer de nombreux convois derrière leurs volets à demi clos, de derrière leurs portes entrouvertes. C’est les larmes aux yeux qu’ils nous voient défiler. Et nous, nous chantons, la Marseillaise, même! Et nous arrivons en gare de Compiègne. Un quai, comme les autres. Sur le bord du quai, un immense train de marchandises, avec des wagons à bestiaux. "Hommes : 40, chevaux en long : 8". Aspect accueillant. Bonne couche de paille à l’intérieur. Portes grandes ouvertes. Nous nous disons, ma foi, par groupes de 50, dans ces wagons, eh bien, ma foi, on tiendra le coup.

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