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au-delà du regard

mis à jour le 07/10/2015


echanger dossier 3

Entre le collège J.-Monnet, à Angers, et l’institut Montéclair, fondé en 1885, destiné aux personnes présentant une déficience visuelle, il n’y a que les méandres de quelques rues. Bien avant la loi du onze février 2005 rappelant que “tout enfant handicapé est de droit un élève”, ce collège scolarise des enfants ayant une déficience visuelle, depuis sa création en 1989.

mots clés : échanger, collège, handicap, déficients visuels, pédagogie différenciée


ls y suivent la même scolarité que les autres, tout en bénéficiant d’un accompagnement particulier. À partir du diagnostic médical, quelles actions l’équipe éducative peut-elle mettre en place pour construire les apprentissages pédagogiques ? Comment personnaliser le parcours des enfants ayant une déficience visuelle sans pour autant les stigmatiser au sein du groupe-classe ? Comment, enfin, valoriser leurs points d’appui pour y associer, et faire progresser, l’ensemble des collégiens ? En quoi le fait de s’adapter à un public particulier est-il source d’enrichissement pour le professeur et l’élève ?

Loi pour l’égalité des chances

Depuis la loi de 2005, deux principes sont clairement établis : l’accessibilité à l’institution scolaire (dans l’établissement scolaire de secteur à chaque fois que c’est possible), et la compensation (mesures individuelles rétablissant l’égalité des droits et des chances). Le plan personnalisé de compensation peut inclure, par exemple, un accompagnement par un auxiliaire de vie scolaire (AVS) et une prise en charge par les professionnels médico-sociaux, en plus de l’école. Dans les MDA (Maisons départementales de l’autonomie pour le 49 et 53 et MDPH dans le 44, 72 et 85), une équipe pluridisciplinaire évalue les besoins de chaque enfant en situation de handicap. Ensuite, les directions académiques des services de l’Éducation nationale mettent en œuvre les mesures notifiées. Cet accompagnement spécifique est étayé au centre Montéclair par différents professionnels (orthoptiste, psychomotricien, éducateur spécialisé, neuropsychologue, psychologue, orthophoniste). Ces accompagnements sont programmés lors d’une semaine d’évaluation en amont du lancement du parcours individualisé (aménagement de l’emploi du temps, objectifs de travail, orientation, projet de vie professionnel, aide de vie scolaire à temps plein ou temps partiel). Parallèlement, des rencontres sont planifiées avec les enseignants et I. Daveau, coordonnatrice de l’Ulis TFV (troubles des fonctions visuelles) du collège J.-Monnet. D’ailleurs, ce partenariat s’inscrit en toutes lettres au cœur du projet d’établissement : “Accueillir chaque enfant, l’aider à trouver sa place au sein du collège. Favoriser progressivement son autonomie”. Reste à définir des moyens d’action concrets, pour chaque heure de cours, aux côtés des enseignants.

Dis-moi comment tu vois…

Le projet d’établissement instaure un accueil privilégié dans une classe à effectif restreint pour chaque niveau, de la sixième à la troisième (environ vingt élèves, dont trois, maximum, présentant une déficience visuelle). Des temps d’enseignement supplémentaires sont proposés afin de présenter, en amont du cours, le contenu de la séance, ou d’y revenir a posteriori pour reprendre les notions difficiles : une heure hebdomadaire en français, mathématiques, anglais, et trente minutes en SVT (sciences et vie de la Terre), sciences physiques, histoire-géographie. Enfin, une heure est également dévolue à l’enseignant spécialisé. Les autres élèves de cette classe à mixité naturelle sont désignés de manière tout à fait libre, sans critère particulier. Une décharge horaire (cinq heures par semaine) est également attribuée au professeur coordonnateur de l’Ulis. Pour autant, l’enseignement vers un public présentant une déficience visuelle ne va pas de soi. Ainsi, l’institut Montéclair propose-t-il, en plus des documents adaptés, un soutien pédagogique et une sensibilisation à destination des enseignants et des camarades de classe. En effet, les trois quarts des professeurs du collège interviennent dans des classes incluant des enfants présentant une déficience visuelle. C’est donc une formation à échelle collective qui s’instaure, dès les premières semaines de la rentrée. En septembre, une réunion présente les profils de chacun des enfants accueillis, à partir des renseignements fournis par l’Institut. Tous les trimestres, l’équipe (direction du collège, professeur principal, professeur coordonnateur, AVS, infirmière, éducateur et enseignant spécialisé de l’institut Montéclair) se réunissent avec l’élève et ses parents pour ajuster les aides et évaluer les progressions. Cette année, plusieurs formations complémentaires se sont également mises en place : une demi-journée de découverte de la déficience visuelle, un stage sur la lecture d’images, un atelier “yeux bandés”, des lunettes floutantes pour se représenter la vision lacunaire. L’expérience de ces lunettes est d’ailleurs très efficace : le moindre texte devient brouillard. En quelques minutes, les adultes ressentent des migraines, une perte d’équilibre et de repères, des yeux tubulaires, une grande fatigabilité, et une difficulté majorée pour élaborer sa pensée. Dès lors, le retour en classe intègre, avec compréhension, les mesures les plus appropriées pour réduire ces obstacles.

Fiat Lux

Que la lumière soit ! Ou plutôt l’inverse… Afin de ne pas créer une ambiance lumineuse néfaste aux yeux de certains malvoyants, les enseignants peuvent être amenés à réduire l’imprégnation lumineuse de leur salle : les volants roulants ou les rideaux sont baissés aux trois quarts. Le tableau n’est pas éclairé de manière à ne pas produire de retour réfléchissant, même au premier rang où se positionnent (voir ci-contre) les enfants ayant une déficience visuelle. Certains portent une paire de lunettes teintées pour atténuer leur hypersensibilité à la lumière (parfois même une casquette, non autorisée par le règlement pour les autres élèves). Les degrés de cette photophobie (crainte de la lumière dans le sens où l’individu souffre de douleurs ou de migraines, en regardant une source lumineuse) peuvent être divers. Parfois, leurs documents sont imprimés en fond bleu, moins éblouissant que le blanc. Au plafond, deux tiers seulement des néons sont allumés, ceux des côtés droit et gauche. L’allée centrale, où se positionnent les collégiens ayant une déficience visuelle, en reste exempte. Dans ces dispositions particulières, l’on comprend qu’un travail préalable de sensibilisation à destination des autres élèves de la classe ait été utile. En sixième, deux jours d’accueil au lac de Maine (parc voisin de l’établissement) permettent de créer des liens visant à mieux accepter l’autre, avec respect. Ils participent à tour de rôle à quatre ateliers : une chasse aux dangers (avec l’infirmière et l’assistante sociale), un défi lecture, des jeux extérieurs collectifs, une mise en situation d’un repas au self, chacun étant équipé de bandeau ou lunettes à vision tubulaire (disparition de la vision périphérique). Comment alors se servir d’une carafe d’eau à table sans renverser son verre ? Comment maintenir son plateau horizontal sans renverser les couverts ? Au self, un trombinoscope des élèves concernés est fourni à tous les agents, qui proposent spontanément leur aide. Une attention particulière est portée sur les objets qui traînent. En effet, un cartable mal positionné dans l’allée de classe peut engendrer une chute de son camarade malvoyant. Chacun réfléchit à sa responsabilité.

Tête à tête avec Lancelot

Ce jour, quelques minutes après la sonnerie, Andréa arrive en cours, en compagnie de ses camarades de cinquième, sans AVS. Elle s’installe sur la première table, la plus près du tableau, et devant le bureau de l’enseignante de français, E. de Vaulx. Elle prend rapidement son ordinateur portable (prêt de l’institut), à disposition dans la salle, le branche sur la prise attenante et ouvre sa session. La semaine passée, en heure de soutien, elle a préparé avec l’enseignante la séance d’aujourd’hui. Elle sait qu’il s’agit d’un travail d’analyse d’images, autour de la lecture de l’ambitieux roman médiéval Chrétien de Troyes, du chevalier de la Charrette. Les élèves ont déjà lu l’œuvre intégrale. Nous sommes à la onzième séance : un défi lecture autour de l’étude comparative d’images médiévales, en lien avec l’histoire des arts. Trois iconographies de Lancelot sont successivement projetées au tableau : une infographie du vingt et unième siècle et deux enluminures du quatorzième (voir annexe). Pour que les contrastes des couleurs apparaissent le plus clairement possible, les lumières du tableau sont éteintes et les images fortement grossies ; la clarté au-delà du brouillard.

Une réflexion en amont

Pour faire face à l’ensemble de ces contraintes, l’enseignante a construit son projet de séquence littéraire bien en amont. “Lire le roman de chevalerie au Moyen Âge” doit répondre à la présence particulière d’Andréa et à tous les élèves du groupe : les plus rapides, les plus lents, ceux qui ont besoin de bouger, ceux qui semblent trop réservés. Respectant le diagnostic fourni par l’équipe médicale, elle a commandé la traduction du roman selon les besoins d’Andréa : une typographie en Arial, taille 18, en gras. Ces indications fournies par l’institut varient en fonction de chaque aveugle. Autant dire que chaque exemplaire imprimé par l’institut est quasiment à visée unique et qu’il faut le commander bien en avance ! Pas question non plus de commander une transcription d’ouvrage que l’on n’étudiera qu’avec parcimonie. Au CDI (Centre de documentation et d’information), la professeure a fait racheter des disques audio d’œuvres romanesques lues. Certaines, comme Le Tour du Monde en quatre-vingts jours de J. Verne, sont libres de droits. Ayant saisi, grâce au public ayant une déficience visuelle, l’intérêt et le plaisir procurés par ces outils, elle souhaite en faire profiter tous les élèves, ciblant particulièrement les “petits” lecteurs. Pour les élèves dyslexiques, ceux qui présentent des problèmes d’élocution, des troubles d’apprentissage, l’écoute des audio-livres peut se révéler un support pertinent et attractif.

Et en aval

Du côté des enseignants, E. de Vaulx témoigne des modifications engendrées quant à son organisation personnelle. Il n’est pas envisageable d’arriver en classe avec des documents peu ou prou réfléchis, en quantité superflue ; encore plus qu’avant, le corpus est soigneusement préparé. La rigueur et l’anticipation s’imposent. En juin, les ouvrages littéraires sont sélectionnés et les séances rédigées bien en avance. Malgré la quantité impressionnante de travail engendrée, la professeure ne regrette pas cette orientation pédagogique. Elle avoue y avoir gagné en précision, en réflexion. Chaque document devant être réécrit pour l’élève ayant une déficience visuelle, elle constate qu’elle ne produit plus de photocopies pléthoriques et inutiles. Le choix du document pertinent, le plus porteur de sens en fonction de l’objectif visé, est rigoureusement sélectionné et profite à l’ensemble des élèves, malvoyant ou non. Que dois-je faire dire à mon document ? Quelles informations transmet-il ? Quelle longueur peut-il raisonnablement atteindre ? Au niveau de la mise en page, il n’y a plus de fioritures non plus : la clarté de la consigne s’impose. À chaque fois, une consigne écrite (et donc peu visible pour un élève ayant une déficience visuelle) est lentement réarticulée à l’oral, avec vérification de la compréhension. L’enseignante se rapproche pour voir si l’élève se lance effectivement dans l’activité (signe qu’il a compris), ou sollicite sa reformulation verbale. De ce fait, les aménagements mis en place bénéficient à tous les élèves en difficulté de lecture ou de compréhension, et ils gagnent en aisance, avec la tolérance du groupe. Dans cette classe au rythme adapté, chacun progresse en confiance. La pédagogie est vitalisée, en mouvement perpétuel et réfléchi.
 

Images mystérieuses dévoilées

Dans le cadre de ce cours de français sur l’analyse des trois iconographies représentant le chevalier Lancelot, la consigne est la même pour tous : quelle est la représentation la plus fidèle de l’épisode du pont de l’épée ? Les élèves observent les trois images, et en fonction des indices textuels émanant de l’extrait de Chrétien de Troyes, choisissent celle qui paraît la plus fidèle à l’écrit de l’auteur. “Entoure d’une couleur ce qui est fidèle au roman, et d’une autre, ce qui est infidèle.” (voir annexe). Sur son écran d’ordinateur configuré pour un zoom automatique à cent soixante pour cent, Andréa peut observer en pleine page chaque questionnement ou image. L’enseignante lui a fourni les clichés la semaine précédente, ainsi qu’un résumé du passage, sur clef. Lorsqu’on lit trente mots par minute, on ne peut envisager dix pages de roman à parcourir, sous peine de découragement extrême. Pour la professeure, le maître mot reste “le plaisir de la lecture”. Petite adaptation au profil de l’élève, son tableau à remplir ne comprend qu’une seule colonne relative à l’image 3 au lieu des trois colonnes pour ses camarades (iconographies une, deux et trois à observer). La professeure adapte le niveau d’exigence au rythme d’analyse et à la fatigabilité d’Andréa pour ne pas la décourager, tout en lui permettant de saisir notions et fil conducteur de la séance. Le bénéfice de cette pédagogie différenciée rejaillit également sur les élèves en difficulté ; les plus lents peuvent ne remplir qu’une ou deux colonnes dans le temps imparti (vingt minutes pour ce défi lecture) et apporter leur avis final. Les plus rapides peuvent compléter les trois et finir les premiers du défi hebdomadaire. Pour soutenir le suspens et l’émulation du groupe, E. de Vaulx a instauré ce rituel “défi-lecture” tout au long des extraits abordés en classe. Autre facette de la souplesse d’adaptation, les collégiens peuvent choisir d’y répondre en solo, à deux, ou à trois maximum. La solidarité entre copains se répercute dans l’étude des documents ; on s’aide, on s’associe. Chacun choisit la formule qui lui convient le mieux, selon l’envie du moment. C’est un atout pour développer l’autonomie et l’initiative.

Se donner la main

Pour la première fois de l’année, un garçon vient s’asseoir aux côtés d’Andréa, qui accepte sa présence. À la sortie du cours, l’adolescent explique son geste : “Je voulais l’aider. J’ai vu qu’elle était toute seule, elle avait du mal.” Spontanément, il montre du doigt les détails qu’Andréa n’a pu saisir, et l’épaule pour remplir son tableau. À sa disposition, se trouvent de grandes feuilles blanches avec lignages en noir pour garder l’horizontalité de son écriture. Elle utilise de gros feutres de couleurs différentes pour souligner et favoriser la mémorisation visuelle de ses réponses, mises en exergue. Cet appui typographique est également transmis à la classe qui a pris l’habitude de soigner ses cours et de souligner, d’entourer les notions essentielles ; ou comment l’apprentissage pour l’une rejaillit positivement sur les autres. L’enseignante revient sur la précision de ses conseils de mise en page, sur lesquels elle n’aurait sans doute pas autant insisté auparavant. Finalement, le binôme improvisé finit dans les délais. Quoiqu’en difficulté à l’oral, Ryan se propose pour exposer ses résultats au tableau. À la surprise de tous, Andréa se lève à son tour pour consolider leur partenariat naissant : “C’était vraiment gentil qu’elle m’accompagne au tableau, ce n’est pas facile.” Tous les élèves ont pris l’habitude d’associer le geste aux mots, lorsqu’ils sont au tableau, afin qu’Andréa, au premier rang, puisse localiser le détail visuel qu’ils exposent. L’enseignante rappelle systématiquement la consigne et sollicite par des verbes d’action la précision du geste, associée à celle des yeux : “Tu montres avec ton doigt, décris ce que l’on voit, poses le doigt sur le donjon”. Le donjon révèle alors ses mystères aux princesses écolières.

Abstractions dans l’espace

Après les images, la géométrie dans l’espace requiert toute l’ingéniosité de l’équipe enseignante. I. Daveau, coordonnatrice des enfants ayant une déficience visuelle et professeur de mathématiques, nous explique sa réflexion pédagogique. Pour elle, “chaque enfant est différent, handicap ou pas. Chacun est unique. Face au handicap visuel, on en prend vraiment conscience. De ce fait, on oralise énormément, on répète, à chaque fois avec un vocabulaire différent, pour s’assurer de la compréhension de tous. On va moins vite, mais cette lenteur apparente, paradoxalement, apporte un bénéfice à beaucoup”. En mathématiques, quelques outils semblent indispensables : du matériel de géométrie adapté, une loupe lumineuse fonctionnant sur batterie, le logiciel Zoomtext (qui permet l’accès à des programmes et logiciels de géométrie adaptés) configuré par un spécialiste de l’institut pour les ordinateurs à disposition, ainsi qu’une calculette gros format avec microphone intégré. La touche sonore permet à l’élève de vérifier, à l’écoute, les touches et chiffres qu’il utilise. Pour les figures dans l’espace, il faut savoir que le dessin en perspective est difficilement accessible aux malvoyants. Dans ce cas, la professeure construit des solides que les élèves sectionnent pour comprendre les trois dimensions. “Je bricole, je construis, j’invente sans cesse, je m’adapte à eux… et à tous les autres. J’ai utilisé un gâteau roulé à la framboise pour faire apparaître la section cylindrique par un plan. En plus de la manipulation, je m’appuie sur les autres sens, le toucher, le goût, l’odorat. “Au final, c’est l’ensemble de la classe qui a savouré l’expérience et parfaitement retenu la leçon !

Mise en mots

Effectivement, la difficulté d’abstraction n’est pas seulement l’apanage des élèves ayant une déficience visuelle. Lorsqu’un schéma, des segments ou des chiffrages sont projetés au tableau, la professeure retrace systématiquement un croquis sur une feuille qu’elle place devant les élèves malvoyants. Dans l’heure préparatoire de soutien, la jeune élève a préparé avec son professeur la figure géométrique qui sera projetée au vidéoprojecteur à tout le groupe la semaine suivante, grâce au logiciel installé sur son ordinateur. L’enseignante apporte également le solide concerné afin qu’elles repèrent, ensemble, les éléments à travailler. Au tableau, toutes les démonstrations de la classe sont accentuées par le geste. Le vocabulaire utilisé par les élèves au tableau ne peut rester imprécis. “La droite passe par là” ne veut rien dire pour qui ne voit pas. “La droite passe par le point C” est plus révélatrice du sens directionnel. De ce fait, tous les élèves améliorent la précision de leur expression orale, sans rappel par la professeure, et maîtrisent le vocabulaire géométrique ; la présence de personnes présentant une déficience visuelle au sein du groupe se révèle un atout. Là encore, l’heure de soutien permet, par exemple, de construire à l’avance les figures de la séance à venir. En troisième, les élèves les plus avancés deviennent tuteurs pour certains avançant à un autre rythme, malvoyants ou pas. Pour conserver la trace écrite du cours, en français, un(e) élève secrétaire de séance s’installe au bureau et enregistre les réponses de façon à redonner, en fin d’heure, le compte-rendu informatique aux élèves présentant une déficience visuelle. Les compétences de chacun sont valorisées.

En synergie

Totalement impliquée dans l’inclusion des élèves malvoyants, I. Daveau a souhaité s’inscrire à la formation 2CA-SH (Certificat complémentaire pour l’adaptation scolaire et la scolarisation des élèves handicapés). Elle rappelle combien la synergie de tous les acteurs concernés est indispensable, dans et hors l’école, mais aussi de façon transdisciplinaire et éducative. Souvent, les situations familiales ne sont pas simples. De nombreux élèves viennent des confins de l’académie vers l’institut Montéclair, renommé, et qui permet une scolarisation de six à vingt ans dans les établissements scolaires associés. Parfois très jeunes, ils sont en internat toute la semaine. Cet éloignement familial n’est pas évident à vivre au quotidien. Le collège, c’est la sortie de l’enfance, la prise de conscience du handicap et de ses conséquences : “Je ne pourrai jamais conduire. Ce métier, je ne pourrai jamais le faire. Je ne supporte plus d’être dans le noir”. Un suivi psychologique s’avère indispensable, et tout particulièrement à l’adolescence. De par leur situation professionnelle, les enseignants sont sensibilisés à ces fragilités, et la coopération avec les équipes médicales les aident dans leur pratique quotidienne, face à tous les adolescents. Enseigner à un public à handicap, c’est enseigner en équipe, forcément. Ainsi, l’ergothérapeute aide à la dextérité du clavier, du curseur en bureautique, et on écoute ses conseils. Si certaines activités sont possibles en EPS (éducation physique et sportive), comme le torball (ballon sonore), le travail avec le psychomotricien s’impose. Le langage commun ne s’arrête pas à telle ou telle matière. Pour les documents papier, la transcription en braille devient légende en géométrie, mais également en géographie. Une à deux semaines sont nécessaires au service de transcription pour adapter une carte usuelle en légende braille. Pour obtenir une carte en relief, on utilise du papier Zytex qui permet, au toucher, de représenter les contours de frontières en surépaisseur et les informations en braille. Les flux de population s’inscrivent sous forme de flèches épaissies (voir ci-dessous). Parfois, c’est l’ensemble du manuel scolaire qui doit être transcrit, l’enseignant doit absolument anticiper de plusieurs mois sa demande, afin qu’elle ne se perde pas dans l’espace-temps.

Chemin accompli

Dans cette classe, les élèves, sensibilisés à la différence, s’acceptent mieux les uns les autres, et développent une solidarité que l’on retrouve peu chez les adolescents en compétition scolaire. Grâce à cette prise de conscience, ils réfléchissent à la notion de respect et accentuent leur aide à autrui, par leurs gestes ou leurs propos, en développant le tutorat. Les moqueries, parfois cinglantes à cet âge, s’estompent. À ce sujet, O. Jacques, principal du collège, témoigne de la réaction de parents : “Majoritairement, ils sont contents que leur enfant intègre la classe qui scolarise les élèves présentant une déficience visuelle. Ils sont satisfaits du petit groupe d’élèves, limité à vingt, estimant que leur enfant bénéficiera de conditions privilégiées (plus de calme et plus de temps, d’explications) pour progresser. Certains, toutefois, restent inquiets en invoquant la quantité de notions au programme, et la peur (fausse d’ailleurs) d’un niveau inférieur. Mais beaucoup estiment comme une chance le fait que leur enfant évolue dans une société respectueuse des différences. “Au final, l’ensemble des enseignants avoue avoir modifié son regard sur l’élève, modifié sa pratique et transféré ses nouvelles compétences au service de tous ses élèves. Parce que, comme nous nous attachons à le répéter, “chaque enfant est unique, différent, handicap ou pas”.
 
auteur(s) :

C. Coquereau

contributeur(s) :

I. Daveau, E. de Vaulx, O. Jacques, Collège Jean-Monnet, Angers [49]

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