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l'artiste comme archiviste

mis à jour le 12/01/2020


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Comment créer en recourant à des documents d'archives ?

mots clés : mémoire, dessin, sculpture, archive


Document sans nom


Ce travail proposé aux élèves de Première Spécialité Arts Plastiques est lié à la notion de mémoire ; il s'inscrit dans le "champ des questionnements artistiques transversaux" des nouveaux programmes et puise à plusieurs sources :

 
  • 1. la visite d'une exposition

« L'exposition "Contre-vents" raconte un chapitre de l'histoire sociale et politique de la Bretagne et de l'Ouest français, en s'intéressant à des formes d'actions qui se sont manifestées dans des luttes et des contre-cultures autour de Saint-Nazaire, de 1968 à aujourd'hui. À partir de documents variés issus – entre autres – de la création graphique, cinématographique ou littéraire, l'exposition apporte un point de vue inédit sur les liens entre geste artistique et action militante.
(...) L'image de l'étudiant parisien lançant des pavés en Mai 68 a fini par se confondre avec un mouvement qui bloqua la France entière, et par recouvrir les "événements" dans d'autres zones géographiques et sociales. On sait pourtant que Mai 68 a produit des formes de lutte et de solidarité dans les milieux ouvriers et les zones rurales, générant des expériences politiques, culturelles et artistiques, qui aujourd'hui encore représentent des points aveugles de l'Histoire. »





Vue de l'exposition Contre-vents (Solidarités ouvrières, étudiantes et paysannes dans l'Ouest de la France : une généalogie), Le Grand Café, Saint-Nazaire, du 26 mai au 29 septembre 2019 (photo Marc Domage)
 
  • 2. la lecture d'un texte

« L'artiste comme historien choisit plutôt de se remémorer les événements qu'il est décidé, collectivement, d'oublier – ou il choisit de se remémorer des choses, des événements, différemment, d'une multitude de manières défiant les narrations qui dominent l'histoire officielle. (...) Dans la plupart des cas, l'artiste comme historien est le gardien d'autres histoires, un historien des événements négligés, marginalisés, oubliés. Cela s'applique également, dans les grandes lignes, à l'artiste comme archiviste et/ou à l'artiste comme documentariste – la moindre chose que l'on puisse dire est qu'il s'agit là de distinctions méthodologiques poreuses et malléables. En effet, tous aspirent à documenter ce qui ne l'est pas et à archiver ce qui ne l'a pas encore été. »

(Didier Roelstraete, "L'art après l'histoire", Une histoire. Art, architecture, design des années 1980 à nos jours, Centre G. Pompidou, Paris, 2014)

 
  • 3. la découverte d'une démarche d'artiste

« Sur papier ou sur toile, à l'aquarelle ou à la peinture à l'huile, les tableaux de Giulia Andreani sont inspirés de documents photographiques d'archives minutieusement préparés, où les figures historiques du XXe siècle se mêlent à des inconnus.
Dans des camaïeux de bleus et de gris, c'est une peinture de mémoire qu'elle révèle. »

(Julie Crenn, "Giulia Andreani", Artpress, mars 2014)

 





Giulia Andreani, vue de l'exposition Tout geste est renversement, Galerie Maïa Muller, Paris, du 21 mars au 25 avril 2015 (photo Rebecca Fanuele)
 

 

Partant de ce "corpus", les élèves devaient à leur tour s'emparer d'archives oubliées (officielles ou familiales) pour en réactiver la mémoire. Un travail dans lequelpour reprendre les mots de Julie Crenn au sujet de Giulia Andreanis'installerait « un jeu entre la surface et la profondeur, entre l'apparition et la disparition, entre la réalité et la fiction, entre le passé et le présent, entre la vie et la mort. »
Dans les trois productions présentées ci-dessous, les élèves ont privilégié l'archive familiale et, comme un fait exprès, la figure commune de leur grand-père.



 

  
Deux dessins au stylo à bille sur papier,
70 x 50 cm chaque


transcription de la lettre à télécharger ici


J'ai directement pensé à une lettre que ma mère m'avait montrée un mois auparavant, juste après qu'elle ait remis la main dessus. C'est une lettre de mon grand-oncle Edmond écrivant à son frère, mon grand-père Michel. Dans ce courrier daté du 3 novembre 1958, Edmond décrit avec humour les circonstances de son silence épistolaire. La raison ? Un stylo à bille défaillant ! Et il invente alors dans le détail, et de manière désopilante, la manière improbable dont il serait allé à la recherche de la bille dans son stylo, à coup de perceuse, de scie à métaux et de lampe à essence ! Résultat prévisible : il l'a définitivement cassé et a dû en racheter un autre. Au passage, sa femme, glissant sur l'encre échappée du stylo,
« s'est retrouvée au frais les fesses dans la lessiveuse qui finissait de bouillir »...
Accompagnant cette lettre, j'avais deux photos d'identité de mon grand-père mais malheureusement, je n'en avais pas d'Edmond. Alors, je me suis dit que je pouvais faire un double portrait de ce grand-père disparu en 1984, et pourquoi pas carrément au stylo à bille, pour coller avec le contenu de la lettre un peu dingue qu'il avait reçue. Je me suis ainsi lancée ce défi de réaliser deux grands dessins sur papier aquarelle, épuisant non pas un mais trois stylos Bic bleu... qui font désormais partie du travail au même titre que les dessins et la lettre.
(Maëlys)

 

 

Mon travail repose sur l'utilisation de nombreux agendas ayant appartenu à mon grand-père, décédé en 1996. Après sa mort, ils ont été conservés par ma grand-mère dans une vieille valise en bois toute rafistolée. Au décès de ma grand-mère, mon père récupéra cette valise pour éviter qu'elle soit jetée comme l'envisageaient ses frères et sœurs.
Dans ces agendas, mon grand-père écrivait brièvement chaque matin au petit-déjeuner ce qu'il avait fait la veille. La plupart des informations sont relatives à son métier d'éleveur de porcs mais pas seulement. Il est aussi question de messes, de football et de théâtre. On peut ainsi lire à toutes les pages ce que fût sa vie pendant un quart de siècle. Sorties de leur contexte, certaines phrases ont un caractère étrangement poétique (
« fagoter dans le pré des vallées », « ramasser des cailloux », « vendu le veau de Charmante », « aller faire un petit tour », « l’enterrement de la mère de l’Abbé Bénis », « orage le soir », etc.), le projet aurait pu porter essentiellement sur cet aspect-là. Mais j'ai plutôt décidé de mettre en valeur les carnets en eux-mêmes pour les livrer à la lecture de ceux qui voudraient bien s'y plonger.
Ma production est un vaste présentoir que j'ai construit pour exposer tous ces agendas. Il est constitué d'une quinzaine de tasseaux en bois d'une hauteur allant jusqu'à 1m80, correspondant à la taille de ce grand-père que je n'ai pas connu (de manière à lui redonner de la présence). Tous ces éléments sont enfoncés dans un épais socle noir sur lequel est posée la valise ouverte. Celle-ci contient divers documents dont une photo de lui, debout à coté de son cheval.
(Louis)



 
Bois, agendas, valise, photographie
et divers matériaux, 189 x 51 x 80 cm
 

 


    
Recueil de poésie dédicacé par Louis Aragon (offert par le poète au grand-père d'Alyssa à l'occasion de la naissance de sa fille "Elsa") et photographie prise quelques années plus tard par Robert Doisneau chez le grand-père d'Alyssa, qui est photographié en compagnie de sa fille "Elsa"

 
contributeur(s) :

Daniel Sage

information(s) pédagogique(s)

niveau : 1ère

type pédagogique : production d'élève

public visé : enseignant

contexte d'usage : classe, travail autonome

référence aux programmes :

Champ des questionnements artistiques transversaux :
L'artiste et la société. Recours aux documents, aux archives et aux traces. L'art et le travail de mémoire.

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