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mis à jour le 27/04/2013
Le tableau de Legrand a été peint à l'occasion d'un événement politique et diplomatique qui occupa le devant de l'actualité pendant plusieurs mois, la visite officielle que le tsar Nicolas II effectua en France en octobre 1896
mots clés : République, presse, nationalisme, Nicolas II, amitié franco-russe, colonisation
Le Petit Parisien publia ce portrait du tsar et de sa famille quelques jours avant la visite prévue début octobre. Il s'agissait de préparer l'opinion en donnant de Nicolas II l'image d'un homme simple, jeune père de famille et bon époux ; l'impératrice Alexandra qui porte la princesse Olga dans ses bras étant une image propre à émouvoir le public. Il s'agit pourtant bien d'un portrait officiel : le tsar est en grand uniforme et son maintien est bien celui d'un souverain ; la relation entre les personnages reste distante et les attitudes quelque peu guindées. |
A l'Arc de triomphe « [...] Et la masse grossit toujours. Rien n'est merveilleux comme l'aspect, depuis l'Arc de Triomphe de toute cette avenue des Champs-Elysées, perle parisienne enguirlandée et enrubannée, qui s'étend jusqu'à la place de la Concorde : débarrassé de son échafaudage l'Arc de Triomphe lui-même, présente un aspect grandiose et se reconnaissant par l'absence de toute ornementation extérieure. Voici le 22e d'artillerie, avec trompettes et canons, qui prend position. Des canons retentissent : c'est le moment de l'arrivée. Remous dans le public. Cinq à six cent mille personnes sont massées sur l'avenue des Champs-Elysées. Les soldats, sur un commandement, présentent les armes. La curiosité générale est à son paroxysme ; mais c'est le martyr des journalistes qui commence. Un vieux commandant du 129e de ligne, très brusque, fait poursuivre les journalistes présents, bien que munis de coupe-files réglementaires. Malgré le très aimable commissaire de police du faubourg Saint-Honoré, le commandant se cuirasse derrière la consigne, malgré l'avis d'un général présent. Nous sommes obligés de fuir derrière les curieux, et, seules les acclamations assez nourries des assistants mettent fin à l'incident. On crie : « Vivent les Spahis ! Vivent les Cheiks (sic) » quand l'escorte russe passe majestueusement au pas. Mais voici, précédée de Montjarret, la voiture impériale. Le Tsar se tourne à droite à gauche, visiblement impressionné de cette foule compacte, respectueuse, qui l'acclame avec dignité. L'impératrice en blanc, se penche vers M. Félix Faure qui semble lui désigner l'arc de l'Étoile, et faire, à la jeune et élégante souveraine, l'historique de l'Arc de Triomphe. On surprend sur les lèvres de l'impératrice un « Oh » d'admiration et aussi de joie à la vue de cette foule respectueuse, élégante, qui, par-dessus les baïonnettes des soldats, fait retentir les vivats. Le Tsar, lui, salue en portant sa main au bonnet, sans prendre une minute de repos. En passant devant le drapeau du 129e de ligne, il s'incline davantage et le salut se prolonge. M. Félix Faure lorsque la voiture [...] a pris les Champs-Elysées, désigne à l'empereur toute une maison, à gauche, dont le toit est noir de monde. Les chevaux ont, du reste, sensiblement ralenti l'allure, de façon que tout le monde peut voir le souverain. [...] Un Viennois, tout près de moi, me dit : « - Monsieur, j'ai assisté à l'entrée de Leurs Majestés à Vienne : eh bien ! Jamais il ne m'a été donné de voir un jour de fête comme celui-ci, Parisiens et provinciaux semblent tous, de l'ouvrier et de l'employé au grand seigneur, être des gentlemen fortunés. C'est admirable ! Malheureusement un accident se produit inévitable en la bousculade et le désir de tous de « voir » quand même. Quand le cortège débouche à gauche de l'Arc de Triomphe, deux branches d'un arbre situé entre les avenues du Bois et de la Grande Armée se détachent sous le poids des gens qui y avaient grimpé et entraînent avec elles une demi douzaine de curieux. Ceux qui se trouvaient dans l'arbre ont eu heureusement le temps de s'échapper, et comme la hauteur n'était pas considérable, les blessures ont été légères à la tête et aux épaules. On a transporté les blessés dans une pharmacie de l'avenue de la Grande Armée. » Le Gaulois, 9 octobre 1896 |
« Le canon tonne, un grand brouhaha s'élève, puis l'attente fige tout ce peuple dont les voeux se concentrent sur le long ruban d'avenue vide. Les petits fantassins rouges restent fixes. La voiture du préfet de police passe au grand trot et voici qu'une rumeur, grossie en clameur, s'élève et gagne de proche en proche. L'attente tourne à l'anxiété. Les fantassins portent et présentent les armes et dans l'acclamation puissante qui semble sortir d'une seule poitrine, voilà [...] dans une pompe qui les isole et les espace, le piqueur Monjarret et les postillons de la berline impériale au petit trot. On distingue la robe et l'ombrelle blanches de l'impératrice qui masquent l'uniforme hussard [de l'empereur]. Sur le devant, le président de la République. Deux mondes, l'immense Russie et la belle France, tiennent en ces trois costumes empanachés, des bonnets d'Astrakan, des chamarres d'or. » P. et V. Margueritte in Écho de Paris, 10 oct. 1896 (cit. in Marmouget, pp 58-59) |
« Le train rapide de huit heures vingt cinq du matin a amené hier à la gare de Lyon les six chefs arabes venant d'Alger, dont le Petit Parisien avait annoncé l'arrivée. Tous sont décorés de la Légion d'Honneur [...]. Les chefs portent de superbes burnous blancs ou bruns dorés, brodés d'or et ornés de glands également or, et de vestes de drap fin de diverses couleurs et de bottes rouges couvertes d'arabesques d'or et d'argent. Leurs yatagans, poignards et pistolets sont richement damasquinés et incrustés de pierreries. » |
« Juste devant la voiture de l'empereur de Russie, lorsqu'il fit son entrée triomphale à Paris et lui formant une étincelante escorte, s'avançaient, graves et imposants, les fidèles serviteurs de la France, les chefs arabes et tunisiens. Leur attitude était si noble, si majestueuse, ils avaient si grand air sur leurs admirables chevaux que l'on eut dit un peloton de rois. La foule sur leur passage fit entendre les acclamations enthousiastes ; quant à eux, ils saluaient avec une magnifique dignité. Ces hommes, tous parmi les plus illustres et les plus puissants dans leur pays, sont des Français très dévoués. Ce sont Si Hamza, chef des Oules Sidi Cheiks ; Si Mohammed-ben-Gana, agha des Zibans ; Si Ferhat-Mouly, caïd des Béni-Maïda ; Si Lakdar, bac-agha des Larbaa ; Ali-Bey, caïd des Béni-Bou-Sliman, etc., etc. En leur confiant la garde de l'empereur, on a fait l'honneur à notre hôte et en même temps on rendait un juste hommage à la fidélité des chefs arabes. » |
« L'Algérie ne sera pas seule représentée aux fêtes données en l'honneur des souverains russes. Hier matin sont arrivés à Paris trois des principaux chefs tunisiens. Ils sont accompagnés par trois personnages notables, cavaliers arabes fameux aux confins du désert. Tous ont superbe allure sous leurs longs burnous blancs sur lesquels se détachent les broderies d'or de leurs vêtements et les incrustations de leurs armes. Ainsi que les aghas d'Algérie, les caïds tunisiens et leur suite ont été conduits au Cercle militaire [...]. » |
Bruno Hérody, chargé de mission au Musée des Beaux-arts de Nantes
éditeur(s) :Claudie Ferchaud
devant « Le Rêve », le voyage de Nicolas II en France | 26/04/2013 | |
Le tableau de Legrand a été peint à l'occasion d'un événement politique et diplomatique qui occupa le devant de l'actualité pendant plusieurs mois, la visite officielle que le tsar Nicolas II effect ... | ||
République, presse, nationalisme, Nicolas II, amitié franco-russe | Bruno Hérody |
histoire-géographie-citoyenneté - Rectorat de l'Académie de Nantes