Lecture : les contributions correspondent à la variation de la part de chaque composante dans le PIB avec un signe opposé. Par exemple, la balance commerciale s’améliore de 4,5 % du PIB entre 1981 et 1997 ; le recul de la part de l’investissement en construction dans le PIB sur cette période contribue pour 4,5 points à cette hausse.
Les commentaires sur l’évolution du commerce extérieur français font souvent référence à la compétitivité de l’économie, sa spécialisation ou son positionnement sur les marchés internationaux. Si ces facteurs sont déterminants pour comprendre l’évolution et la composition des flux commerciaux et du solde commercial en niveau, la balance commerciale en part du produit intérieur brut (PIB) répond à une autre logique : elle reflète les décisions de consommation – donc d’épargne – et d’investissement des agents économiques nationaux.
En effet, le PIB est la somme de la consommation, de l’investissement et du solde commercial. La variation du déficit commercial en points de PIB est donc la somme de la variation du taux d’investissement et de celle du taux de consommation, en points de PIB également. Ainsi, une hausse du taux d’investissement, si elle n’est pas compensée par une baisse du taux de consommation, c’est-à-dire si elle n’est pas financée par de l’épargne nationale, doit être financée par de l’épargne du reste du monde. Cela prend la forme d’une dégradation de la balance commerciale (nous faisons ici abstraction des revenus de la balance courante).
Dans ce billet, nous utilisons cette égalité pour mettre en évidence les déterminants du solde commercial français des quarante dernières années. Les résultats sont présentés sur le graphique 1. La courbe bleue montre l’évolution du solde commercial en points de PIB et en écart à son niveau de 1981. Les barres montrent comment les différentes composantes de la consommation et de l’investissement contribuent à cette évolution. Le graphique met en évidence deux faits stylisés :
(i) Les fluctuations de moyen terme du solde commercial correspondent principalement au cycle de l’investissement, qui est largement tiré par l’investissement en construction, aussi bien des ménages que des entreprises.
(ii) La réduction de la part de la consommation des ménages dans le PIB depuis le tournant des années 1990 contribue à augmenter le solde commercial, mais est compensée par une hausse de la part de la consommation publique depuis la crise de 2008.
Il peut paraître étonnant que la compétitivité-prix ne joue pas de rôle direct dans la décomposition obtenue. C’est que, pour un taux d’investissement et de consommation donnés, une hausse de la compétitivité augmente certes les exportations et la balance commerciale en niveau, mais laisse invariante la balance commerciale en part de PIB car elle augmente aussi le PIB. À l’inverse, une baisse du taux d’investissement ou de consommation améliore le solde commercial en part de PIB, mais en diminuant les importations et le PIB en niveau, sauf si elle s’accompagne d’une amélioration concomitante de la compétitivité.
Les gains de compétitivité peuvent donc permettre un ajustement par le haut du solde commercial, sans peser sur la croissance. Par ailleurs, ils peuvent également avoir un effet indirect sur les décisions d’épargne et d’investissement. Par exemple, une dépréciation du taux de change réel peut entraîner une hausse temporaire du taux d’épargne, et donc du solde commercial, si les revenus supplémentaires engendrés par les exportations ne sont pas immédiatement consommés.
La suite du billet revient plus en détail sur les phases de hausse, de baisse, puis de stabilisation du solde commercial.
Amélioration du solde commercial de 1987 à 1997 : hausse de l’épargne et crise de la construction
Entre 1987 et 1997, le solde commercial s’améliore de 4 points, passant de −1 à 3 % du PIB. Deux dynamiques sont à l’œuvre derrière cette évolution.
Premièrement, le taux de consommation des ménages diminue durablement dès la fin des années 1980 (graphique 1, barres rouges). Ce taux dépend lui-même de la part du revenu des ménages dans le PIB et du taux d’épargne des ménages (graphique 2). C’est surtout la hausse du taux d’épargne au tournant des années 1990 qui favorise l’amélioration du solde commercial, même si la moindre part du revenu des ménages dans le PIB a également joué un rôle.