L'original, la copie
La notion de " master " en vidéo, je ne sais plus trop ce qu'elle recouvre actuellement. Avant, les choses étaient claires : il y avait un premier montage sur une bande-vidéo analogique et il s'agissait ensuite, pour la multiplier, de copier cette bande.. Mais aujourd'hui la notion de copie n'existe plus puisqu'on part d'un fichier numérique qui est virtuel. Il existe chez moi un disque dur dans lequel se trouvent tous les fichiers : pour moi, ce serait cela l'" original ". Mais il n'est pas lisible tant que l'on ne l'a pas mis sur un logiciel qui va le décoder.
La propriété de l'œuvre
Il y a eu un très très vague contrat avec la ville de Nantes... C'est ce qui fait à la fois le charme et les limites du monde de l'art : souvent, les contrats sont assez flous, les gens n'ont pas les services juridiques suffisamment pointus pour faire les contrats. Ainsi, pour Nantes : projets d'artistes, c'est la notion d'auteur qui prévaut puisque je n'ai jamais signé quoique ce soit qui stipule que le film appartienne à la ville. Le film m'appartient. Par contre, la ville a un certain nombre de copies - mille copies peut-être ... ? - qui sont à elles, qu'elle peut vendre sans rien me demander.
Les artistes de Nantes : projets d'artistes
Il n'y a pas sciemment l'idée de proposer une typologie précise de différentes pratiques artistiques contemporaines. On voit effectivement différents types d'artistes, mais cela est venu de manières assez intuitive. Au départ, j'avais une liste d'artistes un peu plus importante qui s'est réduite à sept pour différentes raisons.
Ainsi, la question du budget et du temps à consacrer rentrent en ligne de compte dans ce type de choix. J'essaie de donner un minimum de matière au gens, de pas faire un tout petit truc que l'on voit en deux secondes, mais il ne faut pas non plus que je m'embarque dans quelque chose de trop long.
Un autoportrait ?
Parmi les sept artistes, celui que je préfère en fait, c'est Pierrik Sorin... Je le préfère parce que son projet est très cinématographique. Il se réfère à l'histoire du cinéma, aux premières animations de l'image. Et puis, il y a un petit peu de perversité (ce n'est pas par hasard que c'est celui-là qui a été - entre guillemets - censuré). Et les autres artistes, ce sont plutôt des autres moi-mêmes qui s'expriment moins, des Pierrick Sorin plus esthétisants...
Dans ce sens-là, on pourrait peut-être parler d'autoportrait...Même si c'est involontaire, puisqu'au départ, il n'y avait pas du tout cette idée-là, je voulais même faire jouer des gens. Mais c'est vrai, on peut aussi voir ce film comme un autoportrait multi-facettes : il y a les références à la peinture, les dégoulinures, les hologrammes, le cinéma...
Les différentes phases du travail
Etre devant la caméra n'est pas forcément le moment que je préfère... Dans la pratique artistique, ce qui m'intéresse, c'est plutôt l'amont et l'aval du projet. Le moment où on cherche l'idée - et où on la trouve de préférence... Et aussi la fin, comme le moment du montage parce que ce sont des phases où on est relativement détaché des contraintes techniques et des contraintes du réel, où il n'y a pas tout ce poids, même physique, de la caméra à porter par exemple.
Pour créer les personnages, c'est assez intuitif... Je détermine juste peut-être les vêtements, je me dis :" je vais lui mettre les cheveux comme ça ", puis une fois que j'ai les cheveux et les vêtements , le reste vient avec... Par contre, pour le texte, je travaille souvent de manière très écrite. Je fais le story-board avec tout le texte écrit à côté. Je me méfie beaucoup de l'imprévu, et des moments liés à l'affectivité. Je ne travaille pas de manière très émotive : il y a une émotion au départ, puis à partir de cela je construis une idée.
Le bricolage
Ce n'est pas souhaité mais c'est assez inéluctable que le côté bricolage soit moins présent dans mon travail. Il y a une évolution des progrès techniques dont on se sert évidemment. Ce serait contre-nature de refuser toutes ces possibilités nouvelles. Même quand j'utilise les nouvelles technologies, j'essaie que cela ne fasse pas trop technologique ; Nantes : projets d'artistes ne ressemble quand même pas à une grosse superproduction avec images de synthèses, etc....
Il y a le risque aussi quand on travaille avec des plus gros budgets, pour des événements importants, des commandes un peu lourdes, de s'éloigner d'une certaine poésie, d'une certaine recherche... Mais en même temps, on ne peut pas passer toute sa vie à faire des petits films super 8 tout pourris... Parce qu'on s'ennuierait très rapidement..."
propos retranscrits par Thierry Froger
avec l'aide de Bernard Descourvières, Tangi Gicquel et Philippe Neau
(fiche actualisée en 2018)