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mis à jour le 28/03/2011


echanger dossier 92

Au cours de leur cursus scolaire, les élèves rencontrent plus ou moins régulièrement, en classe ou en face à face, un conseiller d'orientation-psychologue dont ils attendent des réponses aux questions importantes qu'ils se posent quant à leur avenir. Pour les aider, et non décider à leur place, cette rencontre donnera lieu à un entretien. L'échange, fondé sur des méthodes solides, doit leur permettre de réfléchir à leur projet pour mieux se l'approprier, donc mieux s'y impliquer.

mots clés : échanger, entretien, orientation, principes, outils, projet professionnel, remédiation


Un élève ayant dix-sept de moyenne générale voulait faire un apprentissage en plomberie. Le travail du COP (conseiller d'orientation-psychologue) a consisté à le faire réfléchir sur les raisons de ce choix, à l'aider à prendre conscience de tous les choix qui lui étaient possibles, sans pour autant porter un jugement sur celui qu'il revendiquait. Très vite, le déterminisme familial est apparu, et les enjeux parentaux ont été discutés. Ainsi l'élève a-t-il pu comprendre ce qui avait présidé à son choix, même s'il est reparti toujours convaincu de faire cet apprentissage. Il s'agissait de prendre le temps de s'arrêter et de réfléchir à ce choix dont la pertinence pouvait être mise en doute lors de la prise en compte objective des résultats. L'élève s'étant posé des questions à partir de celles du COP a pu y répondre afin de mieux prendre conscience de ce qui le motivait dans cette voie. On le voit, l'entretien apparaît comme une démarche visant à demander à l'élève de regarder objectivement le projet qu'il envisage, regard posé sur sa situation personnelle et sur le métier ou projet envisagé (gestes, scènes, représentation, expériences possibles).

Qui sont donc ces conseillers d'orientation-psychologues ?

Les COP, formés en centre de formation dont l'Inetop (Institut national d'étude du travail et de l'orientation professionnelle), ont donc pour mission d'aider toute personne, et en particulier les élèves, à construire un projet scolaire et/ou un projet professionnel susceptibles de les satisfaire en fonction de leur personnalité, de leurs intérêts, de leurs ambitions, de leurs résultats et du contexte social et économique. Ils reçoivent les élèves, accompagnés éventuellement de leur famille, en entretiens individuels, animent des séances en classe (dès le niveau cinquième ou quatrième en collège), travaillent en étroite coopération avec les membres de l'équipe éducative, notamment les professeurs principaux et l'équipe de direction. Les entretiens ont lieu soit dans l'enceinte de l'établissement (c'est le cas le plus souvent), soit au centre d'information et d'orientation (CIO) directement. L'élève verra plusieurs fois un COP pendant sa scolarité, mais ce ne sera pas toujours le même. Un COP travaille surtout les questions liées à l'orientation scolaire et professionnelle, mais il peut aussi répondre à des demandes d'ordre psychologique (difficultés d'adaptation, mal-être, évaluation psychopédagogique, pour élaborer des solutions de remédiation en cas de difficultés scolaires lourdes, etc.).

Qui sont ces élèves ?

Les établissements scolaires font de l'élaboration de projet professionnel, ou tout au moins de projet scolaire, une nécessité de tout cursus réussi. Les niveaux de troisième, seconde et terminale sont éminemment concernés. Les élèves voient dans le COP un spécialiste de la formation, le reconnaissent comme un interlocuteur avec qui on peut prendre le temps de discuter de son projet, de ses envies, aspirations, et qui saura traduire ceux-ci en termes de parcours de formation. On peut distinguer plusieurs profils d'élèves en entretien : des élèves en difficulté, qui ont du mal à se projeter dans un avenir proche ou lointain, donc à donner du sens à la scolarité qu'ils semblent subir (dans ce cas, l'élève va voir le COP parce qu'on l'a "envoyé" le voir) ; des élèves d'un bon niveau, qui subissent la pression quant à la formulation d'un projet (ceux-ci ont souvent uniquement un projet scolaire, alors que l'entourage, et particulièrement les parents, attendent aussi un projet professionnel) ; des élèves qui ont une idée, et qui souhaitent prendre le temps de la formuler plus précisément avec un professionnel de l'orientation ; des élèves complètement indécis que cette situation angoisse, etc.

Quels sont les principes guidantun entretien ?

Le COP a une approche multifactorielle de la personne qu'il reçoit : l'élève évolue dans un environnement social, familial et scolaire particulier. Tous ces aspects ont une influence sur cet élève qui doit réfléchir à ce qu'il est et veut devenir, en fonction de toutes ces données, et pas seulement en fonction des seuls résultats scolaires. Il s'agira au cours de l'entretien d'aider le jeune à conscientiser ce qui va déterminer ses choix. La demande de l'élève est au départ souvent explicite, par exemple : "Je veux m'occuper d'enfants ; je veux être coiffeuse ; je veux être médecin". Il est important de répondre à un moment de la rencontre à cette demande explicite, mais l'entretien sert à aller au-delà. Celui-ci, marqué par sa durée limitée, est défini par un objectif qu'il n'est pas toujours aisé de formuler, tant du côté de l'élève que du côté du conseiller, dans la mesure où nombre d'implicites sont mis en jeu. Il faut cependant chercher des buts à atteindre afin que cet entretien soit fructueux. On interrogera les représentations du métier (ou des études) que s'en fait l'élève, on l'amènera à se questionner sur les conditions nécessaires à la réussite de tel ou tel projet ; on incitera le jeune à confronter des données objectives à ce qu'il sait de lui-même. Le COP n'est pas dans l'injonction, mais dans la recherche d'une démarche scolaire aboutissant à un projet professionnel. Ainsi, il faut donner à l'élève une représentation de la réalité qui modifie, sans l'abîmer, sa représentation personnelle, parfois erronée, mais cependant fondée. L'élève doit donc repartir avec des réponses à ses questions, afin d'instaurer un climat de confiance entre lui et le professionnel, dans la mesure où l'élève investit sur une personne qui va l'aider à faire le point sur le projet qu'il tente de formuler. Le principe de ces entretiens est donc caractérisé par le triptyque suivant : exploration des possibles, questionnement sur soi, synthèse. En fonction des situations, le COP peut choisir de commencer par l'exploration des possibles ou par le questionnement sur soi. Les entretiens peuvent également être semi-collectifs : en ce cas, le COP se trouve avec quelques élèves et l'objectif est que la représentation de chacun sur ce qu'il est et ce qu'il veut se modifie selon les représentations que les autres ont des situations évoquées.

Quelle posture faut-il adopter ?

Le meneur d'entretien, en l'occurrence le COP, doit poser des questions en prenant une position d'accompagnateur, afin de respecter la liberté de celui qui lui répond, même s'il est susceptible de ne pas être d'accord avec lui. Ainsi, un désaccord, exprimé ou tu, ne peut faire l'objet d'une interruption du dialogue, ou d'une tension, mais doit, au contraire, donner lieu à l'expression d'arguments fondés qui impliquent chacun. Le conseiller ne doit pas être dans la position de toute puissance de celui qui sait ce que son interlocuteur doit faire, même s'il a des données objectives irréfutables, tant l'élève a aussi d'informations qui ont forgé son désir de poursuivre telles ou telles études. Par ailleurs, le conseiller doit être convaincu que l'élève interrogé est capable de réfléchir, quelles que soient ses difficultés à s'exprimer. Le jeu des questions/réponses n'est pas satisfaisant, car il risque de ne pas amener l'élève à réfléchir; l'entretien se construit au fur et à mesure de l'échange et non en amont. Ce que l'on sait peut-être de l'élève, du contexte économico-social de la région concernée, ne doit pas constituer des éléments d'influence sur l'élève. Il s'agit donc, comme le dit Nicole Baudoin qui enseigne à l'Inetop, d'une coconstruction 1. Cependant, la position de neutralité, bien que visée, n'est pas totale dans la réalité, puisque le professionnel de l'orientation, même s'il écoute avec bienveillance, aide l'élève, et pour cette raison met du sens et lui en fait part.

Quels outils sont mis en œuvre ?

Autrefois, des tests étaient utilisés afin de déterminer ce qu'un élève devait faire, en fonction de ses désirs, de ses compétences, de sa personnalité. Ces tests ont montré leurs limites, tant ils étaient fondés sur l'idée que le résultat apparemment objectif pouvait valoir décision d'orientation. Aujourd'hui, on travaille préférentiellement sur les intérêts, sur l'estime de soi, estime parfois mise à mal par la violence de la notation scolaire. Il est alors nécessaire de s'appuyer sur l'extrascolaire (qu'est-ce que je vaux ? ; qu'est-ce que je sais faire ? ; quelles sont les activités que je pratique dans ma vie qui ont du sens pour moi, que je pourrais avoir envie de développer ?) pour mieux revenir à ce qui relève du scolaire proprement dit (résultats, travail, attitude). On cherche ainsi à éduquer l'élève à faire des choix, lui donner une méthodologie de recherche et d'analyse des informations, le but étant que le jeune fasse un choix assumé maintenant ou plus tard, ce qui lui permettra de s'impliquer, notamment scolairement. Différentes techniques sont utilisées en entretien : le miroir consiste à renvoyer à l'élève ce qu'il vient de dire, en le répétant devant lui afin qu'il mesure la validité (ou non) de ses propos - cet outil peut d'ailleurs revêtir un caractère risqué dans la mesure où l'élève peut ne pas accepter ce qui lui est renvoyé - et la reformulation par l'élève des phrases qu'il prononce est utile afin de chercher dans la reprise, voire le développement nuancé, ce qui relève de la vérité de cet élève, et ce qui relève de ce qu'il souhaite dire sans en être totalement convaincu. Cette reformulation a le mérite de développer, et pas seulement de répéter, ce qu'on a dit avant. Il s'agit de mieux prendre conscience de ce qu'on veut, voire de ce qu'on ne veut pas malgré tout ce qu'on en dit. On peut aussi relancer l'élève par une question (on fait ainsi avancer la discussion et la réflexion), mais la manière dont cette relance est faite conditionne la suite de l'entretien, en fonction de la façon dont elle est reçue. Le conseiller peut aussi interpréter ce qui lui est dit, mais en ce cas, il y a un risque que la suite de l'entretien se fonde sur une hypothèse de l'adulte qui mène l'entretien, et non plus sur ce l'élève a réellement à exprimer 2.

Les limites de ces principes et de ces outils

Des contraintes caractérisent parfois ces entretiens, et il est alors nécessaire de travailler en fonction de celles-ci : la présence d'une tierce personne, en l'occurrence les parents, voire un frère ou une sœur ; le fait que les élèves bénéficient d'un autre accompagnement (en même temps ou à un autre moment) tant les entreprises de conseils en orientation se développent. Mais d'autres paramètres changent ou tout du moins ont une influence sur la manière dont l'entretien est mené : il s'agit du temps de cet entretien, mais aussi du temps qui sépare l'élève de la décision d'orientation qu'il devra prendre ; il s'agit aussi du désir, notamment de l'élève, d'aboutir à un résultat concret, alors que rien ne laisse peut-être présager de cette nécessité ; il s'agit aussi de l'implication de l'élève rencontré dans la mesure où cette implication aura une forte influence sur la menée de l'entretien, sur son contenu et son résultat. Ainsi, les outils ne seront efficaces que si l'élève est concerné par son avenir scolaire ou professionnel.

Comment évaluer la pertinence ou la réussite d'un entretien ?

Parfois, l'entretien est considéré comme réussi, tout simplement parce qu'il a eu lieu, tant certains élèves ont éprouvé de difficultés, ont émis, explicitement ou implicitement, de réticences à prendre rendez-vous avec un conseiller d'orientation. S'agit-il donc seulement de répondre à la question posée par l'élève, s'il y en a une ? Ou plutôt de faire émerger des éléments qui lui permettent de mieux comprendre la situation dans laquelle il se trouve, quitte à ne pas avoir défini au cours de l'entretien un projet professionnel ou scolaire totalement abouti ? L'efficacité du service rendu par le conseiller d'orientation doit être mesurable par lui-même : a-t-il réellement aidé l'élève à avancer et à résoudre les problèmes qui étaient les siens ? À tout entretien correspond une situation particulière, dont les nombreux paramètres ne donnent pas prise à une réponse univoque et certaine. Il ne s'agit donc pas de fournir à l'élève des solutions clés en mains qui lui donnent des réponses rassurantes, mais des outils, une méthodologie de questionnement et d'analyse l'aidant dans sa démarche scolaire et professionnelle à long terme.
1. Une orientation scolaire a-t-elle un sens ?, actes de la journée d'étude et de formation Le Mans - Rouillon du 18 mars 2009, Edusarthe, inspection académique de la Sarthe, 2009.
2. Repères, Les Cahiers de l'accompagnement, n° 47, Éditions du CARIF Poitou-Charentes, 15, rue Alsace-Lorraine.
 
auteur(s) :

P. Chéry

contributeur(s) :

N. Mudès, CIO, Le Mans-centre [72]

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