Contenu

innovation pédagogique

Recherche simple Vous recherchez ...

espace pédagogique > actions éducatives > innovation pédagogique > échanger

le socle en construction

mis à jour le 21/03/2011


echanger dossier 1

La validation des compétences devient obligatoire dès cette année pour la classe de quatrième. Aussi, dans ce collège, des professeurs ont suivi un stage pour y réfléchir. Ils expérimentent une grille d'évaluation commune et, avec tous leurs collègues de l'établissement, essaient de coordonner leurs actions.

mots clés : échanger, évaluation, oral, concertation, compétences transversales, situation pluridisciplinaire, grille d'évaluation, communiquer


Le collège Jules-Renard recrute des élèves des communes rurales environnantes, mais aussi du quartier populaire de Laval dans lequel il se situe. Avec la mise en place du socle commun de compétences et les difficultés qu'elle soulève, les enseignants ont souhaité réfléchir aux problèmes d'évaluation. En effet, ils se trouvent soudain confrontés à des modes d'évaluation différents, les notes traditionnelles toujours en vigueur, et les compétences du socle validées sous la forme binaire acquis/non acquis. De plus, ces compétences, souvent interdisciplinaires, doivent être validées dans plusieurs disciplines. Il ne semblait pas évident non plus de communiquer ces résultats aux familles. Un temps de réflexion collective et de formation s'imposait donc.

Deux jours de stage

Douze professeurs de différentes disciplines ont suivi deux journées de stage non consécutives. La première journée a été consacrée d'abord à approfondir les connaissances concernant le socle commun, et à faire le point sur les difficultés rencontrées par les enseignants dans sa mise en place. Parmi les sept compétences, les stagiaires ont choisi de faire porter leur réflexion sur l'une d'elles, qui les concernait tous, soit s'exprimer à l'oral. Dans toutes les disciplines, en effet, les élèves sont amenés à prendre la parole sous différentes formes. Lesquelles ? Chaque enseignant a réfléchi aux différentes situations propres à sa discipline. La mise en commun a mis en évidence la diversité de ces situations, mais aussi des constantes. Une grille d'évaluation commune a été élaborée, chacun devant l'expérimenter dans sa discipline entre les deux sessions de formation, en prenant soin de préciser les circonstances particulières, propres à la matière, pour un même item évalué. Un bilan a été effectué lors de la seconde journée. Les stagiaires ont pris ensuite connaissance d'expériences effectuées dans des collèges relevant de l'Éducation prioritaire, et dans un établissement pilote, le collège de Clisthène, à Bordeaux. Ce dernier a mis en place des bulletins de compétences, mais le contexte de cet établissement est un peu trop éloigné, selon eux, de leurs propres conditions de travail. Ils ont réfléchi à la possibilité d'effectuer des détours par l'écrit pour construire des compétences orales : la rédaction d'une fiche individuelle préalable à un débat oral peut être, en effet, très utile pour relancer les propos... Mais deux jours leur ont paru insuffisants, car tout le travail pour mettre en place l'évaluation de ces compétences à l'échelle de l'établissement reste à faire. Cependant, il est intéressant de revenir sur les situations qui ont été expérimentées pour évaluer collectivement la maîtrise de l'oral, et sur le bilan qui en a été tiré.

Des compétences transversales ?

Parmi les sept compétences orales répertoriées par les enseignants des différentes disciplines, un premier constat : toutes ne peuvent être évaluées dans toutes les disciplines, sans parler d'y être construites. La professeure de musique, qui ne dispose que d'une heure avec chaque classe, ne peut travailler l'ensemble, ni donc avoir le temps nécessaire pour évaluer. Lire à haute voix de façon expressive ne fait pas partie, par exemple, de ses priorités en évaluation, même si les élèves peuvent être amenés à le faire occasionnellement. Mais d'autres compétences sont travaillées et évaluées pratiquement par tous les professeurs. Dans toutes les disciplines, en effet, il est demandé aux élèves de "prendre la parole en public", au moins devant la classe, sous une forme un peu élaborée : comptes-rendus, exposés oraux divers qui mettent en jeu également les capacités à "rendre compte d'un travail collectif", à "prendre en compte l'auditoire"... Il importe donc de prendre un peu de temps pour découvrir les dispositifs de chacun, les grilles déjà mises en œuvre dans les différentes disciplines, et de les comparer avec la grille collective (voir annexe).

"Prendre la parole en public"

Évidemment, les enseignants n'ont pas attendu la publication de ce socle exigé pour tous pour construire et évaluer ces compétences. Ils utilisent déjà des grilles spécifiques à leur discipline pour évaluer les productions des élèves. Comment celles-ci peuvent-elles s'articuler avec les nouvelles exigences ? Peut-on les modifier pour les rendre plus pertinentes ? Quels sont domaines plus particulièrement pris en compte dans chaque discipline ? Telles sont quelques-unes des questions que se sont posées les enseignants.
"Lire à haute voix" n'est pas un objectif prioritaire en musique ; par contre, "prendre la parole en public" est une compétence que les élèves doivent maîtriser aussi dans cette discipline, même si cette prise de parole est un peu singulière. En effet, régulièrement, les élèves doivent interpréter un chant au micro, devant leurs camarades de classe, par groupes de trois, chacun devant chanter seul deux strophes. Cette épreuve est évaluée à l'aide d'une fiche connue de l'élève, et qui énumère les différents critères de réussite. Certains sont évidemment spécifiquement disciplinaires, tempo, rythme, justesse de la mélodie, mais d'autres sont transversaux comme la posture, le regard, la respiration... voire la position par rapport au micro. C'est à partir de ces derniers que la professeure remplira, dans la grille commune, la colonne concernant la compétence "prendre la parole en public". Ce qui fait qu'actuellement, elle remplit deux fiches d'évaluation !


Exposer, dialoguer

En français, cette compétence sera un des éléments pris en compte lors des exposés demandés aux élèves. Cette situation complexe exige la mise en œuvre de multiples compétences comme l'indique la fiche de l'enseignante : compréhension du sujet, recherche documentaire, sélection des informations, organisation du plan... mais certaines sont spécifiques à l'oral : se détacher de ses notes, ne pas se contenter de lire, respecter un débit suffisamment lent pour permettre aux auditeurs de prendre quelques notes... Ce sont ces éléments qui conditionneront la maîtrise de la compétence "prendre la parole en public". En espagnol, la même compétence sera évaluée dans une situation pédagogique encore différente, propre aux cours de langue vivante, le dialogue. Après avoir travaillé un dialogue sur le thème "recevoir des amis", à l'aide de supports variés, et après avoir construit ensemble les critères de réussite d'une telle épreuve, les élèves doivent mémoriser et jouer la scène devant le reste de la classe. Comment ces savoir-faire sont-ils construits ? Et si la voix est trop faible, mal assurée, le débit trop rapide, le regard fuyant, le corps recroquevillé ? Comment remédier à la timidité profonde d'un élève ? Toutes les disciplines ne peuvent consacrer du temps à toutes ces composantes de la maîtrise de l'oral. Mais certaines travaillent précisément ces aspects. En début de chaque cours de musique, les élèves travaillent régulièrement la respiration, la relaxation, la position, l'échauffement vocal... attitudes qu'ils peuvent transférer dans les autres situations disciplinaires avec l'aide de leurs enseignants.

"Reformuler"

Une autre colonne prend en compte la capacité pour un élève à "reformuler un texte ou des propos prononcés par un tiers". Les situations d'apprentissage ou d'évaluation de cette capacité sont encore très différentes selon les disciplines. L'entraînement à la reformulation est relativement fréquent dans le déroulement habituel du cours de français : reformulation des consignes, des propos de l'enseignant, d'un élève, d'une communication de groupe... En espagnol, une situation précise d'évaluation de cette compétence a été mise en place en complément de la séance de mise en scène des dialogues, évoquée ci-dessus. Pendant que deux élèves effectuent leur prestation devant leurs camarades, un binôme est plus particulièrement chargé de l'écoute, car il aura pour tâche de reformuler oralement l'essentiel du dialogue écouté. Une seconde situation de reformulation des propos d'élèves permet le réinvestissement de cet apprentissage plus tard dans l'année. Suite au visionnement de quelques séquences du film racontant le voyage du Che en Amérique latine, les élèves doivent effectuer des recherches au CDI sur différents sujets en rapport avec ce qu'ils ont vu, le paysage, le pays, la vie du Che... et exposer leurs résultats à leurs camarades. Chaque sujet est traité par trois élèves. Après la prise de parole de l'un des trois, les deux autres ont pour consigne de reformuler les propos de leur camarade et d'indiquer les ressemblances ou les différences avec la façon dont eux ont considéré le sujet.

"Donner son avis... et le défendre"

La fiche d'évaluation a été testée prioritairement avec des classes de quatrième, puisqu'une validation doit être effectuée à ce niveau-là cette année. Mais elle a aussi été expérimentée dans d'autres niveaux, car tous n'enseignaient pas dans cette classe. Ainsi, la professeure de français a tenté une évaluation de ses élèves de sixième dans toutes les compétences d'oral au cours d'exercices différents : la lecture à haute voix en classe, des exposés sur Ulysse pour la prise de parole, le compte-rendu d'un travail et l'adaptation à un auditoire. La rencontre avec un écrivain de littérature jeunesse a été l'occasion de travailler et d'évaluer la compétence "donner son avis et le défendre". Dans le cadre du prix du roman jeune, les élèves ont lu Mon petit cœur imbécile de Laurent-Xavier Petit qu'ils ont rencontré, et à qui ils ont fait part de leur point de vue de lecteur. Cela a aussi été une occasion de rédiger en groupe une "recette pour écrire". Chacun devait exprimer son avis sur la formulation, sur le choix du vocabulaire en fonction du genre d'écrit ; propositions et justifications écoutées et validées par l'enseignante. Mais dans cette classe difficile, ce n'était peut-être pas la compétence la plus importante à travailler. Une autre compétence, objet d'un travail particulier, qui n'avait pas été placée dans la grille commune, semblait peut-être prioritaire.

"Prendre en compte l'avis de l'autre"

Il est des compétences orales qui entrent aussi dans les compétences sociales et civiques et qui sont beaucoup plus difficiles et plus longues à acquérir. En effet, certains élèves savent bien donner leur avis et surtout le défendre, mais en cherchant plutôt à limposer ! Ils savent peu écouter, sont peu attentifs à l'avis de l'autre, refusent de le prendre en considération. Or une compétence comme celle-là ne s'acquiert pas facilement. Le collège n'a d'ailleurs pas attendu la publication d'un socle commun pour créer un dispositif particulier, c'est la "classe-solidarité". L'établissement, situé en face du stade de football, accueille dès la sixième des apprentis footballeurs. Des tensions sont sensibles dans cette classe, on a du mal à se supporter ; les garçons, en particulier, refusent de travailler avec les filles. Alors "le respect mutuel", "l'acceptation des différences" et donc "la prise en compte des propos d'autrui" sont bien des compétences transversales à construire, mais comment ? Cela ne peut pas être l'objet d'une discipline, d'où la mise en place d'un projet de médiation avec cette classe. Les élèves apprennent à vivre ensemble. Ainsi, on crée des binômes d'élèves qui ont du mal à se supporter, on place un garçon à côté d'une fille, le travail en groupes mixtes est systématique. Des actions de solidarité sont menées par la classe, comme recueillir des dons pour les Restos du cœur... Il est en effet des compétences qui ne peuvent se construire que sur du long terme, il serait trop tard de constater qu'elles ne sont pas maîtrisées en fin de quatrième. Mais cela suppose un engagement spécifique d'une équipe en dehors des cours disciplinaires.

Un projet collectif

Les douze enseignants stagiaires ont juste eu le temps d'élaborer une grille sur une compétence transversale, la maîtrise de l'oral, et de l'expérimenter. Il reste à convaincre les collègues, à travailler les autres compétences, à élaborer un livret de compétences qui permette une communication avec les parents... encore bien du travail ! Une réunion de tous les enseignants a été organisée pour en discuter. Tous ces problèmes ont été bien évidemment soulevés : tout cela demande du temps, que faire avec les élèves dont les compétences ne seront pas validées ? Disposera-t-on d'heures spécifiques pour la remédiation ? Pourquoi se lancer dans l'élaboration coûteuse d'un livret ? autant attendre qu'on nous le communique. Si certaines disciplines, scientifiques en particulier, fonctionnent déjà sur ce modèle, le programme d'autres disciplines ne correspond pas du tout à ce mode d'organisation, ou n'y fait référence que sur la forme. Ne peut-on craindre que les élèves se satisfassent de ce socle commun alors que les programmes sont plus ambitieux ? Bref, les difficultés et les critiques ont été nombreuses. Les travaux de groupes qui ont suivi ont été plus constructifs. Chaque groupe a pris en charge quelques compétences tranversales et devait décider quelles seraient les deux disciplines qui assureraient l'évaluation, les enseignants devant bâtir les situations d'évaluation pour la rentrée 2011. La première partie des conseils de classe, ou un préconseil, serait consacrée à faire le point sur l'acquisition du socle, repérer les élèves qui posent problème ou les compétences qui n'auraient pas encore été évaluées. Le socle commun impose de repenser collectivement le rapport à l'évaluation, de créer de nouveaux outils, des structures de concertation, des plages de remédiation... Le chantier est vaste et exigeant.
 
auteur(s) :

M. Le Bihan

contributeur(s) :

P. Macron, S. Boillée, L. Lefeuvre, Collège Jules-Renard, Laval [44]

fichier joint

information(s) technique(s) : pdf

taille : 252 Ko ;

ressource(s) principale(s)

echanger dossier 1 construire, évaluer des compétences 11/01/2011
La question de la construction et de l'évaluation des compétences prend aujourd'hui une nouvelle actualité avec la mise en œuvre du socle commun de connaissances et de compétences. Désormais, ...
évaluation, évaluer, compétences, livret, socle commun

haut de page

innovation pédagogique - Rectorat de l'Académie de Nantes