La précédente étude sur ce sujet date de 1998. Ce qui motive aujourd'hui un nouvel examen de la question, c'est le constat d'un mouvement inéluctable vers les ressources numériques. Ce développement du numérique, dans la classe et hors de la classe, l'évolution des programmes vers l'acquisition de compétences et la diversification des contextes d'enseignement pourrait aboutir à une dilution du manuel traditionnel dans l'ensemble des outils et ressources informatiques.
Le rapport souligne une absence de concertation des politiques pédagogiques, éditoriales et financières.
L'objectif premier du manuel scolaire est de présenter, de manière organisée, les savoirs définis par les programmes officiels, au service des enseignants et des élèves. Mais l'éditeur, depuis 1793, est libre dans sa production des manuels. Il n'est pas soumis à une certification de l'institution.
L'enseignant dispose ensuite d'une liberté de choix et d'utilisation, mais souvent contrainte par la simple disponibilité du manuel dans l'établissement. La plupart des professeurs s'appuient en outre sur plusieurs manuels dans la préparation des cours. Les plus expérimentés ont moins recours au manuel de la classe, ou l'utilisent pour des documents d'illustration et des exercices.
Les inspecteurs rappellent que le manuel n'est pas le programme, mais une déclinaison du programme. Les manuels présentent des progressions linéaires, alors que sont encouragées des progressions « itératives ou spiralées » pour favoriser des apprentissages durables.
Le rapport formule donc une exigence : le manuel doit expliciter ses présupposés théoriques, en référence aux programmes.
Du côté des élèves en cours, on relève de très faibles utilisations individualisées des manuels au profit des pratiques collectives. Et, dans le premier degré, les leçons préparées à partir de plusieurs ressources sont souvent diffusées en photocopies, insérées ensuite dans des cahiers ou classeurs.
Le manuel, parmi d'autres supports, devrait être exploité davantage dans l'accompagnement personnalisé et le développement de l'autonomie.
Hors de la classe, le manuel se révèle fort peu comme un support de formation, un complément aux notes personnelles, une somme de résumés de cours et d'exercices, un outil d'égalité des chances. En réalité, les manuels demandent de plus en plus la présence de l'enseignant et ce dernier apprend rarement aux élèves à l'utiliser, et conseille peu les familles sur cette question. Les parents, bien qu'inquiets du poids des manuels dans le cartable, considèrent toujours le livre scolaire comme une référence des savoirs à acquérir et, chez certains, comme un instrument d'aide au travail des enfants.
Spécificité nationale, le manuel est plus présent en France que dans le reste du monde. Il exerce chez nous une fonction normative et rassurante. Il a été d'abord un outil d'uniformisation du système éducatif. Mais, conçu aujourd'hui pour des élèves en situation de cours en classe, sous la conduite d'un professeur, le manuel est de moins en moins « l'ouvrage de référence qui peut aider les parents à soutenir leurs enfants dans leur parcours scolaire » (p.19).