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Bien investis dans un fonctionnement qui paraît aujourd’hui naturel, les enseignants reconnaissent qu’il aura fallu du temps, de l’énergie et quelques sacrifices : accepter la situation inconfortable de la remise en question de ses propres pratiques, accepter de confronter ses pratiques à celles de ses collègues, accepter d’adhérer à un projet au long-cours collectif. Il aura fallu du temps pour aménager des espaces dans chaque classe, en prenant en compte les modalités de travail de chacun et de chaque niveau, en respectant les particularités de chaque salle de classe.
Il aura également fallu du temps pour répartir avec progressivité les compétences selon les niveaux et la singularité des élèves, pour trouver des pictogrammes, pour élaborer les chemins de progrès. Beaucoup de déjeuners se seront transformés en échanges constructifs. Mais maintenant que le projet s’est concrétisé, ce dispositif offre aux enseignants des temps de disponibilité pour observer les élèves au travail, et plus encore pour différencier par une aide directe auprès des élèves en difficulté.
Pour les élèves, la démarche proposée développe le Devenir élève des programmes de 2008 ; elle leur permet d’être acteurs de leur projet d’élèves, les aide à grandir et à accéder à l’autonomie. Les élèves se savent autorisés à s’emparer des savoirs, à s’approprier les finalités d’une évaluation, à construire au-delà des apprentissages. Et parce qu’ils évoluent dans un environnement social, ils vivent au quotidien la coopération : s’occuper de l’autre, sortir d’une logique individualiste. Selon Annaïg, C’est hyper intéressant pour gérer la difficulté. Et elle ajoute : "On respecte les besoins, le rythme de l’enfant, et il sait pourquoi il est en classe".
Puisque la démarche est partagée par tous, chacun se sent légitime pour aider l’autre à améliorer des documents, à différencier son approche. Cette lisibilité du travail des collègues favorise la mise au travail des élèves dès le début de l’année. "Les plus grands forment les plus jeunes, ils leur expliquent comment ils vont travailler", précise Stéphanie, enseignante en CM1-CM2. Côté parents, la logique est maintenant comprise et acceptée, car ils ont des retours positifs sur l’engagement scolaire de leurs enfants.
Toute nouveauté a besoin d’être analysée avec recul ; il faut du temps pour mesurer les effets d’une nouvelle pédagogie, mais trois ans après la mise en œuvre de ce dispositif, les enseignants ont l’impression sensible que les élèves adoptent une posture qui appelle moins de sanctions.
La méthode adoptée dès la maternelle ne pointe que les réussites des élèves, tout en gardant trace du nombre d’essais. Qu’un élève réussisse une tâche dès sa première tentative, ou qu’il réussisse après trois tentatives infructueuses, il recevra comme résultat un smiley souriant 1, car ne sont attribués que des smileys souriants1. Les enseignants gardent pour eux les traces des différents essais, ainsi que celles des échecs intermédiaires, et ne les communiquent pas aux parents, car ils constituent des outils d’information en vue de remédiation pédagogique.
En élémentaire, les résultats sont proposés sous une autre forme : un code-couleur permet aux élèves de garder une trace de leur cheminement : vert si tout est réussi, bleu si tout est juste après correction, jaune s’il reste des erreurs, rouge si la procédure est incomprise. Le code AC inscrit par l’enseignant indique aux élèves que l’exercice est à corriger, sans que soient identifiées les erreurs. Ce regard positif porté sur l’investissement et le travail de l’élève apparaît explicitement sur les bilans.
Les enseignants suivent une logique qui consiste à valoriser les réussites des élèves, à interroger leurs réponses, à interroger les ressources de la classe pour comprendre. Cette logique répond aux attentes institutionnelles : "Chaque enseignant s'attache à mettre en valeur, au-delà du résultat obtenu, le cheminement de l'enfant et les progrès qu'il fait par rapport à lui-même. Il permet à chacun d'identifier ses réussites, d'en garder des traces, de percevoir leur évolution". (source : Programme d’enseignement de l’école maternelle, BOEN spécial n° 2 du 26 mars 2015). On sort donc lors de ce moment d’un enseignement vertical adulte-élève.
innovation pédagogique - Rectorat de l'Académie de Nantes