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24 images par seconde

Une commande

En juin 2018, Mme Lebeau, chargée d’opérations pour la région des Pays de la Loire, m'a confié un projet artistique en lien avec la construction du futur lycée de Nort sur Erdre.

L'idée était de sensibiliser les premiers élèves de seconde, c'est-à-dire les quatrièmes de cette année, à la construction de leur futur établissement en leur proposant de participer à une création artistique collective exposée autour du chantier sur les panneaux de clôture.


Mes intentions d'enseignante

• amener des élèves de cycle 4 à s'interroger sur un lieu existant et un projet architectural en devenir. En lien avec le PEAC et les programmes d'arts plastiques, il me semblait intéressant de privilégier la démarche exploratoire et de ne proposer au départ que des pistes de travail. Faire en sorte que ce soit un projet pédagogique et que la réalisation plastique soit avant tout celle des élèves.

• La proposition d'investir la clôture en bac acier qui sécurise le chantier et borde la route mettait en jeu autant de questions que de pistes faisant écho aux trois grands questionnements introduit par le cycle 4

- La représentation ; les images, la réalité et la fiction 
- La matérialité de l’oeuvre ; l’objet et l’oeuvre 
- L’oeuvre, l’espace, l’auteur, le spectateur

 


                 

• s'intéresser à la place du spectateur, celui qui regarde l'oeuvre, à savoir ici les automobilistes et les piétons qui déambuleront sur le parking situé de l'autre côté de la route, alors c'est l'idée de déplacement, de mouvement, de vitesse qui sera à prendre en compte. Et avec elle, les notions d'images fixes et animées, de séquence et de narration.

• partir de la thématique du chantier, qui est juste derrière la clôture, qui est dissimulé, caché. Le chantier, c'est la construction, l'action, c'est travailler, oeuvrer... mais pour les élèves ce n'est pas ce que l'on présente, c'est une succession d'étapes, c'est le processus de création. Cela m'intéressait d'amener les élèves à s'interroger sur cette idée de processus de création et sur la dimension esthétique d'un tel espace.

• Une clôture de 80m de long et 2m de haut, c'est un espace d'exposition particulier pour des collégiens : c'est un espace gigantesque à investir et en même temps ce n'est pas un espace d'accrochage officiel. A l'heure du street art, ce n'est pas si facile d'envisager un tel espace d'exposition.

Le déroulement du projet

A la rentrée de septembre, ce sont donc cinq classes de quatrième et pas moins de 140 élèves qui ont donc été sollicités pour oeuvrer les uns après les autres à la réalisation de cette série d'images. La dimension collaborative s'est traduite par la répartition entre les classes des différentes phases de recherches et de pratique plastique : un projet artistique en relais.

Nous avons commencé par évoquer la thématique du chantier en classe. Ensuite deux classes sont allées sur le site pour effectuer des prélèvements matériels, chromatiques, informatifs... une sorte d'archéologie inversée. Nous venions relever des indices, des éléments avant que le bâtiment n'existe. Comme pour écrire une histoire avant l'histoire ; une préhistoire du lycée. Ou bien justement nous relevions le début, les origines de ce futur établissement. Une séance de prise de vue a également eu lieu. Il s'agissait de photographier le chantier en travaillant le cadrage : du plan d'ensemble au gros plan, de l'étendue du paysage au plus près de la matière.


De retour en classe, nous avons observé ce que nous avions extrait et capté. Nous avons beaucoup discuté de ce qui semblait essentiel, important pour ce projet, et symbolique de cet espace particulier. Sont ressortis des mots clefs, des couleurs dominantes, des matières séduisantes, des espaces et des postures intéressantes. Et puis l'idée de beauté, de prime abord exclue du chantier a commencé à voir le jour dans l'esprit des élèves.

Reprenant certains gestes, certaines actions des architectes, les élèves ont pour certains réalisé des dessins d'observation, d'autres ont travaillé avec des systèmes de calques à partir des photographies, des mots ont été linogravés... Nous avons également extrait des images du timelap et utilisé les photographies des compagnons travaillant sur le chantier que Mme Lebeau nous avait transmises.
 




Et puis il y a eu une phase de réflexion, de flottement. Le projet était en suspens. J'ai alors repris les mots clefs, les pistes évoquées au début. Est revenue l'idée d'archéologie, de strates. Le chantier est une succession d'étapes, la superposition d'éléments matériels, structurels... 



Nous allions nous aussi jouer la superposition et la transparence en associant à la matière photographiée les dessins de paysages et de gestes des compagnons... Il a fallu sélectionner les images : les photographies et les dessins des élèves.. Nous sommes alors arrivés à la phase numérique. 


Tous les éléments graphiques gardés ont été scannés. Avec photofiltre, les élèves ont associé les images. Ces collages numériques donnent à voir des rapports d'échelle entre les fonds et les dessins qui sont parfois bousculés.

Une série de 22 montages est créée. Nous avons ajouté une première et une dernière photographie de matière rouge, comme pour ouvrir et fermer la série. Et puis 24 images c'était plus juste, plus logique, comme un clin d'oeil

  • aux 24 mois de chantier

  • aux 24images/seconde, au cinéma, quand les images défilent sous les yeux du spectateur au volant

• 24 images par seconde, par les futurs élèves de seconde

Et donc après plusieurs mois de prélèvements, de recherches graphiques, de sélections et de pratique numérique, la série « 24 images / seconde » s'est précisée et a été accrochée sur les panneaux de clôture le long de la route en face de la salle Cap Nort.

Si le projet collectif peut s'avérer frustrant pour certains élèves, je crois que ce projet artistique a été l'occasion de mieux comprendre le processus de création et montre une fois encore la place centrale de :

• la pratique plastique comme le lieu de questionnement du sensible.
• la pratique du spectateur et de l'exposition comme le laboratoire d'une pensée culturelle et plurielle en mouvement.

Pauline Crusson, professeure d'arts plastiques

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