innovation pédagogique

V. Gérolami soulève un paradoxe : "Les parents viennent déposer ou chercher leur enfant, puis partent vite. Mais en même temps, on ressent chez eux l’envie de rester pour échanger." Or, quel espace offre une école pour retenir ces parents ? Il faut que l’école leur donne l’envie de revenir, d’entendre du positif sur leur enfant, " dès l’entrée à la maternelle, et bien sûr au Cours Préparatoire !", ajoute V. Gérolami. "J’aimerais que, dès la maternelle, on propose un espace-parents, un accueil privilégié aux familles, pour établir un contact favorable à la réussite du jeune enfant. C’est l’action prioritaire que nous souhaitons mener avec l’association des parents et les représentants de parents". Dès juin 2016, s’engagera une réflexion pour qu’à la rentrée scolaire de septembre de tels espaces soient opérationnels afin de créer au cœur de l’école des habitudes de rencontres régulières entre les familles.
En 2013, l’Éducation nationale a élaboré la Charte de la laïcité ; charte qu’il est demandé depuis 2015 de faire signer aux parents. "Mais peut-on transmettre sans accompagnement cette charte à des familles parfois démunies pour bien la comprendre et spontanément peu intéressées par ce document ? " questionne V. Gérolami.  L’école Germaine-Tillion a donc choisi d’attendre le milieu de l’année scolaire pour transmettre ce document, c’est-à-dire avant les vacances de février, après l’organisation d’un temps d’échanges sous la forme d’un world café. Ainsi est-il proposé aux parents de venir à l’école pour récupérer leur exemplaire de la charte.
L’école s’interroge donc sur de nouvelles modalités pour faire venir les parents, et plus précisément ceux qui n’osent entrer ou rester. Si l’interrogation actuelle porte sur l’organisation régulière de "cafés parents" l’an prochain, cette année a été expérimentale pour tisser du lien.
En effet, l’école a mis à profit la semaine de la laïcité pour inviter les parents à un échange convivial entre adultes, sur le principe du "World café". Les participants (parents, enseignants, inspecteur, animateurs, …) sont répartis en petits groupes autour de tables. Chaque table propose une réflexion que chacun est amené à explorer. Un quart d’heure plus tard, les membres du groupe se séparent : chacun se dirige à sa guise vers une autre table de son choix. Cependant, une personne du groupe reste autour de la table pour exposer aux nouveaux membres la réflexion qui vient d’être menée. Dans le cadre scolaire, on peut ainsi imaginer que les participants commentent les actions menées dans l’école, qu’ils interrogent le projet d’école, des thèmes du quotidien, la médiation scolaire, …
En décembre 2015, l’école Germaine-Tillion a donc organisé son premier "Café découverte". Soutenue par l’inspecteur de la circonscription, cette action a été focalisée sur la charte de la laïcité. D’immenses panneaux ont été préparés : sur chacun d’eux était collé un article de la charte. Tous les participants ont alors exprimé leur ressenti en utilisant différentes couleurs : le bleu pour indiquer ce que l’on en comprend, le rouge pour indiquer à quelles valeurs tel article renvoie, le vert pour faire le lien avec le quotidien de la vie dans l’école.

"On attendait plus de parents …", souligne V. Gérolami, "mais c’est un début ! Les gens n’osent pas, ou croient que leurs réflexions ne sont pas intéressantes. En tout cas, c’est une expérience à refaire !" . Elle pense qu’il faudrait davantage prendre appui sur les parents déjà sensibilisés, parce qu’ils sont dans l’association des parents d’élèves ou parce que représentants au Conseil d’école. Ou encore : sensibiliser en proposant un "Café découverte" aux enfants le mercredi, avec un prolongement le samedi pour les parents. C’est ce qui a été fait, en deux temps : le mercredi 9 décembre 2015 a été organisé un world café avec les élèves, et le samedi 12 décembre les parents ont été conviés à un world café, notamment autour de l’exposition des travaux des élèves.
Très énergique et volontaire, la directrice ne manque pas d’idées : "Il faudrait aussi pouvoir tenir une permanence pour recueillir les questions, les remarques, parce que quand on distribue la charte, on sent que certains parents voudraient en parler". Certes, il existe déjà un espace de parole, organisé par les représentants de parents d'élèves, pour recueillir les questions des parents en vue du Conseil d'école, mais imaginer un espace-parents permettrait d’identifier dans l’école un lieu où les parents peuvent trouver des informations.
La problématique autour de laquelle réfléchit l’école étant : comment mieux communiquer sur de l'information et non pas sur des rumeurs, des déformations de propos, ... ("il paraît que.. ", "c'est écrit dans le journal...", ) ?

"Il est essentiel, ajoute-t-elle, que tout le monde se sente bien dans cette nouvelle école. Quand on interroge les élèves le matin sur ce qu’ils ont vécu de positif depuis leur réveil, certains n’ont aucune réponse…".
Il est effectivement nécessaire que l’école offre des espaces de parole pour permettre à chacun de s’exprimer, puis de mieux se connaître, de mieux comprendre les autres, d’identifier ses réussites et celles des autres, d’écouter et de se savoir écouté. Et V. Gérolami de laisser le dernier mot à Nelson Mandela : "il nous faut apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon nous allons mourir ensemble comme des imbéciles".