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le droit de parole et le devoir de coopération

La coopération est au cœur du projet pédagogique de Sandrine Penven.
Cela passe par le développement d’une relation bienveillante basée sur la confiance où chacun ose se montrer tel qu’il est, et où tous acceptent de se nourrir des autres pour s’enrichir ensemble car "la réussite est collective et se niche dans les progrès de chacun"1.

Être une classe : un engagement où chacun doit faire sa part
La coopération est un devoir où chacun doit faire sa part. Pour l’illustrer, Sandrine Penven utilise la légende amérindienne du colibri. Celle-ci met en scène un immense incendie en forêt. Tous les animaux sont terrifiés et regardent s’étendre le feu. Seul le petit colibri - incarné par l’enseignante - s’active pour aller chercher quelques gouttes d’eau avec son bec afin de l’éteindre. Un tatou alors agacé par son agitation explique à l’oiseau que ces quelques gouttes ne suffiront pas à éteindre l’incendie. C’est alors que le colibri lui répond d’un air engagé : "je le sais mais je fais ma part".

Cette philosophie répond au projet éducatif fondé sur la coopération qu’engage Sandrine Penven avec ses élèves : "Je fais ma part, cela veut dire que je les accompagne mais que je ne peux pas porter tous les rôles. Mes élèves et moi-même sommes un ensemble. Si un maillon est défaillant, on ne peut pas faire une chaîne ! Alors, je veux tout le monde et chacun doit être force de proposition. La moindre parole de mes élèves a du sens pour moi."

Reconnaître les besoins de chacun : la charte du vivre ensemble
Les situations d’apprentissage sont toujours variables comme l’aménagement flexible de l’espace classe. Le point d’ancrage : toujours offrir la possibilité aux élèves de coopérer, le travail de l’un enrichissant celui de l’autre.
Mais pour que chacun puisse trouver sa place, l’enseignante co-construit avec ses élèves en début d’année une charte du vivre ensemble. Celle-ci a pour projet de formuler à l’écrit les besoins de ses élèves. Elle s’intègre dans une première séquence de français intitulée : passeport citoyen.
Le devoir de coopérer passe alors par la conscientisation des besoins des élèves. Pour l’incarner, l’enseignante commence par projeter un extrait du film Les Héritiers2 montrant en particulier une scène où un groupe d’élèves ne parvient pas à se faire entendre alors que tous œuvrent pourtant pour un projet commun, celui de donner à voir le témoignage d’enfants exterminés au cours du génocide juif : "je leur demande donc toujours : cette situation de travaux de groupe est-elle normale ? Cela veut dire quoi pour vous être un groupe ? Qu’auriez-vous fait ?"
Ainsi à partir de cette scène et d’une liste, les élèves de Sandrine Penven argumente en faveur de leurs besoins, "j’ai besoin de… parce que-…: chacun alors s’écoute et cherche à se comprendre".

Cette charte donne l’occasion d’être rappelée à chaque fois que les élèves travaillent en groupe puisqu’à l’issue, une auto-évaluation de leur attitude et de leur travail leur est demandée :
• La communication a-t-elle été bienveillante au sein du groupe ?
• Avons-nous répondu aux consignes ?
• Tout le monde a-t-il pris la parole ?

Cela leur permet toujours de s’interroger sur le sens de leur coopération et de leur savoir-être en classe.

La minute philo pour réfléchir ensemble
Coopérer, c’est aussi réfléchir ensemble. Pour cela, l’enseignante met en scène un rituel à chaque séance de français intitulé : "la minute philo".
L’objectif consiste à donner des références culturelles aux élèves afin d’enrichir leurs écrits mais aussi afin d’engager une discussion, un débat de quelques minutes entre eux. Un élève vient alors tirer au sort une citation dans une enveloppe, tous l’écrivent et expliquent ce qu’ils comprennent dans leur cahier autrement appelé leur carnet de voyage. Puis, ils échangent entre pairs pour dire ce qu’ils en pensent.

Inverser les rôles pour aider les élèves à prendre la parole
Pour responsabiliser ses élèves et leur donner davantage la parole, Sandrine Penven leur donne le rôle d’assistant teacher. Cela signifie dès l’entrée en classe que certains élèves qui en ont envie ou qu’elle choisit, prennent en charge le rituel d’introduction de la séance : écriture de la date, comptabilisation des absents, recensement des humeurs de chacun. Ce rituel se poursuit par le pont avec la séance précédente : « Do you remember ? » Telle une cheffe d’orchestre, l’enseignante s’installe et vidéo-projette les supports nécessaires pour que ses élèves assistant teacher puissent s’exprimer sur le cours précédent et prendre appui sur les documents travaillés. Elle remarque d’ailleurs que certains d’entre eux réagissent, participent, parce que c’est leur collègue de classe qui le leur demande et non pas l’enseignant : "Ce qui est intéressant, c’est qu’ils sont confrontés à la gestion du groupe classe. Et ils se rendent compte que cela est parfois difficile. Mais globalement, les élèves sont respectueux de ceux qui prennent la parole."

Plus encore, l’enseignante met en place des activités dédiées pour ces temps d’échange. Par exemple, elle demande à tous ses élèves de créer des questionnaires qui ont pour vocation de rebrasser les notions d’une séance. Elle propose alors aux élèves d’utiliser des outils en ligne comme Kahoot ou encore Quizinière, outils qui lui permet aussi de suivre en temps réel les avancées de ses élèves.
Les assistant teacher inventent alors par cet intermédiaire des questions qui permettront d’instaurer le rituel d’entrée en classe. Ils peuvent aussi décider des modalités de l’activité (debout, assis, à plusieurs). Pendant ce temps, l’enseignante les écoute et les observe : "Mes élèves font vivre la classe, ils s’interrogent les uns les autres. Ils se respectent. J’ai de belles surprises parfois. Une élève une fois a pris en charge le groupe en début d’heure alors que je ne l’aurai jamais cru. Ses pairs l’ont même applaudi. Je sais que pour certains, c’est compliqué. Alors jamais je n’impose vraiment quelqu’un si je sens que c’est trop difficile pour lui. Mais en même temps, il ne faut pas que ce soit toujours les mêmes. C’est un équilibre à trouver. Je m’adapte."

Jouer pour apprendre ensemble
Sandrine Penven a mis en place un coin canapé qui a plusieurs fonctions : celui de se calmer d’abord mais aussi celui de jouer lorsqu’une activité est terminée. À cet effet, une boîte en bois est mise à leur disposition. À l’intérieur, les élèves peuvent retrouver des jeux créés par l’enseignante ou par des élèves les années précédentes. Eux-mêmes peuvent aussi faire le choix d’en concevoir. Pour cela, l’enseignante leur proposer d’aller glaner des informations auprès des groupes toujours en activité et ils peuvent ainsi élaborer des quiz culturels ou des jeux de vocabulaire par exemple. "Ils aiment bien, je n’ai jamais de freins. C’est leur SAS à eux. J’obtiens toujours des productions et je me dis que celles-ci sont toujours plus adaptées à leurs compétences et à leurs évolutions surtout. Dans tous les cas, ils gagnent au moins l’autonomie, l’écoute, l’échange et le partage."


1. Guillaume Caron, Laurent Fillion, Céline Scy, Yasmine Vasseur, "Oser les pédagogies coopératives au collège et au lycée", Cahiers pédagogiques, ESF, p. 38.
2. Film Les héritiers, Marie-Castille Mention-Schaar, 2015

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