histoire-géographie-citoyenneté

Quels enseignements peut-on tirer du rapport Duclert sur le génocide des Tutsi ? La normalisation/réconciliation sont-elles encore possibles ?

Un état des lieux de la recherche sur ce crime contre l’humanité a été posé lors des Rendez-vous de l’Histoire de Blois – octobre 2021. Les intervenants, divers mais tous spécialistes de la question ont pu montrer les avancées de la recherche depuis 27 années mais aussi les chantiers qui restent à investiguer, particulièrement après le rapport Duclert.

Quelques mises en perspective d’une table ronde très riche qu’il faut visionner dans son intégralité pour en comprendre les enjeux (voir la captation vidéo).

La recherche reste balbutiante même si de nombreux ouvrages ont été publiés depuis 27 ans. Cependant, les chercheurs sont peu nombreux car les recherches sont coûteuses, tant sur le plan financier qu’humain et psychologique. S’atteler à l’étude des génocides engage l’historien et la personne humaine. De plus, l’accès à la langue, le Kinyarwanda, est complexe pour les chercheurs européens et anglo-saxons. Des « continents archivistiques » sont actuellement en émergence mais il faudra plusieurs dizaines d’années pour les exploiter.

Le processus génocidaire ne naît pas spontanément mais est le résultat d’un processus très lent, programmé et méthodique. Le régime d’Habyarimana doit être étudié comment une dictature qui bascule dans un pouvoir génocidaire.

Le travail sur les victimes est essentiel pour comprendre les mécanismes génocidaires. C’est ce que fait avec talents Hélène Dumas, en particulier dans son dernier ouvrage - Sans ciel ni terre. Paroles orphelines du génocide des Tutsi (1994-2006) (La Découverte, 2020). Elle affronte le plus obscur d’un génocide, le mal qui est fait à des enfants, avec cette volonté de détruire la filiation par exemple.

Les responsabilités internationales doivent enfin être évoquées. Et ce fut la raison d’être du rapport Duclert concernant la France, mais des investigations sur d’autres acteurs, telle l’ONU sont nécessaires.

Sur le rôle de la France. Vincent Duclert précise son rôle en revenant sur le texte de son rapport :  “la crise rwandaise s’achève en désastre pour le Rwanda, en défaite pour la France. La France est-elle pour autant complice du génocide des Tutsi ? Si l’on entend par là une volonté de s’associer à l’entreprise génocidaire, rien dans les archives consultées ne vient le démontrer.” Pour lui, l’historien doit rester dans son rôle, la commission n’a rien trouvé concernant une éventuelle intention française de s’associer au programme de destruction des Tutsi. Cependant, les conclusions du rapport n’interdisent pas aux magistrats et aux parties civiles de poursuivre l’État français pour complicité.