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conditions de réussite pour transférer 

Quelques conseils
Tout d’abord, Cécile Lacôte-Coquereau insiste sur la nécessité de faire preuve d’exigence et d’ambition en lycée professionnel ; C’est pourquoi Proust, Van Gogh, le douanier Rousseau, Arcimboldo, De Vinci, Vélasquez, Hokusai, Hopper, Turner, Mozart, Tchaïkovski, Bach, Chopin, Debussy, Satie intègrent son enseignement. “Il faut leur permettre l’écoute d’une musique classique à laquelle ils n’ont que rarement accès” ajoute-t-elle. Les tableaux sont affichés sur les murs de la classe comme autant de souvenirs de séquences abordées et apprentissages accumulés. Des boîtes à outils sont exposées en fond de classe, attendant une réactivation, notamment sonore et visuelle.
De même, en littérature, un travail conséquent sur les figures de style et leurs effets (métaphores, hyperbole, épanalepse, périphrase, …) leur est proposé. Ce travail s’avère possible surtout parce qu’au-delà du sens qui lui est donné, il entre dans une combinaison de supports sensoriels et dans un cadre ludique. En effet, en fin de séance, une ritualisation ludique permet aux élèves d’aller piocher dans ce que la classe nomme la caisse à outils quelques filets à papillons des figures. Un élève secoue cette boîte enfermant toutes les figures de style déjà rencontrées et questionne la classe afin de faire émerger la définition.
Cette enseignante conseille également de se questionner pour faire évoluer sa pratique et aider ces élèves à s’enrichir culturellement et intellectuellement, pour trouver des stratégies pédagogiques afin de combattre l’ennui que certains semblent vivre au lycée. Faire évoluer sa pratique, c’est aussi se demander comment permettre à ces élèves de devenir actifs et non de subir certains contenus enseignés. Enfin, il faut les aider à comprendre les intérêts d’une scénarisation : “cela revêt de l’importance pour leur avenir professionnel” selon Cécile Lacôte-Coquereau.
Par son expérience, elle affirme qu’une telle pédagogie est adaptée aux élèves décrocheurs, qu’ils soient en CAP, en BTS, ou en préparation du bac : progressivement, ils manifestent une meilleure appétence et curiosité ; on constate un développement du plaisir et de l’émotion. “Ils se prennent au jeu, viennent partager un thé littéraire proustien ; on voit les élèves de CAP participer à un Cercle des philosophes, au plus grand plaisir de leur enseignante !”.
Certes, pour un enseignant, “c’est chronophage !” reconnaît-elle : l’investissement est conséquent : construction de séquence avec en parallèle recherche de supports sensoriels et de stratégies pédagogiques diversifiées, préparation de la salle en amont des cours. “Certains jours, quand trop d’heures s’enchaînent sans pause, j’ai très peu de temps pour modifier l’ambiance de la classe qui sort et recréer un autre espace-classe pour le groupe d’élèves qui va venir. Mais je suis sans doute trop exigeante et perfectionniste !” conclut-elle, reconnaissant ainsi qu’elle est une boulimique de la recherche pédagogique construite sur les sens.
Il est légitime qu’une telle démarche déroute au début certains élèves : écouter de la musique classique, s’interroger sur la symbolique des fleurs pour un public presque exclusivement masculin en section industrielle, c’est plutôt inhabituel ! Pour convaincre ses élèves du bien-fondé de son enseignement, l’enseignante compte sur la contagion de son engagement et sur la clarté du contrat pédagogique. “Dès leur arrivée dans ma classe, je leur présente ma démarche, dans un espace sécurisant pour eux”. Elle compte également sur le temps, en avançant progressivement avec certains élèves : “Régulièrement, je montre les bénéfices de leur travail en les associant et en apportant une explication rationnelle, physiologique, intellectuelle à ce que je leur propose. Et si un élève refuse tel jour un temps de relaxation-mémorisation, j’accepte son choix, tant qu’il respecte le cadre collectif”. »

Quelles Plus-values ?
Pour l’enseignant : Cécile Lacôte-Coquereau reconnaît un plaisir partagé, notamment lorsqu’elle constate que ses grands lycéens s’approprient les savoirs qu’elle a scénarisés pour eux. Elle les voit curieux, allant au-delà de ses espérances initiales, dépassant ses attendus, respectant les horaires et le cadre qui leur est offert (respect des œuvres et de l’espace). Plus encore, elle note que la participation est en hausse, autant à l’oral qu’à l’écrit. “La salle de cours est devenue un lieu vivant et en perpétuel mouvement (galeries d’arts mouvantes et murs d’affichages renouvelés)”, précise-t-elle, avant d’ajouter : “J’ignore si l’impact apaisant des plantes apporte un plus à l’ambiance, mais depuis que je scénarise les savoirs, je n’éprouve pas de problèmes de gestion de classe”.
Pour chaque élève : elle constate une attitude positive face à la lecture, sans doute du fait de rituels de lecture ou parce que la salle contient un espace presse avec de confortables fauteuils. Elle relève aussi une meilleure implication de chaque élève quel que soit son rapport aux savoirs ou aux autres. L’organisation de la salle autorise des déplacements libres (vers les îlots, ou vers des espaces isolés : coin lecture, espace classeurs d’activités libres), ce qui limite les comportements impulsifs.
Mais outre leur comportement, c’est également une amélioration de leurs résultats qui est reconnue : davantage investis dans le déroulé des séances, ils se montrent plus motivés et actifs, et mémorisent mieux.
Elle constate une sensibilité musicale et artistique accrue ainsi qu’une meilleure compréhension de la présence d’œuvres artistiques dans leurs cours. Enfin, les élèves prennent conscience que tout l’espace de la salle leur est dédié : ils n’entrent pas dans un lieu étranger mais dans un lieu esthétique destiné à toucher leurs sens. “Ils se sentent donc estimés, élevés, respectés, et se montrent dignes de l’attention qu’on leur accorde”.


Des conseils de lecture
Marsollier, Christophe, Enseigne avec ton cœur, Chronique sociale, 2011.
Jellab, Aziz. Marsollier, Christophe, Bienveillance et bien-être à l’école, Berger Levrault, 2018. Article relatant cette expérience au lycée Curie, p. 139-140.
Pastoureau, Michel, Les couleurs de nos souvenirs, Points, 2010.

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