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croiser les regards pour repenser son enseignement

Pour tout enseignant, une réflexion menée avec un collègue va faire évoluer le rapport à l’enseignement, transformer ses pratiques et avancer vers de nouvelles représentations. La réflexion à plusieurs a une double incidence : d’une part, elle induit une interrogation sur son propre enseignement et, d’autre part, elle enrichit non les contenus disciplinaires, mais les modalités de transmission des savoirs, tant sur les plans pédagogiques que didactiques. Charlotte Barboteau précise qu’il est arrivé "qu'on co-anime quelques séances ; ce qui permet de mêler les deux points de vue. Vianney pouvait compléter mes propos sur ce qu'ils vivaient en EPS, poser des questions supplémentaires aux élèves. Depuis la dernière rentrée scolaire, je l’ai par exemple accompagné sur des cours d'EPS afin de les interroger sur leur raisonnement dans leur choix de courses. Cela a fait émerger en eux des questions qu'ils ne s'étaient visiblement pas posées."

Travailler avec un collègue permet de questionner sa posture professionnelle, de concevoir de nouvelles situations d’apprentissage, de sortir d’un enseignement juxtaposant et additionnant les contenus. Cette démarche nécessite néanmoins "d’entrer dans l’univers du collègue" comme le précise Vianney Thual. "Échanger, avoir un regard différent, ce n’est pas nouveau", mais ici il s’agit de partager des modalités pédagogiques, de se demander comment mettre en commun ses pratiques, en prenant appui sur des compétences transversales. Parfois, ces échanges mènent au constat que certaines démarches s’avèrent identiques, même dans des disciplines très différentes. Créer du lien, échanger, voire négocier avec un collègue, c’est aussi rendre explicites pour les élèves des exigences dans les pratiques et montrer à ces collégiens la cohérence des attendus. On est plus légitime si l’on demande aux élèves de travailler en groupes dès que l’on accepte soi-même, ouvertement, de travailler avec des collègues.
Et, pour faire évoluer son enseignement disciplinaire, mieux vaut, semblent affirmer ces deux enseignants, sortir de réflexions intradisciplinaires, et donc mener une analyse de pratiques interdisciplinaires. La confrontation de démarches avec des collègues de disciplines éloignées de la sienne permet in fine de faire apparaître la singularité de sa propre discipline, les points de convergence avec d’autres disciplines, la pluralité et la complémentarité de démarches.

S’autoriser à explorer un autre champ disciplinaire, c’est aussi s’engager dans un travail suivi en compagnie d’un collègue et prendre progressivement l’habitude de travailler en équipe. Le premier bénéfice identifié par Vianney Thual est de pouvoir prendre le temps d’interroger son enseignement : "ce travail a permis une meilleure compréhension de ce que l’on fait, de ce que chacun fait dans son domaine." C’est une confrontation de projets : celui de chacun des enseignants concernés et celui de chaque élève. "Il s’agit de réduire l’écart grandissant entre le projet du prof et celui de l’élève" ajoute-t-il. Ce travail collaboratif induit une transformation des pratiques résultant d’un positionnement professionnel réflexif ; c’est ce que constate Vianney Thual lorsqu’il admet : "Cet EPI en particulier a changé beaucoup de choses dans mon approche, dans la construction didactique de mes séquences. Ce ne sont pas tant les modalités (interdisciplinarité, projet) de l'EPI qui m'ont fait évoluer, mais davantage la réflexion engagée pour construire quelque chose de cohérent et fonctionnel. Pour moi, cette posture professionnelle mérite d’être cultivée car elle participe à renforcer des expériences relationnelles riches fondées sur la réciprocité, le partage et l’enrichissement mutuel."
Charlotte Barboteau rejoint cet avis : "C'est surtout dans la construction didactique que j'ai fait évoluer ma pratique, en prenant appui sur de nouveaux outils en mathématiques : élaboration d’un plan d'apprentissages (il s'agit de donner du sens aux apprentissages, de donner une direction, un objectif, une raison d'être), création de fiches objectif afin de faciliter la compréhension de notions mathématiques, mise en place d’un bilan personnel lié à la problématique pour inciter l'élève à se poser des questions à chaque étape de l'EPI… Dans ma pratique en général, la réflexion menée depuis cet EPI m'a fait repenser la façon dont je présentais les différents apprentissages aux élèves : j'essaie maintenant de faire en sorte que l'élève se situe davantage, que les notions ne soient pas mises bout à bout mais qu’apparaisse un lien entre elles sur l'année, voire sur un cycle."

Les deux enseignants admettent qu’il a fallu, par un bref bilan hebdomadaire, quelques réajustements, reconnaissant là l’intérêt pédagogique des pauses-café. Leur cheminement professionnel aura nécessité une année test car il faut du temps pour comprendre qu’un contrat didactique doit être mis à l’épreuve du terrain et pour dépasser la déception d’un écart entre demandes magistrales et réponses collégiennes. Visiblement, ils ne regrettent pas d’avoir détricoté leur projet initial, ne serait-ce que pour saisir qu’ils y avaient mis trop d’implicite.

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