Témoignage de Monsieur Giraud sur la déportation à Buchenwald - page 19 / 44
La vie quotidienne à Buchenwald

   Or, quelle ration ? Je pourrais vous donner un exemple de ration alimentaire. Nous recevions le matin avant de partir au travail, la ration alimentaire pour une journée de travail absolument abrutissante. Une boule de pain qu'il fallait couper en tranches selon le nombre de rations qu'elle devait fournir. Et dans les bons jours, vous connaissez ces pains de 400 que vous trouvez dans les boulangeries, vous voyez la grosseur à peu près, quand, dans les jours heureux nous recevions une tranche de pain qui faisait environ un centimètre d'épaisseur, et encore, c'était un pain synthétique à base de sciure de bois - très nourrissant paraît-il, mais il fallait faire attention à cause de la dysenterie - eh bien nous avions une tranche de pain pour la journée, et nous recevions un bâton de margarine, un pain de margarine de 500 g qu'une grille découpait en 25 bâtons. Les bâtons du milieu étaient réguliers, mais ceux du pourtour étaient souvent réduits à une demi-ration. Et alors, je vous ai dit que nous étions de véritables bêtes humaines . Il fallait voir ces batailles, ces bagarres absolument invraisemblables de détenus pour s’arracher la meilleure ration de margarine, combats dont souvent le seul résultat était que la margarine était perdue pour tous, écrasée, disparue. Et c'était la ration alimentaire pour une journée de travail.