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la partie immergée de l'iceberg

mis à jour le 11/04/2011


echanger dossier 1

Professeur de sciences physiques, Frédéric Artur est également formateur académique et appartient au groupe de la DGESCO (1) qui travaille sur le socle commun de compétences. Un vaste et passionnant chantier, explique-t-il, qui amène à reconsidérer sous un angle différent les pratiques disciplinaires. Qu'en est-il donc de ce fameux socle commun qui interroge et effraie tout à la fois ?

mots clés : échanger, socle commun de compétences, individualisation, tâches complexes, pluridisciplinarité, transversalité, évaluation


Regroupées en sept domaines (langue française, langues vivantes, culture scientifique, maîtrise informatique, culture humaniste, compétences sociales et civiques, autonomie et initiative), les compétences sont par essence transversales. Adapter son propos à son destinataire, extraire des informations, savoir s'autoévaluer... comment évaluer ces compétences, aussi capitales qu'impossibles à enclore dans le cadre d'une discipline donnée ? Mais surtout, avant de les valider, comment faire en sorte que les élèves puissent les acquérir ? En effet, il s'agit de ne pas réduire le socle à l'ultime phase de sa validation, note l'enseignant de physique-chimie, qui cite François-Marie Gérard 2 : "Pour un enseignant, l'évaluation des apprentissages est importante. Mais ce n'est pas le plus important. L'essentiel, c'est que les élèves apprennent ! S'il fallait choisir entre un enseignant qui n'évalue jamais les acquis de ses élèves, mais développe chez eux des compétences solides et efficaces, et un autre enseignant qui met en place des dispositifs sophistiqués d'évaluation critériée à travers des situations complexes pour constater que ses élèves n'ont pas appris grand-chose, notre choix du premier enseignant serait évident". Bref, avant de faire des croix dans un livret, il s'agit de mettre en œuvre une pédagogie qui permette à l'élève de construire ces fameuses compétences qu'il acquiert au fil des activités pratiquées dans les différents cours.

Faire le point

La première étape consiste à se mettre au clair, soi-même, et avec les élèves. Chaque enseignant ne retrouve rien que de familier à la lecture de la grille des compétences. Mais l'implicite gagne toujours à être explicité. Ainsi, après avoir fait l'inventaire des différentes compétences mises en jeu dans son enseignement, Frédéric Artur en sélectionne deux ou trois, particulièrement importantes dans la séquence qu'il prépare. Inutile d'être trop ambitieux, on ne peut tout travailler en même temps. Ce qui compte, c'est que l'éventail de ces compétences soit travaillé sur l'ensemble de l'année. Mais de l'intitulé des textes à la mise en œuvre concrète, il y a une marge essentielle à expliciter. Au collège Jules-Ferry, l'équipe des enseignants s'est réunie pour transformer cette terminologie très vague en critères de réussite. Ce qui a souvent donné lieu à des échanges riches, en fournissant l'occasion de préciser ce qu'on attend qu'un élève maîtrise. Tout le monde n'a pas nécessairement les mêmes exigences, et il s'agit de s'entendre sur un modus vivendi raisonnable au regard des textes comme du possible réalisable par un élève à un stade donné de sa scolarité. Le tout est de ne pas oublier que la validation d'une compétence ne doit pas être réservée aux quelques cas d'élite, mais être à la portée d'un élève ordinaire... Le critère de réussite transforme de manière concrète et opérationnelle un item de compétence, qui est quant à lui nécessairement plus large et abstrait. Par exemple, l'item 1.8 "Savoir utiliser des outils de recherche", valable finalement à tous les niveaux d'une scolarité, devient "Je me sers efficacement des usuels (manuels scolaires, dictionnaires, encyclopédies - utilisation pertinente du lexique, de l'index ou du sommaire), du logiciel documentaire et d'internet". L'élaboration de cette grille est une première étape, il reste maintenant à mettre en œuvre une pédagogie de l'apprentissage incluant les compétences, adaptée à tous les élèves. Quoi qu'il en soit, cette formulation donne des leviers concrets à l'action pédagogique.

Les regarder penser

Que cela change-t-il au niveau des cours ? À la fois pas tant que ça et beaucoup, note l'enseignant. Cette trame didactique amène avant tout à davantage regarder les élèves travailler. La seule observation d'un produit fini, une copie par exemple, ne permet pas de comprendre précisément quelles sont les compétences défaillantes chez un élève. Est-ce un problème de lecture, d'expression, de notion non comprise... ? De même, les sempiternelles remarques des élèves : "J'comprends rien", "j'y arrive pas" sont à la fois inexactes et inopérantes pour une résolution efficace des problèmes, même si elles traduisent bien la grande confusion et l'absence de prise sur les difficultés que ressentent de nombreux élèves. Qu'est-ce qui pose problème exactement ? Ce questionnement amène nécessairement l'enseignant à expliciter clairement ce qu'on fait et pourquoi on le fait. Parfois, Frédéric Artur décompose également les différentes étapes à franchir pour réaliser le travail demandé. Ce qui s'avère nécessaire lorsque de nombreux élèves ont échoué ou lorsqu'il y a une grande diversité de stratégies de résolution de la tâche proposée. Mais pour observer les élèves dans leur travail, encore faut-il se donner le temps de pouvoir le faire. C'est dans les moments où les élèves sont en activité qu'il est possible de les regarder penser. Comme tous ne vont pas à la même vitesse, l'enseignant prévoit des activités complémentaires pour les plus rapides: construire la synthèse du cours, par exemple, ou travailler sur une autre situation. C'est en les regardant faire qu'on va pouvoir cibler la difficulté, voir où ça coince et donc pointer la ou les compétences défaillantes. Encore faut-il leur proposer des activités qui leur donnent réellement l'occasion de penser...

Une certaine manière de (re)concevoir le cours

Lors de la préparation des cours, la première étape est donc de s'interroger sur les compétences les plus importantes mises en jeu dans l'activité, et de les faire clairement apparaître (voir annexe). Chaque compétence, globale, est déclinée en capacités qui sont autant de sous-parties du tout. La question est ensuite de savoir quel type d'exercices va permettre de mettre en jeu ces compétences du socle commun. Pas ceux qui prémâchent la réflexion en décomposant les étapes de la procédure à suivre, à la manière d'une recette de cuisine. On impose dans ce cas une compétence à utiliser, ce qui ne signifie pas que l'élève serait capable d'en mesurer la nécessité si on ne le lui avait soufflé. Et pourtant, il faut bien aiguiller un élève qui se trouve dans une impasse. Les activités de type situation-problème sont particulièrement riches pour mettre en œuvre des compétences variées en laissant une grande autonomie, tout en permettant d'aider ponctuellement, à différents stades, un élève en panne. Prenons un exemple. En cinquième, les élèves se trouvent confrontés au problème suivant : peut-on indiquer sur l'affiche publicitaire d'Énian [sic] que l'eau est pure (voir annexe) ? Question toute bête en apparence, dont la réponse va pourtant mettre en jeu des compétences nombreuses : observer, rechercher et organiser les informations ; réaliser, manipuler, mesurer, calculer, appliquer des consignes, raisonner, argumenter et communiquer à l'aide de langage et d'outils scientifiques ou technologiques. Cette tâche complexe, dont la résolution peut s'effectuer par des stratégies variées, va permettre à l'élève de mettre en œuvre ces différentes compétences, et à l'enseignant de mesurer celles qui ne sont pas bien maîtrisées, en fonction du stade où l'élève va bloquer. Un petit coup de pouce est alors nécessaire.

Des coups de pouce pour acquérir des compétences

Dans l'exemple cité, l'enseignant a prévu une série d'aides. Le but est de donner à l'élève le coup de pouce minimum pour lui permettre de repartir. Ces aides peuvent concerner la démarche, les connaissances ou les savoir-faire (voir annexe). L'enseignant les donne parfois oralement, il peut aussi utiliser un texte imprimé. Il donne alors à l'élève un bandeau indiquant l'aide apportée, sous forme de consignes. L'élève le collera alors dans son cahier. Plus l'aide apportée est importante, moins l'élève maîtrise de compétences. Certains de ces coups de pouce reviennent régulièrement. L'élève peut alors trouver de l'aide dans des fiches-méthode, à disposition dans la classe, où se trouvent également différents usuels et manuels. Ces derniers sont une source d'informations importante, à condition de savoir s'en servir. L'une de ces fiches-méthode le rappelle au besoin (voir annexe). On est ici dans la phase de formation, l'objectif est de mettre en œuvre des activités qui vont permettre d'acquérir des compétences, en l'occurrence, ici, les compétences 1.8, Savoir utiliser des outils de recherche, et 3.1, Extraire des informations. Toutes reposent sur un problème, une énigme à résoudre. Au départ, la consigne reste donc très ouverte. C'est le cas, par exemple, pour l'activité qui va permettre aux élèves d'aboutir au circuit en dérivation 3. Une photographie montre des voitures ; l'une d'elle a un seul phare en fonctionnement. Pourtant, l'interrupteur du véhicule commande l'allumage des deux phares en même temps. Comment expliquer ce phénomène ? Quel circuit peut expliquer un tel fonctionnement et que se passe-t-il donc pour qu'un seul phare soit allumé ? Si certains élèves résolvent le problème sans aide, pour d'autres, des coups de pouce seront nécessaires : Que faut-il vérifier dans le montage pour savoir s'il fonctionne comme le circuit d'éclairage avant d'une voiture ? Une lampe grillée se comporte-t-elle comme un interrupteur ouvert ou fermé ? Etc.

Une évaluation explicitée...

L'intérêt du fonctionnement en compétences est avant tout que l'élève s'approprie son apprentissage, en comprenant ce qu'on lui demande exactement de maîtriser. Quels sont ses points forts, les points faibles sur lesquels il va devoir porter ses efforts ? Il ne suffit pas de connaître son cours pour être assuré de la note maximale. Si l'enseignant le sait bien, ce n'est pas toujours le cas des élèves... Le fait d'indiquer dans la grille de références les items travaillés permet d'activer cette prise de conscience. Une grille est d'ailleurs affichée dans la salle de cours : elle reprend les items incontournables qu'on retrouve dans la quasi-totalité des activités pratiquées. Le recours à l'autoévaluation et à la coévaluation complète cette mise au clair. La plupart du temps, les élèves sont ainsi amenés à remplir une grille qui va leur permettre de mesurer eux-mêmes ce qu'ils maîtrisent aussi bien que les points qu'il leur faudra encore travailler. Il s'agit une fois encore d'être raisonnable et de limiter les compétences. Par exemple, pour l'activité sur le gaz, réalisée en quatrième, la grille reprend trois items : Extraire des informations d'un document, Faire un schéma en respectant des consignes et Mettre en œuvre un raisonnement. Une telle terminologie peut rester bien vide de sens pour des élèves. C'est dans le travail d'explicitation et dans la fréquence des activités que la notion de compétences se clarifie et se concrétise aux yeux des élèves. Une fois ceux-ci accoutumés à la démarche, il devient simple de leur demander de remplir une grille qui reprend les principales compétences travaillées dans l'activité, dans la mesure où cette procédure est pensée dès la préparation de l'activité (voir annexe). Et ce sera d'autant plus évident pour les élèves lorsque tous les enseignants mettront en œuvre des pratiques prenant explicitement en compte les compétences du socle.

... pour une validation motivée

Pour les élèves qui ne parviennent pas à maîtriser certaines compétences, dans différentes disciplines, un soutien sera nécessaire. L'accompagnement éducatif se construit ainsi sur un diagnostic qui permet une remédiation ciblée. La validation finale se conçoit alors comme une synthèse motivée des différentes activités et évaluations réalisées ponctuellement dans différentes disciplines. La question de la centralisation des données est au centre de nombreuses réflexions dans les établissements. L'enseignant de sciences physiques possède sa propre grille qui reprend, par élève et par item, les différentes compétences du socle. Au départ, et ceci est clairement dit aux élèves, tout le monde est en vert. C'est lorsque les élèves ont montré qu'ils ne maîtrisent pas une compétence que l'enseignant les décoche, jusqu'à ce qu'ils aient montré, dans les activités suivantes, leur capacité à en faire un usage pertinent et efficient. L'évaluation par compétences est tout le contraire d'un outil de classement. Le travail de conception et de mise à jour de telles grilles est important, d'autant plus qu'il s'agit de se mettre d'accord, avant la validation, sur les exigences à avoir. Qu'attend-on exactement d'un élève ? D'où la nécessité de critères de réussite. Quoi qu'il en soit, la mise en œuvre du socle commun permet de mieux connaître les difficultés des élèves et d'expliciter ce qui demeure trop souvent dans le flou, dans les pratiques comme dans les modalités évaluatives. Il faut rester raisonnablement modeste dans un premier temps, être pragmatique sans perdre de vue le fil conducteur de la démarche (voir document complémentaire). Une démarche qui ne révolutionne pas nécessairement les pratiques et les évaluations antérieures ; plutôt un changement de perspective, une explicitation de l'existant, une question de point de vue...

1. Direction générale de l'enseignement scolaire
2. François-Marie Gérard, équipe BIEF : Évaluer des compétences, guide pratique De Boeck, collection "Action", 2009, page 194.
3. Ces activités ont été produites dans le groupe de la DGESCO. Certaines, dont celle sur les circuits dérivés, sont parues sur le site Éduscol (sur le bandeau de droite, tout en bas, fichier "situations" à télécharger).
 
auteur(s) :

D. Grégoire

contributeur(s) :

F. Artur, Collège Jules-Ferry, Montaigu [85]

fichier joint

information(s) technique(s) : pdf

taille : 188 Ko ;

ressource(s) principale(s)

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