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la tapisserie de Bayeux, Namuth

mis à jour le 22/12/2008


BAYEUX.jpg

Les changements de temps et d'espace dans une même scène.

mots clés : œuvre, analyse, stage


 
Tapisserie de Bayeux
1066/82
 
analyse de l'œuvre

technique
Il ne s'agit pas à proprement parler d'une tapisserie, mais plutôt d'une broderie « d'images et d'inscriptions ». Elle est considérée comme « la plus longue bande dessinée du monde ». Cette broderie devait être accrochée de pilier en pilier, comme tenture décorative dans la nef de la cathédrale de Bayeux. L'avantage de la tapisserie, par rapport au livre ou à la fresque par exemple, est quelle peut être déplacée, exposée, emportée, expliquée, dans des endroits différents.
son sujet
présenter aux regards des fidèles le récit de la conquête de l'Angleterre par Guillaume le conquérant. Vaste sujet qui explique les grandes dimensions de l'œuvre : 0,50 m de haut et 70 m de long.
Broderie sur toile de lin d'assez fine texture, exécutée avec des laines de couleur pour réaliser personnages, animaux familiers ou fantastiques, bateaux, édifices ...
Les différents coloris employés soulignent le relief obtenu par 2 très simples points de broderies : 1 dit de couchage (= point de Bayeux) et 1 de tige utilisé pour exécuter les contours, les traits de visages, les mains, jambes et totalité des inscriptions. (point de chaînette = restauration).
4 Couleurs (: 8 teintes) : bleus, verts, rouges, un jaune chamois s'allient de façon + ou - arbitraire pour rendre un effet de perspective. Le fond de toile est laissé nue et son ton bistre (lin), met en valeur la richesse et l'originalité des teintes.
Les faits sont relatés sous forme de scènes délimitées par une représentation schématique de bâtiment, palais ou manoir seigneurial ...
Le thème historique occupe la partie centrale (33 à 34 cm de haut.), autour : 2 bordures historiées (7 à 8 cm), brodées d'animaux + ou - fantastiques et des fables d'Esope et de Phèdre.
approche historique
La Tapisserie de Bayeux, aussi connue sous le nom de Tapisserie de la reine Mathilde, et plus anciennement « Telle du Conquest » (pour « toile de la Conquête »). A-t-elle était exécutée par Mathilde et ses dames, dans un monastère saxon, dans un couvent normand ? Actuellement on ne lesais pas ! Elle semble avoir été commandée par Odon de Bayeux, demi-frère de Guillaume le Conquérant. Elle a été confectionnée entre 1066 et 1082. Le Concile d'Arras (1025) venait de décider qu'il était souhaitable de parer les églises de tentures à personnages, afin d'informer les fidèles : instruction par les images, une majorité de fidèles étant illettrés. Probablement commencée après la bataille d'Hastings (14 octobre 1066), qui permit à Guillaume, précédemment considéré comme le bâtard de Normandie, de devenir roi d'Angleterre.
Elle décrit les faits relatifs à la conquête normande de l'Angleterre en 1066. Elle détaille les événements clés de cette conquête. Près de la moitié des images relatent des faits antérieurs à l'invasion elle-même. (Il faut aussi remarquer que la broderie est amputée. Sa fin est perdue mais elle devait se terminer, d'après tous les historiens, par le couronnement de Guillaume.) Bien que très favorable à Guillaume le Conquérant, la Tapisserie de Bayeux a une valeur documentaire inestimable pour la connaissance du XIe siècle normand et anglais. Elle nous renseigne sur les vêtements, les châteaux, les navires, les conditions de vie de cette époque. Conservée jusqu'à la fin du XVIIIe siècle dans le trésor de la cathédrale de Bayeux, elle est aujourd'hui présentée au public dans un musée (à Bayeux) qui lui est entièrement dédié. La tapisserie est inscrite depuis 2007 au registre Mémoire du monde par l'UNESCO.

La tapisserie se présente comme un long rouleau descriptif où toute l'histoire se lit comme un récit continu. C'est une « bande dessinée » ou plutôt un film, car elle ne se présente pas sous forme de vignettes associées, mais comme une suite, une succession ininterrompue d'images, un mouvement incessant de scènes qui se chevauchent, avec des séquences, des plans, un montage ...
Les principales scènes sont des « plans fixes » : scènes d'intérieur, moment de palabres, de conseil ou de décision. À chaque fois le cadre est le même : une grande salle voûtée et 2 interlocuteurs.
Il existe d'autres scènes fixes, mais leur importance dans le récit est moindre. Partout ailleurs règne le mouvement.

La tapisserie de Bayeux retrace des faits historiques, pourrait-elle être considérée comme un équivalent de nos journaux actuels (qu'ils soient écrits ou télévisés), qui nous informent d'une actualité se déroulant dans des lieux et des temps divers (ou multiples ?) ?
Le but de cette oeuvre est bien d'informer, de renseigner, de conserver une trace d'événements d'actualité pour l'époque. Pour ce faire ses concepteurs ont utilisés divers procédés nous permettant de comprendre le déroulement physique et temporel de ces événements.

Ref. « La Tapisserie de Bayeux »,Michel Parisse, ed. Denoël. 1988.
« La Tapisserie de Bayeux », Simone Bertrand, ed. Ouest france. 1992

questions soulevées par la tapisserie

Comment représenter dans une même scène ce qui s'est déroulé, se déroule et va se dérouler ?
Sur la tapisserie, on voit Harold et un de ses compagnons avec les genoux à demi pliés au moment d'entrer dans l'église de Bosham, cela permet de montrer les personnages avant leur entrée, debout et leur attitude, agenouillé, une fois dans l'église. On les voit donc déjà en train de s'agenouiller à l'intérieur.
La représentation du mouvement, selon 2 procédés, permet de représenter le passage du temps. On peut voir ce mouvement soit par la traduction de la mobilité dans le « dessin », les gestes, attitudes : sur l'extrait proposé (doc. diaporama), on peut voir les jambes avant des chevaux + ou - pliées, ce qui laisse suposer que le cheval est à l'arrêt et près à partir ou qu'il marche, quand le cheval galope ses pattes antérieures sont projetées vers l'avant. Le deuxième procédé utilisé est système de la décomposition du mouvement : un personnage est représenté dans une attitude, puis juste à coté dans une autre, qui lui succède dans le temps.(ex. : Harold est tué et tombe à terre : on le voit tomber en trois temps, d'abord debout, puis s'affaissant sur son cheval et finalement tombant de cheval, allongé au sol).
L'utilisation d'une dominante de lignes horizontales renforcent l'idée de déplacements rapides.
Dans le document, les cavaliers arrivent au bord de la mer, puis sont dans le navire. Un bouclier tient lieu de séparation entre les deux scènes, nous montrant le temps écoulé.
Le procédé du flash-back, du retour en arrière, est aussi utilisé. Par le biais d'inversion de dessins : des cavaliers galopant de droite à gauche, viennent informer Harold.

Comment représenter les changements d'espaces dans une même scène ?
On peut prendre l'exemple de la mer : l'eau est montrée par des traits ondulés, qui partent du sol et montent sur la gauche (début de la mer), devient plus « épaisse » au centre, quand c'est la pleine mer, et ces traits redescendent, sur la droite, pour rejoindre le sol pour montrer sa « fin ».
Cela peut aussi se traduire par la succession, l'association des lieux les uns à coté des autres, nos habitudes de lecture de gauche à droite nous permettant de comprendre ces différents espaces, comme une continuité de lieux et par la même de temps. C'est un peu comme si nous avions un panorama qui se déroulait sous nos yeux.
En fait il me semble que dans la tapisserie les changement de temps entraînent ceux d'espaces et inversement ...
A chaque changement de séquences (comprenant le déroulement de plusieurs scènes dans un temps, et parfois différents lieux), un signe matériel souligne l'ellipse, s'il est question d'une rupture dans le temps ou le déplacement s'il a changement d'espace.
Pour montrer une ellipse : un arbre stylisé (le + souvent) ou des bâtiments.

Comment représenter la profondeur, l'étendue de l'espace ? (cela peut-il entrer dans cette question des différents espaces : échelonnement des plans?)
Grâce à la superposition des éléments qui sont sensés être les uns derrière les autres, et dans la tapisserie apparaissent les uns au dessus des autres.
Un autre procédé employé, pour signifier l'éloignement, est celui de la réduction des éléments, les grands sont sensés être devant, les petits derrière. Sur cette partie de la tapisserie la partie supérieure est occupée par les navires de la partie centrale, un petit navire se trouve entre deux grands et au dessus (sur la tapisserie), cela prolonge l'espace, crée la profondeur, ouvre la perspective.
La profondeur de champ peut se voir dans les scènes de batailles : la scène centrale déborde dans la partie inférieure : au milieu de la tapisserie se déroulent les combats, en dessous on peut voir les morts résultant de ces combats : temps et espaces différents sont ainsi traduits.
Parfois, pour une meilleure lisibilité ou pour mieux montrer, certains éléments supposés être « loin », sont représenté plus grands que ceux proches. Tout est construit et représenté pour une meilleure compréhension ou lecture.

actualité
ensemble des événements actuels, des faits tout récents. Au pluriel : informations, nouvelles du moment (dans la presse et surtout en images).

Information : Renseignements sur quelqu'un ou quelque chose.
Renseignement ou événement qu'on porte à la connaissance d'une personne, d'un public.

image
Représentation d'un objet par les arts graphiques ou plastiques.


référence au programme, 4ème
Les images et leur relations au réel.
Les images et leur relations au temps et à l'espace : travail sur la durée, la vitesse, le rythme (montage, découpage, ellipse); elle permet d'étudier les processus fixes et mobiles à l'oeuvre dans la BD, le roman-photo, le cinéma, la vidéo.
 
Hans Namuth, Pollock painting, 1950.
analyse de l'œuvre

contexte historique
De 1945 à 1960, l'arrivée de New York au premier plan de la scène artistique marque un changement capital dans le monde artistique. L'influence des surréalistes (ex. écriture automatique de Masson) dans les  années 40 à New-York participe à la naissance de cette peinture américaine. L'abstraction gestuelle - action painting - valorise les structures organiques et l'engagement physique du peintre dans son travail (en relation avec la philosophie existentialiste) avec un rejet et un dépassement de tout ce qui touche à la peinture traditionnelle.

description
Le document est une planche contact montrant 6 photos parmi les plus de 500 prises de vues réalisées par Namuth de Juillet 1950 à Octobre/ Novembre 1950 dans l'atelier de Jackson Pollock à Springs, East Hampton, N.Y.

Il s'agit d'un tirage sur papier de photographies argentiques en N et B de format 6x6. Les photographies nous sont présentées en deux séries positionnées verticalement sans qu'il soit possible d'envisager une quelconque chronologie dans les actions du peintre.

(La position des images les unes par rapport aux autres peut être modifiée sans que cela n'apporte ou n'enlève quoi que ce soit à la lecture des images. Sur ce sujet, voir le difficile travail de curator Pepe Karmel qui, pour l'exposition rétrospective de Pollock au Museum of Modern Art de N.Y. en 1998, utilise les négatifs originaux des photos et des films de Namuth pour essayer de reconstituer les étapes de réalisation des toiles de Pollock).

reconstruction du réel et stratégies de témoignage
Il y a déjà dans la présentation du document et dans le choix des images une volonté de nous montrer ce travail comme un témoignage brut.

Tout d'abord, il s'agit d'un travail de commande à Hans Namuth ( 1915- 1990) qui est successivement photoreporter ( 1937 Guerre d'Espagne , Légion étrangère et Armée américaine en 1941), puis photographe pour des revues New Yorkaises. Namuth n'est aucunement intéressé par le travail de Pollock avant cette commande mais ses expériences de photoreporter apporte de la crédibilité à ces photos. De plus, Namuth utilise un Rolleiflex 6 x 6 à pellicule apparu en 1929. Cet appareil est considéré comme l'outil de précision des photoreporters.
La restitution des photos se fait sur planche contact pour donner un maximum d'authenticité. La présentation d'une planche contact sous-entend une absence de transformation de l'image par absence de recadrage, de masquage, d'agrandissement et de retouche.
La juxtaposition artificielle des images nous fait penser à une succession de photogrammes et nous renvoie, en entretenant une confusion, au premier film couleur que Namuth réalise en 1950 pour essayer d'obtenir un meilleur rendu de la façon dont s'enchaînent les mouvements de Pollock. Cependant, ici, il n'y a pas de succession des actions mais une perte de repères temporels avec une juxtaposition, une simultanéité des actions qui fait que Pollock semble doué d'ubiquité. De plus, les photographies sont prises sur le vif, l'éclairage est naturel.


 


























 
Hans Namuth
Pollock painting,
1950
 
stratégies de représentation
La première intention du photographe est de témoigner de la gestualité singulière et spontanée de la technique du peintre, de l'énergie qui se dégage des mouvements de son corps. Il nous montre des portraits en pied de ce dernier placé dans un lacis infini de peinture s'étendant d'un tableau à l'autre sans sembler vouloir s'interrompre. Le photographe choisit, et donc sélectionne, les moments et les actions « les plus photogéniques », alors qu'il est connu que Pollock travaillait, par exemple, positionné très proche de son support.
Namuth démultiplie les points, angles et distances de visée tout en restant face au peintre. On observe quelques flous occasionnés par les gestes du peintre que le photographe oppose à la netteté, à la linéarité et à l'immobilisme des toiles présentes dans l'atelier. Pollock semble évoluer dans un espace restreint et fermé : profusion de tableaux sans bords au sol et aux murs. Les cadrages serrés renforcent l'impression du corps à corps que mène l'artiste avec son support.

Le photographe semble adopter le projet du peintre, mais devant la difficulté de saisir par le regard les toiles de Pollock (absence de narration, frontalité et absence de lieu idéal d'où les regarder - all-over-, adaptation du rythme du regard à celui des toiles, travail en strates, grands formats), il met l'accent sur la « chorégraphie », sur le personnage. Ses prises de vues opèrent de violents recadrages des œuvres de Pollock. Ces recadrages rassurants d'œuvres voulues décadrées permettent une lecture traditionnelle d'un travail dont la logique d'ensemble échappe et déroute.

La publication de ces photos dans la revue Portfolio en 1951 et la projection du premier film de Namuth permettent enfin d'appréhender le travail de Pollock. Les lecteurs et spectateurs y trouvent la construction du mythe d'une peinture « à l'américaine » : le personnage est sombre, rebelle, amoureux des grands espaces, amateur de grosses voitures, fume des cigarettes et porte des jeans (même image que l'acteur James Dean). Les critiques d'art se focaliseront plutôt sur les procédés de fabrication de l'œuvre que sur les toiles elles-mêmes.

Ces photos installent la réputation nationale et internationale du peintre, et du photographe (Namuth publie également en 1980 un livre présentant un choix de ses photos),à tel point que celles-ci sont très souvent publiées (articles, affiche d'exposition) à la place des œuvres de Pollock pour parler de ce dernier. De plus, l'article du critique Rosenberg installe définitivement Pollock dans cette figure de l'artiste romantique. Il décrit les photos de Namuth et non le travail du peintre. Il présente ce dernier tel un visionnaire de la réalité intérieure qui donne forme à son inconscient en combattant dans «  l'arène de la toile ».

 
questions posées par l'œuvre
- Comment penser sa propre position subjective sans faire de celle-ci le sujet de l'image ?

- Quelles stratégies (représentation et présentation) sont mises en place pour faire œuvre de témoignage ?

- La présentation de documents permet-elle une meilleure compréhension de la démarche d'un artiste ?

-Quel est le rôle de l'image dans les stratégies de médiatisation d'une personne ? Quel est le rôle de l'image dans les stratégies de médiatisation d'un événement culturel? Quel est le rôle de l'artiste dans cette médiatisation ?
 
sources

- Interview with Hans Namuth Conducted by Paul Cummings
At the Artist's studio in New York, New York
August 12 and September 8, 1971.
- Boxer, Sarah (1998-12-15). "CRITIC'S NOTEBOOK; The Photos That Changed Pollock's Life", The New York Times,
- Carmean, Krauss, O Connor, Rose, Clay, L'atelier de Jackson Pollock/ Photos Namuth, 1982.
- Rosalind E. Krauss, The Optical Unconscious, MIT Press, Cambridge, Mass., 1993, p. 244; and The Originality of the Avant-Garde and Other Modernist Myths, MIT Press, Cambridge, Mass., 1985, p. 80.
- A Sum of Destructions, in Kirk Varnedoe and Pepe Karmel, eds., Jackson Pollock: New Approaches, New York: The Museum of Modern Art, 1999, pp. 71-100.
- Harold Rosenberg, "The American Action Painters" from Tradition of the New, originally in Art News 51/8, Dec. 1952, p. 22
 
auteur(s) :

stage didactique et nouveaux programmes 2008/2009

information(s) pédagogique(s)

niveau : tous niveaux

type pédagogique : préparation pédagogique

public visé : enseignant

contexte d'usage : travail à distance

référence aux programmes :

ressource(s) principale(s)

vignette.jpg image et narration 18/08/2009
Analyse d'œuvres conduisant à des leçons.
narration, image, analyse, œuvres lucile leveziel

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