Le théâtre-image se développe dans les années soixante-dix sous l’influence d’Augusto Boal essentiellement. Cette technique qu’il nomme d’ailleurs "théâtre-statue" constitue un pan important de son travail du Théâtre de l’Opprimé. Engagé contre la junte militaire, Augusto Boal permettait de sculpter la réalité pour identifier et comprendre les oppressions subies par les citoyens brésiliens qui devenaient "spect-acteurs". Aujourd'hui encore, cette forme de théâtre souhaite aider à lutter contre toutes les formes d'oppression pouvant exister dans les sociétés humaines. L’objectif est de donner aux personnes qui veulent exercer davantage leur citoyenneté un outil de parole, mais aussi d’analyse d’une réalité, de construction d’une volonté et de préparation à l’action concrète. Il s’agit de trouver les images qui disent la réalité, de prendre de la distance par rapport au vécu et donc de décoder celle-là. La méthode du Théâtre de l’Opprimé a ceci de particulier qu’elle ne propose pas aux participants une entrée par la théorie, mais par la pratique à travers un parcours qui mobilise les sensations, le corps, les souvenirs, les rêves et l’intellect. C'est donc par la situation de jeu que l'acteur expose une vision, la plus synthétique possible, de situations concrètes.
Dans la classe, les exercices amènent donc l'élève à être acteur de ses apprentissages. Il s'agit d'une mise en activité du groupe d'élèves ayant pour objectif de trouver des images qui disent la réalité et la décode. Technique simple, elle a pour vocation d'être un moyen de rendre compte d'une situation, d'exprimer des sentiments difficiles pas toujours aisés à verbaliser. Les élèves peuvent, par son intermédiaire, trouver une méthode de recherche (d'investigation) de leurs représentations et ce, de manière confortable, car ils ne se focalisent que sur la double contrainte du corps sculpté et de l'interdit de la parole. C'est un vecteur de travail rigoureux, de précision et de concentration.
De même, le processus de création des images est intéressant pour des élèves, car ils doivent faire des choix. Le théâtre-image donne du sens, parce qu'il faut regarder pour comprendre. Chaque élève prend conscience des images qui auraient pu être élaborées, de celles qui manquent pour que l'interprétation fasse sens. Dans un travail sur les personnages féminins chez Molière, par exemple, les élèves peuvent dégager ce qui leur semble juste de montrer, ce qui est exagéré, mais aussi ce qui leur manque. Ainsi commence le travail d'analyse, d'abstraction et d'argumentation. En proposant des images variées d'une même situation et en les comparant, les élèves se rendent compte des éléments à conserver pour exprimer une réalité. Ainsi s'exerce la force de la démonstration.
Lors des restitutions, les images créées sont généralement de qualité. Ainsi nous ne pouvons qu’affirmer que le théâtre image est un formidable outil pédagogique utilisable par bon nombre de disciplines.