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et si scolarité pouvait rimer avec virtualité ?

mis à jour le 15/06/2010


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Depuis la rentrée 2007, Julie - une élève de quatrième du collège Jean-Rostand à Trélazé - vit un problème de santé l'empêchant de venir assister aux cours. Cette situation a été prise en compte avec la mise en place progressive d'outils numériques. Mais pour répondre à une situation particulière, c'est désormais tout un collège - élèves, enseignants et parents - qui est progressivement entré plus avant dans la culture numérique.

mots clés : échanger, culture numérique, numérique, TICE, enseignement à distance, enseignement virtuel


Depuis plus d'un an, ce collège, rénové il y a deux ans et situé dans une zone d'éducation prioritaire (ZEP), a mis en place un projet d'accompagnement spécifique pour répondre à la situation de Julie. En effet, il a été nécessaire de s'adapter à sa situation médicale. Au début, ses contraintes de santé lui interdisaient de pouvoir assister aux cours. Il a donc fallu envisager qu'elle soit présente, mais de son domicile. À d'autres moments dans l'année, elle a pu assister aux cours, mais à condition de rester au maximum en situation allongée. Depuis septembre 2008, elle peut assister aux cours en fauteuil. Son accueil, régi par la loi du 11 février 2005, s'est donc imposé au collège. Si le principe semblait aller de soi, la réalisation concrète a nécessité de résoudre des questions multiples. Sa scolarisation a posé la question de l'accessibilité des locaux et de l'équipement nécessaire à un enseignement à distance. Dans ce collège, une grande salle, située près de l'accueil, était dédiée au conseil d'administration et autres réunions. Elle a été convertie en salle de classe. Aujourd'hui, coexistent dans cette salle deux tableaux. La craie d'un tableau traditionnel voisine avec le tableau blanc interactif. Juste à côté, dans une armoire, un ordinateur et un vidéoprojecteur assurent le relais des informations. Les images transitent, mais aussi le son : les enseignants s'équipent d'un micro-cravate qui permet aussi un transfert direct. Quand ce n'est pas l'enseignant, ce peut être aussi un élève qui s'en sert. Quand Julie est là, rien ne gêne son accès en fauteuil et son lit médicalisé l'attend et lui permet de suivre les cours dans des conditions optimales pour elle. Elle peut aussi écrire au tableau, comme tous les élèves, grâce au clavier ou à l'ardoise graphique. Quand elle est chez elle, à l'aide de son ordinateur équipé d'un accès haut débit, elle continue à participer en direct à différentes heures de cours. Elle est maintenant en quatrième et sa scolarité, avec l'insertion dans le groupe-classe qu'elle suppose, est bien de l'ordre de la réalité.

Interactivité pour tous

Comme tous ses camarades de classe, Julie peut donc aujourd'hui suivre des cours, elle a des notes et un bulletin trimestriel. Elle a même été, l'an dernier, la première à valider son B2i ! Sa remise officielle de diplôme a même constitué une forme de challenge pour ses autres camarades. Désormais, quand elle est physiquement absente, elle ne bénéficie pas de "cours filmés". Les images qui lui arrivent sur l'écran de sa chambre sont celles de la réalité de la classe, en temps et heure. Le dispositif a été pensé et mis en place pour permettre à Julie de continuer à être une élève actrice et présente au cours, comme ses camarades. Ce système technique maintient les relations sociales tissées avec la communauté scolaire et favorise ainsi son retour en classe. Mais pour arriver à ce résultat, il a fallu quasiment une année. Une année où l'établissement a établi des liens avec de multiples partenaires. Au collège, une équipe s'est rapidement constituée autour d'un professeur de mathématiques, Yannick Danard. Outre sa compétence informatique et pédagogique, il avait aussi l'expérience personnelle du travail avec des jeunes hospitalisés. Ce problème singulier à résoudre fait qu'aujourd'hui, c'est l'ensemble des professeurs des disciplines qui prend progressivement place dans cette action. Les enseignants, mais aussi les parents, qui ont réussi à trouver un lit médicalisé grâce à une clinique qui renouvelait son matériel. Il a fallu aussi entreprendre des démarches, avoir des autorisations et répondre à un cahier des charges complexe. Grâce au travail conjoint du Rectorat et du dispositif Adaptation scolaire et scolarisation des élèves handicapés (ASH), le collège s'est donc vu doté d'un matériel permettant une réelle montée en puissance du dispositif et d'un accompagnement. Pour que cela voie le jour, il a fallu que la question soit envisagée de manière systémique : services enseignants et informatiques, médicaux et sociaux, services administratifs à l'échelon local, départemental et rectoral. Bref, il n'y a pas, dans de tels cas, que le tableau blanc qui se doit d'être interactif.

Flash-back et quelques sueurs froides en "live"

Bref, ça marche aujourd'hui ! Mais pas d'optimisme béat, il a fallu accepter de tâtonner ensemble pour en arriver là. Pour mieux comprendre, il n'est sans doute pas inutile de faire un petit retour arrière. Revenons donc en septembre 2007. C'est d'autant plus facile que cette expérience a été l'objet de l'écriture d'un blog personnel, relayé par le serveur académique de l'académie de Nantes. Replaçons-nous au démarrage de l'action : Julie est chez elle. Le professeur lui a montré à domicile comment faire ses branchements et brancher son casque. Lorsqu'elle est connectée, elle ne voit pas la classe, la classe ne la voit pas encore, mais le son passe. Tout ce qui est écrit sur le tableau interactif apparaît sur son ordinateur. Des cours sont testés, progressivement. Les élèves de la classe acquièrent progressivement de l'expérience et, quelquefois, commencent à maîtriser la technique avant l'enseignant qui se lance pour un premier cours, dans cet environnement technique. "Attention, m'sieur, l'micro est éteint." - "Passez sur le tableau blanc, ça devrait aller." - "On n'peut pas entendre Julie, elle n'a pas allumé son micro." En octobre 2007, le rythme monte à quatre séances virtuelles par semaine. À chaque séance, une question se résout. Un exemple : ce début de cours d'anglais avec Mme Bertrand. Au début, il faut faire face à un petit souci de connexion micro, puis cela a fonctionné sans problème technique. En revanche, on constate qu'il est difficile de faire passer le son d'un lecteur Compact disc (CD) par le micro pour que Julie entende correctement. Il faudra passer par le lecteur de l'ordinateur et aller en partage d'application. On imagine les appréhensions des mises en place et les vérifications nécessaires : dix mètres de câbles entre les enceintes, le vidéoprojecteur, le lecteur de CD, sans oublier le fil mauve de la connection internet ! Ce stress est accentué quand les essais se passent en présence d'une classe entière de cinquièmes. Mais heureusement, pour faciliter l'installation et résoudre, pas à pas, les questions techniques, le professeur coordonnateur est là et improvise des solutions techniques. Au fil des cours et de l'année, cela fonctionne de mieux en mieux.

Pour la classe, les jeux du virtuel et de la réalité

Mais avant d'arriver à la situation de décembre2008 où l'on peut croiser à l'intercours une Julie en fauteuil, escortée par ses camarades, il faut imaginer aussi que cette intégration s'est faite progressivement. En début d'année précédente, dans la classe, on ne la connaît pas. Les élèves savent que c'est en partie pour elle que le déroulement habituel de la classe se modifie progressivement. Ils savent qu'à certains cours, elle les entend. Progressivement, ils l'entendent puis la voient. Pourtant, il leur faut aussi accepter des changements d'habitudes, des changements de salles. En effet, au fur et à mesure que chaque professeur entre dans le dispositif de "classe virtuelle", eux doivent venir dans cette salle qui s'équipe progressivement, en attendant qu'un dispositif mobile se généralise. Quelquefois, un professeur se débat avec son micro ou ses fiches. Le déroulement du cours peut s'en trouver ralenti. Les enseignants font tellement attention au matériel ou aux interventions de Julie qu'ils peuvent paraître ne plus porter autant attention à ceux qui sont bien là ! Mais, petit à petit, toutes les disciplines entrent dans la ronde et les habitudes se créent. L'anglais, mais aussi l'histoire et la géographie, les sciences de la vie et de la Terre, chacune pose des questions nouvelles à résoudre : comment mettre les documents à disposition ? Comment rendre compte des expériences ? Comment régler, en éducation musicale, le décalage son puisque le dispositif "Centra" de l'académie de Nantes passe par Toulouse ? Quelques remarques laissées là encore sur le blog témoignent de tâtonnements et de doutes mais tous avancent.

... Et pour Julie aussi !

Du point de vue de Julie aussi, les progrès se sont faits au fil du temps. Plus d'un an après le début de l'expérience, elle fait partie intégrante de sa classe de quatrième. Mais cela ne s'est pas fait d'emblée. Pas facile, en début d'année scolaire, d'appréhender la maladie et de faire de sa chambre une classe ! Il faut aussi que la famille se fasse à cette situation ! Commencer à huit heures est vite apparu comme un horaire impossible à tenir au départ. Son entrée en classe a donc été fixée à neuf heures. Il faut tenir compte que seule, le travail lui demande une attention de tous les instants. Ses horaires doivent donc être aménagés. Pourtant, petit à petit et au fil de l'année, l'emploi du temps entre dans une forme de régularité. Chacun, élève et enseignants, maîtrise des outils plus complexes. D'abord, le son, la prise de parole. Ses interventions se font plus nombreuses au fil du temps, et enfin, une webcam lui permet de suivre les cours. Petit à petit aussi, les élèves intègrent leur camarade et dès le 10octobre, un incident témoigne que les jeunes cinquièmes sont bien entrés dans le jeu. Ce jour-là, une alarme incendie est prévue et la sonnerie retentit. Le professeur pense à dire au micro à Julie : "attends, on revient !", ce sur quoi Adèle renchérit, non sans humour : "Julie, mets ton manteau, c'est l'alerte incendie, on sort !". Bref, la classe, ravie de faire une pause, est sortie. Julie, de son côté, a attendu que tous remontent dix minutes plus tard. Le cours a ensuite repris avec Julie. À chaque étape, elle reçoit la visite et les soutiens techniques du professeur coordonnateur.

Et le bonheur est dans la classe

Les cours virtuels se déroulent ainsi, au rythme habituel, mais l'événement de cette semaine de décembre 2007 est la venue de Julie au collège, un jeudi après-midi. Amenée par son papa, elle est installée dans la salle Tati, devenue salle de classe depuis. Elle commence avec deux cours, ce jeudi après-midi : anglais avec Sylvie Bertrand et français avec Hélène Weiszberg. L'ambiance est excellente, les cours se déroulent bien, le dernier cours déborde sur la récréation avec un goûter. Atmosphère chaleureuse et conviviale malgré le froid hivernal ! Jeu en anglais pour mieux se connaître, puis chanson rock de Queen (We will rock you) et petites papillotes au chocolat pour terminer en douceur cette heure de cours. Tous les élèves ont bien participé, même les plus timides! Adèle était en grande forme et nous a fait un solo de guitare électrique, magistral ! Demain, classe virtuelle, pour la correction d'un devoir... ce sera moins drôle... mais nécessaire ! Julie a pu mettre un visage sur les prénoms, et les élèves ont pu apprécier la gentillesse de leur camarade ! Ils pourront désormais l'imaginer lors des prochains cours virtuels. À la fin de l'heure, Julie connaissait les prénoms de tous les élèves de la classe. En fin de journée, à une question posée : "As-tu passé une bonne journée ?", elle répond: "Non, j'ai passé une heureuse journée".

Et maintenant...

Aujourd'hui, donc, une certaine normalité s'est installée autour de cet espace virtuel. Mais pas question d'avoir fait un tel investissement en formation et de tels progrès techniques et de vivre tous les autres cours comme si rien ne s'était passé. Des possibilités sont apparues de développer ces outils en dehors de toute prise en charge d'un handicap. C'est ainsi qu'on peut aujourd'hui voir des professeurs transporter du matériel dans des sacs à dos dédiés à cet effet. Des cours sont enregistrés afin d'apporter une aide complémentaire aux élèves en faisant vivre le site numérique du collège. Le tableau blanc interactif est un outil qui ouvre des possibilités très intéressantes : mémorisation de tout ce qui a été écrit pendant le cours, accès direct à de multiples sources. De quoi étoffer sa palette de gestes professionnels : documents-textes, sonores, images, vidéos, logiciels de géométrie dynamique, tableur, grapheur, internet... Et pas question d'en restreindre l'usage quand on a commencé à le maîtriser. Alors des idées germent : pourquoi ne pas utiliser ces équipements pour favoriser l'interaction entre classes dans des projets transdisciplinaires ? Pourquoi ne pas utiliser cet espace virtuel comme alternative à l'exclusion lorsque des élèves doivent être momentanément exclus d'une classe ? Pourquoi ne pas organiser aussi, de cette manière, un accompagnement ou un soutien spécifique ?... Bref, c'est tout un collège qui réfléchit à la mise en place progressive des ENT. En ce domaine, le futur reste à imaginer. Ces outils ouvrent des pistes, aux enseignants de tracer les chemins.
"La classe virtuelle, par le biais de Centra, est intégrée au dispositif Freedom. Il permet par ailleurs de gérer le cahier de texte personnel de l'élève absent, en y insérant des documents. L'élève absent  peut renvoyer, par ce dispositif, le travail fait. Cet ENT contient également un forum en liaison avec le cahier de texte, permettant à l'élève distant de poser des questions visibles par les enseignants, mais aussi par les autres élèves de sa classe. D'autres outils sont intégrés à Freedom Et maintenant... : des ressources en ligne (dictionnaires, encyclopédies...), des liens vers des sites signalés comme intéressants par les enseignants des différentes disciplines. Il y a également un espace loisir (site de cinéma...)."
 
auteur(s) :

C. Riou

contributeur(s) :

A. Danard, Collège Jean-Rostand, Trélazé [49]

information(s) pédagogique(s)

niveau : tous niveaux, 4ème

type pédagogique : article

public visé : chef d'établissement, enseignant, inspecteur

contexte d'usage : classe, travail à distance

référence aux programmes :

fichier joint

information(s) technique(s) : pdf

taille : 184 ko ;

ressource(s) principale(s)

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