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tâches de monstres

mis à jour le 08/05/2023


vignette monstre.jpg

Comment en partant d’une trace plastique fortuite (et hasardeuse) créer une image construite et assumée ?

mots clés : image, ressemblance, hasard, dessin, matérialité, paréidolie, monstre




 
 


Document sans nom

 Cette séquence pédagogique découle de mon envie de faire découvrir aux élèves de sixième l’image et plus particulièrement son apparition à travers la technique du cyanotype.
A partir de cette intuition, il s’agit bien de travailler quelques problématiques plastiques fortes de l’enseignement des arts plastiques : la ressemblance et l’écart, les qualités physiques des matériaux et leurs incidences dans la production plastique, la prise en compte du hasard et de l’inattendu dans le processus de création.

Les questions d’enseignement découlent de ces axes de réflexion :

  • Comment fabriquer une image cohérente en tirant parti des qualités plastiques des matériaux du réel (telles que transparence, translucidité, opacité, textures) ?
  • Comment accepter l’inattendu dans un processus de création ? Quelle est la part de hasard dû au procédé plastique mis en œuvre dans la fabrication d’une image ? En quoi le hasard peut-il être un élément déclencheur à la pratique plastique ?
  • Quel est le rôle de la lumière dans la fabrication d’une image de type photographique ?
 
 
 

Dans cette séquence pédagogique, les élèves sont confrontés à des questionnements plastiques et artistiques qui leur permettent, grâce à une pratique explorative, de découvrir plusieurs utilisations possibles de la technique du cyanotype.
Lors de la première séance, les élèves vont réaliser des photogrammes en cyanotype pour s’interroger sur la matérialité de la production plastique et plus particulièrement sur les qualités physiques des matériaux et leurs incidences plastiques dans la représentation. Puis dans la deuxième partie de la séquence, je propose aux élèves de réfléchir à la relation entre cyanotype et dessin en intégrant le hasard dans le processus créatif.

La compétence expérimenter, produire, créer sera particulièrement travaillée en demandant aux élèves de représenter le monde environnant ou donner forme à son imaginaire en explorant divers domaines ; ainsi que de rechercher une expression personnelle en s’éloignant des stéréotypes.
La réflexion demandée aux élèves sur les œuvres et les artistes proposés permettra de développer la compétence se repérer dans les domaines liés aux arts plastiques, et plus particulièrement décrire des œuvres d’art, en proposer une compréhension personnelle argumentée.

 

 
 



Pour cette séquence, j’ai souhaité me raccrocher à une thématique fédératrice pour des élèves de sixième : le monstre et les créatures fantastiques, mythologiques, imaginaires et fictives. 
La thématique du monstre, du merveilleux et de la métamorphose est au programme de sixième en lettres modernes. Les élèves ont, en amont de cette séance d’arts plastiques, travaillé en français une séquence sur les monstres, notamment à travers l’étude de plusieurs mythes d’Ovide. Ils ont ainsi pu réfléchir au rapport entre métamorphose et changement, transformation, mutation, hybridation et à la pareidolie.
 

 

 

       En arrivant dans la classe, les élèves de sixièmes vont découvrir sur chaque îlot une feuille de papier dessin de format ¼ de raisin recouverte d’un aplat de couleur jaune-vert, ainsi qu’une petite caisse avec des matériaux variés.

Je vais leur expliquer que la feuille de papier n’est pas recouverte d’encre ou d’aquarelle mais d’un mélange de deux produits chimiques (le citrate d’ammonium ferrique et de ferricyanure de potassium) qui rend le papier photosensible, c’est-à-dire sensible à la lumière et particulièrement aux rayons UV. C’est la raison pour laquelle les volets de la classe sont fermés permettant ainsi d’éviter que la lumière du soleil ne révèle le papier préparé.

Les matériaux mis à la disposition des élèves ont été choisis en fonction de leurs caractéristiques plastiques et formels. Il s’agit d’un assortiment de morceaux de papiers variés (papier calque, papier de soie, papier bulles, intissé, gaze médicale, coton fin, toile de jute, tarlatane, rafia…) de petits objets (boutons, bouchons, végétaux…). Ma volonté était de récolter au maximum des matériaux de couleur blanche pour éviter que les élèves ne cherchent à reproduire le réel par la couleur, mais plutôt qu’ils s’interrogent sur les qualités physiques de ces matériaux (transparents, translucides, opaques, ajourés, texturés par exemple) et, in fine, sur les effets plastiques qui découlent de leur utilisation dans une intention de représentation.
 

Le mot « Portrait » est prononcé et écrit au tableau. La demande est précisée :

 

"En composant à partir de certains des matériaux que vous avez à votre disposition, représentez un visage."

 

    Les élèves ont une quinzaine de minutes pour réfléchir à la construction de leur portrait qui renvoie à la question de l’identité.

   Pour que l’on ait le temps d’exposer aux UV tous leurs propositions plastiques, les sixièmes vont travailler par groupe de 3. Ils vont donc, durant cette phase exploratrice, se demander comment tirer parti de ces matériaux pour créer un visage. 

   Comment fabriquer une image cohérente, à savoir un portrait, en tirant parti des qualités plastiques des matériaux mis à disposition ?


 


 

      A la fin des quinze minutes de cette expérimentation pratique, j’invite les élèves à disposer les photogrammes réalisés sous les insoleuses, afin qu’ils soient exposés pendant quelques minutes à la lumière UV. Cette étape peut aussi se réaliser dans la cour du collège, à la lumière du soleil directement. Puis les productions seront rincées dans un bac d’eau, permettant ainsi de révéler l’image obtenue.
 

    Cet instant est toujours magique pour les élèves car c’est celui où l’image passe d’une couleur jaune ocre à un bleu cyan soutenu. De plus c’est aussi l’instant où l’image s’inverse et apparaît. L’eau lave entièrement la solution chimique laissant ressortir les blancs et intensifiant les bleus ; l’image passe du négatif ou positif en deux minutes sous le regard des élèves
 

 

    Les images obtenues sont accrochées au tableau pour un moment de verbalisation en classe entière. Les élèves vont pouvoir voir ce qui a fonctionné (ou pas) dans leur production de photogramme en cyanotype:

  • Comment ont-ils utilisé les matériaux à disposition dans leur représentation de portrait ?
  • Quelles caractéristiques physiques avaient ces matériaux et quels effets cela a produit dans l’image finale ?

    Nous voyons que certains matériaux sont trop opaques et qu’ils n’en résultent qu’une tache blanche dans l’image imprimée. Et au contraire, les élèves constatent que certaines matières laissent des empreintes de textures variées sur la feuille, permettant ainsi la composition d’une image par leur agencement sur le support.

     Nous réfléchissons ensemble aux représentations qu’ils ont fait de visages : est-ce ressemblant avec un visage réel, est-ce vraiment un portrait ? Les élèves vont remarquer qu’il a des déformations, des différences, des exagérations entre leurs représentations et le réel mais que cet écart peut être source d’expressivité. Ils remarquent aussi qu’ils ont essayé de garder des marqueurs forts et constants dans toutes les images tels que les yeux, le nez, la bouche, les cheveux

 

      En amont de cette première séance, j’ai demandé aux élèves de rapporter une image de monstre. Celle qu’il souhaite. Nous accrochons donc ces images pour un échange rapide. Les élèves vont tout de suite décrire les créatures qu’ils ont sous les yeux : elles sont poilues, ont des grandes dents, des griffes, plusieurs yeux, un regard pénétrant… ils vont relever les caractéristiques physiques qui définissent la représentation stéréotypée du monstre, parler de déformations, d’exagérations (grandes dents, longs bras...).  Puis certains élèves vont faire remarquer que sur la plupart des images le monstre souri, mais que ce sourire est inquiétant, dérangeant ; qu’il y a deux familles de monstres, ceux qui ont l’air gentils et les autres, plus terrifiants. Ils vont faire le lien avec la séquence de français et parler de la métamorphose, de la transformation, de l’hybridation, de l’imaginaire et des mythes.
Ce temps de parole nous permet de définir collectivement la monstruosité et sa représentation dans l’intention de réaliser une image de fiction.

 

 
 

     Durant les cinq dernières minutes de cette séance, je distribue aux élèves des carrés de rhodoïds et de l’encre noire. Ils devront, avant de partir du cours, faire une tache d’encre sur le support transparent sans aucune explication supplémentaire. Les taches seront mises à sécher dans la réserve pour la semaine suivante.

 


      La deuxième séance débute par un échange verbal de quelques minutes autour de l’accrochage des portraits de cyanotypes réalisés la semaine précédente et des images de monstres ramenées par les élèves. Ce temps de parole va permettre de raviver dans la mémoire des élèves les caractéristiques de la monstruosité dégagées en première séance. Cela permettra aussi de rappeler quelques principes rapides de la technique du cyanotype (notamment celui du rapport positif/négatif et d’apparition de l’image grâce à la lumière).

    Sur chaque table les élèves de sixième trouveront à leur disposition leur tache à l’encre noire réalisée sur rhodoïd en amont de la séance, ainsi que des plumes à gratter et des pointes sèches (des pointes de compas peuvent être utilisées aussi).

La nouvelle incitation impulse un travail pratique:

"Dans le noir apparaît un monstre....votre tache se transforme en une créature..."

 

Le travail est individuel et nécessite une implication de 30 minutes.

    Les élèves observent leur tache d’encre noire de la tache produite la semaine précédente. Ils s’interrogent, la tourne dans tous les sens et se demandent comment partir de cette forme faite au hasard pour faire émerger la figure d’un monstre. Ils grattent, biffent et griffent la surface noire pour faire apparaitre l’image à partir de la tache.



 

 

 

    Lorsqu’ils ont fini de travailler le support, ils viennent déposer leur Rhodoïd sur une grande feuille de papier dessin préparée avant la séance, avec les solutions chimiques de cyanotype. Les dimensions des insoleuses sont des contraintes et influencent le format final de la production des élèves.  J’ai donc fait le choix de réaliser deux grands cyanotypes collectifs de 40X65 cm, à partir des négatifs grattés réalisés par les élèves. Nous disposons donc 15 négatifs par support, puis nous allumons les lampes à UV.



    Une fois exposées à la lumière et rincées, les élèves découvrent les représentations réalisées sur deux grands formats collectifs. Les élèves assistent ainsi à l’apparition de l’image au fur et à mesure de sa révélation dans l’eau. Image fantomatique qui s’affirme en quelques minutes, laissant ainsi apparaitre toutes les représentations de monstres réalisées par les élèves.

 

 

 

   Pendant les 15 minutes nécessaires à l’exposition de leurs négatifs grattés à la lumière et au rinçage, deux références de la séquence sont présentées au vidéoprojecteur. Les élèves reviennent alors sur ce qu’ils ont fait durant les deux séances en répondant aux questions d’une fiche bilan distribuée. (Voir fiche bilan)

lien de téléchargement
Télécharger la fiche bilan

    

  Puis nous prenons quelques minutes pour un dernier échange face à leurs productions, une amorce de la verbalisation et de la présentation de références qui viendra la séance suivante.

 

Victor HUGO - Forteresse médiévale, 1863

Odilon REDON - Le polype cyclope, 1883

 

 

 

En début de troisième séance, les deux grands formats de représentations de créatures monstrueuses sont accrochés.

    Le début de l’échange permet de s’interroger sur la place du hasard dans le processus de création. Les élèves vont expliquer comment ils sont partis de la tache pour la transformer en une créature monstrueuse et ainsi produire une image : utilisation des caractéristiques formelles de la tache, matérialité de l’encre plus ou moins lisse et opaque qui a permis de créer des textures de fourrures, de poils, d’écailles à la créature par exemple.

    Ils vont donc expliquer comment ils ont accepté et intégré le hasard dans le processus de création, comment ils ont tiré parti de l’inattendu et de ses effets plastiques. Nous allons aussi parler du rôle de la lumière dans leurs productions : ici la lumière est révélée, libérée par le grattage qui forme le monstre. La lumière révèle la figure du monstre, un peu comme dans la forêt ou sous un lit, en pleine nuit, sous l’action d’une lampe on éclaire l’inconnu. Il y a donc un jeu d’apparition d’une forme, celle du monstre à partir d’une autre forme, la tache.

    Les élèves vont décrire les créatures réalisées : en quoi sont-elles monstrueuses ? Quels gestes ont-ils employés ? Est-ce du dessin car nous sommes face à des traits, des hachures, des griffures, des contours, des surfaces ? Certains élèves pourront faire remarquer que nous avons fabriqué une famille de monstres avec ces productions collectives, comme un inventaire, une collection d’images monstrueuses.

 

 

Une fiche de références pour les élèves regroupant quelques œuvres choisies est distribuée en fin de séquence aux élèves.

- Anna ATKINS, dessinatrice scientifique et botaniste, elle réalise des herbiers - 1843
- Matson JONES (Robert RAUSCHENBERG et Jasper JOHNS), Sans titre, 1955 – 365x106 cm
- Victor HUGO, Forteresse médiévale, Choses à la plume, 1863
- Château d’Angers, La Tapisserie de l’Apocalypse, 1375 – détails de créatures monstrueuses
- Odilon REDON, Le Polype cyclope, série de l’album Les Origines, 1883 - lithographie
- Kate CLARK, And She Meant It, 2010

 

J’envisage de retravailler certaines des notions vues dans cette séquence sur la construction de l’image au cycle 4 en envisageant un dispositif qui amènerait les élèves à s’interroger sur la métamorphose, la transformation et les relations et différences entre image unique/multiple. Le dispositif serait construit autour un questionnement plastique mettant en œuvre le passage d’un état à un autre dans la représentation permettant ainsi la réalisation d’une séquence d’images.

 

 
Licence Creative Commons
 
auteur(s) :

céline bertholier

information(s) pédagogique(s)

niveau : tous niveaux, 6ème

type pédagogique :

public visé : non précisé

contexte d'usage :

référence aux programmes :

  
   • La représentation plastique et les dispositifs de présentation – La Ressemblance
    • La représentation plastique et les dispositifs de présentation – La narration visuelle
    • La représentation plastique et les dispositifs de présentation – L’autonomie du geste graphique, pictural, sculptural
    • La matérialité de la production plastique et la sensibilité aux constituants de l’œuvre – Les qualités physiques des matériaux
    • La matérialité de la production plastique et la sensibilité aux constituants de l’œuvre - Les effets du geste et de l’instrument

Les compétences travaillées
    • Expérimenter, produire, créer
    • Mettre en œuvre un projet artistique
    • S'exprimer, analyser sa pratique, celle de ses pairs ; établir une relation avec celle des artistes, s'ouvrir à l'altérité

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