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identité et altérité : premiers pas en Europe

mis à jour le 05/06/2009


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Certes, l'Union européenne est au cœur de nombreuses discussions et ce, dans tous les secteurs, mais comment en donner une dimension vivante et concrète aux futurs citoyens européens d'une petite ville du Pays de Retz ou d'ailleurs ?
Une réponse possible : l'ouverture d'une section européenne.

mots clés : classe européenne, échanges, ouverture culturelle, correspondance électronique


Au collège Louise-Michel de Paimbœuf, les élèves évoluent dans un cadre champêtre et fluvial : la ville, située sur les bords de la Loire, est également le seul port sur la rive sud de l'estuaire. Située à mi-chemin entre Saint-Nazaire et Nantes, cette commune souffre de ce type de localisation qui a tendance à provoquer un repli sur soi. Des distances trop longues pour les deux-roues et un réseau de transports en commun qui ne peut égaler celui d'une grande ville incitent les familles et les jeunes Paimblotins à rester dans leur beau Pays de Retz. Un isolement qui finit par nuire à l'ouverture culturelle des élèves du collège. Et de fait, comme l'indique M. Avignon, le chef d'établissement, dans sa demande d'ouverture d'option européenne : "[...] jamais jusqu'à présent la dimension européenne n'avait été apportée à un projet, jamais les élèves et les familles de Paimbœuf n'avaient pu rencontrer d'autres Européens et échanger avec eux". Mais pour ouvrir une option européenne en collège, encore faut-il qu'il y ait une section correspondante dans le lycée avoisinant, c'est-à-dire à Saint-Nazaire. Reprenons donc cette affaire à ses débuts!

Un professeur voyageur...

Quand on enseigne les mathématiques et que l'on a envie de découvrir le monde, on peut aller enseigner dans un lycée français en Amérique centrale. C'est ce qu'a fait J.-J. Lerein pendant quelques années avant de revenir s'installer au lycée Aristide-Briand de Saint-Nazaire. Dès lors, il va travailler à la création, dans son établissement, d'une section européenne espagnol et mathématiques. Si l'interdisciplinarité prend tout son sens à travers le travail sur la langue dans les textes mathématiques en espagnol, ce sont également les projets culturels qui l'intéressent afin de développer l'ouverture européenne et internationale. Certes, comme l'indique l'enseignant : "[...] l'étude du vocabulaire spécifique aux mathématiques en français et en espagnol est déjà une manière d'aborder les richesses et les spécificités de chaque langue, lesquelles traduisent souvent des traditions culturelles différentes". Mais d'autres actions sont envisagées car, si cette section ouverte à la rentrée 2008 a pour vocation d'intensifier l'usage d'une langue vivante, ce n'est pas là un but, mais bien un moyen pour accéder à d'autres cultures. Ainsi, les voyages, les échanges avec les partenaires (élèves et professeurs), la correspondance électronique et le partage des travaux réalisés en mathématiques seront la clé de voûte de l'un des objectifs de cette section : contribuer à la construction d'une identité européenne.

Une offre à saisir !

Pour les professeurs du collège Louise-Michel, l'ouverture de cette section est une opportunité à ne pas manquer. Paz Rodriguez, la professeure d'espagnol, souhaite consolider ainsi le travail déjà commencé pour créer des échanges entre Français et Espagnols. En effet, malgré une équipe active de professeurs de langues, il est très difficile d'organiser des voyages linguistiques et encore plus d'envisager des échanges. Si ceux-ci sont d'un moindre coût pour les parents, ils nécessitent néanmoins un réel investissement dans la relation avec celui ou celle que l'on reçoit pendant une dizaine de jours, et cela peut inquiéter les familles. Alors, répondre à la demande du lycée d'une ouverture de l'option en collège en proposant la candidature de l'établissement crée une nouvelle dynamique, un nouvel espoir de faire adhérer les familles à un projet européen. Durant l'année 2007-2008, l'enseignante est déjà investie dans un échange qu'elle réussit à organiser malgré bien des difficultés. L'ambition de pourvoir ce petit collège d'une telle option suscite un regain de motivation, tant pour l'équipe éducative que pour un certain nombre de familles. Ces dernières sentent le bien fondé de cette démarche qui ne peut être qu'un atout pour leurs enfants. C'est donc cette candidature, menée en parallèle avec l'organisation d'un premier échange franco-espagnol, qui ouvre grand les portes du collège pour y faire entrer un petit bout d'Europe.

Échanger : pas toujours facile...

Mais à quoi l'enseignant qui se lance dans une telle expérience doit-il s'attendre ? Eh bien, en France, lorsqu'un professeur français souhaite créer un véritable échange entre ses élèves et ceux d'un autre pays, il peut se heurter à des difficultés liées à sa situation géographique ou à notre système éducatif. Ainsi, les établissements de la partie sud de l'hexagone sont davantage sollicités par leurs homologues espagnols qui souhaitent ainsi réduire les frais kilométriques. Par ailleurs, l'apprentissage d'une seconde langue est optionnel en Espagne et il y a donc beaucoup moins d'élèves disponibles pour un échange. Enfin, comme le niveau scolaire qui correspond à celui de nos élèves de troisième est la première année de lycée, des différences dans l'autonomie peuvent apparaître comme un frein lorsque les élèves sont les uns chez les autres. Mais P. Rodriguez ne s'est pas découragée et elle a utilisé toutes les ressources à sa disposition pour trouver l'établissement espagnol avec lequel un échange serait possible durant l'année 2007-2008. Finalement, c'est grâce à eTwinning (voir annexe) qu'elle a pu entrer en contact avec le lycée Élisa y Luis Villamil de Vegadeo, une commune agricole de trois mille habitants. Certes, un voyage de découverte en Espagne aurait déjà pu être un premier pas en dehors des frontières pour les élèves de Paimbœuf, mais l'ambition étant de provoquer une véritable rencontre entre élèves européens, il fallait qu'il y ait réception mutuelle.

De nouveaux horizons

Rien de tel qu'une expérience réelle pour donner chair et sens à une notion évanescente à force d'immatérialité. L'Union européenne n'est pas seulement un chapitre du programme d'éducation civique ou de géographie. Pour les élèves paimblotins de troisième qui sont partis à Vegadeo au printemps 2008, c'est une véritable découverte qu'ils ont vécue. Sur eux-mêmes, d'abord, car après une année et demie d'apprentissage de l'espagnol, il n'a pas toujours été aisé de vivre toutes les soirées seul dans la famille du correspondant pendant une semaine. Ces jeunes élèves ont dû s'aguerrir, prendre sur eux et s'obliger à communiquer. Un seul d'entre eux, sur les dix-huit, n'a pas bien supporté cette situation, dès la première soirée, et a fini le séjour dans une autre famille. La même chose s'est passée pour un élève espagnol lorsqu'ils sont venus à Paimbœuf. Pour les autres, c'est l'aspect positif de cette aventure qui est ressorti. Une vraie rencontre, avec d'autres habitudes alimentaires, d'autres modes de communication familiaux, d'autres notions du confort matériel, aussi. La plupart des familles espagnoles étaient, tout comme celles de Paimbœuf, d'un milieu modeste et les adolescents français ont trouvé curieux que la plupart de ces familles habitent dans des appartements, même s'ils les ont jugés plutôt luxueux. Mais leurs observations ne se sont pas arrêtées là. Les relations entre professeurs et élèves, par exemple, leur ont paru plus informelles, du fait du tutoiement réciproque. Cette semaine d'échanges qui s'est renouvelée en mai, à Paimbœuf cette fois, a atteint son objectif : faire prendre conscience à ces jeunes, peu habitués à rencontrer des étrangers, qu'ils étaient liés par leurs différences et par leurs similitudes à la fois, et que l'horizon de leurs vies respectives pouvait s'étendre bien plus loin qu'ils ne le pensaient.


Aller toujours un peu plus loin...

La professeure d'espagnol le dit bien volontiers, il n'est pas étonnant que si peu d'échanges soient organisés car c'est vraiment une tâche difficile. Et ce, d'autant plus lorsqu'on est isolé dans sa discipline. Mais l'espoir de faire sortir les élèves des limites qu'ils s'imposent eux-mêmes, par sentiment d'insécurité, par manque de confiance ou par tradition familiale ou sociale, a suffi à P. Rodriguez pour garder toute sa ténacité. Ainsi, pour résoudre le problème du financement la première année, elle a cherché et trouvé une classe d'un autre collège de Loire-Atlantique qui allait dans la même région d'Espagne et elle a pu de cette façon réduire considérablement les frais de transport. Et elle a même porté plus loin l'ambition pour ses élèves, puisqu'elle a préparé, avec le chef d'établissement, la candidature à l'ouverture de la nouvelle option d'espagnol européen. Le collège de Paimbœuf comme celui de Saint-Brévin, une commune voisine, ont été choisis, et les deux enseignantes travaillent ensemble à la préparation des élèves qui pourront ensuite rejoindre le lycée nazairien. Double objectif dans cette démarche : ouvrir les esprits à la reconnaissance de l'altérité et à la construction de l'identité européenne et aussi inciter davantage ces jeunes adolescents à envisager une orientation scolaire au lycée général. Le taux de passage en seconde générale est faible et certains élèves pourraient se sentir plus confiants grâce aux compétences développées au travers de l'apprentissage d'une langue et d'une civilisation.

Un petit groupe motivé

Les onze élèves qui ont choisi l'option européenne forment un groupe motivé. Ils ont été volontaires et ont même dû s'expliquer sur cette motivation qui avait des conséquences sur d'autres choix possibles. L'enseignante d'espagnol a présenté aux trois classes de cinquième leur seconde langue vivante au mois de mars. Durant cette présentation, elle en a profité pour présenter aussi l'option. Parallèlement, le principal du collège avait déjà envoyé une lettre aux parents pour leur annoncer l'ouverture de cette option. Sachant qu'en cinquième, il y avait des élèves qui avaient déjà choisi le latin, la question de l'abandon de cette option en faveur de la section européenne s'est posée. Il a été décidé de laisser aux élèves motivés la possibilité de changer. De fait, pour cette première année, la plupart des élèves sont d'anciens latinistes. Une fiche d'évaluation a été élaborée. Elle s'appuie sur l'avis du professeur d'anglais pour connaître la motivation de l'élève en langue et surtout à l'oral, et aussi sur celle du professeur de mathématiques, pour des raisons évidentes. Ensuite, les candidats ont dû écrire une lettre de motivation. Enfin, la troisième phase a été de passer un entretien oral devant un groupe d'adultes dont le professeur de latin (qui donnait son accord ou pas pour l'abandon du latin), le professeur principal, le principal et la professeure d'espagnol. Deux élèves se sont désistés avant l'entretien. Les autres l'ont passé de façon satisfaisante et la question du refus s'est posée seulement pour une élève qui avait un niveau très juste aussi bien en mathématiques qu'en anglais. Il a finalement été décidé de l'accepter puisque sa motivation et son envie ont semblé plus importantes que ses difficultés. Enfin, si le souci d'une concurrence avec le latin perdure pour l'instant, il faut noter que deux élèves qui ont choisi l'option espagnol européen n'ont pas voulu abandonner le latin et se sont inscrits au CNED (Centre national d'enseignement à distance). La difficulté du recrutement réside, bien sûr, dans le fait qu'il s'agit de deux heures supplémentaires de travail par semaine. Et puis c'est une option pour les deux dernières années du collège qui élimine la possibilité d'en faire d'autres comme le latin ou l'ODP (option découverte professionnelle) en troisième.

Communiquer pour se découvrir

L'objectif clairement annoncé d'acquérir une bonne maîtrise à l'oral permet d'exploiter les deux heures supplémentaires d'espagnol pour mettre tous les élèves du groupe en situation de pratique régulière. La dotation informatique faite par le Conseil général offre la possibilité à l'enseignante d'utiliser la salle multimédia comme un laboratoire de langues et toutes ses séances sont bâties autour d'activités orales. Un petit regret néanmoins, les lecteurs MP4 qui devaient être prêtés par le rectorat ne sont pas arrivés et les élèves n'ont donc pas, pour l'instant, la possibilité de travailler en autonomie la correction de la langue et de la prononciation. L'oral est bien un objet d'apprentissage, mais il est aussi un outil pour découvrir la culture espagnole. À la fin de leur année de troisième et après cette première année d'option, les élèves auront fait le même travail d'apprentissage grammatical que les camarades avec lesquels ils sont trois heures par semaine. Néanmoins, la pratique langagière supplémentaire de deux heures les amènera certainement à avoir une meilleure assimilation de la syntaxe espagnole. Enfin, ils compléteront les connaissances acquises sur la civilisation ibérique tout au long de l'année grâce aux deux périodes d'échange avec les élèves espagnols, puisque P. Rodriguez a pu, à nouveau, obtenir un accord de principe pour un échange avec l'établissement de Vegadeo. Enfin, les élèves réaliseront pendant leur séjour en Espagne, tout comme l'année précédente, un cahier de voyage qu'ils mettront en forme au retour. Ce cahier a pour but de les aider à se repérer et à établir des comparaisons entre le mode de vie espagnol et français. En effet, le cahier met l'accent sur l'observation de la vie familiale en Espagne (organisation, habitudes, goûts...) pour les faire réfléchir aux différences et aux similitudes avec la leur. Chacun peut s'exprimer à sa façon et c'est par le dessin, parfois, que les choses sont dites (voir annexe). En difficulté en troisième, cette année-là, cette jeune dessinatrice a su exprimer, avec talent, son goût pour de nouveaux paysages en consacrant un temps certain à la représentation de ce qu'elle voyait de la fenêtre de son correspondant espagnol. Ce sont donc des projets réellement ambitieux que ce voyage et cette classe européenne pour ces élèves en manque d'horizons, qui découvrent leurs homologues espagnols alors même que cela paraissait encore inenvisageable quelques mois auparavant.
 
contributeur(s) :

J.-J. Lerein, P. Rodriguez
J.-J. Lerein, P. Rodriguez, Collège Louise-Michel, Paimbœuf [44] - Lycée Aristide-Briand, Saint-Nazaire [44]

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