Contenu

innovation pédagogique

Recherche simple Vous recherchez ...

espace pédagogique > actions éducatives > innovation pédagogique > échanger > dossiers parus

pas à pas vers l’autonomie

mis à jour le 21/06/2010


echanger-211c.gif

Sans supprimer la salutaire rupture entre l'école et le collège, puis entre le collège et le lycée, tout est fait dans ce secteur scolaire Ambition-réussite pour que ces passages ne soient pas une cause d'échec pour les élèves fragiles. Afin de leur permettre de sauter le pas, les établissements les mettent dans des situations qui les amènent progressivement à plus d'autonomie.

mots clés : sois autonome, autonomie, liaison école/collège, liaison collège/lycée


Les porte-vues : le passé avec soi

Tout d'abord, le porte-vues. Grâce à lui, l'élève emporte avec lui, en quittant son école, un précieux bagage : la mémoire de tous ses apprentissages scolaires, et ce même porte-vues, transformé et enrichi, il pourra aussi le conserver pour le lycée, au minimum pour son travail personnel à la maison, ses exercices et ses révisions. C'est bien rassurant quand on quitte un établissement où l'on a des repères, pour aller vers un autre qui reste mystérieux, avec des enseignants dont on ne sait rien des méthodes. Le porte-vues permet en effet à l'élève de pouvoir continuer à travailler avec le même outil, qu'il maîtrise bien, puisqu'il l'a construit lui-même et qu'il a appris à l'utiliser. Il part de l'école avec trois porte-vues : un en français, un en mathématiques et un autre en histoire. Au collège, ses nouveaux professeurs vont continuer à faire vivre chacun de ces dossiers. Les nouveaux apprentissages seront notés dans ce même document, dont le sommaire est prévu pour intégrer les objectifs de la sixième, et qui sera complété par la suite. Les professeurs des différentes disciplines ont un de ces classeurs qu'on leur a photocopié et ils peuvent ainsi faire le lien entre ce qu'ils font et ce qui a été fait les années antérieures sur le même sujet. Ce lien, bien peu d'élèves de sixième sont capables de le faire seuls, eux qui considèrent que tout ce qu'on leur dit est nouveau et n'a rien à voir avec ce qu'ils ont appris à l'école élémentaire. C'est vrai que souvent, les mots sont différents, les activités aussi... Mais quand le professeur nomme l'apprentissage qui les renvoie à la page correspondante, le lien se fait et le nouvel apprentissage peut s'ancrer, trouver sa place... Moins étranger, même s'il y a du nouveau, il a plus de chance d'être mémorisé et utilisé par la suite.

De l'école au collège, les alléeset venues

Afin de limiter aussi l'inquiétude liée au manque de repères, de connaissance des lieux et des personnes, les élèves de CM2 sont accueillis quatre fois au collège dans l'année : trois demi-journées et une entière. Là, bien sûr, ils découvrent les lieux, les salles, le CDI (centre de documentation et d'information), le réfectoire, la cour, mais surtout les personnes et le fonctionnement même des cours. En effet, des enseignants de français et de mathématiques "échangent leur service" selon l'expression consacrée : les professeurs des écoles prennent en charge leurs ex-élèves, maintenant en sixième, alors que les élèves de l'école assistent au "vrai" cours d'un professeur du collège. Si l'on ajoute la maîtresse surnuméraire qui assure, dans chaque établissement, la moitié de son service, on voit bien qu'à leur arrivée au collège, les élèves connaissent déjà un certain nombre de leurs nouveaux professeurs. Ces expériences sont, bien sûr, précieuses pour les élèves, qui peuvent ainsi vivre les deux situations, anticiper sur les adaptations à prévoir, mais surtout se rendre compte que, finalement, ce n'est pas si différent. C'est aussi précieux pour les enseignants qui sont amenés à concevoir ensemble les activités pour qu'elles s'intègrent dans les parcours respectifs des élèves. C'est une immersion "de l'autre côté du miroir", avec ses rythmes, ses logiques, ses contraintes... et qui modifie durablement la représentation que se font les professeurs de collège d'un élève qui arrive en sixième. Inversement, les enseignants de l'école prennent conscience du changement de rythme auquel leurs élèves seront soumis et qui les oblige à abandonner certaines exigences de soin, de relecture... Le couperet des cinquante minutes est souvent fatal aux travaux de finition !

Au CDI, donner la maîtrise des lieux

Les collégiens, eux, ont très souvent des difficultés d'adaptation en seconde : c'est un constat partagé dans ce collège "Ambition-réussite". Un des objectifs prioritaires du collège est donc de les amener, sur les quatre années, à une plus grande autonomie. Le CDI est un des lieux où ce travail se fait. Dès l'entrée en sixième - et même dès les accueils antérieurs - la documentaliste et les enseignants créent les conditions pour que les élèves soient au plus vite à l'aise dans ce lieu. Dès lors, une heure par semaine, en demi-classe, sur une des heures d'études dirigées et pendant la première moitié de l'année, les élèves mènent des travaux de recherche à la demande des enseignants. Les consignes et les conditions de réalisation évoluent progressivement, de très encadrées et aidées, vers un travail plus libre et autonome. Ainsi, en début d'année, les élèves ont fait un mini-dossier pour le cours de SVT (sciences de la vie et de la Terre) sur le thème des espèces menacées. Le professeur a fourni un plan pour ce travail. Pour cette première fois, le travail est très précisément accompagné : la documentaliste lit et fait reformuler les consignes données et les explique si besoin, puis elle les recopie au tableau. Les élèves ont à leur disposition des documents sélectionnés par la documentaliste. Ils choisissent librement l'espèce qu'ils vont étudier et se mettent au travail. La documentaliste, dès lors, n'intervient qu'à la demande. Les élèves ne travaillent que sur des documents papier et le dossier demandé est un manuscrit (même si le traitement de texte n'est pas interdit).

De la liberté... encadrée

Un peu plus tard, dans le cadre du même cours de SVT et en liaison avec l'infirmière, les élèves mènent toute une recherche et une réflexion autour de l'alimentation, finalisée par la préparation d'un petit-déjeuner. Les élèves ont, cette fois, plus de liberté dans le choix des documents qu'ils doivent trouver eux-mêmes dans les rayonnages ; il leur est également demandé d'aller chercher sur internet les renseignements manquants, sous forme de documents écrits ou d'images. Cette fois, les élèves, en binômes, créent des panneaux d'affichage, pour la cantine et la classe, sur les grandes familles d'aliments, avec des exemples. La mise en pages des informations sur le panneau est libre. Le travail se fait au CDI, soit avec le professeur de SVT, soit avec l'infirmière. Pour ce petit-déjeuner, chaque classe a dû s'organiser, faire la liste de tout ce qu'il leur fallait pour avoir le repas équilibré et festif qu'ils avaient choisi. La classe s'est scindée en deux groupes : l'un est allé au marché pour acheter, avec un budget défini, les produits frais qu'il lui fallait, puis a préparé une salade de fruits pour toute la classe ; l'autre groupe a fabriqué le pain, dans les cuisines du collège, sous la responsabilité du professeur de sciences. Ces activités, fortement finalisées par le plaisir du partage, en lien avec la vie familiale et sociale, permettent à chaque élève de prendre confiance en lui par des prises d'initiatives sans risque, dans des groupes conçus pour que chacun puisse trouver un rôle, une responsabilité. Pendant ces activités, la présence de plusieurs adultes permet de croiser les observations, de cerner les faiblesses, mais aussi les progrès. Ces informations sont précieuses pour l'élaboration des situations suivantes.

Des exigences croissanteset moins d'aide

En fin de sixième, dans cette même discipline, les élèves ont à faire un travail sur les animaux qui hibernent, avec le même principe qu'en début d'année : ils traitent l'animal de leur choix. Mais cette fois-ci, le professeur donne le travail à faire entièrement "à la maison". Il est préparé en classe, les consignes sont précises et expliquées, mais les élèves doivent s'organiser seuls pour le faire et le rendre dans les délais. C'est tout naturellement qu'ils sont venus au CDI, sur leur temps libre ou les moments de permanence. Ils sont alors capables de faire leur recherche eux-mêmes sur BCDI. Ils ont l'obligation de travailler à la fois sur des documents papier et sur internet. Le professeur leur demande de préférence un document rédigé en traitement de texte, avec une insertion d'image. La documentaliste intervient surtout pour les vérifications orthographiques, car la règle absolue est la reformulation. Pas de copié-collé. L'évolution progressive du dispositif et des exigences est une manière de construire progressivement l'autonomie des élèves. C'est aussi la preuve que les élèves ont évolué et ont moins besoin des adultes: ils se débrouillent avec les consignes et les documents ou sont amenés à demander de l'aide individuellement. La production attendue est nettement plus longue et diversifiée. Ce travail de formation à la recherche et à la restitution de l'information se fait dans le cadre des différentes disciplines - le latin, les arts plastiques, le français, tout particulièrement - dont une partie des cours se déroule au CDI, soit en classe entière, soit par demi-classe.

Des lecteurs autonomes : sortir du CDI

Dès l'école primaire, les élèves prennent l'habitude d'aller à la médiathèque de l'Espal, implantée dans le quartier. De nombreuses actions à l'initiative de l'école, de la médiathèque, de la Ville, des associations, incitent aussi les familles à fréquenter la bibliothèque, les salles d'exposition, de spectacles, les ateliers... La volonté est de créer un lien entre l'enfant et la bibliothèque, qui ne passe pas nécessairement par l'école ou le collège. Ainsi, un comité de lecture qui regroupe, à la médiathèque, une classe de CM2 et des élèves de sixième et de cinquième volontaires, participe à la liaison entre l'école et le collège. Les jeunes se connaissent bien, ce qui évite, à la rentrée suivante, le ghetto des nouveaux. Mais l'intérêt essentiel des projets qui impliquent un travail avec la médiathèque est de contribuer à créer un comportement de lecteur autonome qui ne craint pas d'aller vers les lieux culturels. Créer une habitude de fréquentation, donner des repères, mettre en évidence les ressources d'une médiathèque-salle d'exposition et de spectacles, c'est lever des obstacles pour la vie entière, y compris pour la vie du jeune collégien, puis du lycéen, qui pourra trouver là des lieux de lecture et de travail complémentaires des CDI, pendant la période scolaire, mais aussi pendant les vacances et après la fin de la scolarité.
 

Parler des livres

En sixième, les élèves participent, comme une bonne trentaine d'autres classes de sixième, à "Kioscalire", une action de lecture départementale organisée par le centre de ressources lecture. Une bonne quinzaine d'ouvrages qui "croisent" les programmes de nombreuses disciplines leur sont proposés. En lisant ces romans, ces BD, ces documentaires, les élèves, seuls, ou en groupes, revisitent des éléments de certains cours. C'est là encore une occasion de développer son autonomie. Cela se fait librement, les élèves choisissent leurs livres, l'investissement individuel est modulable... Mais la documentaliste et les enseignantes organisent des tables rondes, des discussions, des ateliers de présentation des livres, de créations de jeux. Ces échanges autour des livres participent aussi à la construction d'une relation autonome au livre et à la lecture. On peut rendre un livre sans l'avoir fini, on peut dire qu'on ne l'a pas aimé en cherchant à dire pourquoi. Cette opération est par ailleurs ponctuée par des activités ludiques sur les livres, à mener en temps limité, et dans lesquelles les adultes ne doivent pas intervenir. Il faut donc qu'en amont, la classe se soit organisée pour traiter la totalité des jeux dans les deux heures, pour valider collectivement les réponses incertaines, pour recopier proprement... Seuls ou par deux, les élèves se répartissent les livres, le travail de copie des réponses validées, la vérification que rien n'a été oublié... Et les résultats placent régulièrement une ou deux des classes de ce collège "Ambition-réussite" dans le peloton de tête !

En troisième, des élèvesen autonomie

En troisième, les élèves utilisent très facilement les logiciels, vont consulter les sites dédiés à leurs révisions du diplôme national du brevet (DNB), la préparation de l'attestation scolaire de sécurité routière (ASSR), l'orientation. Dans le cours de l'année et dans plusieurs disciplines, ils font des recherches, de manière très autonome, cette fois. L'accent est mis sur la vérification et la validation des résultats issus d'internet. Cette année, des élèves de troisième ont vécu une expérience très forte dans laquelle ils ont appris à prendre des engagements, à les tenir et à s'investir personnellement et individuellement. Une vingtaine de volontaires des deux classes de troisième s'est en effet engagée, tout au long de l'année, dans une action proposée par le ministère et intitulée : "À l'école des écrivains : des mots partagés". Tous ont mené leur projet jusqu'au bout, alors que tout se déroulait sur leur temps libre, une heure par semaine, le lundi ou le mardi soir de 16 h 30 à 17 h 30. La documentaliste et les trois professeures de français n'ont fait qu'accompagner les élèves. Pour commencer, pendant les vacances de Noël, les élèves ont eu à faire la lecture cursive du livre de Yasmine Ghata, La nuit des calligraphes (Le Livre de Poche, Fayard). Découvrir seuls ce récit a demandé un effort certain à beaucoup d'entre eux qui, néanmoins, se sont accrochés à leur contrat de lecture. À la rentrée, certains passages de ce livre sombre et difficile ont été relus en classe, ce qui a permis aux élèves de discuter autour du roman.


Tenir tête à un écrivain

Après une première rencontre en groupes avec l'auteure, préparée collectivement, au cours de laquelle, grâce à leurs questions, ils ont pu faire sa connaissance, ils se sont lancés dans un projet d'écriture individuel. La contrainte a été donnée par l'écrivain : il s'agissait de choisir un objet familial, transmis de génération en génération, de le décrire, puis de le faire parler. Les élèves - français de souche y compris, qui, au premier abord, ne se sont pas sentis concernés et même exclus par cette idée d'histoire familiale - ont dû faire des recherches dans leur famille, enquêter, recueillir des témoignages. Ce travail d'investigation n'a pas été toujours facile. Les élèves ont dû s'impliquer, d'abord dans le choix même de l'objet, l'équivalent du calame dans le livre de Yasmine Ghata, puis dans la recherche qui s'est parfois heurtée à des tabous, des secrets de famille, et enfin, le plus difficile, dans l'écriture. Lors des séances consacrées à la production des textes, les élèves se répartissaient dans plusieurs salles et les quatre adultes "tournaient" : pas de tuteur personnel, de référent. Des lectures plurielles, des conseils limités. Puis ils ont eu à préparer et à assumer une rencontre en tête-à-tête avec l'auteure pour défendre leur premier jet et entendre ses critiques, positives et négatives, ainsi que ses pistes de réécriture. Cet entretien a été vécu comme un événement qui fait grandir. Quand ils ont restitué oralement au groupe les indications pour faire évoluer leur texte, les enseignantes ont été surprises par l'accueil très positif fait aux critiques et aux propositions de l'auteure. Une attitude très mature. Ils se sont remis au travail, puis ont écrit une ultime version en traitement de texte.

La nuit des calligraphes

L'établissement a décidé de prolonger ce projet : les textes seront rassemblés pour une exposition organisée par les élèves avec les objets, et une phrase de leur texte sera choisie par eux comme la plus emblématique. Ils vont la calligraphier eux-mêmes sous la direction d'un spécialiste qui viendra travailler un mercredi après-midi avec eux. La scénographie de l'exposition est entièrement confiée aux élèves eux-mêmes qui accueilleront leurs camarades des autres classes et les parents pour les visites. L'ensemble - les textes, les photos des objets (prises par les élèves) et la phrase calligraphiée - sera ensuite publié dans un livret. C'est à l'évidence une expérience très forte et au cours de laquelle chacun a dû relever le défi de la lecture puis de l'écriture - problématique pour quelques-uns - d'un texte très personnel, réécrit jusqu'à une version publiable. Les textes seront lus sur scène par des élèves du conservatoire de théâtre, pendant le salon du livre de la ville : "La 25e heure du livre". Et même, après une préparation individuelle avec la professeure de théâtre, Fatima lira elle-même son texte au public. Cette action reste cependant surtout l'expérience d'un travail au départ solitaire, parfois presque secret, même si des adultes ont pu aider à tel ou tel moment. Ils ont eu à s'engager jusqu'à défendre leur texte face à un écrivain : un adulte et un expert, puis à l'assumer face à leurs lecteurs et au public. Cette action a été une chance pour eux d'exercer, avec un encadrement réel, certes, leur capacité à s'engager et à travailler seuls, dans et hors collège, sur plusieurs mois, puis à mettre en œuvre collectivement la valorisation de leurs écrits. C'est une expérience précieuse de mise en confiance et d'apprentissage de savoirs et de savoir-faire très variés, construits dans l'action, avant de se lancer dans l'après-collège, quel qu'il soit.
 
auteur(s) :

M. Coupry

contributeur(s) :

A. Billon, T. Rousseau, C. Blot

fichier joint

information(s) technique(s) : pdf

taille : 176 ko ;

haut de page

innovation pédagogique - Rectorat de l'Académie de Nantes