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Schwitters, Warhol, Piranèse, Raynaud

mis à jour le 20/12/2008


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Autour de la question d'espace occupé

mots clés : œuvres, analyse, stage


A partir de l'analyse des œuvres choisies, nous proposons de faire émerger la notion d'espace occupé, d'en déterminer le sens, de repérer dans chacune des œuvres le mode particulier d'occupation de l'espace et la relation de sens que cette occupation engage. Dans un second temps,nous proposons de développer des questions d'enseignement en relation avec les programmes de troisième.
 

analyse des œuvres

analyse de l'œuvre de Schwitters
Le merzbau s'inscrit dans la continuité du travail de collage et d'assemblage. La photographie fixe une étape de cette installation considérable réalisée entre 1924 et 1936.
Repères historiques (cf. article « merzbau » développé sur Wikipedia.fr)
Le nom original qu'il avait donné à cette construction était Cathédrale de la misère érotique dont le contenu était aussi choquant pour l'époque que tout ce que pourraient produire les artistes radicaux d'aujourd'hui. Le terme Merz provient d'un fragment de papier où se trouvait inscrit le mot allemand Kommerz, de Kommerz Bank ; Bausignifie construction en allemand.
Schwitters travailla de 1923 à 1936 sur la forme Merzbau qui atteint la taille de huit pièces dans sa maison de Hanovre. L'arrivée des nazis au pouvoir en Allemagne en 1933 contraint Schwitters à l'exil en Norvège.Il y entama la construction d'un nouveau Merzbau dans les environs d'Oslo mais le laissa inachevé suite à l'invasion du pays et dont les restes brûlèrent en 1951. Il fuit à nouveau, cette fois vers la Grande-Bretagne où il fut interné jusqu'en 1941 en tant qu'Allemand. En1945, malgré une santé fragile, il reprit la construction d'une nouvelle œuvre connue sous le nom de Merz barn, soutenu par le Museum of Modern Art de New York. A son décès, il n'avait terminé qu'un seul mur. On peut aujourd'hui voir à l'Université de Newcastle.
Aucun autre Merzbau n'aurait survécu mis à part quelques éléments de celui établi en Norvège et qui a été filmé en 1999 par Guy-Marc Hinant.Le Sprengel Museum de Hanovre a reconstitué l'un de ces ouvrages qui comporte au moins quatre des pièces qui se trouvaient dans la maison de l'auteur. »
Il apparaît déterminant de comprendre combien le Merzbau constitue l'œuvre d'une vie réengagée lors de chaque déménagement contraint.Cette sculpture protéiforme est réalisée par assemblage de matériaux glanés, matériaux de récupération, déchets, rebuts de nature diverses.Cependant, cette « cueillette d'éléments hétérogènes et hétéroclites »(cf. site : www.cndp.fr/magarts/heter... n'est pas le fruit d'un collectage hasardeux, c'est bien au contraire les qualités physiques et plastiques des matériaux qui déterminent leur sélection. Schwitters met à mal la hiérarchisation des matériaux, nobles et pauvres. Le déchet, le rebut font irruption avec radicalité dans la « chasse gardée » des matériaux réservés au champ artistique. Par cet acte, c'est la vie dans sa trivialité, sa quotidienneté qui s'invite au grand banquet du monde« aristocratique » de l'art. Ces éléments sont intégrés au fur et à mesure, l'œuvre ne connaît pas de stade d'achèvement, elle est en constante évolution. l'œuvre semble se générer elle-même, se déployer selon son propre principe de "vie" en poussant au delà les limites jusqu'à exclure l'espace de vie pour lequel il était prévu au départ.Car c'est au cœur de sa maison que s'érige cette sculpture protéiforme.Progressivement elle contamine tous les espaces, traverse trois niveaux, s'étend sur huit pièces. L'espace de vie est totalement mobilisé et devient espace de l'œuvre. Les formes organiques remettent profondément en cause la structure initiale de l'habitat, la maison est à la fois le matériau premier, son support, son cadre et son cocon.




 




 

Kurt Schwitters
le merzbau
installation réalisée entre 1924 et 1936 dans sa maison à Hanovre
 
analyse de l'œuvre  de Piranèse

Impression de démesure de l'espace architectural, l'homme apparait perdu dans cet espace labyrinthique gigantesque. (Piranese esquisse quelques personnages minuscules). Le rôle de la lumière concourt à créer cette impression tragique, elle pénètre par faisceaux perçant l'épaisseur des ténèbres . La lumière provient du haut, nous sommes comme enfermés en fond de cale. La représentation ne montre qu'une partie de cette prison imaginaire. Le choix du cadrage et le respect de la perspective installe le regard au cœur même de l'œuvre. Par le jeu des premiers plans et le respect d'une représentation de l'espace rigoureuse et réaliste, le spectateur a déjà fait un pas dans cet univers carcéral. Le regard emprunte tous les passages, arpente les escaliers, s'immisce dans le lointain sans jamais trouver quelconque sortie. Tout n'est que porte close, grille massive et opaque le regard se bute dans les limites de l'image. Tout le mérite de Piranese est defaire ressentir l'enfermement du prisonnier par celui du regard.L'espace plan devient un espace de projection outrepassant les limites du format. De nombreux éléments architecturaux se prolongent dans notre représentation mentale en dehors du cadre visible de l'œuvre. Le regard est mis en crise par cette quête sans fin.
On peut parler ainsi de saturation de l'espace, d'un espace qui emprisonne le regard au sein de ses limites mais quelles sont-elles ces limites celles perçues ou celles de notre représentation mentale ?
Le regard confiné dans cet espace plan est enfermé dans les limites de l'image. En ce sens c'est le regard explorant l'espace représenté qui occupe l'espace de l'œuvre et réciproquement. Piranese dresse des barricades, il n'y a ni début ni fin, le spectateur pourtant physiquement extérieur à l'espace plan se projette au sein de la représentation, la prison contamine son univers mental et engendre une angoisse propre à la claustrophobie.

 




 

Piranese
  planche VII du recueil des prisons , gravure à l'eau forte, 1750
 
analyse de l'œuvre de Jean Pierre Raynaud

Dans son œuvre « 1000 pots bétonnés » Jean-Pierre Raynaud occupe l'espace par les matériaux, mille pots rouges de même taille, rangésselon un alignement quasi maniaque.

La serre, qui à l'origine est dévolue à la vie végétale, sorte de pouponnière, voit ici sa fonction complètement renversée. Les pots bétonnés qui sont au départ l'écrin de vie de la plante sont minéralisés. Les pots de fleurs ainsi stérilisés deviennent le symbole de l'immuable, de l'absence de vie. Lieu dédié à la vie il devient tombeau.
La répétition visuelle de ce motif rouge aligné selon un principe rationnel d'occupation de l'espace ne perturbe pas la circulation hypothétique mais accroît la rigueur outrancière de cet espace tombal propre au monument.

Ces mille pots bétonnés, ancrés dans l'espace, comme un arrêt du temps,empêchent toute possibilité de vie pour prévenir l'inévitable processuset de mort.
A la vue de cette œuvre, il en ressort une certaine angoisse. On y ressent tout d'abord un poids: le poids des pots bétonnés et rangés,mais aussi le poids de la mort, de la permanence et de l'éternité qui en découle.
Puis, l' angoisse est perceptible par le mal-être ressenti à la vue de cet univers aseptisé, aucune vie n'est possible, l'ensemble reste immobile et même inquiétant.
L impact de la couleur, de la quantité, du rangement y participe largement.

L'univers est glacial, rigoureux. Le rouge donne signe d'alerte, nous rebute dans ce contexte.
les carreaux de céramique blanc qu'il utilise jouent ici le rôle de barrière immunitaire. Le carreau de céramique industriel, hygiénique,lavable et anti-corrosif, n'a normalement pas sa place dans ce lieu où la vie est sensée naître et s'y développer.
Là encore, le message est clair: il faut éviter tout rapport à la déchéance, au danger et à la maladie. L'espace est occupé et construit de manière à le surprotéger. Rien n'est laisse au hasard.

La serre laisse cependant un échappatoire à notre regard, et au mal-être ressenti à la vue de cette occupation de l'espace si particulière. En effet, les vitres nous permettent de voir au-delà de cet l'espace fermé et aseptisé. La lumière extérieure et la vue sur le parc, et donc la nature, nous rappelle à la vie.
 




 
Raynaud
1000 pots bétonnés pour une serre ancienne  1986
domaine de Kerguéhennec
 
analyse de l'œuvre de Warhol


Warhol, publicitaire de renom se lance en 1960 dans la production de peinture. Il adhère au pop art Pour se distinguer des productions de ses collègues il adopte une technique (la sérigraphie à partir de photos) et des thèmes (produits et images de grande consommation )  qui deviennent sa marque de fabrique.
1962 est une année clef dans la génèse des 25 marilyn.
En 1962, Marilyn Monroe, actrice emblèmatique du cinéma américain meurt (suicide ou assassinat?).

Warhol qui admire marilyn depuis des années réalise une oeuvre pleine d'ambiguité entre hommage et mise en abime du mythe.
Warhol pose sur un fond bleu 25 portrait de marilyn.
Il s'est servit d'une photo qu'il a retravaillé pour ne gardé que les traits principaux. Avec la technique de la sérigraphie il a posé 25fois la même image de l'actrice. Les 25 images sont différentes dans les couleurs et les valeurs. La technique même de la sérigraphie est à la base de ces nuances.
Marilyn icone de la sensualité perd ici son humanité
L'émotion se désincarne. L'image de maylin se désincarne. Ce n'est pas le reflet de la réalité. C'est l'image de l'image. Un espace entièrement occupé par une image qui semble s'éloigner de son modèle comme un lointain écho de la réalité. L'émotion s'éloigne.
Chez Warhol, la répétition de la figure se rapporte souvent à son exténuation.
Exténuation = épuisement, fatigue.
Le choix des sujets est en rapport avec cette obsession de la mort.


 




 

Warhol
25 Marylin  - 1962
 
Un « espace occupé », qu'entend-on par ce terme ?
Espace occupé renvoie à l'idée d'un espace à l'origine libre, vacant ou destiné à un autre usage. L'occupation de l'espace est souvent ordonné selon un principe d'organisation de cet espace.

L'occupation interroge la nature, l'usage de l'espace préalable,l'identité visuelle de l'occupation, les limites de l'espace occupé. A chaque fois l'occupation suppose une logique de perturbation,d'appropriation d'un espace qui ne m'appartient pas ou qui n'est pas dévolu à l'usage que j'en fait. L'espace est neutralisé par l'occupation... L'espace est poussé « dans ses retranchements ».

Dans le langage militaire, l'occupation est un « terme employé pour désigner la présence de forces militaires d'un État sur le territoire d'un autre État, sans que ce territoire cesse de faire partie de celui-ci ». Cette acception du terme renvoie à l'idée d'invasion,d'annexion d'un espace. Dans ce sens je ne peux qu'occuper le territoire de l'autre. Lors de manifestations, l'occupation d'un lieu est associée à l'idée d'un blocage, l'espace est parasité, son usage est contrarié voire bloqué. L'occupation renvoie à l'idée d'une visibilité de cette occupation. Il n'y pas d'occupation discrète...
Lorsque j'occupe un espace, je prends en compte ses limites, ses frontières, ses dimensions .L'espace occupé est nécessairement un espace circonscrit. Je m'organise dans le but de couvrir une surface la plus importante possible, l'espace est saturé. J'exploite l'espace en poussant ses limites. Les frontières, les bords de cet espace sont mis en exergue par l'expansion , le développement de son occupation.
Occuper implique l'idée d'un déploiement spatial mais aussi temporel.Quelle est la permanence de cette occupation ? Il doit demeurer une inadéquation de l'occupation. S'il est occupé l'espace implique unusage préalable qui se trouve contrarié, l'occupation dérange...
 
synthèse comparative des modes d'occupation de l'espace dans chacune des œuvres et leur relation de sens.

Dans l'œuvre de Schwitters, l'espace privé est contaminé par l'œuvre qui se développe selon un processus organique. Elle se déploie,grandit, se développe jusqu'à parasiter l'espace d'origine. L'habitat devient support et cocon de l'œuvre sculptural. L'espace est en mutation il perturbe la fonction première de l'habitat.

Dans l'œuvre de Warhol, on peut distinguer deux dimensions complémentaires de l'espace occupé :
La première est relative à cette rationalisation de l'occupation du format. Warhol répète 25 fois l'image du portrait de Marylin Monroe réparties en 5 lignes et 5 colonnes. L'image est répétée de façon systématique respectant une grille sous jacente, probablement que le5x5 n'est pas le fruit du hasard (5 au carré). Ce remplissage et cette répétition renforce à la fois les limites de l'espace plan mais a aussi la particularité de concevoir l'image qu'une portion d'un espace sans limite selon le principe du all over.
La deuxième nous conduit à interroger l'interpénétrabilité des espaces,celui des mass médias propagateur d'une culture populaire faisant irruption dans l'espace savant de l'art. L'image de Marylin ainsi reproduit est sacralisé, Marylin est morte en tant que femme et naît entant que mythe.

Dans l'œuvre de Raynaud, la serre est à l'origine dévolue à la vie végétale. Les pots bétonnés qui sont au départ l'écrin de vie de la plante sont minéralisés. La serre est une « pouponnière », les pots de fleurs ainsi stérilisés deviennent le symbole de l'immuable, de l'absence de vie. La fonction de la serre est renversée, lieu dédié à la vie il devient tombeau. Cette idée de permanence est renforcée par l'ancrage des pots. La répétition visuelle de ce motif rouge aligné selon un principe rationnel d'occupation de l'espace ne perturbe pas la circulation hypothétique mais accroît la rigueur outrancière de cet espace tombal propre au monument.

Dans l'œuvre de Piranese, l'espace de la représentation rend captif le regard qui parcourt sans cesse l'espace plan de l'œuvre en renforçant la prégnance des limites. Le regard bute sans fin, l'occupation de l'espace accroit ses limites. La quête de liberté est vaine, c'est l'espace mental qui se trouve dès lors occupé, pris à la gorge par des pulsions claustrophobes.

questions d'enseignement
Vous trouverez les extraits relatifs au programme d'arts plastiques de troisième correspondant aux questions développées :
L'espace, l'œuvre et le spectateur
Traditionnellement, les arts plastiques sont considérés comme les arts de l'espace et de la forme. Ces données sont inséparables dans une dialectique du plein et du vide, de l'intérieur et de l'extérieur. La forme se déploie dans l'espace et en même temps, elle le génère. C'est ainsi que tout objet occupe, d'une manière ou d'une autre, un certain volume et manifeste l'espace. Différentes qualités de l'espace nous affectent en fonction de son échelle et de ses mesures, l'espace habitable, l'espace miniaturisé, la vaste étendue naturelle ou urbaine,le monument.
Les situations d'enseignement ouvriront aussi sur de nouvelles études : l'espace comme matériau de l'architecture et des œuvres environnementales, l'espace comme dimension de la réalité à expérimenter physiquement, l'espace comme dimension de dialogue et d'interaction entre l'oeuvre et le spectateur.

Le programme de troisième s'organise selon trois entrées où interagissent la pratique et la culture permettant d'explorer les propriétés de l'espace.

La prise en compte et la compréhension de l'espace de l'oeuvre : il s'agit, pour en comprendre la portée artistique, d'affiner la perception des dimensions de l'espace et du temps comme éléments constitutifs de l'oeuvre: oeuvre in situ, installation, environnement et les différentes temporalités de celles-ci : durée, pérennité,instantanéité. L'espace de
présentation de l'oeuvre : rapport entre l'échelle de l'oeuvre et l'échelle du lieu, accrochage, mise en scène, éclairage ; l'espace scénique et ses composants : cube scénique de la représentation picturale.

apprentissages
Elles permettent également de modifier des espaces pour en travailler le sens.
Elles permettent de découvrir et de s'approprier l'environnement quotidien.

compétences artistiques en fin de troisième

- Prendre en considération, dans une production artistique, les données physiques d'un espace plan longueur, largeur, proportions) ;
- Produire du sens en disposant des objets, des matériaux, des volumes dans un espace déterminé ;
- Prendre en compte le lieu et l'espace comme éléments constitutifs du travail plastique ;
- Transformer la perception d'un espace (représenté naturel ou construit).

quelques pistes d'enseignement qui restent à préciser, clarifier et développer :

- A quelles fins l'œuvre peut-elle faire dialoguer deux espaces différents ? (privé/public ; espace public/espace de l'œuvre) ?
- Occuper un espace implique-t-il son appropriation?
- Comment une oeuvre peut-elle s'approprier un espace?
- Comment une oeuvre peut-elle changer la perception de l'espace?
 
auteur(s) :

stage didactique et nouveaux programmes 2008/2009

information(s) pédagogique(s)

niveau : tous niveaux

type pédagogique : préparation pédagogique

public visé : enseignant

contexte d'usage : travail à distance

référence aux programmes :

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arts plastiques - InSitu - Rectorat de l'Académie de Nantes