innovation pédagogique

Il existe, depuis 2006, un service de cartographie en ligne qui publie des données géographiques concernant l'ensemble du territoire français, Géoportail. Édugéo, qu'on pourrait considérer comme sa version pédagogique, a été ouvert en avril 2008 et inauguré officiellement le 1er octobre 2008. Ce site met à la disposition des élèves et des enseignants des données cartographiques (photos aériennes ou satellites, cartes numérisées, données topographiques diverses...) provenant des collections de l'IGN. Ces données couvrent le territoire national et les départements d'outre-mer, elles incluent les cartes les plus récentes, mais aussi des cartes et des photographies anciennes. Ces ressources permettent une analyse fine des territoires et des mutations profondes qu'ils ont pu connaître au cours des cinquante dernières années, car les différentes informations, cartes de diverses époques, photos aériennes, voies de communications, réseaux routiers, cadastres... peuvent se superposer et faire apparaître l'évolution du territoire étudié. Mais Édugéo met aussi à disposition des élèves des outils d'exploitation de ces données cartographiques. Une fonction, par exemple, leur permet de réaliser des croquis et des légendes (formes, couleurs...), à partir des cartes elles-mêmes. En effet, cet outil permet de dessiner directement sur les cartes. Ce site est une ressource pour le professeur qui, grâce au tableau interactif, peut avoir rapidement toutes ces données à disposition, mais aussi pour les élèves qui peuvent travailler individuellement sur ces cartes, comme on va le voir.

En ce début d'année, être capable de lire une carte topographique et de pouvoir faire un croquis d'interprétation est un des objectifs traités en cours de géographie en classe de seconde. Jadis - il y a deux ans ! - l'établissement ne disposait encore que de trois cartes de régions différentes comme support pour traiter ce chapitre, dont celle de la région des élèves. Et ceux-ci, pour réaliser leur croquis, dessinaient sur papier calque, à partir d'une photocopie de carte en noir et blanc. Aujourd'hui, après une séance en classe entière au cours de laquelle l'outil sera présenté, les élèves se retrouvent en module, chacun ayant la carte de sa commune d'origine sur son écran, pour observer et comprendre l'organisation d'une ville. Ils se familiarisent ainsi avec le site et les outils proposés. Les élèves se retrouvent tous ensuite, pendant deux heures, en salle informatique, seuls ou à deux devant un écran, pour tester leurs connaissances sur une nouvelle carte, celle de Beaune. Ils vont confronter leur vision d'un espace local connu avec un espace inconnu. Ils téléchargent la fiche-guide et les consignes de travail (voir annexe). Ces consignes sont accompagnées d'une copie d'écran de la carte de Beaune, en cas de défaillance de la technique ! Tous les élèves sont actifs et, dans l'ensemble, manient sans problème l'outil. Chacun choisit ses légendes. Pour repérer les zones commerciales, on cherche les parkings facilement identifiables mais leurs recherches se portent en périphérie. On se donne des points de repère bien personnels parfois, deux élèves identifient les quartiers pavillonnaires à la présence d'une piscine ! La discussion est animée, dans le petit groupe. Aucun ne semble s'ennuyer ni perdre son temps. Les cartes imprimées par les élèves prouveront que les connaissances ont été acquises.

Dans le cadre de ce chapitre sur les dynamiques urbaines et l'environnement urbain, l'étude va se prolonger pendant un cours collectif où, à l'aide du tableau numérique interactif, l'enseignant va poursuivre et généraliser la réflexion commencée par les élèves. Il effectue d'abord la correction du travail effectué sur la ville de Beaune. Il fait apparaître sur le tableau une capture d'écran de la carte de cette ville. Il y dessine le croquis d'interprétation puis il fait glisser la carte : il ne reste plus sur le tableau que le croquis seul qu'il légende ensuite. Quelques aller-retours entre carte et croquis permettent aux élèves de fixer l'interprétation. Ensuite, en utilisant Google Earth, la photographie aérienne de la ville de Bologne apparaît sur le tableau. Un effet de zoom est effectué sur le centre-ville pour que les élèves perçoivent l'organisation orthogonale de celui-ci et en déduisent son origine romaine. Ils repèrent alors le forum et les arènes. L'enseignant met en évidence, par des traits rouges, les deux axes de circulation qui structurent la ville : la cardo et le decumanus. Un déplacement de l'image fait apparaître sur le côté une organisation circulaire autour de ce qui semble être une église, qu'il faut interpréter et situer dans le temps. Puis la photo s'agrandit et le professeur, d'un trait de couleur différent, surligne les différentes voies de communication et l'aéroport. Une organisation très nette apparaît ainsi par-dessus la photo, mettant en évidence l'organisation de l'espace, support à partir duquel l'enseignant conclut sur les points communs entre les villes européennes. Le même outil est utilisé pour étudier l'organisation différente de la ville américaine de Boston. Mais l'utilisation d'une nouvelle fonction de l'outil permet d'avoir une vision oblique du centre de la ville, qui met en évidence le relief et la forêt de gratte-ciel. Un élève reconnaît tout de suite ce Central Business District (CBD) ! L'outil permet de zoomer sur un échangeur autoroutier pour remarquer l'habitat pavillonnaire qui s'est développé à proximité. Un trait de crayon électronique fait apparaître la distance entre cette zone et le centre-ville, point de départ d'une réflexion sur le mode de vie américain. Il semble n'y avoir que l'observateur pour être surpris par les effets extraordinaires de cet outil qui fait partie du quotidien des élèves ! Leur attention est sans cesse focalisée sur la carte, la photo ou le croquis qui évoluent en permanence. Le professeur terminera par une heure de module consacrée à Bangkok où les élèves, regroupés par niveau, approfondiront leurs connaissances ou essaieront, devant l'écran, de corriger leurs erreurs.

Les élèves, à la fin de ce premier trimestre, ont découvert Beaune, ses vignes et son hospice. En fin d'année, en cours d'histoire, ils y reviendront lorsqu'ils étudieront la Renaissance. Ils analyseront le fameux portrait de Jan Van Eyck, La Vierge du chancelier Rolin, le fondateur de ces hospices ! Tout comme en cours de géographie, l'outil informatique va être proposé aux élèves sous forme de livre électronique ou hypermédia qui permet de créer des liens entre de l'image, du texte et du son. Ils sont initiés à l'outil et au travail d'observation, d'analyse et de commentaire, d'abord en classe entière. Le professeur leur présente, sur le tableau interactif, un premier tableau de Van Eyck, Les époux Arnolfi. Ensuite, chacun devant son écran va effectuer personnellement le même travail. Il dispose d'un livre électronique dont il peut faire tourner les pages sur l'écran pour voir le tableau entier ou simplement une partie ou un détail grossi grâce à l'effet loupe, ce qui lui permet d'observer le tableau mieux que s'il se déplaçait au musée! Des questions le guident dans la réalisation de son commentaire. Il peut ensuite utiliser lui-même une autre version et écouter ou lire le commentaire et effectuer ainsi une autocorrection de son travail. Dix livres de ce type sont à sa disposition. Il peut travailler sur ces documents seul, au CDI ou chez lui. Les exercices qui lui sont proposés sont variés et de niveaux de difficulté différents. L'outil permet ainsi une individualisation des travaux.

Pour étudier certains chapitres de géographie, en s'appuyant le plus possible sur la réalité locale, le professeur a lui-même construit ses propres outils à l'aide d'un logiciel gratuit (le logiciel fGIS). Ainsi, pour étudier le chapitre sur l'eau en classe de seconde, "L'eau, entre abondance et rareté", il a recueilli les données du Conseil général de la Mayenne sur le "schéma d'aménagement et de gestion de l'eau" du département. À partir de ces données, il a réalisé un outil semblable à Édugéo. De nombreuses cartes sont superposées, sous formes de couches que les élèves peuvent faire apparaître en fonction de leurs besoins : communes, répartition de la population, communes rurales et communes urbanisées, réseau hydrographique, sites nautiques, captage d'eau... À l'aide de ces informations, les élèves observent les zones de captage et celles de consommation et cherchent alors des réponses aux questions que se pose le conseil général lui-même, avec les mêmes données. L'usage de l'outil permet d'avoir un autre regard sur la discipline et de prendre avec d'autant plus de sérieux des exercices qui apparaissent d'autant moins scolaires !

Ces outils et les ressources qu'ils permettent de mettre en œuvre renouvellent les modes d'approche et l'intérêt des élèves pour la discipline. L'attention pendant le cours est plus soutenue grâce aux nombreux documents présentés sur le tableau blanc inter-actif. La vision du globe terrestre ou les images en 3D permettent de déstabiliser durablement des représentations fausses. Grâce à Édugéo, ils acquièrent une connaissance du territoire à toutes les échelles, depuis les territoires les plus proches, leurs communes d'origine, jusqu'aux échelons régionaux et nationaux, voire européens et mondiaux sur d'autres sites. La pratique des cartes que l'on déplie soigneusement et qui enferment le regard dans leurs limites étroites semble relever d'une autre culture.