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mis à jour le 19/12/2012


echanger dossier 1

Au collège de Bercé, deux classes de sixième expérimentent pour la deuxième année l'évaluation sans notes grâce à la coordination serrée d'une équipe pédagogique motivée.

mots clés : échanger, classe sans note, projets transversaux, compétences, nivau sixième


L'idée de l'expérimentation vient d'un petit groupe d'enseignants. Le déclic a eu lieu au cours d'une formation au sein de l'établissement. Celle-ci portait sur la gestion des élèves en difficulté ou/et dyslexiques : comment les évaluer avec pertinence pour leur permettre de progresser ? C'est au cours de cette formation et des échanges qu'elle a suscités que l'inadéquation entre la pratique des enseignants et les modalités des évaluations est apparue comme un handicap, et ce pour tous les élèves. L'évaluation par connaissances et compétences est une solution proposée pour aider les élèves en difficulté, mais n'est-elle pas une solution souhaitable pour tous ? Les enseignants du groupe pratiquent une pédagogie différenciée et sont avant tout soucieux d'expliquer aux élèves l'utilité de chacun des apprentissages dans la construction progressive de leurs compétences. Ils seront amenés à les réinvestir tout au long de l'année. Certaines notions ne sont bien évidemment pas acquises par tous au même moment, et qu'importe! Mais obtenir une note faible à la première évaluation peut être perçu comme une sanction, alors que l'élève pourrait en réussir une autre de même type un mois plus tard, par exemple. À l'issue du stage, une équipe-noyau d'enseignants de mathématiques, de français et d'anglais demande l'expérimentation auprès du chef d'établissement. Leur projet est prêt : il consiste en un travail par objectifs d'apprentissages, qu'il s'agisse de connaissances ou de compétences à acquérir. L'expérimentation commence en 2010-2011, sans notes, avec une classe de sixième, et s'étend cette année sur deux classes de sixième. Le choix du niveau s'est imposé : le dispositif aidera les nouveaux élèves à bien identifier les exigences de travail au collège.

L'élaboration du livret de compétences

Dès le début de l'expérimentation, l'équipe décide de créer un livret de connaissances et de compétences qui servira de support trimestriel aux élèves, en complément du bulletin sur lequel figureront uniquement les appréciations. Chaque professeur s'attelle donc à définir les principales connaissances et compétences à acquérir dans sa discipline (voir annexe). Un casse-tête ? Non, témoignent les enseignants, mais plutôt une mise en phase avec un projet didactique qui incite sans cesse à revoir les apprentissages précédents, et à les réinvestir dans une nouvelle circonstance (nouveau chapitre, exercice différent). Une nouvelle situation de travail donne aux élèves la possibilité de comprendre une notion, par exemple, ou de montrer qu'il est capable de réinvestir une compétence de manière autonome. Chaque apprentissage acquiert ainsi du sens. La liste des compétences est le résultat d'une réflexion croisée menée à partir des programmes, des items du socle commun de connaissances et de compétences, et des exigences de chaque professeur. La formule a cependant évolué cette année par la mise en exergue des compétences transversales, présentées dès la première page du livret. Il s'agit de compétences communes à tous les enseignements, fondamentales pour tout apprentissage : le respect des règles de vie collective, les bases de travail personnel, de présentation des copies, etc. Cela permet de clarifier auprès des jeunes collégiens la convergence des enseignements : expliciter des axes de travail communs pour des apprentissages différents, et par là, faciliter leur adaptation aux exigences du travail au collège. Cette page des compétences transversales intègre les règles de vie scolaire ; elle se substitue ainsi à la note mise en place il y a quelques années. Pour situer l'étape d'apprentissage d'une compétence, l'équipe a retenu quatre stades : compétence non acquise, compétence en début d'acquisition, compétence presque acquise et compétence acquise. Sur la première page du livret, chaque étape est précisément définie. Ainsi, une compétence est acquise quand "les apprentissages sont maîtrisés et utilisables dans des situations nouvelles". Le livret fonctionne comme un outil de liaison, remis à l'élève après chaque conseil de classe, signé par les parents et rapporté ensuite au professeur principal.

Une révolution ?

Pour les enseignants, l'évaluation sans notes est en phase avec l'évolution de leur pratique didactique. D'un point de vue pédagogique, elle permet de rendre les élèves davantage actifs, acteurs, réfléchis. En mathématiques, par exemple, la professeure incite les élèves à se poser les bonnes questions : quelle compétence évalue-t-on ? Pourquoi fais-je ce travail ? Quand vais-je le réévaluer ? À quoi cela peut-il me servir dans la vie pratique ? Les élèves sont aussi plus actifs et rigoureux, car ils comprennent que les compétences peuvent être évaluées dans plusieurs domaines. Par exemple, l'apprentissage de la conjugaison des temps du récit peut être évalué dans un contrôle de conjugaison, mais aussi dans un exercice de réécriture ou dans une rédaction. L'élève doit rester vigilant : il faut acquérir les notions à des fins durables. Les compétences ne sont donc pas acquises puis mises de côté pour le reste de l'année, mais réinvesties régulièrement. Sans les notes, ce qui devient différent, c'est que l'on déplace l'intérêt de l'élève de la note vers les compétences, claires et lisibles. Le parcours est ainsi individualisé et l'élève capable de se situer et de se fixer ses propres objectifs. En français, pour préparer une évaluation à venir, le professeur demande aux élèves de trouver les compétences sur lesquelles ils vont être évalués, en fonction des objectifs de la séquence achevée. Suite à la correction du professeur, si une remédiation est nécessaire, le devoir peut donner lieu à une auto-correction suivie d'une seconde évaluation. Il s'agit avant tout de laisser toute leur chance aux élèves de comprendre, d'acquérir les apprentissages en jeu. À cette fin, toutes les compétences disciplinaires de la liste sont vues trois fois dans l'année. De fait, les élèves ne sont pas stressés comme face aux évaluations notées. En revanche, du côté des professeurs, la correction des devoirs nécessite plusieurs lectures et chaque enseignant a sa technique pour reporter son évaluation : le traditionnel carnet de notes est obsolète... En mathématiques, la professeure a adopté le système d'une fiche par compétence pour la classe entière : elle crée donc trois à cinq fiches par évaluation. Toutes les compétences sont réévaluées en cours d'année, les fiches sont donc progressivement complétées. En anglais, l'enseignante a choisi un code par compétence, ce qui lui permet d'avoir un regard sur l'évolution de la classe et de chaque élève sur une seule page. L'expérimentation est encore récente et l'acquisition d'un logiciel commun pour reporter les connaissances et compétences est un souhait partagé.

Du livret au conseil de classe : un diagnostic personnalisé

L'équipe enseignante a aussi pour objectifs de motiver les élèves dans leur travail personnel et d'investir davantage les parents. De fait, si le livret constitue un outil de repérage précis pour les enseignants et les élèves, il l'est également pour les familles. On expose le plus souvent oralement aux parents les exigences, savoirs et savoir-faire, lors des réunions avec les professeurs ; ici, ils sont explicitement formulés et répertoriés par écrit. Il est alors plus aisé pour les parents de comprendre les exigences de travail, de distinguer les acquis de leur enfant et ses difficultés. Le livret se lit en parallèle du bulletin d'appréciation trimestriel : l'ordre des disciplines y est identique. Corollairement, le livret sert de support lors des entretiens avec les familles. C'est un point d'appui qui permet de cibler une compétence à travailler, ou d'établir une progression personnalisée avec des objectifs spécifiques à atteindre. Certains parents se sentent plus à même d'aider leur enfant dès lors qu'ils ciblent précisément les attentes disciplinaires. La relation aux familles se trouve enrichie ; l'élève a, quant à lui, le temps de comprendre le rythme et les attentes du collège. Pour exploiter la somme des informations ainsi collectées, l'équipe pédagogique se réunit avant le conseil de classe. Le premier travail d'analyse des livrets ne saurait être effectué au cours du seul conseil de classe, ce serait trop long. Lors de cette réunion préalable, la fiche des compétences transversales est aussi renseignée collectivement. Les professeurs sont unanimes : grâce au livret de connaissances et de compétences, le conseil de classe apporte un regard plus affiné sur le travail de l'élève. Il n'y a plus de considérations générales sur des moyennes pas toujours significatives, mais un regard précis qui permet de rendre la progression de l'élève plus visible.

Différents dispositifs de remédiation

Le regard porté sur les compétences transversales par l'ensemble de l'équipe pédagogique favorise la mise en place de dispositifs de remédiation complémentaires à ceux que les professeurs intègrent dans leurs cours. À l'issue du conseil de classe du premier trimestre, la difficulté de quelques élèves à s'organiser dans leur vie de collégien est apparue. Manquant d'autonomie, ces élèves rencontraient des difficultés diverses, de l'oubli récurrent de matériel aux problèmes de repérage des mots-clés dans les consignes. Ces aspects sont abordés en tout début d'année lors des séances de vie de classe. Mais ces bases n'étaient pas acquises pour les élèves identifiés. L'équipe de direction a donc décidé de créer des groupes de soutien de trois ou quatre élèves, encadrés par un assistant d'éducation. Ce soutien personnalisé a permis aux élèves de trouver leurs marques. Pour cibler des compétences plus précises, des programmes personnalisés de réussite éducative (PPRE) ont également été mis en place sous la forme de petits groupes de un à trois élèves regroupés selon leurs niveaux. Chaque PPRE a duré six semaines à raison d'une séance hebdomadaire encadrée par un enseignant de la classe. Il s'est agi, pour un groupe, de travailler sur la concentration en classe, pour un autre, sur l'organisation du travail pendant les cours, savoir à quel moment se mettre au travail après la lecture d'une consigne, par exemple. Les élèves sont repartis rassurés, plus confiants à l'issue de ce dispositif d'aide qui leur a permis de comprendre les convergences des exigences dans les différentes disciplines.

Une dynamique de projets

Cette volonté de lier les différents enseignements dans la rigueur de travail qu'ils nécessitent est au cœur de la réflexion des enseignants. Si l'organisation de la classe sans notes exige beaucoup de concertation entre les professeurs, il y a aussi, et justement, de leur côté, la volonté de briser des barrières entre les disciplines, de montrer que la rigueur exigée est la même partout. En ce sens, au premier trimestre, les enseignants ont proposé à leurs élèves un premier travail en projet, associant les mathématiques au français. Les deux professeurs ont coanimé deux heures sur les trois séances consacrées à ce travail. Il s'agissait de réaliser une tâche complexe, à savoir le décodage d'une citation extraite de la déclaration universelle des droits de l'Homme et du citoyen, cryptée avec des chiffres et des dessins (voir annexe). Un diagramme, donné aux élèves, mettait en évidence la fréquence des lettres dans la citation (activité extraite du site Éduscol). De multiples situations de décryptage étaient possibles. Les élèves, par groupes de trois ou quatre, ont testé les situations, travaillé par élimination en réinvestissant leurs connaissances sur les diagrammes (notion étudiée en début d'année scolaire) et en se fondant sur la correction de la langue. À l'issue de la première séance, les élèves devaient rédiger la démarche d'investigation pour ceux qui étaient les plus avancés, l'exprimer à l'oral pour les autres. La deuxième séance était consacrée à un débat oral sur le sens de la citation. La conclusion du projet commun a été la réalisation individuelle d'un devoir à la maison. Les élèves devaient choisir une citation et produire un diagramme lui correspondant (voir annexe). Les élèves, tous pris au jeu, se sont disciplinés et ont fourni un travail sans flottement tout au long des séances. Cet enthousiasme et leur réel investissement ont décidé les professeurs à renouveler l'expérience en associant cette fois cinq enseignements : français, anglais, mathématiques, éducation physique et sportive et histoire des arts. Il s'agira d'écrire un poème en français ou en anglais sur une figure géométrique sans jamais la citer, sauf dans le titre. Après un temps consacré à la définition mathématique de différentes figures, à la recherche des émotions artistiques qui pourraient leur être associées, viendra l'étape de création du poème qu'il s'agira enfin de mettre en espace. L'évaluation portera sur la lecture, mise en scène du poème. Trois heures au mois de mars seront consacrées à ce projet transversal : une nouvelle expérience pour l'équipe enseignante, un nouveau défi pour les élèves.

Une expérimentation en évolution

L'année dernière, les professeurs de mathématiques et de français partageaient deux sixièmes de même profil, l'une évaluée traditionnellement, l'autre sans notes. Ils ont établi un bilan commun. Dans la classe sans notes, ils n'ont observé aucun décrochage des élèves scolairement très fragiles. Ils ont aussi constaté que les redoublants avaient tiré profit de leur deuxième année de sixième. L'expérimentation semble donc particulièrement bénéfique pour des élèves en difficulté qui ont besoin de cibler les tâches à accomplir. Ces élèves sont peut-être aussi stimulés, car les modalités de travail sont différentes et le stress de la note inexistant. Les enseignants remarquent aussi avec le sourire que le dispositif n'empêche pas certains élèves de se comparer les uns aux autres, de rivaliser... mais il leur est impossible désormais de se baser sur les notes pour se mesurer entre eux. Il s'agit davantage d'une compétition avec soi-même, fondée sur la valorisation et l'encouragement. L'expérimentation va perdurer à la rentrée prochaine, toujours sur le niveau sixième pour assurer aux nouveaux collégiens une transition plus douce entre l'école et le collège. Mais les professeurs n'excluent pas, ultérieurement, de prolonger le dispositif en cinquième. Affaire à suivre !
 
auteur(s) :

N. Le Rouge

contributeur(s) :

Mme Brocard, M. Chantoiseau, Mme Keradennec, Collège de Bercé, Château-du-Loir [72]

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information(s) technique(s) : pdf

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