innovation pédagogique

L'essentiel, pour que puisse perdurer le partenariat, est de construire des relations humaines, et pas uniquement professionnelles, ce qui implique des affinités, mais aussi une certaine durée. Pourtant, il faut paradoxalement tenir compte de la brièveté d'une année scolaire et des changements d'une année sur l'autre. L'idée retenue est de créer des binômes associant un chef d'entreprise et un professeur principal, sur la base évidemment du volontariat. Le cahier des charges est volontairement minimal. Il ne s'agit pas d'imposer, on l'a dit, mais de faciliter les initiatives futures. L'enseignant ira passer une demi-journée dans l'entreprise et déjeunera avec le chef d'entreprise ; ce dernier se rendra une demi-journée au lycée et assistera à des cours. Présenté aux enseignants en début d'année scolaire, le projet suscite leur adhésion. À tel point que huit professeurs se portent volontaires, quatre de plus que les quatre professeurs principaux de seconde générale. Comment expliquer un tel succès ? Sans doute parce que le projet répond à de réels besoins, mais aussi parce que le dispositif est souple et peu contraignant, ce qui laisse une place essentielle aux initiatives pédagogiques. Enfin, ce partenariat n'est pas à "sens unique" : chacun va chez l'autre, dans une démarche de découverte mutuelle. Le CJD a dû faire face à un recrutement plus complexe à réaliser, dans la mesure où il lui fallait trouver au total vingt-deux chefs d'entreprise volontaires, pour répondre à la demande des quatre lycées, privés et publics, de Montaigu et des Herbiers. D'autant plus que le critère de proximité était fondamental pour permettre des échanges fréquents au besoin, avec des déplacements à pied. Vingt-deux entreprises sont finalement présentes à l'appel. Une papeterie en gros côtoie une fabrique de construction métallique, un cabinet d'architecture intérieure ou une boulangerie; les structures sont très variées, avec des grandes entreprises et des PME 2, de l'industrie, comme du tertiaire et du commerce (voir annexe). Leur point commun est une certaine ouverture d'esprit du chef d'entreprise, qui a conscience de l'importance de l'école, de la nécessité de créer des liens durables entre le monde scolaire et celui de l'entreprise.

"Comment apparier tout ce petit monde ?", se sont demandé les membres du CLEE. Convaincus que de tels partenariats ne peuvent s'inscrire dans la durée que si les partenaires nouent des relations humaines cordiales, le comité local exclut une constitution aléatoire des couples. Mais le projet doit aussi avancer, et le temps de chacun est précieux. C'est alors que surgit une lumineuse idée : pourquoi pas un speed-dating ? Il a lieu en début d'année scolaire. Chaque chef d'entreprise est installé à une table. Il discute pendant six minutes - top chrono ! - avec chaque professeur. "Le plus difficile aura été de faire respecter le temps imparti", constate la proviseure; beaucoup voulaient prolonger la conversation. À l'issue de cette rencontre, les enseignants émettent des vœux en classant les chefs d'entreprise avec lesquels ils souhaiteraient travailler. Globalement, toutes les demandes ont pu être accordées. Les couples ainsi constitués, les étapes s'enchaînent pour mieux faire connaissance et définir une ligne d'action pour les années à venir. Les enseignants se rendent dans les entreprises en mars, leurs dirigeants viendront dans les lycées courant mai. L'objectif est de constituer des binômes qui seront activés en fonction des besoins. En effet, les enseignants ne sont pas nécessairement professeurs principaux de seconde tous les ans. Et leur projet peut être différent d'une année sur l'autre. Une fois que les personnes se connaîtront bien, que les enseignants auront une idée plus précise de l'entreprise partenaire, il sera plus facile de construire des projets annuels. Ceux-ci permettront aux élèves, dans le cadre de leur parcours de découverte des métiers, d'apprendre à connaître le fonctionnement d'une entreprise, les personnes qui y travaillent et leurs métiers, les réalités et les contraintes du milieu professionnel.

L'avenir nous le dira. Nous n'en sommes encore qu'à l'heure de la rencontre. Il faut laisser au temps le temps de se connaître. Diverses pistes sont d'ores et déjà envisagées quant au contenu des projets à construire, qui commenceront à la prochaine rentrée scolaire. L'avantage de la proximité géographique des entreprises est de faciliter les échanges. Une fois la structure posée, le projet de chaque année pourra être adapté en fonction du profil des élèves ou du projet pédagogique. Il peut s'agir de visites de l'entreprise ou d'échanges plus soutenus, l'objectif étant bien entendu de dépasser une superficielle visite et d'approfondir la découverte par des situations de mise en activité dynamique des élèves. Tout est possible, et tout sera plus facile dans la mesure où la phase de prise de contact aura déjà été réalisée. Le succès de tels dispositifs repose essentiellement sur l'engagement humain, conclut la proviseure du lycée Jean-Monnet. Ajoutons que la souplesse de la structure permet de l'adapter à des projets pédagogiques en partie déterminés en fonction de paramètres qui varient d'une année sur l'autre : profil des élèves, professeur principal de la classe, projet de l'équipe pédagogique... autant de variables plus faciles à prendre en compte lorsque les fondations humaines, elles, sont déjà posées. L'édifice ne peut qu'y gagner en fonctionnalité et en solidité, sans perdre de sa souplesse.

1. Le CLEE, Comité local éducation-économie, est un lieu de travail pour permettre un rapprochement entre monde éducatif et monde économique, afin de faciliter et fédérer des actions écoles-entreprises. Dans le CLEE, sont représentés les établissements scolaires, les entreprises, la mission générale d'insertion, les chambres consulaires et les représentants des parents d'élèves.
2. Petites et moyennes entreprises.