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Modélisation et simulation au service de l'enseignement des sciences économiques et sociales.

mis à jour le 10/01/2009


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La création de modèles et leur utilisation en classe : une mise en oeuvre riche mais non sans dangers.

mots clés : modèle, modélisation, simulation, virtualité, tice



La modélisation et la simulation ne sont pas des pratiques nouvelles dans la pédagogie des S.E.S. La nouveauté réside en le développement des TICE (développement des logiciels, implantation accrue des matériels) dont l'effet est de favoriser leur mise en oeuvre.

Un signe fort de ce constat est la référence présente dans l'item 3.6 du B2i lycée : 
"Dans le cadre de mes activités scolaires, je sais repérer des exemples de modélisation ou de simulation et je sais citer au moins un paramètre qui influence le résultat."

I. Construire un modèle avec les élèves.

« Les sciences n'essayent pas d'expliquer, c'est tout juste si elles tentent d'interpréter, elles font essentiellement des modèles. Par modèle, on entend une construction mathématique qui, à l'aide de certaines interprétations verbales, décrit les phénomènes observés. John Von Neumann

"Un modèle est une représentation simplifiée et idéalisée de la réalité". Michel Henry (1).

Cette construction suppose une compréhension suffisante de la réalité (donc la confrontation aux représentations existantes) afin de la retranscrire, même sommairement, en un modèle.

A. Etapes de l'élaboration du modèle

L'identification des éléments constitutifs du phénomène

 

Etape essentielle avec les élèves tel le recensement des principaux déterminants du prix d'un produit

A noter que cette activité peut s'appliquer à des études de type sociologique dans une vision interactionniste telle l'approche du dopage (2) ou la théorie des jeux (dilemme du prisonnier)

L'identification des relations entre les élémentsC'est recenser le lien (entre coût et résultat, productivité et production...) mais aussi la nature de ce lien : maintient, accentue, amoindrit... telle la relation entre l'évolution du prix et de la demande. A noter que ce stade permet la prise de conscience de la multiplicité des causalités.

La transcription mathématique des relations Cette transcription doit être assez respectueuse des relations sans pour autant nécessiter une instrumentation mathématique dont la complexité rendrait absconse la nature même de la relation. Coefficients multiplicateurs, élasticité suffiront amplement.

L'identification des variants et des invariants et parmi ces derniers les hypothèses mises en oeuvre.

Il peut s'agir de variables environnementales sur lequel l'agent économique n'a pas de prise parce que produit d'un comportement collectif (le prix), imposé par la loi (le salaire minimum), effet d'instances supra nationales (taux d'intérêt) ou psychologiques (optimisme des entreprises, propension à consommer...). L'hypothèse est alors l'expression du choix d'une certaine valeur pour ces éléments incontrôlés.

La prise de conscience des fondements théoriques ou  idéologiques sous-jacents .«Un modèle simulable  (ou simulatoire ) se fonde toujours sur une théorie , c'est-à-dire une description abstraite de certains aspects de la réalité en termes de concepts  ou de variables , et de relations  ou de lois «  Jean-Paul Gremy (3).
Le salaire : plutôt coût ou facteur de productivité ? La consommation : effet d'une variation ponctuelle du revenu ou reflet d'une intériorisation à long terme du niveau de vie ? Au stade de la constitution du modèle, cela suppose chez les élèves, d'une part d'avoir conscience de débats idéologiques, et d'autre part de trancher pour privilégier certaines relations.

 


Il est donc stratégique d'inscrire la conception de ce modèle dans une démarche visant à répondre à des axes de recherche.
Cela implique :

Un choix pertinent des variables d'entrées de manière à créer un enjeu pédagogique  

Le fonctionnement d'une entreprise, le marché du travail, le coût d'un produit, mettent en jeu des dizaines de variables. La dynamique créée par le modèle dépendra des mesures prises par les acteurs-décideurs en réponse à une problématique pré-définie respectivement (ex : effet d'une variation de parité monétaire sur la marge bénéficiaire d'une entreprise).


Un choix pertinent des variables de sorties
Parce que la création du modèle s'inscrit dans une problématique, les résultats doivent refléter les aspects qui posent question (ex : les effets sur l'emploi d'une RTT). A noter que la forme de présentation des résultats doit servir leur bonne compréhension : données chiffrées, représentations graphiques, animations (telles les animations flash sur le multiplicateur) (4)...




















D'où la séparation nette entre entrants (input), hypothèses, module de calcul et résultats (output).

D'où la nécessité de trouver le sentier entre complexité et simplisme en privilégiant -tant dans la création du noyau du modèle que dans sa forme- un objectif pédagogique clair au service du mécanisme visé (l'étude du lien entre coût unitaire et quantités produites par exemple). « On n'augmente pas l'utilité d'un modèle en le compliquant au-delà d'un certain point »  Jacques Hebenstreit (3)
 

II. L'utilisation d'un modèle avec les élèves


"La simulation est l'expérimentation sur un modèle . C'est une procédure de recherche scientifique qui consiste à réaliser une reproduction artificielle (modèle ) du phénomène que l'on désire étudier, à observer le comportement de cette reproduction lorsque l'on fait varier expérimentalement les actions que l'on peut exercer sur celle-ci, et à en induire ce qui se passerait dans la réalité sous l'influence d'actions analogues". Jean-Paul Grémy (3)


A. L'intérêt de l'utilisation d'un modèle avec les élèves

La simulation est un atout pédagogique précieux en ce qu'elle ouvre la perspective à diverses démarches :

La prise de conscience de la pluralité des variables qui constituent un phénomènePluricausalités mais aussi paradoxes (la hausse du prix élève le chiffre d'affaire en valeur mais l'amoindrit en volume du fait de l'élascticité de la demande aux prix.

L'aide à la décision (jeu de rôles) et recours au conflitIl est possible de créer une dynamique de jeu de rôles où s'opposent des intérêts contraires et dont les termes du débats reposent sur l'éclairage par la simulation des effets de telle ou telle mesure. Cf notre proposition.

Pédagogie active par expérimentation Etude de l'évolution du coût unitaire selon les quantités produites... une démarche empirique permettant la remise en cause des représentations.

Tester ce qu'on ne peut tester
Accélérer le temps, confronter une réalité à deux mécanismes alternatifs : comparer pour une même base électorale, les effets du scrutin majoritaire et du scrutin proportionnel .


Emettre une hypothèse et la valider

"Tout objet est conquis, construit, constaté". Gaston Bachelard. Constaté par les faits (ou par le modèle qui se substitue à la réalité). C'est le propre de la démarche scientifique.

Mettre en évidence les effets pervers

Montrer par le modèle que réduire le temps de travail est facteur d'augmentation des coûts toutes choses égales par ailleurs, relancer par la demande peut déséquilibrer le commerce extérieur...

Comprendre les interdépendances

L'impact de la baisse des coûts sur l'EBE (simulation sur le coût d'un produit)


Faciliter l'autoévaluation et développer l'autonomie

L'usage du modèle permet à l'élève de tester seul sa compréhension du phénomène en comparant ses attendus avec les résultats de la simulation



 

B. Les difficultés propres à l'utilisation d'une simulation en classe

 


Différencier la virtualité de la réalité  Réalité plus complexe, pondération des facteurs différente, environnement plus instable, facteur humain imprévisible... « Le principal danger résulte peut être de la difficulté de faire comprendre aux élèves l'écart entre la réalité et le modèle » Catherine Duvernet  (5). Pour y arriver il faut que le modèle soit bien perçu pour ce qu'il est, c'est-à-dire une approximation de la réalité. Une bonne méthode consiste - notamment dans les sciences humaines - à proposer plusieurs modèles explicatifs d'un phénomène donné.

Non transparence du modèle (boite noire)L'absence de présentation du module de calcul du modèle ou son excessive complexité peuvent s'opposer à la compréhension des causes justifiant les outputs. Le modèle garde alors une valeur prédictive mais pas pédagogique.

Non perception des paradigmes sous-jacents

Dans Sims City 2000 (simulateur de développement urbain), la croissance de la population était fonction inverse du niveau d'imposition fiscal, la sécurité provenait de la densité des postes de police et les hôpitaux apparaissaient en fonction de la taille de la population (mutation d'une demeure privée et non expression d'une décision ou gestion de la collectivité publique). Combien de joueurs ont-ils repéré là un modèle idéologique spécifique ?


En conséquence on ne peut envisager utiliser un modèle, donc simuler, sans disposer d'une présentation suffisante des relations entre les variables d'une part et une mention et explicitation des choix idéologiques éventuels qui ont présidé à l'élaboration du modèle et nécessaires à son exploitation.


III. Quels outils sont utilisables aujourd'hui avec les élèves ?

 

Cette liste non exhaustive peut être enrichie par vos propositions.

En conclusion

 

Concevoir ou utiliser un modèle revient à recourir à la virtualité en s'inspirant de la réalité sans pour autant jamais la reproduire exactement.

Un arbitrage doit s'effectuer entre complexité-fidélité et simplicité-inexactitude du modèle.

Un compromis est de s'appuyer sur un modèle suffisamment représentatif pour que l'utlisation pédagogique puisse en retirer les fruits tout en précisant, au moment opportun, les limites du modèle, et,tant que faire se peut, en associant les élèves à cette démarche.



Une séquence pédagogique sur l'impact d'une réduction du temps de travail vous est proposée, à titre d'illustration (ressource associée).


Enfin, la réflexion reste à élargir sur le recours à la virtualité au service de la pédagogie, dans la mesure où le modèle est souvent présenté comme une représentation virtuelle des phénomènes physiques, sociaux, économiques....  Rappelons qu'"au sens philosophique, est virtuel ce qui n'existe qu'en puissance et non en acte. Le virtuel se tient en amont de la concrétisation effective ou formelle (l'arbre est virtuellement présent dans la graine). En toute rigueur philosophique, le virtuel ne s'oppose pas au réel mais à l'actuel. Virtualité et actualité sont deux modes différents de la réalité. Est virtuelle une entité "déterritorialisée" capable d'engendrer plusieurs manifestations concrètes en différents moments et lieux [...]" Pierre Levy (3).


Sources


  • Simulations dans l'enseignement des sciences économiques et sociales.
    Catherine Duvernet, Christiane Padiolleau, Philippe Pignot . Acte du colloque. 1992 Association Enseignement Public & Informatique
    http://www.epi.asso.fr/revue/dossiers/d12p143.htm

 
Notes : (voir "Sources")

(1) "Du hasard aux probabilités : émergence historique d'un puissant outil mathématique".Michel Henry, IREM de Franche-Comté.

(2) "Selon l'équation [1], l'avantage net procuré par le dopage est égal à son rendement brut diminué des investissements directs occasionnés par la quête du butin, des revenus qui auraient pu résulter d'une pratique légale, et du produit de la probabilité d'une condamnation par la "valeur" de la sanction à subir éventuellement :     
AN = B - I - R - (pc.vs)
AN est l'avantage net retiré de l'acte de dopage, B est le rendement brut, I est l'investissement consacré à la préparation et à la réalisation de l'acte de dopage, R est la valeur des revenus abandonnés à cette occasion, pc est la probabilité d'être condamné telle que la perçoit le sportif, et vs est la "valeur" de la sanction liée à l'acte de dopage envisagé.
Problèmes économiques, n° 2687 (08/11/2000). Page 29
Auteur : Jean-François Bourg, Centre de droit et d'économie du sport, université de Limoges. Article original : "Contribution à une analyse économique du dopage."

(3) Jean-Paul Gremy in  Encyclopédia Universalis.

(4)  Animations de Joachim Dornbusch.

(5) Simulations dans l'enseignement des sciences économiques et sociales.
Catherine Duvernet, Christiane Padiolleau, Philippe Pignot . Acte du colloque 1992.

(6) Une rencontre du troisième type : simulation et pédagogie. 1992. Jacques Hebenstreit.

(7) Pole Grand Est. Ecole d'été.
Atelier 8 : Apprendre par la simulation (Jeux de simulation, EXAO...) . 1998. Voir sources




 
auteur(s) :

Pascal Vandergucht

information(s) pédagogique(s)

niveau : 2nde, 1ère ES, Terminale ES

type pédagogique :

public visé : non précisé

contexte d'usage :

référence aux programmes :

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