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qu'est-ce qu'être spectateur?

mis à jour le 06/02/2013


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Qu'est-ce qu'être spectateur? Que faut-il transmettre, éveiller, cultiver pour assurer la réussite de cette rencontre avec le spectacle vivant, et particulièrement le théâtre dans sa diversité?

mots clés : école du spectateur, spectacle vivant, théâtre, théâtre-image, écriture, lecture oralisée


Dans ce document nous allons précisément nous intéresser à ce qu'est être spectateur, à ce qu'il nous faut transmettre, éveiller, cultiver pour assurer la réussite de cette rencontre avec le spectacle vivant, et particulièrement le théâtre dans sa diversité.
En effet on n'est pas spectateur de la même façon face à un spectacle déambulatoire ou de rue (où les comédiens peuvent susciter la participation active du public) et à une représentation en salle où la convention du quatrième mur sera respectée. Devenir spectateur c'est comprendre à chaque fois quel est le rôle donné au public, et donc se poser des questions liées à l'histoire du théâtre, du lieu théâtral, de la scénographie, bref aborder des conceptions dramaturgiques essentielles. Le rôle offert/donné au public par l'auteur, le metteur en scène, le scénographe sera-t-il celui d'un témoin muet, qui partage une émotion de manière cathartique ou distanciée, ou bien celui d'un véritable acteur, partenaire de jeu ? Enfin les formes actuelles de spectacle vivant, parfois proches de la performance partagée nous interrogent souvent, de fait,  sur ce que chacun choisit, spectateur dans une telle situation, de prendre comme place.
 
Tous les exercices de pratique théâtrale dont on va faire état dans ce document sont pour nous primordiaux car c'est par ce passage actif et toujours renouvelé entre les deux « positions », les deux « regards » ou pour prendre un terme plus lié à notre propos, les deux « rôles » d'acteur et de spectateur que l'enfant ou l'adolescent va comprendre tout cela. Cette expérience intime du jeu, de l'acte de jouer, même minimale, est à notre avis primordiale dans un tel parcours. C'est ainsi qu'à chaque étape on s'efforcera de proposer des exercices de jeu, d'oralisation ou d'improvisation qui permettront aux élèves de vivre le théâtre et de faire des retours sur leur expérience.
Enfin il faut aussi souligner que tout ce qui pourra favoriser une rencontre avec les artistes avant la représentation est essentiel car elle permet toujours de tisser des liens qui ensuite garantiront l'écoute lors de la représentation, la sympathie au sens étymologique du terme. Même les élèves les plus rebutés par le « théâtre », écarté souvent d'un « c'est nul » même s'ils n'ont d'ailleurs jamais assisté à un seul spectacle, ne sont plus les mêmes lorsqu'ils reconnaissent ensuite sur la scène le comédien (ou la comédienne) avec qui ils ont échangé, ri et qu'ils ont découvert si proche d'eux.
 
On reprendra ici les mots de Lieven Baeyens (in A l'écoute du monde, collection Questions de théâtre, Théâtre la Montagne magique), à propos des spectacles destinés à la toute petite enfance et d'un apprentissage de l'écoute : « la problématique esthétique de l'écoute surgit quand on admet que l'écoute peut ne pas concerner des formes préétablies... mais naissantes (...) L'écoute suppose une connivence profonde qui ne s'appuie sur aucun préalable, si ce n'est une pré-compréhension de ce qui s'annonce. Du coup écouter n'est pas repérer un signal, mais c'est s'ouvrir à un appel ».
 




on n'a pas toujours été spectateur ...


L'Association Nationale de Recherche et d'Action Théâtrale (ANRAT) a mobilisé un certain nombre d'artistes, d'enseignants, de représentants de structures culturelles autour de la signature d'une Charte nationale de l'école du spectateur. Elle peut nous servir de modèle et de référent.
Cette charte insiste également sur la nécessité de lier expérience intime et expérience collective, émotion individuelle et intelligence partagée.
Pour rendre vivante et concrète cette charte, on peut envisager  de rédiger avec les élèves un « contrat du spectateur », reprendre les notions liées au comportement du spectateur pendant les représentations, mais aussi lors des échanges avec les comédiens. Il est important de bien insister sur les notions de prise de risque collective (on ne sait pas ce qu'on va découvrir !), de respect (des artistes mais aussi de ses camarades), d'essai (on tente des choses ensemble !), d'ouverture, d'échange (de points de vue, d'émotions).    

Il paraît alors important de signifier à l'élève qu'il a réellement sa place durant le spectacle, même s'il n'est pas sur le plateau,  et que sa mission consiste à bien tenir son « rôle de spectateur » pour la réussite de la représentation. Bien sûr cette charte ne doit pas être une suite de contraintes car le théâtre doit rester un lieu d'expression, d'émotion et de plaisir partagés.
mise en œuvre concrète : des pistes d'écriture :

V comme Voisin(e) : il (elle) est là comme moi pour écouter et regarder. Je ne le (la) dérange pas.

1-L'abécédaire
A partir des lettres de l'alphabet, il est possible de faire inventer des définitions aux élèves. On s'inspire ici de l'abécédaire proposé par le Nouveau théâtre d'Angers, sur une idée de Françoise de Roubaix.
Cette suite de recommandations va permettre d'aborder de manière ludique avec les jeunes « les droits et les devoirs » du spectateur de théâtre. On peut distribuer le document en laissant quelques lettres de l'abécédaire sans définition. Il s'agira alors pour les élèves de choisir une lettre et d'inventer une phrase, d'imaginer la maxime qui lui correspondra. Cet exercice permettra aux jeunes spectateurs de réfléchir au bon comportement au théâtre !
On peut utiliser l' Abécédaire  comme support et s'amuser à le décliner en dessins ou bien sûr s'en servir pour un exercice d'oralisation.

L'alphabet ou la charte du jeune spectateur.

Abécédaire du spectateur - Quelques exemples rédigés par une classe de sixième :

Attention : Soyez attentif et suivez ce qui se passe pendant le spectacle.
Bonbon : Mmmm ! C'est bon les bonbons, mais évitez d'en manger pendant le spectacle.
Cinéma : Ne pas confondre théâtre et cinéma.
Décor : Observez-le, c'est lui qui va vous transporter dans le monde de la pièce.
Ecoute : Ouvrez grand vos oreilles et fermez votre bouche ; si vous ratez rien qu'un bout du texte, vous ne comprendrez rien.
Faim : Ne mettez pas de nourriture dans vos poches.
Goinfre : Ne vous goinfrez pas avant le spectacle, vous allez être ballonné !
Hurler : Ne pas hurler quand la lumière s'éteint.
Illusion : C'est magique, le théâtre, mais ne vous fiez  pas aux apparences : tout n'est qu'illusion.
Jouer : Ce sont les comédiens qui jouent, pas les spectateurs !
Lumière : Elle sera sur vous au début, sur les comédiens au milieu et à la fin de la représentation.
Musique : Quand la musique commence, concentrez-vous - écoutez-la.
Noir : Pour ceux qui en ont peur, tant pis ! Au théâtre, c'est la couleur de base.
Oreilles : Taisez-vous et ouvrez grand vos oreilles.
Place : Restez assis sur votre siège et ne bougez pas.
Questions : Gardez vos questions pour vous pendant le spectacle et posez-les aux comédiens après la représentation.
Ronfler : Evitez de ronfler dans la salle et de dormir.
Silence : A effectuer sans commentaire. Ne jouez pas de la trompette !
Techniciens : Les techniciens jouent avec la  lumière et le son....
Urgence : En cas d'urgence, sortez de la salle sans vous faire remarquer.
Violence : Ne vous battez pas dans la salle !
WC : Allez-y avant la séance, car pendant le spectacle, ça pourrait déranger tout le monde.
Yeux : Ecarquillez les yeux pendant la représentation pour comprendre l'histoire sur scène.
Zèbre : Même si un zèbre passe dans la salle, surtout ne bougez pas !
 
X comme XXL : les petits devant, les grands derrière !

2-A la manière de Pennac
 : Les dix droits du spectateur
On découvre ensemble cet extrait :
« Le droit de ne pas lire.   
Le droit de sauter des pages.    
Le droit de ne pas finir un livre.   
Le droit de lire n'importe quoi.    
Le droit au bovarysme (maladie textuellement transmissible).    Le droit de lire n'importe où.    
Le droit de grappiller.    
Le droit de lire à haute voix.   
Le droit de nous taire. »    
Daniel Pennac, in Comme un roman.

En s'inspirant de cet écrit, les élèves pourront rédiger une suite de droits du spectateur à la façon de Daniel Pennac. C'est à la fois un travail d'écriture, d'imagination, et de prise de responsabilités. En effet, en écrivant ce texte, ils s'engagent à le respecter, intérêt de cet exercice.
 
S comme Silence : parfois nécessaire dans la salle - parfois terrible sur scène.

3- Les acrostiches

On choisit par exemple le mot spectateur ou acteur et chaque lettre devient l'initiale d'une des règles de comportement au théâtre, par exemple un acrostiche de verbes :
-Siffler, c'est possible à la fin du spectacle,
-Parler fort n'est pas apprécié par ses voisins,
-Ecouter c'est la garantie d'apprécier la représentation,
-Crier c'est aussi pour la fin
-Taper du pied, ///etc...
 
Les consignes d'oralisation peuvent être très variées comme le montrent ces quelques exemples : propositions techniques, ou plus ou moins concrètes , faisant appel à une situation de jeu ou à l'imaginaire :
-    « aller parler à chacun »
-    « adresse de groupe »
-    « adresse unique à un seul auditeur »
-    « avec un défaut de prononciation »
-    « comme une hôtesse de l'air »
-    « quelqu'un ne vous écoute pas »
-    « en changeant de ton »
-    « en arrangeant le rideau »
-    « en homme politique »
-    « très France-Culture »
-    « cherchant à convaincre »
-    « de plus en plus fort »
-    « chaleur »
-    « voix rebondissante »


Tout est possible et  au fil des prestations on souligne ce qui a été réussi, ce qui a marché on non, on s'interroge sur le ressenti de l'acteur ou de l'actrice et celui des spectateurs.

On insiste sur l'entrée et la sortie:
il ne s'agit pas d'abandonner son personnage une fois son texte dit, il faut tenir ses partis-pris en quittant l'espace de jeu.

Il faut essayer de ne pas donner tous les conseils d'amélioration sur la prestation d'un même élève (afin de ne pas l'accabler, et ne pas effrayer les élèves qui passeront après).

Enfin il est important de donner à chacun un numéro qui sera tiré au sort pour définir un ordre de passage.


A comme Applaudissements : pour dire bravo, pour dire merci!


4- et maintenant l'oralisation
: les gardiens du théâtre
A partir de ces écrits on peut oraliser les définitions à la manière de gardiens du théâtre qui viendront sur scène donner des consignes aux spectateurs. Chaque gardien qui vient donner sa définition au public, propose une entrée, une adresse au public et une sortie. Pour cela on peut utiliser une porte, un portant recouvert d'un rideau symbolisant celui de fond de scène, ou encore simplement dessiner un carré au sol: l'espace de jeu et de prise de parole. On insiste sur le fait de garder son personnage tant que l'on est dans l'espace de jeu et de prise parole, en gommant tout geste parasite. Si la sortie de scène est difficile pour les élèves, on peut terminer la scène par un arrêt sur image.
Cette mise en jeu peut être émaillée de consignes de diction (voix soufflée/ voix nasillarde / voix grave / aigüe /forte /chuchotée/ très articulée/) et/ou corporelles  (corps tout mou/ nuque raide/ ventre en avant / pieds en dedans/ marche rebondissante ...).
 L'important est que chaque acteur garde bien son personnage et vive cette "confrontation à" pour mesurer l'impact de l'adresse, l'importance de l'écoute, l'exigence de ne pas sortir du jeu.
Cet exercice peut également se préparer en déambulation collective  avec l'ensemble du groupe : se croiser, se regarder, échanger ses répliques par 2, à plusieurs. On joue avec l'espace mais aussi avec l'autre, les autres... On fait varier les tonalités, les amplitudes sonores, les  rythmes de parole. Il s'agit alors en groupe, d'apprendre à s'écouter et à se répartir la parole ! Cet exercice n'exclue pas un certain brouhaha mais permet à chacun, même aux plus timides, de s'essayer, de chercher et aussi de mémoriser sa phrase. Cela permettra ensuite aux élèves d'être plus à l'aise  lors de l'improvisation individuelle.
A l'occasion de ces exercices on éprouve tour à tour les deux rôles, spectateur ou acteur, soit en adoptant une disposition frontale qui sépare bien les deux espaces (celui du public, celui du jeu ) et fait exister ou non le 4ème mur, soit en laissant l'espace ouvert, non délimité; on est tour à tour acteur agissant ou spectateur des autres un peu comme lors d'une performance réalisée en plein air ou dans un musée. On choisit sa place et son regard.
 
T comme Trac : soyez indulgent, il peut faire son apparition sur scène à tout moment.

5: De plus en plus...
Puis, en gardant la même définition, les acteurs tirent au sort une humeur ou un sentiment qu'ils vont devoir interpréter. Peu à peu la construction corporelle et l'émotion (l'état) vont se construire et on y parvient en demandant une prise parole de répétitive en trois fois, en crescendo. Ex : « un peu en colère », « en colère », « très en colère » ! De plus en plus honteux, arrogant, nerveux... Cet exercice permet d'accentuer les sentiments et d'entraîner les apprentis-comédiens. Au cours de ce jeu d'oralisation en adresse directe ils mesurent aussi l'impact de l'écoute, du soutien du groupe, toutes attitudes qui les aident à surmonter leur trac et à s'améliorer.
Les élèves apprennent ainsi qu'une prestation est d'autant plus réussie que le public est « bon ».
 
auteur(s) :

catherine le moullec, coordonnatrice académique théâtre

information(s) pédagogique(s)

niveau : tous niveaux

type pédagogique : démarche pédagogique, travaux pratiques

public visé : enseignant

contexte d'usage : atelier, classe

référence aux programmes :

ressource(s) principale(s)

vignette théâtre on ne naît pas spectateur, on le devient 06/02/2013
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