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territoire commun

mis à jour le 03/11/2011


echanger dossier 5

Territoire commun, ainsi s'intitule une séquence édifiée sur la chute du mur de Berlin. Ce concept ne métaphorise-t-il pas l'histoire des arts en tant qu'enseignement transdisciplinaire par excellence ?

mots clés : histoire des arts, mur de Berlin, détour, événementiel, formation pluridisciplinarité


Un mur qui surgit de terre en une nuit ! Une cloison de béton considérée comme une œuvre d'art! Voilà de quoi susciter une légitime curiosité ! À l'occasion du vingtième anniversaire de la chute du mur de Berlin en novembre 2009, deux classes de troisième du collège Mailloux se sont emparées de cet événement avec la collaboration de leurs professeurs d'allemand, d'histoire-géographie et d'arts plastiques ! À cette occasion, chaque enseignant a indiqué clairement aux élèves ce qui relève de l'histoire des arts dans son cours, et les liens possibles en interdisciplinarité. Concernant la période du XXe siècle au programme de troisième, ce projet se situe au carrefour de pas moins de trois thématiques soit "Arts, États et pouvoir", "Arts, espace, temps", "Arts, ruptures, continuités".

L'Europe divisée puis réunie

En histoire, les élèves ont appris les raisons, circonstances et modalités de la construction du "mur de la honte" dans la nuit du 12 au 13 août 1961. Ce "monument" a séparé des milliers de familles et causé la mort de 239 individus qui ont tenté de le franchir à partir de l'Est. De même, ils se sont penchés sur celles de sa destruction le 9 novembre 1989 et sur la réunification de l'Allemagne. Véritables pièces d'archives et documents historiques, des articles de journaux vieux de vingt ans, et relatant la chute du mur de Berlin, ont été retrouvés et apportés par une élève. En allemand, les collégiens ont découvert le film Good bye Lenin ! réalisé en 2003 par Wolfgang Becker qui met en scène, en ex RDA, une mère malade à qui son entourage dissimule l'évolution historique de son pays en reconstituant à son intention le décor auquel elle était attachée de longue date. Forts de leurs connaissances relatives au contexte, et sur proposition, en arts plastiques, de l'incitation suivante : "territoire commun", les élèves ont mené une réflexion sur ce qu'impliquait l'association de ces deux termes, sur les plans sémantique et plastique. Le projet s'est appuyé sur une exposition itinérante singulière intitulée "Artistes pour la liberté". Célébrant le vingtième anniversaire de la chute du mur de Berlin, celle-ci présente une collection particulière, initiée dès 1990, d'œuvres réalisées à partir de débris du mur détournés. D'Arman à Daniel Buren, les plasticiens ont, spontanément ou dans le cadre de commandes ou de concours, utilisé un fragment de béton du mur sécuritaire d'un mètre par 1,20 mètre comme support à leur créativité. C'est bien cette esthétique du recyclage monumental et du détournement qu'évoque, par exemple, le jeu de mots figurant dans le titre de l'œuvre d'Arthur Hubbard Piece on earth.


Une convergence de regards

C'est donc à la faveur d'une commémoration que le choix s'est porté sur une œuvre d'art pour le moins originale. L'œuvre étudiée en histoire des arts est donc le mur lui-même, avec les nombreux tags qui l'ont orné, mais aussi les œuvres plastiques que le mur a inspirées. Selon le BOEN correspondant, la situation de rencontre sensible et réfléchie de l'élève avec l'œuvre désigne à la fois l'événement, la médiation et la mémoire. Mais il se trouve de surcroît que, de par sa spécificité, ce projet, lié à un événement historique, fait l'objet d'une médiation par l'intermédiaire du concept de "territoire partagé" et prend pour objet un lieu de mémoire aujourd'hui disparu, mais pérennisé par des œuvres. Chaque élève doit, après avoir élu, au sein de la collection Artistes pour la liberté, une œuvre de son choix, rédiger à son sujet une fiche-type afin de l'analyser (voir annexe). Ainsi, un élève qui a choisi l'œuvre Piece on earth d'Arthur Hubbard comme étant de nature à "choquer les esprits" l'a interprétée comme dénonçant, sur fond rouge, les tourments engendrés par toutes les formes d'exclusion et véhiculant pour message de "faire la paix sur Terre". Une épreuve sera mise en place fin mai début juin sur ce qui aura été vu en classe et/ou développé par l'élève. De la révolte au pacifisme, de nombreux messages ont été ainsi projetés sur le mur ! L'expression "territoire commun", concept qui fédère cette séquence, n'a sans doute pas le même sens de part et d'autre des disciplines. En histoire-géographie, a été abordée l'antithèse d'un territoire commun à travers la réalité du mur de la honte avec ses barbelés, ses miradors, ses mines antipersonnel, ses points de contrôle, voire sa zone intermédiaire de no man's land, soit le pays d'aucuns. De la métaphore du "rideau de fer" à l'édification d'une frontière d'État entre deux pays, l'étude de la ligne de démarcation entre secteurs, nations, et blocs de l'Est et de l'Ouest, a permis de montrer en quoi le mur de Berlin a constitué un symbole de division de l'Europe jusqu'à ce que sa chute permette un libre accès à "l'autre côté", en créant un espace ouvert aux passages et aux échanges. En allemand, la notion de "territoire commun", qui prend la forme de la réunification de l'Allemagne, et surtout de son déni dans le film Good bye Lenin !, constitue le ressort même de cette comédie. Il s'agit d'une hypothèse inconcevable pour la figure maternelle baignée d'idéologie socialiste. Mais au fur et à mesure que celle-ci se rétablit et que les panneaux publicitaires occidentaux se substituent aux portraits de Lénine, le mur d'illusion édifié pour masquer la chute du mur de Berlin devient de plus en plus périlleux à entretenir par son entourage. Le film relate en quelque sorte la nécessité d'abattre toutes sortes de murs ! En arts plastiques, le concept de "territoire commun" connote plutôt un espace partagé que s'approprient des artistes de diverses nationalités, en édifiant sur les ruines du Mur une collection à vocation universelle, soit un espace symbolique et mental. Voilà un bel exemple de croisement de regards pluridisciplinaires sur une notion fédératrice et de dialogue transversal qui s'enrichit de l'apport spécifique de chaque discipline. Ainsi tombent les murs entre les matières autour d'un projet à la fois unique et commun de l'histoire des arts.

Une mission nouvelle

En juin 2010, sous l'impulsion de son IPR chargé de mission J.-P. Marquet, la professeure d'arts plastiques a assisté à un stage multiniveaux et interdisciplinaire encadré par les pilotes de la mise en place du volet histoire des arts, soit J.-P. Pacaud, chargé de l'action culturelle, et Y. Bourdin, IPR d'éducation musicale. Cinq autres professeurs d'arts plastiques des divers départements de l'académie ont également reçu cette invitation. À l'issue de ce stage, l'enseignante a été chargée d'assurer des formations en histoire des arts. Dans les collèges, l'avancée et les progrès dans la mise en place de ce nouvel enseignement semblent encore très hétérogènes. La situation la plus courante est de répondre à une urgence, soit l'épreuve du DNB. Pour l'instant, cet enseignement est exclusivement centré sur le niveau troisième. Mais une préparation est envisagée en amont pour la rentrée 2010 pour les autres niveaux. Au collège Auguste-Mailloux du Loroux-Bottereau, la grande difficulté est, pour les équipes pédagogiques, de se concerter, et surtout de s'approprier le contenu et la forme de cet enseignement. Il semble important à la formatrice de montrer à ses collègues qu'ils pratiquent déjà, et de manière régulière, cette matière. Il "suffit" désormais de lui créer un cadre, de formaliser et mutualiser des projets quel que soit leur degré d'ambition. Lors des stages, il lui paraît important de revenir sur les textes officiels, de les commenter, pour ensuite s'intéresser au terrain en proposant des outils de mise en place, de planification, à partir des ressources, et en lien avec des partenaires culturels. Aucune généralité n'est possible, de multiples projets sont en chantier en relation avec la politique d'établissement.

Arts et essais

Ce nouvel enseignement qui repose sur un décloisonnement des savoirs offre, selon la formatrice, l'occasion de bâtir des ponts évidents entre les disciplines. C'est une opportunité pour éveiller et sensibiliser les élèves à toute forme d'art dans des domaines larges, en leur fournissant des outils de nature à éduquer et à se forger un recul critique. Les équipes et individus doivent s'accorder sur ce qu'est une œuvre d'art en premier lieu, ce qui n'est pas évident d'emblée, et établir des choix clairs et simples pour ensuite les développer. La notion de plaisir paraît la plus importante : il faut que les choix pédagogiques se basent sur des envies, des passions ou des goûts pour telle œuvre ou tel art, pour qu'il y ait transmission. Il n'y a pas de passage obligé : à la fin de sa scolarité, chaque élève aura réalisé un parcours différent. Les stages en histoire des arts sont animés par des enseignants de cinéma, théâtre et arts plastiques. De ce fait, les arts se croisent allègrement. Les équipes pédagogiques déjà constituées s'interrogent essentiellement sur la forme à donner à leur projet, voire à leurs microprojets. Que l'entrée s'effectue par thèmes, œuvre, événement culturel ou problématique, il importe de prendre en compte le contexte spécifique de l'établissement. Ainsi, pour ce qui est de certains collèges culturellement isolés, des institutions telles que les Fonds régionaux d'art contemporain ou les artothèques prêtent des œuvres d'art. On trouve aussi de nombreuses galeries d'art virtuelles sur internet ! Au lycée, la mise en œuvre se fera de façon obligatoire à la rentrée prochaine, peut-être à l'occasion des enseignements d'exploration, mais chaque acteur doit déjà trouver sa place dans la réforme. Tout reste donc à construire, voire à déconstruire, à s'approprier, à bâtir et à réinvestir, à l'image du no man's land berlinois réaménagé, repensé et réhabilité par les artistes... Un chantier en totale reconstruction comme une voie ouverte  vers la liberté.
 
auteur(s) :

J. Perru

contributeur(s) :

H. Quéré, Collège Auguste-Mailloux, Le Loroux-Bottereau [44]

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