Durant les six semaines que les élèves passent généralement dans le DRI, le changement qu'ils notent d'abord, c'est celui du regard des adultes et professeurs sur eux. Avec leurs mots, ce qu'ils disent c'est que l'enseignant est alors en situation de les reconnaître en tant que personnes, qu'il y a de la gentillesse, de l'écoute, de l'aide, de l'empathie. C'est souvent la première fois qu'ils ont ce ressenti dans l'école, le collège : ils sortent de l'anonymat. On s'occupe vraiment d'eux. Ils disent aussi majoritairement que le fait même d'être dans le DRI fait que, dans les cours qu'ils suivent avec leur classe d'origine, le professeur est plus attentif à eux, plus patient... Il est certain que les regards croisés des éducateurs, des assistants d'éducation, des enseignants, de la CPE, de la COP, éventuellement de l'infirmière, font émerger une image de l'élève bien différente de celle qu'il avait avant d'entrer dans le DRI et que cela joue aussi au moment du retour dans la classe, avant et à la sortie du dispositif. Le retour dans la classe est bien sûr un moment crucial. Jamais perdu de vue, il est au cœur de tous les projets et de tous les échanges. Il se fait après un bilan partagé et avec l'accord de toute l'équipe, de l'élève et de la famille. L'élève se choisit alors un adulte référent parmi l'encadrement du DRI, quelqu'un avec qui il se sent à l'aise et avec qui il aura des entretiens réguliers (au moins un par semaine au début, plus à sa demande) pour évoquer les éventuelles difficultés, mais aussi les réussites, et essayer de prévenir un retour aux attitudes antérieures. Le retour en classe est diversement vécu. La difficulté dans les apprentissages demeure. Globalement, les élèves acceptent mieux les règles de vie communes, ils ont des relations aux adultes pacifiées, ils se sentent mieux intégrés, ils trouvent plus d'intérêt dans certains des cours, au moins, et ils travaillent plus en classe. Les résultats s'en ressentent. Une élève, pourtant assez critique sur le dispositif, est très fière, par exemple, des deux points qu'elle a gagnés depuis son passage en DRI. Néanmoins, elle avoue qu'elle ne travaille pas à la maison. Elle dit qu'elle a appris en mathématiques, mais paradoxalement, que Ça n'a pas marché pour elle, comme si elle avait attendu un miracle. Elle exprime sa difficulté à garder le cap du travail, à ne pas se laisser décourager par ses difficultés persistantes en mathématiques et plus encore en anglais. Elle a vécu un moment agréable, mais met en doute son efficacité, tout en exprimant sa volonté de réussir. Le retour à l'anonymat de la classe, aux problèmes de gestion du groupe par l'enseignant qui n'est pas aussi détendu, attentif à elle, est vécu avec un certain fatalisme. Malgré tout, elle fait confiance aux professeurs qui l'ont aiguillée vers le DRI et elle affiche finalement une détermination certaine à atteindre son objectif : être esthéticienne, manucure. Son interlocutrice sent que quelque chose en elle a malgré tout changé, presque à son insu : elle a pris conscience de sa responsabilité propre dans son parcours. Et elle est décidée à agir.